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Histoire de l’évolution de l’agriculture jusqu’à la période actuelle :
Avant la découverte de l’agriculture, l’homme vivait en tant que chasseurs-cueilleurs, menant une vie de nomade : se déplaçant d’un endroit à un autre pour sa pitance. Mais au fur et à mesure que les changements climatiques se produisent, tel le retrait des glaces, les espèces végétales se développent et les surfaces arables augmentent, une situation rendant le déplacement de moins en moins nécessaire, permettant l’installation d’une population dans un endroit fixe. Ainsi est donc apparue l’agriculture il y a environ -10000 ans dans la vallée de l’Indus et en Chine le long de la rivière Yangtsé (Environmental Science, 2019).
A son stade du néolithique, l’agriculture n’utilisait que des outils en pierre pour exploiter le milieu naturel. Au fil du temps, les outils et les techniques utilisés par cette activité ont évolué suivant les grands problèmes à l’encontre de son développement.
Le premier de ces problèmes a entraîné le développement de nouvelles pratiques agricoles et l’utilisation de nouveaux outils. (Mazoyer 1997). Les outils en pierre des agriculteurs ne permettaient pas de défricher certaines régions comme les zones herbacées d’Afrique et d’Asie où se développe l’élevage des herbivores comme le boeuf, les chameaux, etc. Le déboisement provoqué par les cultures sur abattis-brûlis fut à l’origine des nouvelles conditions écologiques différentes selon les régions (op cit). Les agriculteurs se trouvaient confrontée à un double problème de renouvellement de la fertilité des terres déjà cultivées, suite à l’abattage et à la mise au feu des restes des arbres, et à la mise en culture de terrains déboisés. En réponse à ces bouleversements des conditions écologiques, des cultures adaptées au milieu ont surgies : les agricultures hydrauliques dans les régions sèches comme le Proche-Orient saharien et arabo-persique, les rizicultures hydrauliques des régions tropicales humides de l’Asie, les cultures avec jachères1 en Europe (op cit). En dépit du développement de ces nouvelles techniques agricoles, en particulier en Europe, la production agricole ne suffisait pas à nourrir la population. Par conséquent, les disettes et les famines s’ensuivirent conduisant les populations aux migrations pour la recherche de nouvelles terres à mettre en culture et des guerres de pillage des villes avoisinantes. Autour de -5500, le besoin de mains d’oeuvre agricoles spécialisées se faisaient ressentir dans les civilisations Gréco-romaines et au Moyen-Orient les conduisant à développer le système d’irrigation et la spécialisation de cette main d’oeuvre, elles se sont donc penchées sur le développement des technologies agricoles, et les premières lois écrites furent élaborées. L’agriculture est devenue ainsi un vecteur de civilisation incluant la religion, les comportements sociaux et la législation. L’Egypte Antique est un exemple de ces sociétes anciennes ayant prospérer grâce à l’agriculture.
Le Moyen-âge fut marqué par la « Révolution agricole arabe » au Moyen-Orient (Environmental Science 2019). En effet, ils continuaient à innover dans les industries agies agricoles dûes à la diversité de leurs topographies, les cultures pratiquées dans la vallée de l’Indus et dans le Moyen-Orient ont été tant désirées par les Européens qu’une relation commerciale fut développée entre les 2 régions. En Europe, le XIe siècle est marqué par le début du féodalisme. A cette époque, l’Eglise détenait la majorité des terres, exerçait le commerce, éduquait la population… Bref, elle détenait un 1 La jachère est une surface herbeuse, soumise au pâturage puis retournée avec les bêches et la charrue pour être à nouveau cultivée. En effet, les agriculteurs ne possédaient pas de faucilles pour couper l’herbe et ne pouvaient donc obtenir plus de foin pour les animaux qui vont y paître pendant la mauvaise saison pouvoir temporel et spirituel (op cit).L’agriculture était donc reliée au système féodal, le développement de l’hybridation et la pratique de la jachère sont autant d’étapes franchies par l’agriculture en Europe.
L’agriculture moderne a commencé avec la « Révolution Agricole Britannique » qui, pendant une courte période, des progrès remarquables ont été accomplis dans l’agriculture : des procédés plus efficaces ; rendement élevé des cultures, l’instauration de l ’ « enclosure act» sur la gestion des terres, les hybridations sélectives à l’échelle industrielle qui augmente la taille de la culture et l’utilisation des espèces améliorées. L’élevage s’était aussi amélioré avec des excédents considérables, plus que dans le passé. Ce phénomène a conduit à la Révolution Industrielle et au développement urbain. Il en résulte que la productivité agricole, grâce au progrès technique, augmente et libérant ainsi des mains d’oeuvre pour l’industrie. L’abrogation des Corn Laws indique le début d’une économie alimentaire globale. La théorie de Darwin introduit l’agriculture dans son stade moderne, basée sur la compréhension des mécanismes de développement des cultures. (Op.cit.)
