La créativité appliquée à l’enseignement supérieur
Nous allons maintenant nous focaliser sur ce DU en créativité. Nous définirons son périmètre, nous présenterons le public cible, les objectifs et les contenus pédagogiques, la modalité d’enseignement, ainsi que l’équipe au cœur de ce projet de formation.
Un Diplôme d’Université
Le Diplôme d’Université en créativité sera lancé officiellement pour l’année universitaire 2022-2023 à l’Université Grenoble Alpes.
Le public cible
Dans sa finalité, celui-ci s’adressera à un public d’enseignants et d’enseignantschercheurs de l’Université Grenoble Alpes et de l’Université Savoie Mont Blanc issus de disciplines et de domaines d’enseignement et de recherches variés. Chaque promotion du DU en créativité sera définie par année universitaire et comportera en moyenne 15 participants.
Les objectifs et contenus pédagogiques
Les objectifs principaux de ce Diplôme d’Université seront d’initier et de former des enseignants de l’enseignement supérieur à la créativité, afin qu’ils puissent transposer des processus de créativité dans leur démarche d’enseignement. Par la suite, ces enseignants devront être capables à leurs tours de sensibiliser leurs étudiants aux différents processus créatifs. Le programme de ce DU sera structuré en deux blocs de compétences, qui sont « concevoir un atelier créatif »et« animer un atelier créatif ». Sur le long terme, l’objectif de ce Diplôme d’Université est d’enrichir les pratiques d’enseignement par des démarches créatives, telles que par exemple, l’apprentissage par projet transdisciplinaire.
Une formation hybride et les principes du distanciel
Pour poursuivre, la première session de formation envisagée se déroulera officiellement du mois d’octobre 2022 au mois d’août 2023, en alternant des temps de formation en présentiel et d’autres à distance. Par conséquent, il s’agira d’une formation hybride. Au total, le DU sera composé de onze journées d’atelier de formation en présentiel, et de sept sessions virtuelles, réalisées à distance. L’articulation fine et cohérente entre les ateliers de créativité proposés en présentiel et les sessions virtuelles proposées en distanciel permettra aux participants d’être au cœur de leur formation et de devenir des acteurs de leur apprentissage. Ainsi, pour proposer ces sessions virtuelles, les outils numériques utilisés seront le service de visioconférence Zoom et la suite d’applications et d’outils collaboratifs proposée par la société Klaxoon. Ainsi, l’équipe pédagogique du projet, que nous présentons dans le point qui suit, a défini trois principes pour la partie de formation à distance.
Nos missions dans l’équipe
Veille théorique sur les principes fondamentaux de la créativité
Afin de pouvoir mieux saisir les enjeux de la créativité dans un contexte pédagogique, dans un premier temps, nous avons dû nous former à la créativité en effectuant une veille théorique sur les principes fondamentaux de la créativité, tels que la démarche de Design Thinking, la technique d’idéation collective : Brainstorming, la méthode de résolution créative de problèmes : CPS (Creative Problem Solving), la pensée analogique, ainsi que la pensée divergente et convergente, etc. Cette mission a consisté à lire plusieurs ouvrages scientifiques dans le domaine de la créativité et du design, ainsi que de participer à différents ateliers de créativité en présentiel et à distance.
Benchmark des formations en design et en créativité
Afin d’avoir une vision sur les formations en créativité proposées à l’international, nous avons réalisé un benchmark des formations en design et en créativité proposées par des universités et des consultants, tels que : Aalto University et Design Factory (Finlande), Hasso Plattner Institut (Allemagne), CreaConference (Italie), la d.school Paris (France), la d.school of Standford (États-Unis), etc.
Conception et animation d’un Créa-Lunch à distance
Sur cette période, nous avons également été amenées à concevoir et à animer un Créa-Lunch en ligne et à distance (le 9 juin 2020, de 13h30 à 14h30) sur la thématique suivante « La créa à distance, c’est possible ? ». Il était question d’apporter aux enseignants de la communauté Promising des conseils et des pistes de réflexion quant à l’utilisation d’outils numériques dans une situation d’enseignement-apprentissage créative à distance.
