La couverture médiatique de la politique

La couverture médiatique de la politique

Le malaise démocratique

Les critiques fusent de toute part en direction de la classe politique. Comme le souligne Savigny (2008: 1), « There is a problem, a perception of crisis in politics ». Cette prédominance des perceptions négatives envers la politique intrigue de nombreux chercheurs: « … ces attitudes feraient partie d’un phénomène de désaffection, c’est-à-dire une sorte d’éloignement ou de détachement vis-à-vis de l’espace politique. La désaffection politique est un concept qui est de plus en plus largement employé et dont les définitions ne cessent de se multiplier » (Gunther et coll., 1999: 183). Avant même d’aborder la présumée crise démocratique, il importe de revenir aux sources en examinant de plus près le concept de démocratie.

Qu’est-ce que le malaise démocratique?

La démocratie est une forme d’organisation politique dont les prémisses sont la souveraineté des citoyens et la détention du pouvoir politique par ces derniers. La démocratie est, selon la formule consacrée d’Abraham Lincoln, « le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». Aujourd’hui, les démocraties sont surtout des démocraties représentatives (Gaxie, 2008). Les citoyens élisent des représentants chargés de prendre des décisions en leur nom. Pelletier et Tremblay décrivent la démocratie et apportent les nuances entre démocratie directe et démocratie représentative.
Forme d’organisation politique dans laquelle la souveraineté appartient à l’ensemble des citoyens et citoyennes qui peuvent l’exercer directement, sans intermédiaire (démocratie directe) ou qui peuvent élire des représentants et représentantes chargés d’agir et de prendre des décisions en leur nom (démocratie représentative) (Pelletier et Tremblay, 2006: 524).
La perception de crise ou de malaise démocratique fait référence à la démocratie représentative. La légitimité de la démocratie en tant que régime politique n’est pas remise en question. Ce sont plutôt les institutions et mécanismes qui lui sont inhérents qui semblent poser problème, comme la baisse de la participation électorale et la méfiance envers les élus ou les partis politiques. Ainsi, de nombreuses études démontrent que les citoyens vivant dans les régimes démocratiques accordent une forte légitimité à la démocratie en tant que régime politique. Toutefois, ceux-ci se montrent plus critiques envers les pratiques démocratiques qui ont cours en ce début de 21e siècle.
Moreover, the empirical evidence presented in these chapters confirms from still another perspective that contemporary democracies might not be in the middle of a ‘legitimacy crisis’ (Kaase and Newton 1995). But the data also point to the presence of an important and enduring number of ‘disaffected democrats’ or ‘critical democrats’, two convergent types of citizens characterized by an interplay of diffuse support for democratic ideals, on the one hand, and critical attitudes toward democratic practice, on the other (Torcal et Montero, 2006: 336).
Ce phénomène porte plusieurs étiquettes: déficit démocratique (Norris, 1999; Norris, 2011), désaffection démocratique (Torcal et Montero, 2006; Pharr et Putnam, 2000), malaise démocratique (Giasson et coll., 2012a; Savigny, 2008; Nadeau et Giasson, 2003; Rioux, 2002).
Dans la littérature, les sens attribués aux termes « déficit » et à la « désaffection » démocratique demeurent plutôt ambigus. Ainsi, un même terme peut se voir attribuer des sens différents. À titre d’exemple, le terme désaffection démocratique est parfois associé aux attitudes cognitives ou affectives des citoyens envers le régime démocratique, les institutions qui le composent et les acteurs politiques qui y gravitent. Toutefois, certains auteurs évacuent les dimensions comportementales comme le vote ou l’implication partisane (Montero, Gunther et Torcal, 1999), tandis que d’autres les incluent (Pharr et Putnam, 2000 incluent la démobilisation partisane). En ce qui concerne le « déficit démocratique », certains auteurs l’abordent sous l’angle de la confiance et la satisfaction envers les institutions et acteurs politiques (Norris, 2011 et 1999), tandis que d’autres l’associent à la baisse des taux de participation électorale (Milner, 2005).