Dans les années de guerre, les forces militaires se sont lancées dans l’agriculture intensive. Dans les années 70, la production globale de la céréale a quadruplé. Le développement du nitrate a permis la production d’une plus grande quantité de nourritures à bas prix.
Actuellement, nous sommes dans la « période écologique » où le terme « durabilité » est d’actualité. Elle consiste à associer la recherche de procédés permettant d’accroitre la productivité agricole dans un souci de préserver les ressources naturelles pour les générations futures. (Op cit)
Les liens théoriques entre le secteur agricole et le développement économique
Dans cette section, nous allons mettre en exergue les domaines du développement économique concernant l’agriculture à partir des théories classiques et libérales et énoncer les différentes politiques agricoles appliquées à Madagascar depuis l’indépendance en vue d’en faire un constat sur les étapes déjà franchies en matière de développement par l’agriculture.
Les physiocrates considèrent l’agriculture comme l’unique source de richesse, la théorie dualiste de Lewis nous indique que l’agriculture est en possession d’un excédent de mains d’oeuvre utiles au reste de l’économie, les étapes de la croissance de Rostow affirme le rôle prépondérant du secteur agricole dans le processus de développement linéaire d’un pays et dans le cas pratique, la Banque mondiale a publié dans son Rapport sur le développement en 2008 l’importance de la croissance agricole pour la croissance économique des pays à faibles revenus.
Nous allons développer successivement ses points de vue tout en dégageant le rôle de l’agriculture dans le développement économique.
Les étapes de la croissance de Rostow :
Rostow, dans son ouvrage Les étapes de la croissance (1960), décrit un trajet linéaire par lequel doit passer toute économie dans sa marche vers le développement. Il cherche à donner son point de vue sur l’histoire de la croissance économique des pays développés qui sont passés par cette trajectoire, constituée par les cinq stades d’évolution économique suivant : la société traditionnelle, les conditions préalables au démarrage, le démarrage, la maturité et la société de consommation de masse (Salles P, Wolff J 1970).
La société traditionnelle est caractérisée par « une société stationnaire agricole » du fait que sa productivité est limitée par un maximum que l’on ne peut dépasser. Elle est qualifiée de société prénewtonnienne du fait de l’attitude de la population dont les valeurs sont fatalistes et la structure sociale rigide, le pouvoir politique est détenu entre les mains des propriétaires fonciers.
Dans les conditions préalables au démarrage, une période au cours de laquelle se forment les conditions requises pour le démarrage de l’économie qui sont l’accumulation de capital et l’introduction du progrès technique dans l’agriculture. En effet, l’accumulation de capital est indispensable pour financer la construction des infrastructures nécessaires (routes, ports, canaux, etc.), effectuée par l’Etat ; ensuite, l’agriculture assume les rôles de fournisseur de la grande partie des épargnes mobilisées pour financer les investissements et de l’alimentation pour la population, de matières premières à l’industrie et sert aussi de débouché aux produits industriels d’où le besoin du progrès technique dans la production afin de pouvoir mener à bien ces rôles qui lui sont assignés.
Ces conditions étant remplies, l’économie peut ensuite entamer la phase du démarrage.
Ainsi, l’agriculture occupe le rôle moteur de la croissance économique selon les analyses de Rostow. Dans la section suivante, nous allons développer la capacité du secteur agricole à dégager du surplus de main d’oeuvre nécessaire au reste de l’économie.
Limites théoriques :
Afin de terminer cette partie sur les rôles théoriques de l’agriculture, nous allons déterminer brièvement les limites des théories étudiées ci-dessus. La théorie du surplus se limite aux économies fermées et ne considère donc pas la possibilité qu’il y ait échange entre pays. Pourtant, selon Ricardo (1817), dans sa théorie de l’avantage comparatif, l’échange est bénéfique pour tous. En effet, l’avantage comparatif consiste pour chaque pays de produire des biens dont le coût est relativement faible par rapport à sa production à l’étranger, puis d’échanger la partie non consommée de ces biens avec des biens dont le coût est relativement élevé et qui sont produits par l’étranger.(Mucchielli, Sollogoub 1980). Le marché agricole, par des caractéristiques qui lui sont propres, ont un fonctionnement différent des autres marchés de biens et services. Nous n’allons expliquer que deux de ces caractéristiques qui, la première concerne l’offre et la demande agricoles et la seconde l’impact de la combinaison des caractéristiques de la demande avec les aléas de la production.
