La qualité, une notion antique
L’histoire de la qualité commence il y a plus de quarante siècles dans le royaume de Babylone. Le roi Hammourabi (1792-1750 avant J.-C.) fit graver un code de 300 articles dans une stèle, où l’on retrouve entre autres la notion de responsabilité médicale et la notion de maîtrise de la qualité en production (1). Les égyptiens pratiquaient le contrôle du travail des tailleurs de pierre par des inspecteurs indépendants au XVème siècle avant J-C. Au VIème siècle avant notre ère, les grecs visaient à normaliser les processus de qualité de par une stèle décrivant les spécifications techniques relatives à la production de chevilles en bronze. De nouvelles techniques apparaissent au Moyen Âge, et avec elles de nouvelles productions. On assiste à la naissance des premiers standards de qualité en matière de travail, de conditions de travail, de gammes de fabrication, de gestion et de commerce. Au XIIème siècle, les anglais inventèrent la méthode d’échantillonnage pour contrôler le titre et le poids des monnaies. Au XIIIème siècle, en France, Louis IX ordonna au Maire de Paris, Étienne Boileau, la rédaction du « Livre des métiers » qui précisait les obligations relatives à la qualité de travail des principaux métiers de l’époque et les pénalités occasionnées pour les défaillances. Au début de la Renaissance, les commandes passées par les Mécènes aux artistes étaient accompagnées de «prix-faits», il s’agissait de véritables «cahiers des charges», très détaillés, que ces artistes devaient suivre à la lettre sous peine de ne pas être payés. Le XVIIème siècle fut marqué par le début de l’industrie, période préindustrielle, et Jean-Baptiste Colbert, secrétaire d’État de Louis XIV, fit une déclaration en 1664 qui reste d’actualité : « Si nos fabriques imposent, à force de soin, la qualité supérieure de nos produits, les étrangers trouveront avantage à se fournir en France et leur argent affluera dans les caisses du royaume ». Puis vinrent les temps modernes où apparait une notion de politique normative, poursuivie par le Comité de Salut Public qui créa en 1794, l’atelier national de précision des jauges, des mesures et des matériels d’inspection et en même temps des référentiels destinés à être utilisés dans toutes les fabriques de munitions (1,4–6). La qualité a évolué à travers les âges pour être aujourd’hui un mode de management des entreprises incontournable et performant. En partant de son historique et en abordant les différentes phases de son évolution, nous découvrirons les véritables enjeux socio-économiques des démarches qualité.
La qualité en biologie médicale
La qualité, au sein d’une structure médicalisée, est un devoir déontologique nécessaire pour gérer et prévenir les risques, et satisfaire aux besoins des patients et des cliniciens responsables des soins prodigués à ces patients.(5) Les premières réflexions sur la formalisation de la qualité apparaissent en 1970 dans le domaine de la santé. Pour la biologie médicale du secteur privé en France, la première loi est votée en 1975 et indique les exigences réglementaires en matière de qualité : Art. L. 761-13. En 1978, le laboratoire national de la santé crée le CNQ : Contrôle National de Qualité des analyses de biologie médicale. Ce contrôle tend à assurer la fiabilité et le perfectionnement de l’analyse de biologie médicale dans l’intérêt général de la santé publique. En 1984 sont publiées les bonnes pratiques de fabrication dans l’industrie pharmaceutique et les « bonnes pratiques de laboratoire » destinées d’abord aux laboratoires de toxicologie et étendues aux laboratoires d’essai. Les LBM n’étaient alors soumis à aucun référentiel. L’engagement réel des biologistes dans la démarche qualité correspond à la publication du « guide de bonne exécution des analyses » ou GBEA en novembre 1994, qui impose à tous les LBM la mise en place d’une réflexion et d’une formalisation des pratiques dans un cadre obligatoire et réglementaire. Le guide introduit l’exigence de la qualité de l’acte médical : exigence du public, des organismes payeurs et des institutions (1,3). En 1999, les laboratoires implantés dans un établissement de santé doivent en plus, prendre en compte les exigences du manuel d’accréditation de l’ANAES ou agence nationale d’évaluation en santé. Ces exigences poussent à porter une appréciation indépendante sur la qualité d’un établissement à l’aide d’indicateurs, de critères et de référentiels portant sur les procédures, les bonnes pratiques cliniques et les résultats (13). En complément de ces obligations légales, plusieurs référentiels sont apparus et ont donné le choix aux LBM d’approfondir cette démarche en s’engageant dans des procédures volontaires basées sur les normes NF EN ISO 9001 dès 1987 (14) dès 1987, la norme NF EN ISO/CEI 17025 dès 2000 (15), et la norme NF EN ISO 15189 à partir de 2003 (2). Cette démarche vise à obtenir une reconnaissance internationale en termes de management de la qualité, de compétence du personnel et de qualité d’analyses afin d’apporter la preuve de l’efficacité du LBM.
