PHYSIOPATHOLOGIE DE L’ASTHME
La physiopathologie de l’asthme est complexe. Elle associe une inflammation bronchique et une hyperréactivité bronchique à l’origine de l’obstruction bronchique. Ces phénomènes sont intriqués et sont sous le contrôle permanent du système nerveux autonome (SNA) qui agit aux différentes étapes .
Inflammation bronchique
L’inflammation dans l’asthme correspond à une infiltration de cellules sous la dépendance d’une réponse Th2. Cette réponse est souvent induite par les allergènes conduisant à une prolifération de lymphocytes Th2. Ces cellules synthétisent les cytokines impliquées dans l’infiltration et l’activation d’autres cellules, notamment les basophiles, les mastocytes et les éosinophiles. L’infiltration cellulaire ainsi initiée est pérennisée grâce à un important recrutement de cellules inflammatoires en provenance de la moelle osseuse et du sang circulant.
Cette infiltration cellulaire aboutit à un œdème de la muqueuse bronchique. Ce phénomène augmente l’épaisseur de la paroi, rétrécissant ainsi la lumière bronchique. Cette réduction de calibre est aggravée par une sécrétion muqueuse anormale en quantité et en qualité à l’origine des bouchons muqueux. Cet œdème contribue également aux mécanismes d’obstruction bronchique dans l’asthme. L’inflammation persistante entraîne à la longue un remodelage des parois bronchiques. Il se traduit à des degrés divers par des lésions épithéliales. Elles sont à type de desquamation, de pseudo épaississement de la membrane basale, de modifications de la matrice extracellulaire, d’hypertrophie des cellules à mucus et d’hyperplasie des cellules musculaires lisses.
Hyperréactivité bronchique (HRB)
L’HRB est définie comme une réaction bronchique exagérée, de type bronchoconstriction, de certains individus lors de l’exposition à des stimuli naturels (froid, effort) ou à des agents agonistes (acétylcholine, méthacholine ou l’histamine). Après inhalation d’un allergène (15 mn), survient une réaction bronchique sous forme de bronchospasme. Son mécanisme est IgE dépendant. Elle aboutit à une hypertrophie du muscle lisse bronchique. Elle entraîne également une activation du SNA responsable d’une hypersécrétion de mucus de mauvaise qualité. Au bout de 4 à 6 heures, survient une majoration de l’hyperexcitabilité bronchique liée au recrutement de cellules inflammatoires dans la bronche.
Obstruction bronchique
L’obstruction bronchique est diffuse et d’intensité variable, réversible spontanément ou sous l’effet d’un traitement bronchodilatateur. Elle est la conséquence de l’infiltration cellulaire, du bronchospasme, de l’hypertrophie du muscle lisse bronchique et des glandes à mucus et de l’hypersécrétion de mucus de mauvaise qualité.
La crise d’asthme typique de l’adulte ou crise d’asthme simple ou asthme intermittent à dyspnée paroxystique
✔ Début :
– Il est brutal, le plus souvent nocturne réveillant le malade en proie à une sensation d’oppression thoracique ;
– Il est parfois précédé de signes annonciateurs ou prodromes qui sont variés, mais stéréotypés chez le même patient.
Ces prodromes peuvent être à type de céphalées, d’anxiété, d’agitation, de coryza, de prurit cutané localisé, quelquefois de quintes de toux sèche, de flatulence, d’éructations, de pesanteur épigastrique.
✔ Période d’état :
Elle comporte deux phases :
– la phase sèche : elle est marquée par une bradypnée surtout expiratoire avec une inspiration brève et une expiration difficile, longue, sifflante, active et bruyante chez un sujet couvert de sueurs et anxieux, assis sur son lit ou debout, les bras appuyés sur un meuble ou sur le rebord d’une fenêtre.
– la phase catarrhale : elle survient en 30 à 60 minutes. Elle est marquée par la perception spontanée de sifflements par le malade, l’entourage et/ou le médecin. L’examen physique peut retrouver :
– une distension thoracique ;
– une diminution de l’ampliation thoracique et des vibrations vocales ;
– un tympanisme ;
– une diminution du murmure vésiculaire associée à des râles bronchiques de tous types. Il peut s’agir de sifflements aigus, de ronchi ou de gros râles bulleux réalisant le classique « bruit de pigeonnier ». L’auscultation peut retrouver classiquement des râles sibilants fins, bilatéraux, symétriques, diffus, réveillés par la toux.