D’abord, la production des biens agricoles s’écoule pendant une période entre la culture et la récolte, sans laquelle aucun bien ne peut être produit. Par exemple, la production du paddy prend en moyenne une durée de 3 à 4 mois. Ensuite , la demande en ces biens est rigide et ne dépend pas du prix que peuvent avoir ces biens sur le marché. Ainsi, la décision d’importer ou non dépend donc de la disponibilité de ces biens sur le territoire national et non pas de la variation du prix de ces biens sur le marché local en raison de l’existence de la demande à satisfaire.
En second lieu, la production agricole n’est pas à l’abri des catastrophes naturelles, en plus d’autres facteurs comme le non accès des paysans aux nouvelles techniques de production ou des engrais et semences contribuent à rendre cette production instable d’une période à l’autre. Ainsi, le prix de ces produits sur le marché local varie selon qu’on soit en période d’abondance ou de pénurie suivant la quantité disponible et la demande à satisfaire. Cette variation des prix agricoles a des répercussions graves sur les ménages agricoles. Ces derniers, pour la plupart, vendent leurs produits à bon marché lors de la récolte pour pouvoir payer leurs dettes et se trouvent confrontés à des situations pour lesquelles ils achètent ces produits agricoles au double voire triple de leurs prix de vente. Par conséquent, il y a un risque que le paysan réduise son objectif de production vu qu’il ne peut plus assurer une meilleure condition de production, l’entrainant dans un cercle vicieux de la pauvreté. (Dupaigre et al. 2008).
Afin de remédier à ses particularités du marché agricole, l’Etat doit intervenir et mettre en oeuvre des mesures qui consistent à protéger les paysans et les consommateurs, notamment, de la variation des prix. Ces mesures sont regroupées dans les politiques commerciales du gouvernement en place dont l’étude sort du cadre de ce travail.
Les rôles de la riziculture dans l’économie malgache :
Les malgaches ont une alimentation basée sur le riz. Pour preuve, le gouvernement malgache projette une une consommation individuelle annuelle moyenne de 118 kg, une quantité considérable en Afrique subsaharienne (MinAgri, 2017). Mis à part son rôle dans l’alimentation, il est aussi un produit symbolique de l’économie agricole et culturelle malgache. Le secteur rizicole est le premier secteur du pays en termes de PIB et d’emplois ; ensuite il constitue également un moyen de transmission des valeurs sociales et culturelles malgaches et par conséquent, un gage du pouvoir politique; et enfin, un enjeu pour l’environnement.
Nous allons développer brièvement ces rôles du riz dans la vie économique, culturelle, sociale et politique des Malgaches :
Comme premier secteur du pays, 12 % du PIB global national et 43% du PIB agricole14 proviennent du secteur rizicole (Dabat, 2000). 85 % de la population agricole soit près de 80 % de la population active totale y sont employées, 45 % des communes en perçoivent leurs revenus. En conséquence, les performances du secteur rizicole déterminent de manière significative le dynamisme du secteur agricole et de l’économie nationale. (Dabat, Pons et Razafimandimby, 2008)
Le riz détient un pouvoir particulier influençant les comportements et les motivations de la population voire même les dirigeants politiques :
C’est un vecteur de transmission des valeurs sociales et culturelles malgaches :
En effet, dans la littérature malgache, il existe des légendes et des mythes se portant sur l’origine divine du riz (Beaujard, 1981). Ensuite, lors les cérémonies décrivant les rapports sociaux, cette céréale assume également un rôle particulier. L’exemple du Santa-bary, le rite le plus connu auprès des Merinas qui célèbre les prémices, une cérémonie inhérente du « Hasina » qui est une force dangereuse dégagée par le riz susceptible d’être reçue par les puissants.
Puis, les dirigeants malgaches renforcent leur pouvoir à cette image de puissant recevant le « Hasina », conduisant le peuple à montrer du respect à son égard, lui témoignant le titre de « raiaman-dreny ». Enfin, les malgaches témoignant d’une grande préférence au riz par rapport à d’autres céréales, menacent le pouvoir lors des mesures politiques aux dépens du riz (le soja et le café lors du régime Tsiranana, la substitution du riz à d’autres produits vivriers lors du régime Ratsiraka). (Op.cit.)
La riziculture présente aussi des rapports avec l’environnement et le territoire comme la déforestation, l’érosion et la fertilité des sols ainsi que la gestion de l’eau et de l’espace rural et même urbain issues de la pratiques culturales.
Les rôles de la riziculture à Madagascar nous justifient l’adoption des différentes politiques agricoles orientée en partie par la riziculture, mises en oeuvre depuis l’indépendance du pays, la section suivante fait l’objet d’un développement rapide de ces politiques.
