Depuis le début du siècle, la consommation énergétique mondiale est en très forte croissance dans toutes les régions du monde. Il semble que tendanciellement, les consommations d’énergie vont continuer à augmenter, sous l’effet de la croissance économique d’une part, et de l’augmentation de la consommation d’électricité par habitant d’autre part, quels que soient les cas de figures envisagés. On parle périodiquement de diverses solutions techniques permettant de « continuer à vivre comme maintenant » sans que cela n’aggrave nos émissions de gaz à effet de serre, en attendant tranquillement que l’efficacité énergétique permette de diminuer les émissions. Mais il est important de savoir que l’on ne peut pas filtrer l’atmosphère pour en retirer le gaz déjà émis. La technique ne peut donc rien sur ce plan, et ne nous évitera pas un réchauffement programmé et inévitable d’au moins 1°C en un siècle. Souvent, la révolution des énergies renouvelables est avancée comme un dénouement à tous nos problèmes de production d’énergie électrique. Mais il serait plus raisonnable de voir ces nouvelles solutions techniques comme un simple frein au réchauffement climatique à condition que notre consommation énergétique ne continue pas d’augmenter exponentiellement. Cela éviterait ainsi de reproduire les mêmes erreurs du passé en pensant à des solutions « miracles » qui seraient inépuisables et sans impact sur notre mode vie ou sur l’environnement.
Presque toutes les énergies renouvelables sont des dérivées de l’énergie solaire : le vent, le rayonnement solaire, la force de l’eau sont des produits directs ou indirects de l’activité solaire. Seule la géothermie échappe à cet inventaire. Le Soleil envoie chaque année à la surface de la Terre à peu près 10 000 fois plus d’énergie que la planète en consomme. Il est donc légitime d’essayer d’en tirer profit. L’énergie photovoltaïque, basée sur la conversion du rayonnement électromagnétique solaire en électricité, représente l’une des ressources énergétiques renouvelables à part entière. Même si cette ressource est maintenant de mieux en mieux reconnue en tant que source potentielle d’énergie, cela n’a pas été facile face aux nombreux préjugés existants sur ce sujet. On a reproché par exemple à l’énergie solaire d’être intermittente (jour, nuit, saison), de ne pas être fiable et de dépenser plus d’énergie pour la conception d’un panneau solaire qu’il ne peut en fournir durant toute sa durée de vie. Ces affirmations sont en passe d’être aujourd’hui dénigrées par les progrès techniques accomplis sur les cellules photoélectriques mais également sur le traitement de l’énergie. Actuellement, la plupart des panneaux photovoltaïques produisent largement plus d’énergie au cours de leur vie que l’énergie nécessaire à leur production. On a vu apparaître ces dernières années la notion de remboursement énergétique noté EPT (Energy Payback Time). Selon les technologies et les lieux de production, l’EPT s’étend de 2 à 4 ans pour des panneaux ayant une durée de vie de 15 à 25 ans. Les progrès de fabrication ont été considérables ces dernières années permettant d’avoir des fonctionnements de générateurs photovoltaïques garantis audelà de 25 ans avec en plus des coûts de fabrication qui tendent à baisser quand on ramène le prix de l’installation au prix du Watt Crête.
Développement photovoltaïque
Dans le contexte global d’améliorations des performances d’un système photovoltaïque (PV), il nous a semblé intéressant de commencer cette thèse par un bilan, par filière technologique, des principaux axes de développement photovoltaïques afin de mieux appréhender les potentialités de chacune. Ainsi, en comprenant mieux les fondamentaux, cela nous a permis de comprendre les propriétés de conversion de chaque solution technologique mais aussi ses limites. Nous proposons de partager cette vision globale des avancées technologiques avec le lecteur afin de pouvoir anticiper les besoins futurs et ainsi que chacun puisse se forger son propre avis sur le développement photovoltaïque du futur.
La technologie photovoltaïque la plus utilisée depuis la création des premières cellules correspond à la filière silicium de type cristallin qui représente actuellement 90% de la production mondiale pour les applications terrestres. Ceci peut s’expliquer par le fait que l’industrie photovoltaïque profite régulièrement du développement de l’industrie des semiconducteurs qui est capable de fournir une matière première d’excellente qualité pour les panneaux solaires ainsi que des processus de fabrication totalement maitrisés. Selon la qualité du silicium, nous rappelons les performances. Nous présentons ensuite le principe de fabrication des cellules multi-jonctions à haut rendement dont le développement a été motivé en priorité par les applications spatiales où les performances de la cellule priment sur les coûts de fabrication. Nous parlons ensuite d’une des nouvelles générations de cellules solaires, qui utilise de nouveaux matériaux de type organique. Ces nouveaux composés, en particulier les polymères, pourraient révolutionner le marché du PV grâce à leur faible coût de fabrication et leur facilité d’utilisation (flexibilité, légèreté). La recherche dans ce domaine est extrêmement active depuis plusieurs années et les avancées sont rapides. Nous abordons enfin le large domaine des cellules PV dites couche mince (« Thin-Film ») qui constitue ce que certains appellent les cellules de seconde génération car elles font historiquement suite aux cellules en silicium cristallin. Leur principal atout vient de la faible quantité de matériaux nécessaire à la fabrication d’une cellule comparativement aux cellules classiques (première génération). Les cellules couche mince les plus développées utilisent comme matériau de base le silicium amorphe, le diSéléniure de Cuivre Indium Galium (CIGS), le Tellurure de Cadmium CdTe) et on trouve de plus en plus de cellules multi-jonction améliorant d’autant les performances de cette filière.
