La corpulence des populations, objet d’une croisade morale

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Jeux de pouvoir autour de la définition du bon traitement.

Pendant que la chronicité de l’obésité exige une redéfinition du travail médical qui doit gérer l’inefficacité des traitements curatifs destinés aux maladies infectieuses, les recompositions de l’espace médical, au-delà des enjeux de concurrence établis de longue date entre activité médicale et activité chirurgicale, imposent un partage du territoire sanitaire avec de nombreux métiers paramédicaux qui aspirent à être légitimés en qualité de profession1. C’est à ce titre que l’ « obésologie », activité de soin partagée, se constitue en véritable laboratoire d’analyse à la fois des conditions nécessaires à la construction d’un territoire de compétences qui cherche à s’autonomiser dans le champ médical ; mais aussi des stratégies de collaborations et de concurrences négociées pour définir le bon traitement dans un contexte d’incertitudes identifié comme une fragilisation de l’autorité médicale2.
La sociologie des professions de santé souligne que la construction du territoire clinique, comme répartition des tâches et des compétences, suppose la reconnaissance simultanée du bien-fondé de chaque discipline à la fois par les autres professions patentées pour produire des « biens de santé »3, mais aussi par les institutions et les patients4. Plus récemment, Frédéric Pierru et Daniel Benamouzig affirment que les dynamiques professionnelles du monde médical s’inscrivent dans des « processus transversaux d’intégration institutionnelle ». C’est-à-dire qu’ils appréhendent les transformations des professions de santé à partir des dynamiques institutionnelles afin « de mieux comprendre certaines difficultés éprouvées localement par les acteurs, qui font l’expérience effective d’une « dépossession », d’une « crise » ou d’un « délitement » de leurs activités, dont les principes d’organisation se transforment ».1 C’est donc dans cette continuité, en inscrivant les prises en charge locales dans la dynamique du champ de la médecine, en général, dans celui de l’ « obésologie », en particulier, que ce chapitre s’attache à saisir la synchronie des trajectoires individuelles et des transformations institutionnelles, pour comprendre comment les soignants gèrent les difficultés générées aussi bien par les mutations en cours que par les incertitudes liées à la prise en charge en elle-même.
L’obésité, d’emblée désignée maladie plurifactorielle fait pleinement écho à l’impératif de pluridisciplinarité comme preuve scientifique de l’adaptation du système de santé à l’accompagnement des patients chroniques. Que ce soit au sein des équipes hospitalières ou des groupes de réflexion, voilà une organisation qui s’érige en modèle unique de fonctionnement. Dès lors, quels sont les effets de cette division du travail réunissant, autour de la même activité, des professions qui, si elles occupent des positions différentes dans la hiérarchie médicale, partagent toutes l’expérience d’une relégation à la périphérie de ce qui définit la noblesse thérapeutique ? Au sein des équipes présentées comme le terreau de la construction d’un savoir collectif, pensé comme nécessairement plus performatif puisqu’au croisement de cadres théoriques et de pratiques complémentaires, quelle est la nature concrète du travail de collaboration interdisciplinaire ? Sur le territoire local marqué des enjeux concurrentiels entre services, et plus largement dans un champ où l’incertitude laisse place à l’émergence de groupes de réflexions qui tentent de proposer d’autres approches qui font débat, quelles sont les stratégies collectives mises en place pour remporter la mise ? Enfin, puisque le bon usage du titre de soignant est conditionné par l’accumulation de « compétences scientifiques et diagnostiques » et « de qualités humaines »2, quel travail fournit concrètement chaque soignant pour tenter de briller parmi ses pairs et ainsi valoriser son rôle d’ « obésologue » ? Ce sont ces trois interrogations que ce deuxième chapitre se propose d’aborder, pour finalement interroger les modalités de la construction de l’ « obésologie » comme activité de soin autonome et reconnue.

Travail d’équipe et enjeux de reconnaissance disciplinaire.