Aux fins de la présente recherche, nous retenons le terme malaise démocratique, que nous jugeons le plus englobant pour traduire le sentiment d’inconfort général envers le fonctionnement de la démocratie dans les sociétés postindustrielles. En effet, de nombreux auteurs utilisent le terme malaise (malaise démocratique, political malaise, democratic malaise) et ils pointent vers trois indicateurs qui traduiraient concrètement le phénomène: le déclin de la participation électorale, la baisse de confiance envers les acteurs et institutions politique et une démobilisation partisane (Giasson et coll., 2012a; Savigny, 2008; Blake, 2005; Johansen, 2005).
Canada, like other Western democracies, is showing signs of declining public confidence in the institutions and processes of government. Distrust of politicians and cynicism about the processes of representative government are increasing. Turnout in elections is failing. More and more citizens are turning away from traditional political parties and toward protest parties, pressure groups, the courts and civil disobedience to achieve their goals or frustrate those of their opponents (Blake, 2005: 269).
Les études électorales canadiennes des deux dernières décennies montrent une tendance au déclin quant à la participation électorale et une fluctuation de la confiance envers la classe politique (Gidengil et coll. 2004; Nevitte 1996). La raison d’abstention la plus fréquemment citée par les citoyens qui n’exercent pas leur droit de vote est le manque d’intérêt pour la politique (Pammett et LeDuc, 2003). De plus, des études récentes révèlent que les Canadiens et les Québécois ont une opinion négative de la classe politique qui s’exprime par un faible niveau de confiance et un cynisme envers les politiciens (Samara, 2017; Gélineau et Morin-Chassé, 2009). Elisabeth Gidengil (2012) met en lumière plusieurs indicateurs de cynisme de l’Étude électorale canadienne de 2008. Ainsi, une proportion importante de la population canadienne croit que les politiciens sont déconnectés de la population, ne se soucient pas des citoyens, ne tiennent pas leurs promesses et gaspillent les fonds publics. Des données plus récentes publiées par Samara11 (2017) laissent entrevoir une amélioration quant à la confiance portée aux élus et aux partis politiques au Canada. Le pourcentage de Canadiens ayant confiance envers les élus pour « faire ce qui est bien » s’établit à 47% en 2016, ce qui constitue une hausse de 7% pour les élus et de 5% pour les partis politiques par rapport à 2015. Le changement de gouvernement à Ottawa en octobre 2015 après neuf années de règne du Parti conservateur explique peut-être cette variation. Néanmoins, moins de la moitié de la population fait confiance aux élus et aux partis pour faire ce qui est bien. Les données de ce rapport proviennent d’un sondage mené par Samara en 201612 auprès des citoyens canadiens13.
En plus de la baisse de la participation électorale et du manque de confiance envers les acteurs politiques, les partis sont également en difficulté. Autrefois considérés comme des groupes « that could be loved and trusted » (Wallas, 1920, cité dans Clarke et Stewart, 1998), les partis peinent de plus en plus à remplir leur fonction de mobilisation des citoyens (Wattenberg et Dalton, 2000). La loyauté partisane s’érode et l’électorat est de plus en plus volatile (Amyot, 2017; Palmer, 2002).
… the decline of political parties is evident in their decreasing importance in democratic governance and downward trends in public support for them. Accordingly, the most salient characteristic of partisanship since it was first measured in national election surveys in the 1950s has been its long-term erosion in what has become a protracted era of dealignment in the United States and other democracies (Clarke et Stewart, 1998: 358).
La population s’identifie de moins en moins aux structures partisanes (Clarke et coll., 1996). Celles-ci ne jouissent plus du monopole dans la médiation entre les citoyens et l’État. Les groupes d’intérêt combleraient de plus en plus le besoin d’implication politique des citoyens. Ainsi, le débat contemporain tend à repenser la démocratie en considérant ces groupes, et non plus seulement les partis, comme des acteurs fondamentaux dans la médiation entre la société civile et les autorités gouvernementales (Hudon, 2009).

Y a-t-il un malaise démocratique au Québec?