Les politiques rizicoles depuis 1960 :
Dans cette section, nous allons passer en revue les mesures politiques encadrant le secteur rizicole en vue de faire un constat sur le poids de ce secteur. Pour ce faire, nous allons adopter une approche historique qui consiste à visiter d’une manière générale les mesures appliquées dans ce secteur lors des Républiques qui se sont succédées à Madagascar.
Lors de la Première République (1960-1972) , le Bureau de Commercialisation et de Stabilisation du Riz (BCSR) fut instauré pour organiser la commercialisation du riz avec les petits négociants (Dabat et al 2005). Le BCSR s’occupe de la politique de prix , de l’octroi de crédit aux fermiers et des associations paysannes. De grands projet d’infrastructures furent mis en place dans les régions productrices de riz telles que le Lac Alaotra, Marovoay. En effet, un effort d’extension utilisant des intrants modernes (engrais, pesticides) et des matériels amélioré accompagnait ces projets : la politique agricole dans le cadre du plan quinquennal du gouvernement (Minten 2008). Dans la Deuxième République (1972-1991), le gouvernement socialiste a créé la Société d’Intérêt National pour les Produits Agricoles (SINPA), un établissement monopoliste paraétatique, ayant la responsabilité de faire la collecte, la transformation et la commercialisation du riz. Chaque Fokontany put profiter de la production agricole et contrôler les mouvements des produits à l’aide du système fiscal et des barrières économiques en place. Le prix alimentaire intérieur affichait un niveau très bas traduisant les subventions accordées par le gouvernement dans ce domaine. En 1983, la libéralisation interne commença, une période correspondant à la mise en oeuvre des Programme d’Ajustement Structurel (PAS). L’économie malgache est passée de l’interventionnisme d’Etat vers la libéralisation économique assurée par le marché. Avant que la filière ne fut totalement libéralisée, l’Etat accompagnait la libéralisation progressive de la filière. L’exemple du « riz fokontany » peut être évoqué à cet effet : le riz commercialisé par l’Etat est vendu à un prix inférieur à ceux pratiqués sur les marchés libres (1983-1988) afin de pallier la hausse du prix en période de soudure (elle est marquée par une hausse de prix et une pénurie en riz sur le mraché local). En 1986,l’Etat s’est retiré du commerce et des services relatifs à la filière riz tout en laissant le soin au marché (Daviron et al 2004) malgré l’existence d’un « stock tampon » afin de maintenir le prix du riz à un niveau soutenable, financé par les bailleurs de fonds par le biais du Crédit Agricole pour la Sécurité Alimentaire (CASA), abandonné en 1991 du fait de son coût élevé. Les premières mesures d’ajustement structurel avaient pour but d’encourager la production de paddy et se déroulent en 2 phases à savoir le relèvement forfaitaire haussant les prix aux producteurs ainsi que la libéralisation des prix et des circuits de commercialisation (Dabat et al 2005).
A partir des années 90, l’Etat a orienté ses politiques de prix en faveur des producteurs en appliquant des mesures sur les prix frontières pour mieux contrôler les prix alimentaires. Toutefois, la politique fiscale a varié en ce qui concerne le riz : allant de 30% en 1996 à 10% en 1997, 5% en 1999 pour reprendre les 30% en 2000. Une crise du riz en 2004 a conduit à réduire jusqu’à 0% le niveau du taxe à l’importation du riz en 2005.
La crise du riz en 2004 a été caractérisée par une explosion du prix du riz tant sur le marché international que local et une pénurie des approvisionnements résultant de l’effet conjugué des aléas climatiques et de la dépréciation de la monnaie malgache par rapport au dollar entre fin 2003 et la moitié de 2004. D’une part, les importateurs nationaux hésitaient à importer à cause de la non-perception de la gravité de la crise. D’autre part, le gouvernement malgache a importé et subventionné le prix du riz sur le marché en le vendant à 700 ariary le kg. Le 3riz gouvernemental » s’épuisait peu à peu et la situation aboutit en une pénurie du riz en Octobre 2004 et une hausse des prix du marché intérieurs. L’OdR (Observatoire du Riz) et la PCP-Riz (Plateforme de Conceration et de Pilotage sur la filière Riz) furent crées pour pallier à la défaillance de la structure en place et pour l’élaboration des politiques agricoles, notamment rizicoles. Des mesures comme le désengagement de l’Etat de l’entretien des principales zones d’irrigation ont été appliquées. Actuellement, l’intervient peu sur marchés rizicoles.