S’inscrivant pleinement dans « la rationalisation instrumentale »1 du service public de santé, certains établissements publics ou privés, sont labélisés, sous l’égide des ARS, pour assurer la mission conjointe du traitement de l’obésité. Cette double volonté de « normaliser l’activité des soignants » et « d’équiper le patient » de « grilles de lecture standardisées »2 se traduit par l’imposition d’une interdépendance entre chirurgie bariatrique et éducation thérapeutique. La première ne peut être pratiquée sans un encadrement éducatif du patient. La seconde acte (à condition d’une réelle compliance du malade) la chirurgie comme un recours possible lorsque les mesures hygiénico-médicales sont tenues en échec. Ceci ne se traduit évidemment pas par une simple injonction à partager le travail entre chirurgiens et médecins (endocrinologues et nutritionnistes) mais également par l’établissement de nouveaux groupes professionnels dans le champ médical puisque diététiciens, enseignants APA et psychologues3 sont invités à participer activement au traitement de cette maladie plurifactorielle. Les infirmières, elles, connaissent une nouvelle forme du travail d’équipe puisqu’il ne s’agit plus d’être simplement maintenues en position subalterne des professions médicales mais aussi de collaborer avec des professions paramédicales à qui sont transférées des compétences thérapeutiques4.
Les trois services étudiés, constituent un véritable laboratoire d’analyse des enjeux du travail pluridisciplinaire qui s’est instauré en véritable hégémonie de l’activité médicale. Alors que l’ordre social de ces espaces de travail collaboratifs est segmenté entre plusieurs professions dont la reconnaissance dépend de la construction d’un territoire propre, « en opposition avec les définitions que se donnent d’autres entités semblables »5, quelles coopérations, quels affrontements résultent de cette apparente volonté d’ériger le traitement de l’obésité comme une spécialité à part entière ? Alors que les institutions hospitalières sont des espaces très hiérarchisés comment se rencontrent ceux qui ont tout intérêt à préserver, malgré tout, une division verticale du travail et ceux qui voient en l’horizontalisation le moyen de négocier leur visibilité ? L’observation du travail d’équipe concret, en interaction avec les discours sur ce que représente la pluridisciplinarité comme possibles, permettent d’explorer les enjeux de ces deux réalités.

Jeux de pouvoirs dans un espace segmenté.

Le champ médical est clairement divisé en deux sous-espaces : celui des professions médicales et celui des professions paramédicales. Avant d’observer les interactions entre ces deux catégories de groupes professionnels, celle au coeur de l’activité médicale et celle assignée à sa périphérie, cette section entend isoler chacun de ces deux sous-espaces pour se consacrer à l’analyse des négociations qui s’y opèrent entre chaque segment qui les composent. Cela a été abordé, il semble entendu par l’ensemble des professionnels que le travail de normalisation des corps obèses, dont les causes sont plurifactorielles, nécessite la cohérence d’une action collective entre des soignants. Médecins et paramédicaux appartiennent au même champ de l’ « obésologie ». Loin de nier cette évidence, rendre compte des variations d’interactions entre professions statutairement similaires engage à comprendre les conventions1 qui agencent les activités de chaque discipline au sein des équipes et plus largement au sein du réseau dédié au traitement de l’obésité.

Négociations de l’agencement des activités médicales.

L’ordre social de la médecine de l’obésité se négocie entre trois segments professionnels : nutritionnistes, psychiatres et chirurgiens qui sont tous spécialisés dans le traitement des troubles de l’alimentation. Tous ont en commun d’exercer une activité parmi les moins nobles dans la hiérarchie des spécialités médicales et chirurgicales puisqu’il s’agit de traiter des organes peu sublimés dans les représentations sociales et cliniques. Délégués à la prise en charge de l’obésité, ils sont invités à unir leurs efforts pour réussir à transformer ceux qui, jusque-là, ont échappé au gouvernement social et médical des corps : savoir décider (en bonne intelligence) lorsque la chirurgie s’impose, coopérer pour que l’acte opératoire éventuel soit un succès, accompagner ceux qui ne peuvent ou ne veulent recourir à l’opération. Ainsi énoncé l’agencement des activités médicales peut être pensé comme une chaîne de coopérations (telle que décrite par Howard S. Becker) où, à la fois, chacun fait partie d’un tout mais où chaque segment peut, en fonction du diagnostic, prétendre tour à tour à une mise en avant de sa légitimité.
