Ayant pour fonction la communication sociale, la littérature permet de peindre les réalités sociales, culturelles, politiques (…) de chaque peuple. Elle permet aussi d’avoir des renseignements probants sur la manière de vivre, les coutumes, les us, les traditions de chaque communautés. La littérature orale africaine s’inscrit dans cette veine. Elle est très dynamique. Et nous pouvons affirmer sans risque de nous tromper que « ce modèle de communication fondé sur la rétention et la retransmission assure la permanence des valeurs de la civilisation » . Elle est très influente dans la vie des Africains. Pour essayer de la définir et souligner son importance, Lilyan Kesteloot , dans le premier chapitre de son ouvrage, atteste :
« Fondement et véhicule de la civilisation du continent et de ses différentes cultures, elle est la source inépuisable des interprétations du Cosmos, des croyances et des cultes, des lois et des coutumes; système de parenté et d’alliance, des systèmes de production et de répartition des biens; des modes de pouvoirs politiques et de stratifications sociales (…). » .
Sur la base de ces considérations, nous pouvons soutenir que c’est cela qui a suscité l’intérêt des ethnologues et anthropologues à l’image de Maurice Delafosse , Léo Frobenius , Georges Hardy , etc., qui dès la fin du XIXème Ŕ début XXème siècle se sont beaucoup intéressés à ce patrimoine en le collectant et en le consignant. Ces africanistes voyaient en cette littérature une grande richesse et une importance majeure du fait de la diversité et de la variété de ses thèmes. D’où la nécessité de la recueillir auprès des populations autochtones.
Les Wolof : histoire, religion et littérature
Histoire
Parler de la société wolof requiert non seulement une maitrise des sciences humaines et sociales comme la sociologie, l’anthropologie, l’histoire, la linguistique, etc., mais aussi nécessite une connaissance de quelques notions en géographie. Les premiers missionnaires et voyageurs qui ont découvert le berceau des Wolof ont fixé des pans entiers de leur histoire. Son passé et son influence renforcent son prestige et poussent les chercheurs à s’intéresser davantage à elle. Interrogeons nous à présent sur son histoire, son organisation sociale et religieuse.
Histoire de la société wolof
Les Wolof figurent très tôt dans les récits des premiers voyageurs qui ont fait le tour de l’Afrique. A titre d’exemple, nous pouvons nous référer aux travaux de Cada Mosto qui a apporté, au XVème siècle, des témoignages sur eux. Cette idée est défendue par Abdoulaye Bara Diop qui dit dans l’avant propos de son ouvrage : «L’abondance relative de la documentation écrite qui existe depuis le XVème siècle grâce au voyageurs portugais dans la région, (…) ainsi que la richesse de la tradition orale ayant ses spécialités comme les griots et ses tenants (…) peuvent permettre d’avoir une assez bonne connaissance de l’histoire et de l’anthropologie des Wolof. » Nous pouvons ajouter à la liste des sources, des ouvrages produits par des checheurs qui se sont intéressés au monde wolof. Parmi ceux-ci nous pouvons citer : Yoro Dyao, Majemout Dop, Pathé Diagne, Bassirou Dieng, Lilyan Kesteloot etc. Ces derniers ont fait des études scientifiques sur cette ethnie.
D’après la tradition orale, par l’intermédiaire de récits mythiques, le père fondateur de la société wolof est Njaajaan Njaay. Cette thèse qui contraste avec celle de Dyao et du chercheur sénégalais, Cheikh Anta Diop, qui rattache les wolofs à l’Egypte antique, est soutenue par Abdoulaye Bara Diop qui affirme dans l’introduction de son œuvre qu’il a consacré à cette ethnie :
« L’ethnie wolof, selon la tradition orale serait constituée à la faveur de Njaajaan Njaay où se seraient fondus plusieurs groupes (Soose, Sereer, Pulaar) pour donner naissance à la langue wolof. » .
Ce Laman (Njaajaan Njaay), à la fois charismatique et versé dans la connaissance, fonde, au XIIIème, l’empire du Jolof. Bien organisé, cet empire rayonne dans tout le Soudan occidental. Son ascension est freinée par sa dislocation. En effet, au XVIème siècle, nous assistons à la sécession du Kajoor suivie du Bawol et du Walo qui sont devenus des royaumes indépendants. Njaajaan Njaay est considéré comme l’ancêtre de Wolofs. Aujourd’hui, nous observons que cette ethnie exerce une influence sur toutes les autres ethnies du Sénégal. Par preuve, elle est numériquement la plus importante. Elle représente plus de 40 % de la population et le wolof en plus d’être parlé dans la sous-région (Gambie, Mauritanie et..) est la langue la plus parlée au Sénégal. Et le phénomène de « Wolofisation » ne cesse de gagner du terrain.