Minten (2008) considère le problème du secteur rizicole comme étant d’ordre institutionnel, marqué par la dispersion des interventions dans le développement rural et les politiques rizicoles entre les divers ministères. Pour y remédier, le gouvernement malgache a créé le PADR (Plan d’Action pour le Développement Rural) en 1999 dont les principaux objectifs sont les suivantes : Assurer une meilleure gestion du secteur rural à travers une réforme légale et institutionnelle Faire étendre et promouvoir la production agricole Assurer la sécurité alimentaire dans toutes les régions Développer l’infrastructure sociale pour assurer l’accès aux services sociaux.
Les recommandations du PADR ont été reprises dans le Document sur la Réduction de la Pauvreté (DSRP) et la Lettre de Politique de Développement Rural (LPDR) Cette période a été marquée par 2 politiques : l’interventionnisme du gouvernement à la soviétique sur la première décennie et le passage à la libéralisation de l’économie par le Programme d’Ajustement Structurel (PAS).
Nous tenons à remarquer que le DSRP fut élaboré par l’Etat malgache pour servir de cadre à ses politiques économiques afin de continuer à bénéficier du rééchelonnement du service de la dette, notamment par des stratégies de lutte contre lapauvreté (Annexe 3) (Robilliard AS, Gubert F,2010)
La Quatrième République (2009- …) reprenait les orientations stratégiques en matière de développement rural et donc de politique rizicole de la précédent République. L’Etat cherche à attéindre une production du riz s’élevant à 7 747 904 t en 2020 avec une consommation annuelle de 118kg/personne, le nombre d’habitant est estimé à 26 millions pour la même année.(Annexe 4)
La filière riz à Madagascar :
Cette section consiste à donner une idée sur la situation actuelle de la filière riz malgache En 2015, la production rizicole malgache s’élève à 3 408 000 t. La riziculture occupe les 55% des terres cultivées et 87% des exploitations agricoles produisent du riz. Les statistiques agricoles seront utilisées du fait de la non-disponibilité des statistiques sur le riz.
Selon les conditions pédoclimatiques, la localisation géographique et les pratiques culturales, on enregistre 3 types de riziculture :
La riziculture inondée et irriguée occupant 78,8% de l’ensemble de la superficie agricole (Recensement de l’Agriculture en 2004/2005).
La riziculture pluviale de plateau sur 8,4 % des exploitations agricoles.
La riziculture sur brûlis ou tavy dans les surfaces restantes soit 12,9 % des exploitations agricoles. Les régions productrices de riz sont les suivantes, de 2005 à 2014 : Alaotra Mangoro, et Vakinankaratra assurant chacune les 12 % de la production nationale ; ensuite, Sofia avec les 8 %, suivi de l’Analamanga, Itasy et Haute Matsiatra (7 % chacune) puis de Boeny (5 %). (Revue du MAEP, 2018).
Les productions proviennent essentiellement des grands greniers comme le Lac Alaotra, la plaine d’Ankaizina (Bealanana), la plaine de Marovoay, la plaine de Dabara, la plaine d’Andapa, et la plaine de Mangoky qui bénéficient de grands investissements pour les infrastructures de production tels les barrages, les stations de pompage, etc. (op cit).
Le paddy est transformé en riz (riz complet ou riz blanc) soit par pilonnage manuel, soit à l’aide des décortiqueuses ou dans les rizeries.
Les décortiqueuses pouvant traiter jusqu’à 1000 kg de paddy par heure se trouvent réparties dans tout le pays alors que les rizeries sont souvent localisées dans les régions productrices comme le Lac Alaotra (op cit).
Auparavant, le prix du riz a été contrôlé par l’Etat dans les années 60 et 70. Pui une libéralisation de la filière a eu lieu dans les années 80. Actuellement, c’est la rencontre de l’offre et de la demande qui détermine le prix du riz sur le marché. Le prix du riz est variable selon plusieurs paramètres qui sont la variété du riz, la saisonnalité, et des problèmes rencontrés par les producteurs en matière de commercialisation (état des routes, autoconsommation…).
Les caractéristiques de la filière :
Nous recensons dans les paragraphes qui suivent les caractères principaux de la filière rizicole à Madagascar.
Le revenu des ménages ruraux est essentiellement déterminé par le revenu issu de la production rizicole. Un ménage agricole malagasy perçoit un revenu agricole annuel moyen d’environ 978 000 Ar, ou mensuellement, un revenu de 81 500 Ar. Le riz génère les 41,9% de l’ensemble des revenus agricoles, un montant annuel moyen d’environ 410 000 Ar par ménage cultivateur, dans laquelle est inclue une forte part d’autoconsommation évaluée à 326 000 Ar/an par ménage cultivateur. En moyenne, la vente du riz revient au ménage à un montant de 143 000 Ar. (ENSOMD 2012).