Le service B est dédié à l’accompagnement à la chirurgie, en péri-opératoire. Concrètement, les acteurs qui s’y présentent sont ceux qui d’emblée se projettent dans une intervention chirurgicale. L’éducation thérapeutique est uniquement là pour accompagner cette démarche : programme de six mois obligatoires en amont et ateliers fortement conseillés à posteriori. Historiquement, ce service apparaît 8 ans après la création du service D, dédié à la chirurgie. Spatialement, éducation thérapeutique et chirurgie n’ont pas non plus la même place. Le service d’ETP est au fond du site, dans un ancien bâtiment dont les locaux intérieurs du rez-de-chaussée ont été rénovés. Sa présence n’est pas spécifiquement signalée puisque la seule indication au-dessus de l’entrée annonce « Hospitalisation à temps partiel ». Le service de chirurgie est installé au premier étage d’un bâtiment neuf, situé à l’entrée principale. Sous son enseigne se suivent les plaques professionnelles des chirurgiens. C’est en son sein que se tiennent les RCP1 où Anne, qui dirige le service B, se déplace pour rencontrer les autres professionnels spécifiquement affiliés au service chirurgical : psychiatre, infirmière, diététicienne et chirurgien. Autant d’éléments qui semblent désigner les chirurgiens comme détenteurs légitimes de l’autorité « obésologique » au sein de l’institution. En réalité les matériaux d’enquête révèlent des formes complexes et changeantes de rapports de domination entre ces chirurgiens et leurs alter-ego statutaires (psychiatre et nutritionniste).
Pour que leur dossier soit présenté en RCP afin que les experts valident ou non l’opérabilité, les patients doivent répondre à un certain nombre de critères :
• Avoir suivi le programme d’éducation thérapeutique pendant une durée minimum de six mois, dans le double objectif de vérifier que le suivi de règles hygiénico-diététiques ne suffit pas à l’amaigrissement, mais aussi d’évaluer leurs aptitudes à maintenir le respect de l’hygiène de vie qu’implique l’acte chirurgical (notamment la fragmentation des ingestions alimentaires en six prises). Les données sont transmises à la médecin responsable du service qui est chargée de les exposer lors de la RCP.
• Être examinés par un certain nombre de spécialistes afin d’éliminer toute complication biologique potentielle que l’obésité pourrait aggraver lors de l’opération. Pour tous, le minimum est d’avoir éliminé les risques pneumologiques, cardiologiques et gastroentérologiques. Puis en fonction des données cliniques de chacun, d’autres experts peuvent être sollicités. Ces consultations se font soit en interne, soit dans des cabinets de ville. Des bilans écrits sont adressés au service chirurgical et centralisés par l’infirmière coordinatrice pour compléter le dossier de chacun.
• Être évalués par la diététicienne et la psychiatre du pôle chirurgical afin d’anticiper les éventuelles complications post-chirurgicales, notamment l’incompliance ou la décompensation. Les deux professionnelles concernées participent directement à l’étude finale des candidatures.