Ainsi, le malaise démocratique serait caractérisé principalement par trois indicateurs: le déclin de la participation électorale, la baisse de confiance envers les acteurs et institutions politiques et une démobilisation partisane (Giasson et coll., 2012a; Savigny, 2008; Blake, 2005; Johansen, 2005). Au Québec, la participation aux élections provinciales suit une pente descendante depuis le milieu des années 1970. La figure 1 illustre cet état de fait en montrant les taux de participation aux élections provinciales entre 1976 et 201414. Malgré un sursaut du taux de participation à l’élection de 2012 (74,6%), la « norme » se situe à autour de 70% depuis 2003. Un creux historique a été enregistrée lors de l’élection de 2008 avec un taux de participation de 57,4%.
Outre la baisse du taux de participation, la confiance des citoyens québécois envers leurs représentants politiques cause problème. Selon une étude effectuée pour le Directeur général des élections du Québec par les chercheurs universitaires François Gélineau et Alexandre Morin-Chassé (2009), le cynisme influence négativement la probabilité de voter: « Le fait que le cynisme soit le facteur qui a le plus grand impact sur le vote à l’élection du 8 décembre
Les politiciens se retrouvent parmi les derniers de classe en ce qui concerne le niveau de confiance accordé aux diverses professions15. Un sondage mené en 2016 par la firme Léger pour le compte du journal Le Devoir révèle que plus des trois quarts des Québécois (79%) font peu ou pas confiance aux politiciens16. Dans la même lignée, une étude menée conjointement par la firme de sondage CROP et la Chaire de recherche sur la démocratie et les institutions parlementaires indique que 68% des citoyens québécois ne font plus confiance aux représentants du gouvernement pour faire ce qui est juste pour la société québécoise (2012: 9).
Les partis politiques québécois éprouvent les mêmes difficultés que la tendance observée dans les grandes démocraties: déclin du militantisme et du membership, baisse de l’attachement partisan, difficulté à mobiliser l’électorat et à présenter des projets susceptibles de rallier les citoyens (Pelletier et Couture, 2012: 226). Les deux plus grands partis du Québec, le Parti libéral du Québec et le Parti Québécois, ont connu une baisse importante de membres depuis une trentaine d’années. Quand on considère le membership des deux grands partis, la tendance ne fait pas de doute: bon an mal an, à la fin des années 1970, ils comptaient 235 000 membres, soit 6% des électeurs. Au cours des dernières années, ils ne comptaient plus que 165 000 membres, soit 3% des électeurs. Depuis 30 ans, les partis auraient perdu la moitié de leurs ressources humaines fondamentales17.
Dans la même lignée, 64% des Québécois considèrent que les partis politiques se ressemblent au Québec et qu’il n’y a pas vraiment de choix (Chaire de recherche sur la démocratie et les institutions parlementaires/CROP, 2012: 7). De plus, une étude menée par Couture et Pelletier démontre que la confiance accordée aux partis politiques est moins élevée que celle vouée aux autres institutions de la gouverne politique, comme la fonction publique, l’assemblée législative, le gouvernement et les forces de l’ordre. De plus, les Québécois ont moins confiance en leurs partis que les citoyens du reste du Canada, ce qui se vérifie également pour la confiance envers les autres institutions politiques du pays (Pelletier et Couture, 2012).
En regard de ces travaux de recherche et sondages, il semble que le Québec s’inscrit dans une tendance similaire au reste du Canada et aux autres démocraties postindustrielles en regard du malaise démocratique. La participation électorale est en baisse depuis le milieu des années 1970. La population éprouve des difficultés à faire confiance à ses dirigeants. Les partis voient leur nombre de membres diminuer significativement et les Québécois leur font moins confiance qu’aux autres institutions politiques comme la fonction publique, l’assemblée législative et les forces de l’ordre. Où se situe véritablement le problème? Les citoyens québécois sont-ils désespérément cyniques envers la politique, ou sont-ils plutôt critiques de la manière dont elle est pratiquée?

Citoyens cyniques, sceptiques ou critiques?