Co-conception du Diplôme d’Université en créativité
Apport d’une veille théorique en didactique pour l’équipe du DU
Au cours de ce stage, nous avons transmis des apports théoriques lors d’une visioconférence pour l’équipe pédagogique qui intervient dans le cadre du DU en créativité. Il s’agissait d’une présentation sur les types de soutiens qui doivent être mis en place dans une formation à distance ou hybride. Cette présentation s’appuyait sur un ensemble de connaissances transmit par les enseignants-chercheurs du master Didactique des Langues et Ingénierie Pédagogique nuMérique (DILIPEM).
Accompagnement dans le choix des outils numériques
Nous avons accompagné l’équipe pédagogique du programme Promising, au niveau de la dimension numérique de la formation hybride (DU en créativité). Nous entendons par cette mission, l’identification des outils numériques les plus adaptés aux besoins en créativité, et selon les trois principes du distanciel définis pour ce diplôme d’université. Pour cela, nous avons réalisé une typologie des fonctionnalités proposées par les plateformes d’apprentissage Moodle et Klaxoon. Nous avons également apporté une expertise quant à la prise en main de différents outils numériques (Padlet, Zoom, etc.) adaptés à un contexte pédagogique et de créativité.
Co-conception d’une trame à partir des expériences vécues à distance
Nous avons également participé à l’élaboration du Diplôme d’Université en collaborant avec les différents membres de l’équipe du projet, selon une démarche de créativité. Et plus particulièrement, nous avons co-conçu avec Christine Bout de l’An, à un niveau macro, une trame pédagogique générique destinée à la scénarisation des séances de formation à distance du DU. Cette trame s’appuie sur un bilan de nos expériences vécues à distance lors du confinement, grâce à l’expérimentation de plusieurs formations en créativité (CreaConf, webinaires du WorkLab, formations à distance proposées par Promising).
Problématique
L’intégralité de nos missions se situant dans une démarche de créativité dans l’enseignement supérieur, nous avons décidé d’orienter nos réflexions sur la créativité, et plus précisément sur la posture et l’ingénierie de la facilitation créative.
Nous avons été chargé de concevoir un atelier à distance sur la facilitation en créativité, dans le cadre du Diplôme d’Université intitulé« la créativité appliquée à l’enseignement supérieur ». Cette formation diplômante a pour objectif de sensibiliser les enseignants du supérieur, à ce que peut apporter la créativité dans leurs pratiques et démarches d’enseignement, auprès d’un public étudiant. Cependant, avec cette formation diplômante, il n’est pas question de révolutionner les pratiques d’enseignement dans le supérieur, ni même de jeter l’éponge à des méthodes d’enseignement, qui sont par défaut, l’antithèse des pédagogies actives, participatives ou implicatives. Pasquier (2016) défini la pédagogie implicative comme :
« une pédagogie qui se mettrait plus du point de vue du récepteur [des apprenants] avec l’idée de favoriser un rôle actif, participatif, implicatif, dans le but d’une émancipation et d’une capacité à devenir soi-même son propre maître. C’est-à-dire, d’être capable de mobiliser toutes les ressources et toutes les compétences nécessaires pour poursuivre ce chemin sans fin, qui est celui de l’éducation ». (Pasquier, 2016 : 00:00:23).
La vision de l’équipe de projet qui propose ce diplôme d’université est orientée sur l’implication de processus créatifs qui peuvent apporter, à des moments opportuns d’enseignement, une plus-value quel que soit la discipline ou le domaine d’enseignement. Il s’agit donc de proposer un diplôme d’université, capable de susciter la curiosité des enseignants du supérieur, pour transposer la créativité dans leur démarche d’enseignement. C’est à partir de ce contexte que nous avons choisi d’orienter notre réflexion sur le questionnement suivant : « Quel est l’intérêt de la facilitation en créativité dans une situation d’enseignement à distance en synchrone ? ».
Ainsi, pour apporter des éléments de réponse et d’éclairage à notre questionnement nous nous sommes appuyées sur notre cadrage théorique en créativité et en facilitation, ainsi que sur nos expérimentations vécues en présentiel et à distance, pendant cinq mois, au sein du programme expérimental Promising.