La norme NF EN ISO 9001 : Système de management de la qualité, exigences
Cette norme internationale décrit les exigences relatives au SMQ, applicables à tout organisme et à tout domaine d’activité. Les exigences sont regroupées en sept chapitres :
Contexte de l’organisme (enjeux externes et internes)
Leadership (responsabilité, autorité et communication, politique qualité, objectifs qualité, revue de direction)
Planification (actions à mettre en œuvre, objectifs qualité, modifications du SMQ)
Support (ressources, compétences, sensibilisation, communication, informations documentées)
Réalisation des activités opérationnelles (maitrise opérationnelle, produits et services, conception et développement, maitrise des processus, production et prestation de service)
Evaluation des performances (surveillance, mesure, analyse et évaluation, audit interne, revue de direction)
Amélioration (actions correctives des non-conformités, amélioration continue)
Les exigences sont relatives à la fois à l’organisation, à l’implication du personnel, à la conformité des produits ou prestations, au bon fonctionnement des équipes. Ceci dans le but d’accroitre la satisfaction des clients et de démontrer que les produits sont conformes à leurs attentes et aux exigences réglementaires (14,19,20).
Système de management de la qualité SMQ
Le LBM doit documenter, mettre en œuvre et entretenir un SMQ et en améliorer en permanence l’efficacité conformément aux exigences de la norme ISO 15189. Le SMQ doit assurer l’intégration de tous les processus nécessaires pour répondre à sa politique et à ses objectifs « Qualité », ainsi qu’aux besoins et exigences des utilisateurs. Ces processus sont déterminés par le laboratoire qui garantit leur application. Le LBM doit surveiller, évaluer, assurer l’amélioration continue de ces processus (30). La documentation du SMQ doit comprendre les déclarations d’une politique qualité, ainsi que les objectifs, les procédures et enregistrements requis par la norme et les copies des règlementations et autres documents normatifs. Le manuel « Qualité » doit être défini et rédigé, en créant des groupes de travail qui sont responsables de la rédaction de politiques, processus et procédures pour chaque ESQ. Le comité de pilotage doit impliquer toute l’équipe du LBM dans les groupes de travail sans tenir compte du niveau hiérarchique. Pour un laboratoire multi site, un SMQ unique est mis en place et repose sur une politique qualité unique avec un manuel qualité commun et un système documentaire harmonisé (2,22).