En politique, le cynisme du public est considéré comme un sentiment important pour qualifier l’insatisfaction des citoyens envers la classe politique (de Vreese, 2008: en ligne). De plus, le cynisme est un des aspects les plus étudiés lorsqu’il est question du malaise démocratique en raison de sa relation au faible taux de vote (Kaid et Holtz-Bacha, 2008). Le terme « cynisme » est fréquemment employé tant dans la littérature académique que dans les médias. Malgré les nombreuses définitions qui existent, une certaine tendance ressort: le centre du concept de cynisme est l’absence de confiance, la méfiance du public envers les politiciens et les institutions gouvernementales (Pinkleton et coll., 2012; Fu et coll., 2011; Kaid et Holtz-Bacha, 2008; Cappella et Jamieson, 1997; Strama, 1998). D’ailleurs, Pinkleton et ses collaborateurs (2012) font remarquer que les termes méfiance, confiance et cynisme sont souvent employés indifféremment dans la littérature, puisqu’ils sont souvent mesurés de la même façon. Le cynisme est défini par Kaid et Holtz-Bacha « as a lack of confidence in, or a feeling of distrust toward, public officials and institutions » (2008: 592). Certains auteurs, comme Schyns et coll. (2004), décrivent le cynisme comme une attitude individuelle consistant en une profonde conviction que les politiciens sont malveillants et mal intentionnés. Ainsi, le cynisme semble associé à un sentiment négatif du public à l’égard des politiciens et des institutions gouvernementales.
Si la majorité des auteurs en arrivent à des définitions tournant autour d’un manque de confiance, la mesure du cynisme ne fait pas l’unanimité. En effet, les indicateurs utilisés par les chercheurs pour mesurer le concept sont nombreux et variés: « Political cynicism is recognized as an important political sentiment. However, there is little agreement about the nature, measurement, and consequences of political cynicism » (de Vreese, 2008).
Le cynisme est habituellement mesuré par des questions comportant des échelles accord/désaccord avec certains énoncés prédéterminés (Gidengil, 2012; Pinkleton et coll., 2012; de Vreese, 2004b; Cappella et Jamieson, 1997; Agger et coll., 1961), des questions à choix forcé (Cappella et Jamieson, 1997), des énoncés à choisir (Cappella et Jamieson, 1997) ou des entrevues individuelles (Schyns et coll., 2004). Les énoncés utilisés pour mesurer le cynisme font appel à des sentiments négatifs envers la politique et touchent la méfiance du public, surtout envers les politiciens et le fonctionnement des institutions gouvernementales. On peut dégager plusieurs grands thèmes parmi les indicateurs du cynisme politique utilisés par les chercheurs: l’honnêteté ou la malhonnêteté des politiciens, leur éloignement des citoyens (perte de contact, sentiment d’impuissance des citoyens par rapport aux décisions politiques), leur propension à servir des intérêts particuliers ou leurs propres intérêts avant ceux de la population (corruption, retour d’ascenseurs envers certains groupes particuliers) et leur désir de bien paraître et se faire réélire (bénéfice de l’image au détriment du contenu, se coller aux sondages, manque de conviction).
Pour mieux saisir le concept du scepticisme, nous référons premièrement au terme grec skepticos, qui signifie examiner, investiguer. À l’origine, le scepticisme était opposé au dogmatisme, associé à la croyance de posséder la connaissance (Cappella et Jamieson, 1997: 25). Le dictionnaire Merriam-Webster (2012: en ligne) réfère au scepticisme comme une attitude de doute, une disposition d’incrédulité à l’égard d’un objet ou une doctrine affirmant que la connaissance vraie est incertaine. C’est dans ce sens que Cappella et Jamieson (1997) et Norris (2011) réfèrent au scepticisme politique comme un jugement suspendu, un doute. Bref, le sceptique doute, il pose des questions. Il est prudent et il n’est pas crédule.
En politique, un défi important consiste à distinguer le scepticisme du cynisme. En effet, Pinkleton et Austin mettent en garde contre une confusion entre les deux concepts:
« … scholars need to consider the role of healthy skepticism apart from cynicism in the political process » (Pinkleton et Austin, 2002: 160). Eisinger affirme qu’il est facile de tomber dans le piège de confondre une méfiance saine envers le gouvernement à un « dangerous democratic despotism that de Tocqueville outlined » (Eisinger, 2000: 60). Pippa Norris (2011: 19) aborde cette différence entre scepticisme et cynisme. Alors que le scepticisme est un jugement suspendu, le cynisme est marqué par une négativité et un désabusement.