La créativité
Vers une définition consensuelle
La créativité est définie par Schwart en 1969 en tant que « capacité, pouvoir qu’a un individu de créer, c’est-à-dire d’imaginer et de réaliser quelque chose de nouveau » (cité par le Trésor de la Langue Française Informatisé ). La définition consensuelle de la créativité
proposée par Lubart (2010), correspond à « une production qui soit à la fois nouvelle et adaptée » au contexte singulier dans lequel celle-ci émerge (cité par Capron Puozzo & Wentzel, 2016 : 4). Effectivement, Carrier et Gélinas (2011) indiquent que la créativité sousentend l’innovation, l’adaptation, l’inventivité ou encore l’ouverture d’esprit.
De plus, Osborn (cité par Agogué, 2016 : 575), insiste et affirme que chaque individu détient un potentiel créatif conscientisé ou non. Osborn s’oppose à certaines idées préconçues, selon lesquelles, il existerait des individus dotés de capacités créatives, plus que d’autres.
Tom et David Kelley partagent également l’idée de Osborn lorsqu’ils soulignent que « la créativité n’est pas un don rare dont bénéficient quelques chanceux ; elle s’inscrit dans la nature de la pensée et du comportement humain » (2016 : 5). Selon cet auteur, la créativité est comparable à un muscle, qu’il est nécessaire d’entretenir et de développer. En effet, pour Pinkola Estés, la créativité correspond à la capacité à réagir avec notre environnement en choisissant « parmi les centaines de pensées, de sentiments, d’actions et de réactions qui naissent en nous et de les rassembler en une réponse, une expression, un message unique qui va transmettre un sens, la passion, l’esprit du moment » (1996 : 286). Par ailleurs, Ouellet souligne le fait que la créativité invite l’individu « à sortir de ses zones de confort, tout en négociant le niveau d’anxiété nécessaire pour se sentir en compétences » (2012 : 160). Cette idée est également évoquée par Barrau, lorsqu’il écrit « inconfortablement installés, parce que trop de confort nuit toujours à la santé des idées » (2017 : 5).
Un état d’esprit créatif
Développer l’empathie : Brown (2012) explique que l’empathie fait partie intégrante de la créativité. L’empathie est définie comme la capacité à se mettre à la place de l’autre, d’essayer de le comprendre et de tenter de résoudre des problèmes selon sa perspective, c’est-à-dire, qu’elle représente une forme d’altérité. Ainsi, l’empathie est un élément central dans l’approche créative et plus précisément dans la démarche de design thinking. Effectivement, l’empathie représente un point essentiel dans le cadre de projet centré sur l’utilisateur (user experience, UX) qui nécessite de comprendre et de répondre à des besoins d’un individu ou d’un groupe d’individu, afin d’apporter des solutions créatives et innovantes et qui répondent le plus exactement à leurs besoins.
Développer la confiance créative: Brown (2012) explique que la créativité existe en chaque individu. Par nature, tous les hommes sont créatifs, mais la créativité peut être représentée de manière différente. Celle-ci ne se restreint pas au domaine artistique (tel que la réalisation d’une sculpture ou à l’écriture d’une symphonie, etc.), mais s’étend dans tous les secteurs de la vie (psychologie, mathématiques, littérature, photographie, etc.). Ainsi, Brown met un point d’importance à ce que les individus développent une confiance en eux et en leur potentiel créatif, afin de pouvoir l’expérimenter pleinement. En effet, Tom et David Kelley (2016) fondateurs de la d.school de Stanford (Hasso Plattner Institute of Design) partagent la même idée que Tim Brown, lorsqu’ils désignent la confiance créative comme une croyance dans la capacité des individus à changer le monde et à réaliser des projets. Pour ces auteurs, la confiance créative est plus vaste que le talent artistique, c’est une capacité à « utiliser son imagination pour créer quelque chose de neuf dans le monde » (2016 : 3). Selon eux, la confiance créative est indissociable de l’expérimentation, ce qu’ils nomment de « design by doing ».
Dans cette perspective, Tom et David Kelley ont souhaité former les individus à développer cette confiance créative dans l’objectif de pouvoir innover. Au départ, ils pensaient que le défi majeur était d’enseigner la créativité à des individus ayant des profils plutôt « analytiques ». Cependant, très rapidement, ils ont réalisé que tous les individus étaient créatifs :
« nous avons découvert que nous n’avons pas à générer leur créativité en partant de rien.
Il suffit de les aider à redécouvrir ce qu’ils ont déjà en eux : leur capacité à imaginer ou à développer des idées nouvelles. » (2016 : 5).