Evolution :
L’évolution peut être favorable avec la survenue, après une durée variable, d’un apaisement progressif de la crise, soit spontanément, soit sous l’effet de β2- mimétiques inhalés ou systémiques. La toux devient productive ramenant une expectoration pouvant être :
* muqueuse, épaisse, peu abondante, moulée en petits fragments denses ressemblant à des perles grises ou à des « grains de tapioca » appelés « crachats perlés de Laennec ». Ils sont caractéristiques de l’asthme ;
* séro-muqueuse et abondante ;
* muco-purulente si l’asthme est surinfecté.
La période post critique est marquée par une sensation de fatigue et une polyurie fréquente. Classiquement, l’état général est conservé, il n’existe pas de fièvre, ni de douleur thoracique, ni de cyanose. Parfois, surviennent des complications pouvant être aiguës ou chroniques. Les complications aiguës sont : un pneumothorax ou un pneumomédiastin, un emphysème médiastino-sous-cutané, des infections broncho pulmonaires ou des troubles ventilatoires liés à une obstruction bronchique par un bouchon muqueux. Les complications chroniques sont l’attaque d’asthme, l’asthme à dyspnée continue, l’asthme aigu grave (AAG) et l’asthme chronique.
Formes cliniques
Formes selon le terrain
Asthme du nourrisson
La définition est volontairement large pour ne pas méconnaître le diagnostic : il s’agit de la survenue, chez un nourrisson, d’au moins 2 épisodes de dyspnée sifflante (avant l’âge de 2 ans) quel que soit l’âge de début, de l’existence ou non d’une atopie, et la cause invoquée [76]. L’aspect le plus habituel de la crise d’asthme est réalisé par une bronchiolite aiguë virale dyspnéisante, principalement due au virus respiratoire syncytial (50 à 70% des cas). Elle débute par une infection oto-rhino laryngologique (ORL) banale à type de rhinite ou de coryza. Deux ou trois jours plus tard, apparaissent une toux sèche, répétitive, volontiers quinteuse, «coqueluchoïde», une polypnée, un wheezing. Le thorax est distendu. L’auscultation retrouve des râles sibilants et ronflants diffus. Il existe parfois des signes de gravité tels que des battements des ailes du nez, un tirage intercostal et sus-sternal, un balancement thoraco-abdominal et une cyanose. La fièvre est inconstante, l’état général est conservé. La polypnée et la toux peuvent gêner l’alimentation. En règle générale, après un plateau de quelques jours, l’évolution se fait habituellement vers la guérison en 8 à 10 jours .
Asthme de l’enfant
Asthme du jeune enfant
Chez l’enfant d’âge préscolaire, la crise d’asthme peut revêtir la forme typique de la crise d’asthme du grand enfant ou de l’adulte. Des prodromes à type d’éternuements en salve, de toux spasmodiques, de prurit nasal, de rhinorrhée, de nausées précédent la crise de quelques heures à quelques jours. La crise survient souvent la nuit, marquée par des paroxysmes de dyspnée sibilante et évolue en deux phases.
– La phase sèche est caractérisée par une bradypnée expiratoire réveillant le malade avec une sensation d’étouffement, souvent remplacée chez l’enfant par une polypnée. L’inspection du thorax révèle la mise en jeu des muscles respiratoires accessoires et une diminution de l’ampliation thoracique. La distension thoracique se traduit par une sonorité augmentée à la percussion. L’auscultation pulmonaire fait entendre des râles sibilants à l’expiration ou aux deux temps de la respiration.
– La phase catarrhale survient au paroxysme de la crise. Des sifflements expiratoires sont alors perceptibles par le malade lui-même ou par son entourage. Les quintes de toux ramènent parfois une expectoration muqueuse, peu abondante : ce sont les classiques crachats gris perlés de Laennec. Cette phase dure 30 à 60 minutes, puis le malade respire plus facilement, et fatigué, il s’endort. Entre les crises, la respiration est le plus souvent normale, l’auscultation est muette.