En ce qui concerne la typologie des exploitations rizicoles, elles sont classées en 3 catégories : Exploitation de petite taille : 63 % Taille moyenne : 29 % Grande taille : 8 %.
Il existe 3 types de riziculteurs (UPDR, 2000), classés selon leur raisonnement : Les micro-producteurs avec stratégie rizicole de subsistance (34.4% des exploitations rizicoles) : on les retrouve dans le Nord et dans l’Est. Les moyens et conditions de productions à leurs dispositions sont très limités (foncier, capital, équipement, travail, accès au marché). Leur exploitation rizicole n’excède pas, en moyenne, 1 ha ; produisant entre 0,8 et 1,1 tonne de paddy, ne leur permettant pas subvenir à leur besoin de consommation. Les cultures sont donc diversifiées de manière à couvrir les besoins : des cultures de rente comme une autre source de revenu indispensable à l’achat d’autres denrées complémentaires du riz, du maïs et du manioc à substituer avec le riz. Les producteurs de rente polyvalents avec stratégie d’autosuffisance en riz (42.8%) qu’on rencontre dansle Centre-Ouest et sur les Hautes-Terres. Ils pratiquent alternativement des cultures de rente et de revenus, et se soucient d’une autosuffisance en riz, ils ne sont pas attirés par les stratégies d’expansion rizicoles. La production atteint entre les 1,2 et 1,9 tonnes de paddy, pour laquelle une partie est utilisée pour la consommation des ménages et une autre est destinée à la vente. Leur solde « ventes-achats » de riz est faiblement positif. Eux aussi, ils pratiquent une diversification de leurs cultures pour en tirer des revenus nécessaires à l’achat de denrées complémentaires du riz. Les producteurs spécialisés riz et positionnés sur la vente de riz (22.8%) : ce sont les exploitants rizicoles du Nord-Ouest, du Centre-Ouest (double riziculture) et du lac Alaotra. Leurs potentiels technico-économiques d’intensification et d’expansion sont élevés. La taille d’exploitation varie entre 0,7 et 2 ha et rapportant une production entre 1,9 et 5,5 tonnes, à la fois, ils sont autosuffisants en riz et vendent une part considérable de leurs récoltes. Leur solde de « ventes-achats » de riz est positif. Ils diversifient peu leurs cultures et par conséquent, sont dépendant de leur production rizicole.
Ainsi, la faiblesse de la productivité du riz provient de plusieurs facteurs : la diversité des raisonnements des riziculteurs, de la mentalité paysanne du fait de leur faible niveau d’instruction (seulement 4% ont atteint le niveau secondaire et plus) et de leur attachement à la pratique traditionnelle, du problème d’accès aux intrants (pouvoir d’achat des riziculteurs, disponibilité et accès aux intrants, etc.).
Nous avons sur la figure suivante la comparaison entre la production rizicole de l’Indonésie et de Madagascar de 1960-2012.
Les avantages et inconvénients de la filière :
Les avantages : D’après Dabat (2000), la filière rizicole malgache bénéficie de : La présence des facteurs écologiques compatible avec le climat .
Le relief, le sol et sa composition, les propriétés hydrographiques de Madagascar conjugués avec le caractère variable du climat offrent à Madagascar des conditions agroécologiques propices à la pratique de plusieurs types de riziculture. La maîtrise des techniques rizicoles .
Le riz a été longtemps cultivé à Madagascar, la preuve en est que les riziculteurs témoignent de la maîtrise de divers itinéraires techniques impliquant le savoir-faire ancestral et de la présence de différents systèmes de culture. La demande croissante en riz national.
Elle résulte de la préférence des consommateurs pour le riz national.
Madagascar est classé parmi les pays le plus gros consommateur de riz au monde.
La consommation moyenne par tête a été évaluée à 138 kg dans les zones rurales et 118 kg dans le milieu urbain (enquête FAO/UPDR 1999). Le Ministère de l’Agriculture, dans la LPDR tente de retrouver ce niveau de consommation de 118 kg en 2020. Selon cette même enquête, les ménages développent des stratégies d’achat de riz en fonction des moyens financiers disponibles : les plus démunis en achètent en très petite quantité (entre 1 et 3 « kapoaka ») tandis que les ménages les plus aisés en achètent en demi-gros (entre 15 kg et plusieurs sacs) pour les plus aisés et les achats en demi-gros gagnent en volume en zone de production (Mahajanga).