Tom et David Kelley ont donc compris qu’il fallait aider et accompagner les individus à reconquérir leur part de créativité, notamment en inculquant un nouvel état d’esprit « créatif ». Pour cela, il est nécessaire d’aider et d’encourager les individus à cultiver la pensée et la confiance créative par l’expérimentation. Effectivement, ces mêmes auteurs mentionnent l’importance d’associer la pensée à l’action, et ce qui selon eux, définit la confiance créative : « la capacité à produire des idées nouvelles et le courage de les tester. » (Kelley, 2016 : 5). Ainsi, ces auteurs se sont rendu compte que les individus parviennent très rapidement à proposer des solutions créatives, inventives et originales.
Enfin, Geshe Tupten Jinpa (le traducteur anglais du Dalaï-Lama), a partagé sa pensée sur la créativité avec les frères Kelley : en tibétain, il n’existe pas de mot pour « créativité » ou « être créatif ». La traduction la plus proche est l’expression « naturel ». Ainsi, si l’on souhaite être davantage créatif, il suffit d’être naturel et d’être réellement soi-même. Expérimenter : Laustriat et Besançon (2015) mettent en évidence l’importance d’expérimenter, c’est-à-dire de mettre en action ses idées. Du même point de vue que les frères Kelley, il est essentiel en créativité de donner vie aux idées et de les rendre tangibles : « la valeur réelle de la créativité n’émerge que si l’on a le courage de mettre ces idées nouvelles en pratique » (2016 : 5).
Tolérer l’ambiguïté : La tolérance à l’ambiguïté consiste à ouvrir le champ des possibles. Il s’agit avant tout de laisser la porte ouverte à toutes les solutions envisageables, en partant du principe que l’on ne connaît pas la solution pour un problème posé, et que plusieurs solutions, aussi originales soient-elles, peuvent convenir.
Intérêt de la créativité dans l’enseignement
Selon Rey et Feyfant (2012), dans chaque apprentissage, il est inévitable d’être confronté à l’erreur. Pendant de nombreuses années, l’erreur ou la « mauvaise réponse » ont été considérées et connotées négativement, ce qui a pu amener certains individus à vivre une certaine forme de « blocage » et qui, à long terme, a pu réfréner une certaine prise de risque.
C’est à ce niveau que la créativité peut représenter un intérêt majeur dans l’apprentissage et l’enseignement. En effet, lors de situations pédagogiques créatives, les apprenants sont invités à prendre des risques et à accepter l’erreur. La relation qu’entretiennent les individus avec l’erreur est radicalement transformée. C’est ce que souligne Sahlberg (2011), selon cet auteur, il faut « apprendre le droit à l’erreur », en proposant des environnements éducatifs qui encouragent la confiance, et qui libèrent les individus de la peur de se tromper. Ces environnements sont une condition essentielle pour favoriser l’expression créative.
De plus, Rey et Feyfant (2012) soulignent le fait que la créativité permet aux individus de connecter des choses inattendues entre elles. Dans cette perspective, l’éducation doit donc encourager les individus à être créatif. Pour cela, il est essentiel de les autoriser à réaliser des liens et des connexions inhabituelles avec les savoirs, dans l’objectif de développer l’esprit critique, ainsi que l’esprit créatif.
Ce que nous retenons de la créativité
La créativité est liée à l’être humain, à la personnalité de chaque individu, qui symbolise la singularité de l’espèce humaine, qui n’a cessé, jusqu’à ce jour, d’inventer.
Notre société actuelle doit permettre aux individus de développer leur potentiel créatif afin de penser les grands défis et enjeux sociétaux. Dans cette perspective, il semble nécessaire d’accompagner la formation en créativité dans des contextes éducatifs et pédagogiques.
La facilitation
Dans ce chapitre, nous allons nous intéresser à la démarche de facilitation. Nous définirons ce qu’est la facilitation, puis nous nous intéresserons aux rôles du facilitateur au sein d’un groupe d’individus, dans l’objectif de mieux comprendre l’intérêt d’une telle démarche et ainsi d’appréhender au mieux les bénéfices d’une telle posture, pour un contexte d’enseignement hybride.
Qu’est-ce que la facilitation en créativité ?