Matériel de laboratoire, réactifs et consommables
Le matériel de LBM est défini par les instruments, les matériels de référence, les consommables, les réactifs et systèmes analytiques. Le LBM doit avoir l’équipement nécessaire aux analyses qu’il propose de réaliser. Il doit vérifier que l’équipement répond aux exigences de performances spécifiées par lui-même ou annoncées par le fabricant. Lors de l’installation des équipements biomédicaux dans le laboratoire, le biologiste médical vérifie que les principales performances attendues sont bien atteintes dans le contexte du laboratoire. Cette vérification s’appuie sur des mesures portant sur des échantillons de contrôle et/ou sur des matériels de référence. Le biologiste médical vérifie la cohérence des résultats avec les valeurs issues des équipements installés antérieurement. Toutefois, dans la mesure où le LBM n’apporte aucune modification, il ne lui appartient pas de valider la totalité des performances annoncées par le fabricant (22). Le laboratoire doit analyser ses besoins métrologiques au regard des recommandations des sociétés savantes, des exigences des fournisseurs et des risques identifiés sur l’ensemble des processus. A la suite d’un étalonnage, le laboratoire vérifie systématiquement l’adéquation de son équipement à ses exigences métrologiques spécifiées. L’opération d’étalonnage et de vérification aux exigences spécifiées constitue la confirmation métrologique. L’exploitation périodique des données métrologiques permet une dynamique d’ajustement continu de la stratégie décidée au regard des besoins réels. Le LBM doit avoir une politique et des procédures qui gèrent directement et régulièrement l’étalonnage du matériel et la maintenance préventive. Les enregistrements d’étalonnage et de maintenance doivent inclure les rapports/certificats de tous les étalonnages et/ou vérifications incluant les dates, heures et résultats, réglages, les critères d’acceptation et la date prévisionnelle du prochain étalonnage et/ou vérification. Lorsque l’instrument nécessite l’utilisation de facteurs pour modifier les données de base ou le résultat final de l’analyse, le LBM doit avoir des procédures en place pour s’assurer que les anciens facteurs ne sont plus utilisés et ont été remplacés par les nouveaux facteurs. D’autres exigences informatives telles que l’emplacement de l’instrument, le fabricant et les conditions de réception doivent être satisfaites par le LBM. Pour répondre aux exigences de cette norme, le LBM devrait vérifier l’exactitude et l’imprécision annoncées par le fabricant pour chaque analyse sur un nouvel instrument ou kit avant de rapporter un résultat patient. Un autre moyen pour vérifier les exigences qualité pour de nouveaux lots de réactifs consiste à analyser des échantillons de contrôle ou des matériels de référence avant et après tout changement de lots de réactifs pour s’assurer que l’analyse continue d’opérer dans ces spécifications. La même procédure est à observer après un réétalonnage, une maintenance importante ou le remplacement de pièces de l’instrument. Un logiciel doit être validé avant toute mise en service. Des précautions doivent être prises pour protéger l’intégrité et la confidentialité des données de patients archivées sous format électronique. L’accès aux programmes doit être limité pour éviter l’altération ou la destruction de données par des personnes non autorisées (2,22,24,31).
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS BIBLIOGRAPHIQUES
A. GENERALITES SUR LA QUALITE
1. HISTORIQUE
a. La qualité, une notion antique
b. La qualité depuis l’ère industrielle
c. La qualité en biologie médicale
2. DEFINITIONS
3. REFERENTIELS
a. Le GBEA
b. Le manuel d’accréditation de l’ANAES
c. La norme NF EN ISO 9001 : Système de management de la qualité, exigences
d. ISO 15189 : la norme pour les laboratoires d’analyses de biologie médicale
4. CERTIFICATION ET ACCREDITATION
a. Certification
b. Accréditation
c. Distinction entre certification et accréditation
DEUXIEME PARTIE : APPLICATION DE LA NORME NF EN ISO 15189
A. LA NORME NF EN ISO 15189
ISO 15189 et ISO 9001 : similitudes et différences
A. EXIGENCES DE LA NORME NF EN ISO 15189
1. EXIGENCES MANAGERIALES
a. Responsabilité
b. Système de management de la qualité SMQ
c. Maitrise des documents
d. Contrats de prestations
e. Examens transmis à des LBM sous-traitants
f. Services externes et approvisionnement
g. Prestations de conseil
h. Traitement des réclamations, identification et maitrise des non-conformités
i. Actions correctives, préventives et amélioration continue
j. Maitrise des enregistrements
k. Evaluation et audits
l. Revue de direction
2. EXIGENCES TECHNIQUES
a. Personnel
b. Locaux et conditions environnementales
c. Matériel de laboratoire, réactifs et consommables
d. Processus préanalytiques
e. Processus analytiques
f. Garantie de qualité des résultats
g. Processus post-analytiques
h. Compte rendu des résultats
i. Diffusion des résultats
j. Gestion des informations de laboratoire
B. MISE EN PLACE DE LA DEMARCHE QUALITE
1. LA GESTION ET LE SUIVI DES PROJETS
2. L’ECOUTE DES UTILISATEURS
3. L’AMELIORATION DES PROCESSUS
4. LA GESTION DOCUMENTAIRE
5. LA MESURE DE LA QUALITE
a. Indicateurs
b. Tableau de bord
c. Audit interne
6. AVANTAGES DE L’ACCREDITATION
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
REFERENCES
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