Un autre avantage important du secteur est l’avancée de la recherche rizicole au cours des dernières années. Elle concerne plusieurs domaines de la culture : tant sur des variétés performantes de riz pluvial et irrigué (notamment le riz d’altitude) que sur des techniques intensives (SRI mis au point dans les années 80) économisant des mains d’oeuvre ou bien avantageuses pour l’environnement (lutte anti-érosion, amélioration de la fertilité des sols). Parmi les acquis de la recherche, le semis direct présente plusieurs atouts : une bonne productivité du travail et un coût de revient faible.
Les inconvénients : La filière rizicole malgache connait de véritables problèmes au niveau des infrastructures de base, de la faiblesse des rendements des cultures et au niveau du marché. Les riziculteurs, quant à eux, ne peuvent avoir accès au crédit à cause du problème de l’insécurité foncière, etc. Autant de contraintes constituant de facteurs de blocage au développement de la filière nationale. L’enclavement des zones productrices .
Ceci empêche la filière de fonctionner avec efficacité : la production rizicole ne peut pas atteindre les marchés. L’état des routes nationales, l’insuffisance des entretiens et le manque des ouvrages de franchissement sur la plupart des pistes rurales (comme les passages à gué) empêchent les zones productrices d’offrir leurs productions sur le marché. Une telle situation constitue un facteur décourageant les agriculteurs, en particulier les riziculteurs, ce qui baisser la production et accroissant davantage les importations. Les conséquences de la pratique culturale .
Les systèmes de cultures, comme le « tavy » et la riziculture pluviale portent atteinte à l’environnement et provoquent la déforestation, l’érosion des bassins versants… Ces effets sont préjudiciables aux riziculteurs eux-mêmes (ensablement des périmètres, baisse de fertilité des rizières suite à épuisement du sol…) et aux autres usagers de l’environnement. La diffusion des nouvelles techniques et variétés issues le la recherche rizicole posent problèmes .
Il faut supporter le coût de la diffusion qui requiert des communications à des niveaux différents (à travers les mass-médias, les agents de développement, etc.). À cela s’ajoutele comportement des paysans (aversion aux risques, hystérésis16). En outre, le niveau d’équipement des riziculteurs est très limité : la faible utilisation des intrants majeurs comme les engrais minéraux, semences sélectionnées, produits phytosanitaires, etc. semble être en étroite liaison avec la mentalité paysanne, au prix de ces produits et à l’approvisionnement insuffisant des zones rizicoles dû à l’état des routes. Des problèmes techniques sont aussi rencontrés .
Au niveau des compétences requises pour un meilleur rendement de la culture : le non- respect de la bonne dose de fertilisation requise pour les semences améliorées ; l’insuffisance de la quantité d’engrais minéraux apportées aux cultures (80 kg/ha sur les Hauts Plateaux et 69 kg/ha au Lac Alaotra) Problème d’accès des paysans aux crédits .
Les producteurs ne peuvent mener une bonne campagne culturale faute de crédit, nécessaires pour l’achat des intrants. Les riziculteurs ayant eu accès au crédit formel a été inférieur à 3% en 199917.
L’incitation à investir dans la production rizicole diminue en raison de l’insécurité foncière : Les riziculteurs sont confrontés au problème foncier, rendant leur investissement dans la filière plus faible et puis l’accès au crédit dépend de la sécurisation foncière : la terre ou les récoltes peuvent constituer un gage aux crédits contractés. Plusieurs types de contraintes entretiennent l’insécurité foncière à laquelle doit faire face les riziculteurs telles la rareté des terres, le coût élevé d’acquisition des titres, la complexité de la procédure d’acquisition des terres, l’éloignement du service des Domaines et la longueur du traitement des dossiers. La déficience des infrastructures de marché .
Il est difficile pour le riziculteur de connaitre le niveau du prix sur le marché, l’information de formation de prix ne présente pas de traçabilité.
Le marché du riz à Madagascar peut être caractérisé par :
Un faible volume de riz commercialisé en dehors de la période de récolte.
Un manque de fluidité dans la circulation des biens et des informations sur le prix lors de sa transmission au long des sous-filières. En effet, les marchés rizicoles sont spatialement segmentés, un fait qui conduit à la situation de rente et de spéculation rencontrées dans le secteur rizicole et favorisant surtout les opérateurs en aval.
Les enjeux économiques et sociaux des politiques rizicoles du passé
La filière rizicole nationale se trouve à la base du secteur agricole. Elle présente des potentiels non encore exploités et des des contraintes à l’origine de son faible développement.
Dans la première partie du travail, nous avons passé en revue les mesures politiques servant de cadre à la filière depuis 1960. L’objet de ce chapitre est d’en dressrr un bilan sur les conséquences de ces politiques sur l’économie malgache et puis de dégager les limites de ces politiques. Ce chapitre termine le travail de mémoire.