La facilitation correspond à l’acte de « créer les conditions nécessaires pour que l’envie de participer des acteurs ne soit pas freinée » (N’Garo, 2009 : 3). Dionnetet al.(2017) définissent la facilitation en tant « qu’ensemble de compétences — posture, valeurs et techniques — visant à faire interagir, développer ou maintenir un groupe dans un état [actif] et dynamique pour obtenir un esprit d’équipe, un apprentissage collectif, ainsi qu’une évolution individuelle de chaque individu » (Dionnet et al., 2017 : 42).
C’est dans ce même sens que Cristolet al.(2019) définissent la facilitation, comme une démarche permettant l’émergence et la libération de l’intelligence collective au sein d’un groupe d’individus, enclenchée d’une part par la posture de celui qui anime la séance en collectif (nommé de facilitateur), d’autre part grâce à différents outils et techniques de créativité (ce que nous traitons dans l’une des parties qui suit).
De plus, ces auteurs précisent que la facilitation est, avant toute chose, fondée sur des processus relationnels, qui permettent à terme une inclusion très forte des différents individus, au sein d’un même groupe ou d’un collectif.
Du point de vue de Masse (2019), la facilitation doit être considérée en tant que démarche consistant à construire un cadre d’interaction, qui favorise « la place de chaque [individu] dans un processus d’apprentissage » (Masse, 2019, s.p.). La facilitation peut également trouver sa place dans le cadre de la réalisation de tâches collaboratives. Ici, la notion de tâche est à considérer dans une perspective actionnelle, d’enseignement et d’apprentissage. Dans le cadre d’une pédagogie dite active, Bagnoliet al.(2010) soulignent l’importance de proposer aux individus la réalisation d’actions concrètes, et cela, au sein d’un contexte social. De par leurs réalisations, ces actions (ainsi, nommées de tâches) permettront aux individus d’interagir ensemble, de décider, ainsi que de devenir acteurs de leur apprentissage.
Dès lors, la facilitation est un acte à envisager en lien avec « l’énergie qui circule en soi, dans et entre les individus » (Cristolet al., 2019 : 12). Il est donc essentiel pour un facilitateur de se questionner sur lui-même, afin de pourvoir être à même de proposer une démarche cohérente et de favoriser une synergie, allant de sa propre mise en mouvement, jusqu’à la constitution du groupe ou du collectif. En ce sens, il est important que le facilitateur observe avec attention les différentes dynamiques qui se créées et s’installent, au fur et à mesure, autour de lui et principalement au sein du groupe. Cela aura pour effet de lui permettre d’appréhender les interactions qui s’établissent au sein du collectif, ainsi que de mieux s’incorporer au sein de celles-ci. L’importance est que le facilitateur soit dans la capacité d’aligner sa posture par rapport à un plan horizontal, et non vertical avec les individus. En effet, Dionnetet al. (2017) soulignent le fait que la place d’un facilitateur ne doit pas être au centre dans un dispositif d’apprentissage, contrairement à une posture d’animateur (posture « centrale »). L’intérêt d’une telle démarche est que le facilitateur puisse laisser la place au groupe, afin que celui-ci puisse s’émanciper et poursuivre de façon autonome l’apprentissage, dont il est en train de réaliser.Dans la perspective d’orienter notre réflexion sur l’intérêt que peut susciter l’instauration d’une démarche de facilitation, dans le cadre de séances de formation dispensées à distance, nous retiendrons la définition proposée par Masse (2019), qui considère ce concept en tant que démarche visant l’élaboration d’un cadre d’interactions propice et favorable. Dionnetet al.(2017) proposent une distinction entre trois postures différentes, celle de l’animateur, de médiateur et enfin de facilitateur. C’est cette dernière posture qui suscite notre attention et notre intérêt. Effectivement, nous cherchons à identifier quels peuvent être les leviers sous-jacents à une telle posture, ainsi que par quels moyens nous pouvons parvenir à inscrire une telle posture dans un contexte de formation créatif, qui se réalise en partie à distance.
Posture et ingénierie de la facilitation
Afin de mettre en œuvre cette démarche de facilitation, nous allons dans un premier temps, nous interroger sur la nature de la posture du facilitateur. Puis, nous orienterons cette partie sur les principes et les processus qui découlent de cette posture de facilitateur d’atelier de créativité.