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Table des matières
INTRODUCTION
Première Partie : RAPPELS
I- DEFINITIONS
II- EPIDEMIOLOGIE
1- Prévalence
2- Mortalité
3- Impact socio-économique
3-1- Coûts sociaux
3-2- Coûts financiers
III- PHYSIOPATHOLOGIE DE L’ASTHME
1- Inflammation bronchique
2- Hyperréactivité bronchique
3- Obstruction bronchique
IV- TABLEAUX CLINIQUES
1- La crise d’asthme typique de l’adulte ou crise d’asthme simple ou asthme intermittent à dyspnée paroxystique
2- Formes cliniques
2-1- Formes selon le terrain
2-1-1- Asthme du nourrisson
2-1-2- Asthme de l’enfant
2-1-2-1- Asthme du jeune enfant
2-1-2-2- Asthme du grand enfant
2-1-2-3- Asthme de l’adolescent
2-1-3- Asthme du sujet âgé
2-1-4- Asthme de la femme enceinte
2-2- Formes symptomatiques
2-2-1- Asthme nocturne
2-2-2- Asthme hypersécrétant
2-2-3- Toux équivalent d’asthme
2-2-4- Asthme asymptomatique
2-3- Formes selon la sévérité
2-3-1- Exacerbation aiguë d’asthme
2-3-2- Asthme aigu grave (AAG) ou état de mal asthmatique
2-3-3- Asthme instable
2-3-4- Attaque d’asthme
2-3-5- Asthme à dyspnée continue
2-3-6- Asthme difficile
2-3-7- Asthme corticorésistant
2-3-8- Asthme cortico-dépendant
2-4- Autres formes cliniques
2-4-1- Asthme d’exercice
2-4-2- Asthme professionnel
2-4-3- Syndrome de Churg
2-4-4- Maladie de Carrington
2-4-5- Aspergillose bronchopulmonaire allergique (ABPA)
V- DIAGNOSTIC
1- Diagnostic positif
1-1- Interrogatoire
1-2- Examen physique
1-3- Bilan paraclinique
1-3-1- Explorations fonctionnelles respiratoires
1-3-2- Imagerie
1-3-3- Numération formule sanguine
1-3-4- Bilan allergologique
2- Diagnostic de gravité
3- Diagnostic différentiel
3-1- Chez l’adulte
3-2- Chez le nourrisson et le jeune enfant
4- Diagnostic étiologique ou facteurs étiologiques
4-1- Facteurs liés à l’hôte
4-1-1- Prédisposition génétique
4-1-2- Atopie
4-1-3- Sexe
4-1-4- Obésité
4-1-5- Facteurs hormonaux
4-2- Facteurs environnementaux
4-2-1- Environnement intérieur
4-2-2- Environnement extérieur
4-3- Autres facteurs de risque
4-3-1- Facteur émotionnel
4-3-2- Exercice physique
4-3-3- Air froid
4-3-4- Médicaments
4-3-5- Régime alimentaire
4-3-6- Infections
4-3-7- Reflux gastro-œsophagien (RGO)
4-3-8- Urbanisation
4-3-9- Fréquentation des piscines chlorées
VI- CLASSIFICATION
VII- PRISE EN CHARGE
1- Buts
2- Moyens
2-1- Prise en charge médicamenteuse
2-1-1- Bronchodilatateurs
2-1-2- Anti-inflammatoires
2-1-3- Associations fixes de CSI-β2+LDA inhalés
2-1-4- Autres traitements médicamenteux
2-2- Prise en charge des facteurs aggravants et le contrôle de l’environnement
3- Indications
3-1- Prise en charge de la crise
3-1-1- Symptômes isolés
3-1-2- Crise d’asthme
3-1-3- Asthme aigu grave (AAG)
3-1-4- Asthme aigu très grave
3-2- Traitement de fond
3-3- Suivi et évaluation
VIII- PREVENTION DE L’ASTHME
1- Prévention primaire
2- Prévention secondaire
Deuxième Partie : TRAVAIL PERSONNEL
I- OBJECTIFS
II- MATERIEL ET METHODES
1- Durée d’étude
2- Cadre d’étude
3- Population d’étude
3-1- Critères d’inclusion
3-2- Critères de non inclusion
4- Recueil des données
5- Paramètres étudiés
6- Saisie et analyse des données
7- Limites méthodologiques
III- RESULTATS
1- Caractéristiques de la population d’étude
2- Caractéristiques des enfants
2-1- Données épidémiologiques
2-1-1- Age et Sexe
2-1-2- Niveau d’instruction
2-2- Antécédents
2-2-1- Personnels
2-2-2- Familiaux
2-3- Retentissement socio-économique de l’asthme
2-4- Compréhension de la maladie
2-5- Données cliniques
2-5-1- Signes fonctionnels
2-5-2-Signes physiques
2-5-3- Classification clinique de l’asthme
DISCUSSION
CONCLUSION