Des recherches récentes de Pinkleton et ses collaborateurs (2012) montrent que la différence entre le scepticisme et le cynisme se situe au niveau du choix de l’attitude à adopter devant les insatisfactions politiques. Les sceptiques et les cyniques sont tous deux insatisfaits de la politique. Toutefois, les citoyens sceptiques reconnaissent que les politiciens ont leurs limites, ce qui les pousse à chercher des sources d’information additionnelles pour confirmer ou infirmer l’information qu’ils mettent en doute. Les cyniques ont une attitude négative envers les politiciens et utilisent toutes les sources d’information qu’ils trouvent pour renforcer leurs croyances. Au final, Pinkleton et ses collaborateurs affirment que le scepticisme est une forme de négativisme qui est plus protectrice que destructrice en regard de la politique.
Pinkleton et ses collaborateurs (2012) proposent des indicateurs de scepticisme. Dans cette optique, le scepticisme est mesuré par des énoncés avec une échelle accord/désaccord. Ces énoncés abordent la réflexion avant de juger crédibles une nouvelle en lien avec la politique et/ou une affirmation d’un politicien, de la recherche d’informations additionnelles devant des affirmations des politiciens et de l’importance d’évaluer de façon critique les nouvelles et les déclarations des gouvernements.
Enfin, un troisième concept est mobilisé dans la littérature sur les attitudes citoyennes envers la politique, soit celui du citoyen critique. En 1999, Norris publie pour la première fois l’ouvrage Critical Citizens. Global Support for Democratic Government. Norris y présente la notion de critical citizens (citoyens critiques). Elle affirme alors que le soutien des citoyens envers les régimes démocratiques nécessite une analyse plus nuancée que celle du simple cynisme ou du scepticisme. Ainsi, selon Norris, la confiance envers les régimes démocratiques n’est pas un bloc monolithique (Norris, 1999). Elle explique qu’il est possible que les citoyens croient en des valeurs démocratiques, mais qu’ils soient insatisfaits du fonctionnement des gouvernements en place. Norris a publié un deuxième ouvrage en 2011 sur le sujet, Democratic Deficit: Critical Citizens Revisited. Plus de dix ans après ses travaux initiaux, la chercheuse constate toujours ce phénomène des citoyens critiques. L’auteure y présente un modèle, celui du déficit démocratique, pour expliquer cette différence entre les attentes des citoyens en regard de la politique et de la réalité (Norris, 2011: 6).
One reason for the confusion in the literature between those who see a pattern of declining confidence in established democracies and others who see only trendless fluctuations is the reliance on different indicators relating to different levels of support. It is rational and consistent, for example, for citizens to believe in democratic values but to remain critical about the way democratic governments actually work in practice, or to have confidence in political institutions but no faith in politicians, or to disparage most politicians but to continue to support a particular leader, or to trust each other but not elected officials (Norris, 1999: 12).
À l’instar de Norris, plusieurs autres chercheurs rendent compte du phénomène de déficit entre l’appréciation de certains principes démocratiques et l’insatisfaction des citoyens quant au fonctionnement de la démocratie. Des chercheurs canadiens qui ont réalisé une vaste étude sur le malaise démocratique par le biais de groupes de discussion avec les citoyens abondent dans le même sens. La démocratie est un idéal à atteindre, mais la déception des gens « tiendrait donc au fait qu’il y a rupture entre ce qu’ils attendent d’une démocratie et la réalité de la politique » (Bastedo et coll., 2011: 3). D’autres auteurs, comme Gunther et ses collaborateurs, affirment que « l’insatisfaction politique peut être considérée comme étant le résultat d’une divergence entre des valeurs globalement positives attribuées au système politique et une perception négative de la façon dont ce système fonctionne réellement » (Gunther et coll., 1999: 183).
Hofferbert et Klingemann (2001: 372) différencient les « démocrates satisfaits », les « démocrates insatisfaits » et les « non démocrates ». Les démocrates satisfaits soutiennent l’idéal démocratique et se montrent satisfaits du fonctionnement de la démocratie dans leur pays. Les démocrates insatisfaits se montrent favorables à un régime démocratique, mais ne sont pas satisfaits de la façon dont fonctionne la démocratie dans leur pays. Enfin, les non démocrates rejettent explicitement les principes démocratiques. Il appert donc que les citoyens peuvent être cyniques à propos du fonctionnement de la démocratie et de ses résultats, tout en continuant d’approuver les valeurs démocratiques.