Dans ce chapitre, nous allons d’abord faire un court bilan des politiques rizicoles depuis 1960. Ensuite, nous allons analyser ces résultats suivant les théories de première partie afin d’en dégager les apports de chaque politique et enfin d’en tirer les dimensions selon lesquelles la riziculture permet de contribuer au développement économique de Madagascar.
Secteur rizicole : un moteur de la croissance économique malgache.
Le PIB national a cru faiblement depuis l’indépendance avec un taux de 4% (BM 2019). La croissance économique entamée à un moment donné de l’histoire est souvent interrompue par une crise politique.
Dans la filière rizicole, cette situation peut se résumer par la transition de l’interventionnisme d’Etat dans la filière vers la libéralisation dans les années 80, un fait marquant dans l’histoire économique du pays. L’orientation politique mise en oeuvre variait avec la situation économique du pays. Le graphique ci-dessous nous donne la relation étroite entre la croissance du PIB national et de celle de la valeur ajoutée agricole.
Le taux du PIB des années 1972, 1981, 1991, 2002 et 2009 affiche chacun un niveau du taux de croissance bas rapport à son niveau de l’année précédente.
Ces baisses sont imparties :
Aux changements de régimes économiques entrepris dans les années 70 au moment duquel la nationalisation et le début du socialisme marquaient l’économie.
Au bouleversement social suite aux PAS à la fin des années 80.
Des crises électorales des années 2000 et les problèmes politiques de 2009.
Les deux figures suivantes enregistrent l’évolution du PIB malgache de 1961 à 2016 ainsi que celle de la production rizicole sur la même période.
Le riz et la réduction de la pauvreté à Madagascar :
La pauvreté se traduit par la capacité minimum d’acquisition d’un panier minimum de biens de subsistance (alimentation, logement, habillement) (Agreste 2015). La BM fixe un seuil de revenu de 1,25 USD de 2005 pour déterminer la proportion de la population pauvre d’un pays donné.
Le RNDH (2018) donne un taux de pauvreté national de 73,7% pour 2015 dont 78% des plus pauvres se trouvent en milieu rural contre 22% en milieu urbain (PNUD 2014).
La population pauvre malgache vit en grande partie dans le milieu rural dont la majorité des chefs de ménages sont des petits cultivateurs (BM 2019).
Le riz fournit jusqu’à 41,9% du revenu annuel des ménages agricoles soit une somme de 410 000 Ar/an. L’autoconsommation atteint les 79,5% du revenu rizicole, la vente de rapporte de ce fait que 34% du revenu rizicole.
Nous allons analyser l’évolution du taux de pauvreté à l’aide d’une approche rétrospective, allant de 2012 à 1993. Les données disponibles sur les ménages se limitent à 1993 (Minten 2008).
Sur la période étudiée, le niveau de pauvreté de 2012 s’est détérioré par rapport à celui de 2005, passant de 68,7% à 70% pour 2012.. La pauvreté a atteint, en fin 2002,80% de la population suite à la crise électorale. Avant la crise, ce taux a été de 69,6% (Robilliard, Gubert, 2010.
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Table des matières
Introduction
Partie 1 approches théoriques sur les rôles de la riziculture dans le développement économique
Introduction
Chapitre I les rôles théoriques de l’agriculture dans le développement économique
Introduction
1. Brève histoire de l’agriculture
L’origine de l’agriculture
Histoire de l’évolution de l’agriculture jusqu’à la période actuelle
2. Les liens théoriques entre le secteur agricole et le développement économique
La théorie des physiocrates l’agriculture est la seule source de richesse
Les étapes de la croissance de Rostow
La théorie du surplus l’agriculture dispose d’un surplus de mains d’oeuvre nécessaire au développement du reste de l’économie
La contribution de l’agriculture au développement économique
3. Limites théoriques
Conclusion
Chapitre II La riziculture comme une partie importante de l’agriculture
Introduction
1. Les rôles de la riziculture dans l’économie malgache
2. Les politiques rizicoles depuis 1960
Conclusion
Conclusion de la première partie
Partie 2 la contribution de la riziculture dans le développement économique de Madagascar
Introduction
Chapitre I diagnostic de la filière riz
La filière riz à Madagascar
Les caractéristiques de la filière
Les avantages et inconvénients de la filière
Les avantages
Les inconvénients
Chapitre II Les enjeux économiques et sociaux des politiques rizicoles du passé
Introduction
1. Bilan des politiques passées
Secteur rizicole un moteur de la croissance économique malgache.
Le riz et la réduction de la pauvreté à Madagascar
2).Les portées des politiques passées
Les avantages
Les limites
Conclusion de la deuxième partie
Conclusion générale
ANNEXES
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