La posture de facilitateur
Selon Crespel et Nève-Hanquet, le rôle du facilitateur est de rendre plus facile le processus d’intelligence collective au sein du groupe : « la personne qui prend ce rôle stimule l’intelligence collective par des techniques particulières qui, dans l’expérimentation, amènent les groupes et les personnes à voir une même situation sous différents angles ». (Crespel et Nève-Hanquet, 2018 : 15).
Dans cet objectif, le facilitateur doit être amené à créer une forme d’apprivoisement avec le groupe avec lequel il sera amené à interagir, il doit ainsi « rendre possible l’apprivoisement avec lui, entre les participants du groupe, et avec le thème de la rencontre. » (Crespel et Nève-Hanquet, 2018 : 23). Selon les recherches de Crespel et Nève-Hanquet, il y a quelque chose de sous-jacent à la posture de facilitateur en créativité qui est de l’ordre de la réciprocité, c’est ce que ces auteures expriment avec l’emploi du termed’apprivoisement.
Selon ces auteurs, cette forme de réciprocité repose sur l’importance d’accueillir le groupe.
Pour que cet apprivoisement ait lieu, ces auteures évoquent l’importance de mettre en place une attitude corporelle d’accueil, qui passe par le choix de la posture physique, du ton de voix utilisé, et de la manière de s’adresser à son groupe. (Crespel & Nève-Hanquet, 2018).
Dionnetet al. (2017) proposent trois représentations schématiques des différentes postures, précédemment citées (animateur, médiateur et facilitateur). Selon ces auteurs, la posture de facilitateur se différencie des deux autres, par rapport à l’objectif que la démarche de facilitation suppose.
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Table des matières
Remerciements
Introduction
PARTIE 1 – UN PROGRAMME PORTEUR DE CRÉATIVITÉ À L’UNIVERSITÉ GRENOBLE ALPES
Chapitre 1. Promising, cultiver la pensée créative
1.1. Un programme soutenu par les IDEFI
1.2. Les équipes scientifiques et pédagogiques
1.3. Des formats d’enseignement créatifs et innovants
1.3.1. Pour les étudiants
1.3.2. Pour les enseignants
Chapitre 2. La créativité appliquée à l’enseignement supérieur
2.1. Un Diplôme d’Université
2.1.1. Le public cible
2.1.2. Les objectifs et contenus pédagogiques
2.1.3. Une formation hybride et les principes du distanciel
2.2. L’équipe au cœur du projet
2.2.1. L’équipe de projet
2.2.2. Nos missions dans l’équipe
2.3. Problématique
PARTIE 2 – ÉTAT DE L’ART EN CRÉATIVITÉ ET EN FACILITATION
Chapitre 3. La créativité
3.1. Vers une définition consensuelle
3.2. Un état d’esprit créatif
3.3. Intérêt de la créativité dans l’enseignement
3.4. Ce que nous retenons de la créativité
Chapitre 4. La facilitation
4.1. Qu’est-ce que la facilitation en créativité ?
4.2. Posture et ingénierie de la facilitation
4.2.1. La posture de facilitateur
4.2.2. L’ingénierie de la facilitation
4.2.3. Les energizers pour la facilitation
4.3. Mécanismes néfastes au sein d’un groupe
4.3.1. Le blocage de la production
4.3.2. L’appréhension du jugement
4.3.3. Le cas du passager clandestin
4.4. Intérêt de la facilitation dans l’enseignement
4.5. Ce que nous retenons de la facilitation
PARTIE 3 – LA FACILITATION EN CRÉATIVITÉ DANS UNE SITUATION D’ENSEIGNEMENT
Chapitre 5. Entretien avec une facilitatrice en créativité
5.1. Réalisation de l’entretien semi-directif
5.2. Analyse et bilan de l’entretien
Chapitre 6. Expérimenter la facilitation artistique et créative à distance
6.1. Les ateliers de facilitation en ligne de Philippe Brasseur
6.2. Ce que nous retenons de la facilitation en ligne avec des supports artistiques
Chapitre 7. Scénarisation pédagogique du distanciel pour le Diplôme d’Université en créativité
7.1. Réflexion didactique grâce à nos expériences vécues
7.2. Aboutissement d’une trame pédagogique générique
7.3. Scénario pédagogique proposé pour l’atelier de facilitation en ligne et à distance
7.4. Perspectives pour la suite du projet
Conclusion
Bibliographie
Sigles et abréviations
Annexes
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