Moreover, the empirical evidence presented in these chapters confirms from still another perspective that contemporary democracies might not be in the middle of a ‘legitimacy crisis’ (Kaase and Newton 1995). But the data also point to the presence of an important and enduring number of ‘disaffected democrats’ or ‘critical democrats’, two convergent types of citizens characterized by an interplay of diffuse support for democratic ideals, on the one hand, and critical attitudes toward democratic practice, on the other (Torcal et Montero, 2006: 336).
Gélineau et Morin-Chassé avancent que le cynisme est présent au Québec et qu’il est dommageable pour le taux de participation électoral (Gélineau et Morin-Chassé, 2009). Ces derniers ont mesuré le cynisme à l’aide de sept énoncés se rapportant à divers éléments18: la perte de contact des députés avec les citoyens, l’impression que les citoyens ne sont pas consultés par les politiciens, la trop grande complexité de la politique, la trop grande ressemblance entre les partis politiques, le manque de préoccupation du gouvernement envers les citoyens, l’influence des riches sur les partis, ainsi que la satisfaction en regard de la façon dont fonctionne la démocratie au Québec.
Bélanger et Nadeau (2009) ont établi un indice de malaise démocratique des citoyens du Québec composé de sept indicateurs représentés par des questions portant sur le souci démontré par les gouvernements à l’égard des citoyens, la perte de contact des élus avec la population, la confiance des citoyens dans les gouvernements pour faire ce qui doit être fait, l’opinion des citoyens sur le degré de gaspillage au gouvernement, l’opinion des gens à propos de l’honnêteté des dirigeants, la tendance des gouvernements à favoriser certaines personnes et la satisfaction envers la démocratie québécoise. Lorsque les indicateurs précédemment énumérés sont comparés à ceux qui désignent généralement le cynisme dans la littérature scientifique, l’indice élaboré par Bélanger et Nadeau semble mesurer davantage le cynisme que le malaise démocratique. Bélanger et Nadeau ont regroupé ces indicateurs en un indice. Sur une échelle de 0 à 1 (1 indiquant un malaise démocratique plus intense), les chercheurs ont établi que le cynisme était bien présent dans la population québécoise, l’indice s’établissant à 0,65 en 2008 (Bélanger et Nadeau, 2009: 73).
La Chaire de recherche sur la démocratie et les institutions parlementaires et la maison de sondage CROP (2012) ont questionné les citoyens québécois en novembre 2011. Les résultats obtenus laissent entrevoir un cynisme important. Il s’avère que 59 % des Québécois estiment qu’ils n’ont aucune influence sur l’action gouvernementale (2012), plus des deux tiers (68 %) ne font plus confiance aux représentants du gouvernement (2012) et 64 % des citoyens considèrent qu’il n’y a pas vraiment de choix politique au Québec, que les partis politiques se ressemblent tous (2012).
À la lumière de ces données, il est difficile d’affirmer que les citoyens québécois ne font preuve que de scepticisme politique. Le cynisme semble dominer manifestement sur une attitude sceptique caractérisée par un jugement suspendu. En effet, la négativité et la frustration envers la classe politique ressortent clairement à la lecture des résultats des études. Toutefois, peut-on affirmer qu’ils remettent en question l’existence et la pertinence des institutions associées aux régimes démocratiques que sont les forces de l’ordre, le Parlement, le pouvoir judiciaire, l’administration publique? Malgré le fait qu’une dose indéniable de cynisme soit présente dans la population québécoise, les citoyens de la province seraient-ils plus critiques que cyniques?
Plusieurs indices le laissent croire. Tout d’abord, l’étude menée par la Chaire de recherche sur la démocratie et les institutions parlementaires montre que près des trois quarts des Québécois (71 %) croient encore que l’élection constitue le meilleur moyen de tenir les gouvernements responsables de leurs actes. Notons toutefois que ce pourcentage s’établissait à 83 % en 2008, ce qui peut inquiéter (Chaire de recherche sur la démocratie et les institutions parlementaires et CROP, 2012). Les Québécois ont toujours confiance dans le principe des élections démocratiques. L’étude mentionne également, en conclusion, que les Québécois portent un jugement très critique à l’égard de la santé de leurs institutions démocratiques (2012).