Les RCP représentent, par conséquent, un enjeu de taille dans l’agencement de l’activité médicale puisqu’ils sont l’instance où la médecin coordinatrice du suivi préopératoire, la psychiatre évaluatrice des risques post-opératoires et le chirurgien qui opère sont en interaction directe1. Techniquement pour que l’opération soit validée, il est nécessaire que le patient ne coure aucun risque, ni pendant, ni après l’opération. Dans les faits, le risque opératoire ne soulève pas ou peu de débat. Si l’acte chirurgical ou l’anesthésie sont contre-indiqués par un expert, le refus ou le report sont rapidement et collégialement décidés. Ce consensus confère une légitimité supérieure à celui qui aura à charge de poser l’acte opératoire. En écartant les cas contre-indiqués, tous reconnaissent sa responsabilité, le caractère sacré du geste qu’il aura à accomplir sur les corps qui lui seront par la suite confiés, « le hissant avec compétence jusqu’à l’image que lui et son équipe ont de lui »2. Là où les tensions apparaissent c’est lorsque la médecin rapporte les doutes de son équipe sur l’implication du patient dans sa prise en charge (passée et/ou à venir), ou même lorsque la psychiatre alerte sur des troubles psychiques. Ces écarts de point de vue, lorsqu’ils se régulent par un compromis, et qu’ils produisent donc une décision collective, sont le fruit d’un travail d’équipe classique où chaque professionnel prend la part qui incombe à son rôle dans la division du travail, dans un souci de cohésion. Ce type de chaîne de coopération1 a été largement décrit. Ce qui mérite d’être éclairci réside plutôt dans le fait que l’ensemble des soignants affirment qu’au final, plus de neuf dossiers sur dix sont validés2. L’explication de cette forte proportion d’accès à la chirurgie ne peut se restreindre au seul engagement des soignants à rentabiliser l’institution pour laquelle ils travaillent. Certes cette réalité ne peut-être niée, d’autant plus qu’il existe une différence de taille entre les statuts des professionnels du pôle chirurgical (excepté l’infirmière) et ceux de l’ETP, les premiers étant des libéraux, les seconds des salariés. Ainsi les mandats ne sont pas également liés à l’activité chirurgicale, non seulement par la nature même des formes légales de travail, mais aussi par la vocation de chaque service. L’éducation thérapeutique pourrait se passer de la chirurgie, à condition d’entrer en concurrence directe avec le service A qui se consacre de manière quasi exclusive à cette activité. L’inverse n’est pas vrai, en tout cas pas s’il s’agit de répondre aux recommandations de la HAS. C’est ainsi que le résume Anne :
De toutes façons ils ont besoin de moi, ils comptent sur moi, ils m’ont toujours fait appel, ils m’ont toujours demandé ce que j’en pensais.
[Anne, 64 ans, médecin, obésologue depuis 20 ans]
Le cahier des charges qui encadre la labellisation gouvernementale lui attribue une supériorité légitime dans l’agencement de l’activité médicale. Celle-ci est renforcée par son statut émérite qui lui confère un pouvoir symbolique sans conteste dont elle use à la fois dans l’espace de négociation (« Surtout pour qu’on opère pas n’importe qui ! ») mais aussi dans la présentation de soi (« De toutes façons ils ont besoin de moi. »). Pour tenter de comprendre pourquoi, finalement elle laisse passer neuf dossiers sur dix alors qu’elle est là « pour faire barrage », il est nécessaire de reconsidérer conjointement les représentations qu’elle a de sa carrière (« toujours être la première ») et les effets que produisent une prise en charge incertaine sur son identité professionnelle. C’est à l’intersection de ces deux éléments que l’activité chirurgicale semble devenir un moyen indispensable à la validation de son engagement dans l’ « obésologie ». La chirurgie garantit quasiment systématiquement une perte de poids massive, sa difficulté est la pérennité de l’amaigrissement. De nombreux experts s’accordent pour expliquer ces reprises de poids par un désengagement des patients dans la maîtrise de soi. C’est sur ce constat que la nécessité d’améliorer l’éducation préopératoire s’impose, tout en donnant à Anne l’occasion de continuer la compétition pour accéder à la première place : coordonner le service qui prépare le mieux les patients à être opérés par les chirurgiens qui jouissent pour l’un d’une notoriété médiatique, pour l’autre d’une légitimité scientifique puisqu’il a « innové la bipartition1 ». Ainsi la validation de chaque dossier est une reconnaissance supplémentaire de sa performance à manager une équipe, à coordonner une prise en charge réputée difficile. Gratification en trois dimensions puisque lors des RCP le chirurgien congratule ses résultats (« c’est du beau boulot ! T’as bien drivé tes filles ! Ils sont tous prêts ! ») ; de retour dans son service, elle partage chaque succès avec les soignantes de son équipe ce qui renforce simultanément son leadership et la motivation de « ses filles » à continuer de croire « qu’on peut faire toujours plus ! » ; au-delà des frontières de l’institution, son prestige clinique fructifie puisque de nombreuses équipes médicales la contactent pour visiter son unité de soin, découvrir ses recettes2.
Dans l’espace de négociations que représentent les RCP, ces alliances entre le chirurgien et la médecin peuvent toutefois se voir opposer l’avis de la psychiatre qui, elle, engage sa responsabilité sur sa capacité à déceler d’éventuels troubles psychiques latents que la perte de poids risquerait de mettre en exergue :
• Soit parce que la rapidité de la transformation de soi peut créer une rupture entre cognition et image corporelle entraînant ainsi des troubles identitaires majeurs.
• Soit parce que l’amaigrissement peut faire ressurgir des évènements traumatiques jusque-là dissimulés par le psychisme (la surcharge pondérale jouant le rôle d’une carapace protectrice) provoquant des comportements suicidaires.
• Soit parce que le court-circuit de l’appareil digestif peut contraindre les comportements addictifs à se déplacer de l’alimentation vers d’autres substances finalement plus dangereuses pour la santé (drogue et alcool).
Dans les trois cas, ces effets secondaires de la chirurgie bariatrique sont à éviter à tout prix. Chirurgien et médecin-nutritionniste se rallient à ce point de vue. Le premier en fait d’ailleurs une vigilance qu’il exprime systématiquement lorsqu’il est convié à exposer le traitement chirurgical au cours de réunions organisées par les associations de patients. Après le risque opératoire en lui-même, c’est la seconde raison qu’il met en avant pour justifier le refus d’un dossier. Sa collègue, elle (convaincue que l’obésité est le symptôme d’un dysfonctionnement psychique), considère que le traitement du poids ne peut se faire qu’après celui du psyché. Si cette convention valorise, à son tour, le rôle de la psychiatre, l’entretien avec Anne permet de mettre en lumière certains des mécanismes qui contribuent à sa rupture. Elle-même en possession d’un DU de psychiatrie psychanalytique et d’une expérience dans le secteur psychiatrique, où elle a monté « le service pour tous les troubles du comportement alimentaire », c’est avant tout sur la manière d’user du mandat de thérapeute qu’elle s’oppose à sa collègue :
Elle est vraiment plus TCC, c’est-à-dire les thérapies comportementales alors que moi je suis beaucoup plus lacanienne, je suis beaucoup plus psychanalyste ! [Anne, 64 ans, médecin, obésologue depuis 20 ans]
Approches psychanalytique et cognitivo-comportementale sont deux théories qui, classiquement, divisent le territoire de la psychothérapie. Au gré des évolutions culturelles et scientifiques, mais aussi des stratégies développées pour conquérir le marché, le déséquilibre est permanent donnant tour à tour l’avantage à la complémentarité des deux approches ou, plus radicalement, à l’une au détriment de l’autre. Lorsque ces chaînes de coopération se brisent, elles participent à la reconnaissance ou au discrédit des acteurs qui incarnent l’un ou l’autre des deux courants. C’est ce qui se joue dans l’espace des RCP où tout en interagissant pour une décision commune qui saura valoriser la réputation de l’institution, chacune des deux professionnelles oeuvre à la consécration de sa propre expertise. La rivalité pourrait paraître équilibrée puisqu’elle confronte celle qui possède le titre de psychiatre et celle qui jouit de son statut émérite. Dans les faits, pour la médecin (qui a incorporé l’hégémonie du capital scolaire) il s’agit d’inverser un rapport de domination qu’elle estime symboliquement à son désavantage puisque dans la hiérarchie des diplômes de psychiatrie son DU1 est inférieur au doctorat de sa collègue. Inscrite dans un processus de revanche sociale, ses oppositions à la psychiatre ne sont pas la simple concrétisation d’antagonismes conceptuels, mais l’expression d’une double revendication. Non seulement, elle s’oppose à celle qui « qui veut tout commander et qui commande pas toujours de bon aloi », mais elle fait valoir sa pratique d’une médecine financièrement désintéressée puisqu’elle est salariée et se dévoue à l’ « obésologie » au-delà de l’âge légal de la retraite, pendant que sa collègue tire financièrement profit de son statut de libérale sans se consacrer pleinement à la patientèle obèse puisqu’elle partage son temps de travail entre le service chirurgical et son cabinet privé.

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Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE
I – La corpulence des populations, objet d’une croisade morale.
1.1 La construction d’une pathologie médicale : le produit d’une activité de soins segmentée.
1.2 La construction d’un problème de santé publique : le produit de rapports de force.
1.3 La construction d’un sujet médiatique : le produit de luttes définitionnelles.
II – Construction de l’objet : ce que révèle l’ « obésologie » de la société.
2.1 D’une sociologie des classes populaires à une sociologie de l’action publique : la discrétion de la relation entre stigmatisés
2.2 De l’ombre à la mise en lumière : l’approche monographique comme contribution au débat théorique.
2.3 Ethnographier un terrain sous contrôle.
2.4 La question du rapport à l’objet : une question de rapport à la norme ?
III – Matériaux empiriques
3.1 Entretiens semi-directifs : variations de points de vue sur la rencontre de l’offre et de la demande.
3.1.a) Entretiens avec les patients : discours rétrospectifs sur les trajectoires sociales et médicales.
3.1.b) Entretiens avec les professionnels : discours rétrospectifs sur les carrières Pofessionnelles
3.2 Observations directes : les pratiques en action.
3.2.a) Objectiver la place des associations de patients dans le dispositif.
3.2.b) Vérifier la nature des relations entre « obésologues » et patients obèses.
3.3 Le traitement de documents : sortir de la dualité « obésologues » / patients obèses
3.3.a) Dresser le portrait des patients par le traitement statistique.
3.3.b) Confronter les définitions expertes de la prise en charge par les archives administratives
3.3.c) Vérifier la définition publique et locale du problème et de son traitement par les archives médiatiques.
IV – Organisation de la démonstration.
PREMIERE PARTIE : Entre espoirs et déceptions. Comment devient-on « obésologue » ?
CHAPITRE 1 : Fonctions sociales des assignations de genre et de classe dans la fabrique de l’espoir
I – La blouse blanche au féminin : une expression « naturelle » du care ?
1.1 Blouse blanche et conformité aux normes de genre.
1.1.a) Le genre des disciplines.
1.1.b) Éducation thérapeutique et division sexuée de l’activité de soin.
1.1.c) Obésité : une pathologie attentatoire de la définition sociale de la féminité.
1.2 Blouse blanche et subversions du genre féminin.
II – Le défi d’un traitement « hors normes », une stratégie pour se déplacer dans l’espace sanitaire?
2.1 Des capitaux à faire fructifier.
2.1.a) « Quand on veut, on peut » : « obésologie » et mobilité sociale ascendante.
2.1.b) La « bonne volonté culturelle », « matrice de la socialisation professionnelle ».
2.1.c) « Capitaliser l’héritage » : usages distinctifs du mandat d’ « obésologue ».
2.2 Faire corps avec la culture légitime.
Conclusion du chapitre 1
CHAPITRE 2 : Jeux de pouvoir autour de la définition du bon traitement.
I – Travail d’équipe et enjeux de reconnaissance disciplinaire.
1.1 Jeux de pouvoirs dans un espace segmenté.
1.1.a) Négociations de l’agencement des activités médicales.
1.1.b) Négociations de l’agencement des activités paramédicales.
1.2 Jeux de dominations dans un espace hiérarchisé.
II – Travail en réseau et enjeux de reconnaissance institutionnelle.
2.1 Processus de construction de certitudes pratiques dans un contexte incertain.
2.2 Faire équipe : le jeu des identification réciproques.
2.3 De l’injonction à faire oeuvre commune aux processus d’unions parcellaires
Conclusion du chapitre 2
Conclusion de la première partie
DEUXIEME PARTIE : Maîtrise et transformation de soi. Comment devient-on patient obèse ?
CHAPITRE 3 : Variations d’expériences de la stigmatisation corporelle.
I – Constructions plurielles de corps hors normes : entre continuités et ruptures biographiques.