La conversion photovoltaïque
Principe de la conversion Photoélectrique
Le rayonnement solaire est constitué de photons dont la longueur d’onde s’étend de l’ultraviolet (0.2 µm) à l’infrarouge lointain (2.5 µm). On utilise la notion AM pour Air Mass afin de caractériser le spectre solaire en terme d’énergie émise [1, 2]. L’énergie totale transportée par le rayonnement solaire sur une distance soleil-terre est de l’ordre de 1350W/m² (AM0) dans l’espace hors atmosphère terrestre . Lorsque le rayonnement solaire traverse l’atmosphère, il subit une atténuation et une modification de son spectre, à la suite de phénomènes d’absorption et de diffusion dans les gaz, l’eau et les poussières. Ainsi, la couche d’ozone absorbe une partie du spectre lumineux provenant du soleil, et en particulier une partie des ultraviolets dangereux pour la santé. Le rayonnement solaire direct reçu au niveau du sol (à 90° d’inclinaison) atteint 1000 W/m² du fait de l’absorption dans l’atmosphère (AM1). Cette valeur change en fonction de l’inclinaison des rayons lumineux par rapport au sol. Plus l’angle de pénétration θ est faible, plus l’épaisseur atmosphérique que les rayons auront à traverser sera grande, d’où une perte d’énergie conséquente. Par exemple, l’énergie directe transportée par le rayonnement solaire atteignant le sol avec un angle de 48° avoisine les 833 W/m² (AM1.5).
Pour connaître le rayonnement global reçu au sol, il faut ajouter à ce dernier le rayonnement diffus. Le rayonnement diffus concerne tout le rayonnement dont la trajectoire entre le soleil et le point d’observation n’est pas géométriquement rectiligne et qui est dispersé ou réfléchi par l’atmosphère ou bien le sol. En considérant ceci, on obtient une référence du spectre global notée AM1.5 avec une puissance de 1000W/m² .
Le scientifique français, Edmond Becquerel, fut le premier à découvrir en 1839 l’effet photoélectrique [3]. Il a trouvé que certains matériaux pouvaient produire une petite quantité de courant sous l’effet de la lumière. Par la suite, Albert Einstein a découvert, en travaillant sur l’effet photoélectrique, que la lumière n’avait pas qu’un caractère ondulatoire, mais que son énergie était portée par des particules, les photons. L’énergie d’un photon est donnée par la relation :
Ε = h ⋅ c / λ (2-1)
où h est la constante de Planck, c la vitesse de la lumière et λ sa longueur d’onde. Ainsi, plus la longueur d’onde est courte, plus l’énergie du photon est grande. Cette découverte value à Albert Einstein le prix Nobel en 1905.
La conversion photovoltaïque aujourd’hui largement utilisée peut être simplement définie comme la transformation de l’énergie des photons en énergie électrique grâce au processus d’absorption de la lumière par la matière. Lorsqu’un photon est absorbé par le matériau, il passe une partie de son énergie par collision à un électron l’arrachant littéralement de la matière. Ce dernier étant précédemment à un niveau d’énergie inférieur où il était dans un état stable passe alors vers un niveau d’énergie supérieur, créant un déséquilibre électrique au sein de la matière se traduisant par une paire électron-trou, de même énergie électrique. Généralement, la paire électron-trou revient rapidement à l’équilibre en transformant son énergie électrique en énergie thermique. De même, toute l’énergie des photons n’arrivant pas à se transformer en électricité est absorbée par le matériau sous forme thermique. Le matériau constituant les capteurs PV a alors sa température interne qui augmente proportionnellement à l’énergie solaire reçue. Le taux de conversion photon-électron est faible car un certain nombre de conditions doivent être réuni pour que ce phénomène se produise. L’effet thermique est donc majoritaire sur la plupart des capteurs détériorant d’autant plus les performances de ces derniers .