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Table des matières

Introduction
Chapitre 1  Problématique et cadre théorique
1.1 Le malaise démocratique
1.1.1 Qu’est-ce que le malaise démocratique?
1.1.2 Y a-t-il un malaise démocratique au Québec?
1.1.3 Citoyens cyniques, sceptiques ou critiques?
1.2 La problématique: état de la question
1.3 Le marketing politique
1.3.1 Qu’est-ce que le marketing politique?
1.3.2 Le processus de marketing politique et les catégorisations des partis politiques
1.3.3 Quelques distinctions conceptuelles
a) Le marketing politique et la professionnalisation de l’organisation des campagnes
b) Le marketing politique et la politique dite de brokerage
c) Le marketing politique et la publicité
d) Le marketing politique et la communication politique
1.3.4 La pratique du marketing politique au Canada et au Québec
1.3.5 Marketing politique et démocratie
a) La recherche de marché
b) La stratégie
c) La communication
d) L’organisation
1.3.6 Marketing malaise: élaboration d’un cadre théorique
a) L’intégration du marketing politique par les organisations politiques
b) Les médias
c) Les effets sur les citoyens et la démocratie
1.4 Synthèse et questions de recherche
Chapitre 2  Méthodologie
2.1 La recherche qualitative
2.2 Les groupes de discussion
2.2.1 Recrutement et composition des groupes
2.2.2 Le guide de discussion
2.2.3 L’analyse des discussions et le traitement des données
2.3 Les limites de la démarche
Chapitre 3  La démocratie
3.1 Pour moi la démocratie, c’est…
3.1.1 Le rôle de la confiance politique dans les opinions des participants à propos de la signification de la démocratie
3.2 L’état de la démocratie au Québec
3.2.1 Le rôle de la confiance politique dans les opinions des participants à propos de l’état de la démocratie au Québec
3.3 La confiance envers les politiciens
3.3.1 Le rôle de la confiance politique dans les opinions des participants à propos de la confiance portée aux politiciens
3.4 Discussion et conclusion
3.4.1 La signification de la démocratie (Q1a)
3.4.2 L’état actuel de la démocratie au Québec (Q1b)
3.4.3 La confiance envers les politiciens (Q1c)
3.4.4 La démocratie n’est pas en crise, mais…
Chapitre 4  La couverture médiatique de la politique
4.1 Aspects de la politique qui sont les plus couverts par les médias
4.1.1 Le rôle de la confiance politique dans les opinions des participants à propos des aspects de la politique qui sont les plus couverts par les médias
4.2 La couverture de la politique par les médias
4.2.1 Le rôle de la confiance politique concernant la couverture de la politique par les médias
4.3 Conclusion et discussion
4.3.1 Les aspects les plus couverts par les médias (Q2a)
4.3.2 L’opinion sur la couverture médiatique de la politique et son rôle pour mettre l’activité politique en valeur (Q2b)
4.3.3 Des citoyens insatisfaits et critiques à l’égard de la couverture médiatique de la politique
Chapitre 5  Le marketing politique et ses effets sur la démocratie
5.1 Les connaissances des citoyens sur l’élaboration des stratégies et le marketing politique
5.1.1 Les mots et expressions associés au terme marketing politique
5.1.2 Connaissances des participants à propos de l’élaboration des stratégies politiques
a) Le rôle de la confiance politique dans les opinions des participants à propos de l’élaboration des stratégies politiques
5.2 Les opinions des participants à propos du marketing politique
5.2.1 Les opinions des participants à propos de la publicité électorale
a) Le rôle de la confiance politique dans les opinions des participants à propos de la publicité électorale
5.2.2 Les opinions des participants à propos du marketing politique et de ses effets sur la démocratie
a) Le rôle de la confiance dans les opinions des participants à propos des effets du marketing politique sur la démocratie
5.3 Discussion et conclusion
5.3.1 Les connaissances des citoyens sur le marketing politique (Q3a)
5.3.2 Les opinions des citoyens sur la publicité (Q3b)
5.3.3 Les opinions des citoyens à propos des effets du marketing politique sur la démocratie (Q3c)
Conclusion
Bibliographie

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