1.1 Expériences d’un corps gros dès l’enfance : quand la stigmatisation façonne les identités.
1.2 Prises de poids tardives : expériences de « déplacés » corporels.
1.3 Stigmatisations médicales de l’obésité : quand le corps médical avalise l’anormalité.
1.4 Fabrications médicales de l’obésité : quand se soigner fait grossir.
II – Quand vouloir maigrir fait grossir : un ethos du contrôle trahit par une hexis corporelle
2.1 Faire un régime amaigrissant : raisons plurielles du gouvernement de soi.
2.2 Ne pas maigrir : effets pluriels de l’échec.
Conclusion du chapitre 3
CHAPITRE 4 : Conséquences pratiques des représentations dans la construction des « carrières obèses ».
I – Le genre des « carrières obèses ».
1.1 Une médicalisation des corpulences symptomatique du genre.
1.2 Quand le genre pèse sur le recrutement des patients.
II – L’âge de faire carrière.
2.1 Maigrir avant 45 ans : un moyen de se conformer aux rôles sociaux ?
2.2 Maigrir après 45 ans : un moyen de rentabiliser de nouvelles disponibilités biographiques ?
Conclusion du chapitre 4
Conclusion de la deuxième partie
TROISIEME PARTIE : L’épreuve du manque de résultats. Être ou ne pas être « obésologue » ?
CHAPITRE 5 : Stratégies professionnelles pour contenir le désordre.
I – Ce que fait l’absence de guérison à la relation thérapeutique.
1.1 Transformation des objectifs de la prise en charge : usages paradoxaux du poids.
1.2 Cultiver le contrôle ou le plaisir : deux manières de comprendre les pratiques « obésogéniques».
1.3 Quand la médicalisation de l’obésité sépare corps biologique et corps social : refus du souci d’esthétisation.
II – Négociations d’un traitement peu probant avec les autres segments de l’activité médicale.
2.1 Médecine de second recours et enjeux de captation de patientèle.
2.2 Quand la rationalisation de l’activité de soin devient une ficelle du métier.
2.3 Du monopole de l’expertise au partage du discrédit, quelle place pour les associations de patients ?
Conclusion du chapitre 5
CHAPITRE 6 : Entre contraintes et possibles : stratégies d’ajustements des carrières.
I – Partage d’expertises et recompositions des identités corporatistes.
1.1 L’expérience : une compétence naturalisée.
1.2 La probité : un outil de légitimation.
1.3 L’empathie : un outil de distinction.
II – Les carrières à l’épreuve de l’ « obésologie ».
2.1 Protection : stratégies différenciées pour demeurer « obésologue ».
2.1.a) L’éducation thérapeutique des patients obèses : un mandat parmi d’autres pour valoriser les professions.
2.1.b) L’ « obésologie » comme seule voie de salut possible.
2.2 Une blouse blanche à défendre : un sentiment au croisement de la morale et des raisons pratiques.
2.3 Un travail paramédical qui ne fait plus recette : rejets de la moralité du secteur sanitaire.
Conclusion du chapitre 6
Conclusion de la troisième partie
CONCLUSION GÉNÉRALE
1. La croyance et ses effets.
2. L’ordre négocié.
3. Acter la construction de la chronicité de l’obésité « au féminin ».
4. Prolonger la thèse
BIBLIOGRAPHIE GENERALE
TABLE DES SIGLES ET ACRONYMES
ANNEXES
Méthodologie
Annexe M1 : Corpus de sites internet
Annexe M2 : Liste des entretiens
Annexe M3 : Guides d’entretiens
M3.1 : Entretiens professionnels
M3.2 : Entretiens patients
M3.3 Entretiens membres bureaux associatifs
Compléments
Annexe C1 : IMC : Histoire d’un indice, outil de l’ordre social.
Annexe C2 : Techniques de chirurgie bariatrique.
Annexe C3 : Processus de sanitarisation d’un problème social.
Annexe C4 : Carte des CSO.
Annexe C5 : Feuille de route « prise en charge l’obésité 2019-2022 ».
Annexe C6 : Grilles de diagnostic éducatif
Annexe C7 : Sémantique de l’approche bio-psycho-sensorielle.
Annexe C8 : Organisation des groupes professionnels de l’ « obésologie »

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