La plupart des cellules photovoltaïques utilisent des semi-conducteurs pour récolter les paires électron-trou créées par la collision des photons dans le matériau. Cependant, selon le matériau utilisé, le nombre de photons utiles (qui peuvent être absorbés) diffère. En effet, chaque matériau possède son propre gap énergétique (bande d’énergie interdite). Tout photon possédant une énergie inférieure à ce gap et arrivant à la surface du matériau n’aura pas assez d’énergie pour arracher un électron au matériau même s’il entre en collision avec un. Le courant produit par un capteur PV est donc beaucoup plus faible que la quantité de photons arrivant sur le matériau car plusieurs conditions doivent être réunies pour que réellement l’énergie d’un photon se traduise en courant (compatibilité du matériau avec les longueurs d’ondes du spectre solaire, énergie des photons à leur arrivée sur le matériau, probabilité de rencontre d’un photon avec un électron, incidence du rayonnement, épaisseur du matériau, …). De plus, un autre compromis doit être fait par le concepteur de capteurs PV. Si le gap du matériau est grand, peu de photons auront assez d’énergie pour créer du courant mais aux bornes de la cellule, la tension en circuit ouvert sera grande et facilitera d’autant plus l’exploitation de l’énergie électrique. A l’inverse, un matériau avec un faible gap absorbe plus de photons mais présente une tension plus faible à ses bornes. Ce compromis a été quantifié par Shockley et Quessier [5]. Ainsi par exemple, avec un seul matériau, le rendement de conversion maximal théorique est de 31% pour un gap énergétique d’environ 1.4eV. Par comparaison, le gap du silicium qui est aujourd’hui le matériau le plus utilisé pour constituer des cellules dans les capteurs PV terrestres, n’est pas très loin de cet optimum avec 1.12eV. Ainsi, le maximum théorique pour une simple jonction Si est d’environ 29%.
La différence de potentiel présente aux bornes d’une jonction PN soumise à un éclairement est également mesurable entre les bornes de la cellule PV. Typiquement, la tension maximale d’une cellule (PN) est d’environ 0.5 à 0.8V. Elle peut être directement mesurée à ses bornes sans charge (circuit ouvert). Cette tension est nommée tension de circuit ouvert (Voc). Lorsque les bornes d’une cellule sont court-circuitées, on peut mesurer le courant maximal produit par la cellule PV et on le nomme communément courant de courtcircuit (Icc). Ces valeurs peuvent changer fortement en fonction du matériau utilisé, de la température et de l’ensoleillement.
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Table des matières
1. INTRODUCTION GÉNÉRALE
2. DÉVELOPPEMENT PHOTOVOLTAÏQUE, PERSPECTIVES ET R&D
2.1. Introduction
2.2. La conversion photovoltaïque
2.2.1. Principe de la conversion Photoélectrique
2.2.2. Modélisation électrique d’une cellule photovoltaïque
2.3. Les différentes filières photovoltaïques
2.3.1. La filière à base de Silicium Cristallin
2.3.2. Les cellules multi-jonctions à haut rendement
2.3.3. Nouvelles technologies photovoltaïques
2.3.4. Technologie couche-mince
2.4. Projet de recherche ATOS
2.5. Conclusion
3. LES DIFFÉRENTES CHAÎNES DE CONVERSION PHOTOVOLTAÏQUE ET LEURS ÉVOLUTIONS
3.1. Introduction
3.2. Architecture classique d’un générateur photovoltaïque
3.3. Définitions des rendements associés à la chaîne de conversion
3.4. La connexion directe GPV-charge comme mode de transfert de puissance
3.5. La connexion GPV-charge via un étage d’adaptation continu-continu
3.5.1. Introduction
3.5.2. Principe de fonctionnement d’un étage d’adaptation DC-DC
3.5.3. Les avancées
3.5.4. Intérêts de la discrétisation
3.6. La connexion GPV-charge via un étage d’adaptation continu-alternatif
3.6.1. Introduction
3.6.2. L’onduleur central
3.6.3. Les onduleurs strings
3.6.4. Les onduleurs intégrés aux panneaux PV
3.6.5. La conversion multi-string
3.7. Étude de nouvelles architectures d’association pour cellule tandem dans le cadre ATOS
3.8. Conclusion
4. DÉVELOPPEMENT D’ARCHITECTURES DISTRIBUÉES DÉDIÉES AU PHOTOVOLTAÏQUE
4.1. Introduction
4.2. Les micro-convertisseurs comme étages d’adaptation
4.3. Étude d’un micro-convertisseur BUCK utilisé comme étage d’adaptation
4.3.1. Étude d’un micro-convertisseur BOOST utilisé comme étage d’adaptation
4.3.2. Synthèse et bilan de puissance
4.4. Amélioration de la commande MPPT
4.4.1. Principe de recherche du Point de Puissance Maximum du LAAS
4.4.2. Numérisation de la commande MPPT
4.4.3. Développement d’une MPPT Numérique avec MLI interne
4.4.4. Autre optimisation de la commande MPPT Semi-Numérique
4.4.5. Synthèse de l’évolution de la commande MPPT
4.5. Validations expérimentales
4.5.1. Réalisation et validations expérimentales d’un micro-convertisseur Buck
4.5.2. Réalisation et validations expérimentales d’un micro-convertisseur Boost
4.5.3. Synthèse des validations expérimentales
4.6. Conclusion
5. ÉTUDES COMPARATIVES DES DIFFÉRENTES MICROSTRUCTURES D’ADAPTATION
6. CONCLUSION