Géographiquement, l’ethnie wolof habite la basse Sénégambienne. D’après Cada Mosto repris par Diop dans l’introduction de son ouvrage :
« Les Gilofs, Yolofs, ou Accolofs, habitent la basse Sénégambie. La contrée dans laquelle ils se sont fixés s’étend au Nord jusqu’au fleuve du Sénégal (…), au Sud elle a pour limite le peuple occupé par les peuples établis sur les rives de la Gambie. L’océan Atlantique baigne à l’Ouest leur pays, qui est limitrophe à l’Est du Toro et du Fouta sénégalais. » .
De par ces précisions historiques et géographiques apportées à la fois par les témoignages d’Occidentaux venus, très tôt, en pays wolof et par les chercheurs locaux qui ont parcourus les routes de Jolof, du Kajoor (…) pendant de très longues années et qui ont recueillis l’énorme production orale (mythes, contes, épopées) qui pour la plupart du temps est l’apanage des griots, il peut être déduit que cette société a connu presque huit siècles d’existence marqués par une histoire riche. La nation sénégalaise toute entière se reconnait en elle à travers ses hautes personnalités comme Lat Dior Diop, Kocc Barma, El hadji Malick Sy, El hadji Ibrahima Niasse, Cheikh Ahmadou Bamba sur lequel nous reviendrons plus largement. Comme la plupart des sociétés de l’Ouest-africain, l’ethnie wolof, sur le plan social, est hiérarchiquement organisée.
Organisation sociale
L’ethnie wolof est divisée en deux groupes sociaux. Autrement dit, elle est divisée en deux systèmes: les castes et les ordres. Les premiers nommés sont liés à une catégorisation professionnelle et les seconds à l’exercice du pouvoir. Georges Balandier conforte notre propos en soutenant :
«Certaines sociétés, notamment, au Sénégal (…), associent un système d’ordre (aristocrate, hommes libres, hommes de condition servile) et un système de «castes» professionnelles ; chacun d’eux ayant sa propre stratification et sa hiérarchie spécifique ; les ouolofs, (…) relèvent de cette catégorie.» .
Les castes, en milieu wolof ont fait l’objet d’innombrables études dont l’une des plus poussées est du chercheur Abdoulaye Bara Diop. Parlant de l’énorme travail que ce dernier a abattu sur ce sujet, Bassirou Dieng déclare :
« Les travaux les plus pointus sur cette question relatif en pays wolof sont de ce chercheur. » .
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Table des matières
Introduction générale
Première partie :Le corpus : transcription et traduction
Deuxième partie :Analyse
Chapitre 1. Les Wolof : histoire, religion et littérature
I. Histoire
I. 1. Histoire de la société wolof
I. 2. Organisation sociale
I. 3. Organisation religieuse
II. Religion
II. 1. Contexte de naissance et d’émergence d’une « voie », Al Mouridiyya
II. 2. Quelques principes cardinaux du mouridisme
II. 3. Hiérarchie
III. Littérature mouride
III. 1. Définition et domaine d’expression du « Wolofal » mouride
III. 2. Sources des Wolofalkat et visée du Wolofal
III. 3. Présentation de Sërið Mbay Jaxate et de son œuvre
Chapitre 2. Analyse thématique et stylistique
I. Analyse thématique
I. 1. La critique sociale
1.1.1. Critique des tares du système ceddo
1.1. 2. Critique de la hiérarchisation sociale
1.1. 3 L’inconduite du système colonial
I. 2. L‘exhortation
1.2.1 Exhortation à la maitrise de soi
1.2.2. Appel au respect des parents
I. 3. Le panégyrique
1.3.1. L’exaltation de la probité de Bamba
1.3.2. Célébration de l’héroïsme du Cheikh
1.3.3. Eloge de l’action scientifique de Khadimou Rassoul
II. Analyse stylistique
II. 1. Les figures de rhétorique
1.1. L’apostrophe
1.2 L’antanaclase et l’assonance
1.3. La métaphore
1.4. L’anaphore
II. 2. Les procédés énonciatifs
2.1. L’identification du locuteur (je), et du destinataire dans la situation d’énonciation
2.2. Les marques d’énonciation
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE