L’accroissement de la pauvreté au cours des trois dernières décennies à Madagascar est allé de pair avec la dégradation de l’environnement qui s’est accélérée au cours de la même période. En milieu rural, cette pauvreté se traduit essentiellement par une dépendance accrue sur les ressources naturelles : le dénuement matériel et la nécessité de subvenir au besoin vital engendre des comportements qui deviennent des pressions sur les ressources naturelles. Au début de la mise en œuvre du PAE, Madagascar faisait face à la conjonction de multiples facteurs qui ont rendu son environnement très fragile et fortement menacé :
− une croissance démographique très élevée (environ 3%) entraînant une pression foncière sur les régions densément peuplées (200 à 300 hab/km2) et conduisant à une utilisation anarchique des terres sur des écosystèmes fragiles;
− pauvreté croissante résultant du déséquilibre terre/population là où cette dernière est très concentrée en entraînant une dégradation rapide de la santé publique;
− traditions et pratiques foncières peu orientées vers la conservation de l’environnement;
− faillite des mécanismes de régulation sociale se traduisant par une insécurité générale surtout du monde rural et le non-respect de la légalité;
− pratiques dévastatrices des ressources naturelles (défrichements et feux de brousse associés aux exploitations illicites des produits forestiers) qui entraînent une destruction massive des forêts (entre 150.000 et 300.000 ha par an). Elles entraînent aussi une forte réduction de la productivité agricole due à l’érosion (perte de terre de 150 à 250 tonnes par ha et par an); L’insuffisance des institutions et des outils pour mieux conserver, gérer et surveiller l’environnement.
La combinaison de tous ces facteurs conduit les différents groupes sociaux à adopter des stratégies individuelles de survie, d’attente ou de replis à court terme au détriment d’une gestion saine et pérenne des ressources naturelles. Pour mettre en œuvre ce programme environnemental, l’ANGAP a été créée en 1991 pour coordonner et gérer les AP. Ce dernier représente 2 % du couvert forestier national et les activités de développement dans les zones périphériques bénéficiaient à plus de 13 000 familles, à travers de Projet de Conservation et de Développement Intégré (PCDI).
Le point d’alignement
Un PCDI est un ensemble d’opérations mises en œuvre afin de vérifier l’hypothèse suivante : la conservation d’une AP ne peut être atteinte si la population de la Zone Périphérique (ZP) se trouve encore à un niveau de développement tel qu’elle dépend des ressources naturelles offertes par l’AP. L’hypothèse avance aussi que cette conservation ne peut être pérennisée que lorsque la population de la ZP constitue un partenaire à part entière dans le processus de conservation. La notion de développement durable qui se définit comme un développement qui satisfait les besoins actuels sans compromettre ceux des générations futures repose sur trois piliers :
− la croissance économique ;
− le développement social ;
− la préservation de l’Environnement.
La conduite d’une étude de cas de quelques villages périphériques du Parc National Andringitra dans une perspective de développement durable nous a intéressé dans la mesure où la viabilité du parc ne saurait pas être effective, à terme, sans que des modes de productions qui respectent l’environnement ne sont appliqués par la population riveraine. Actuellement, le PN d’Andringitra est menacé par la culture itinérante sur brûlis ou tavy dans sa partie Est (villages d’Ankarena Nord, d’Antevamena, d’Ampasy et d’Ambatomboay), corollaire du mode de production de la population qui vit dans cette partie du parc. Effectivement, le mode de vie de la population de ces zones Est du PN est fortement rattaché à la forêt. Ses productions reposent sur la pratique de la culture itinérante sur brûlis, le Tavy. Dans cette partie Est du parc, la production de riz, principal produit de subsistance des habitants, repose sur la riziculture pluviale sur Tavy. Elle implique l’abandon des parcelles cultivées après deux ou trois ans car la fertilité des sols, alimentés uniquement par les cendres provenant du brûlage, sont éphémère. Or, étant donné la croissance démographique, le temps de restauration du sol, de l’ordre de six ans à huit ans ne satisfait plus les besoins en terre cultivable des paysans. Les populations défrichent chaque année de nouvelles surfaces forestières à raison de deux hectares par ménage. Leurs habitudes sont prohibées selon la politique forestière actuelle. Pour ces raisons, ces quatre villages ont été choisis comme zone d’étude pour le mémoire. Pour assurer la survie de ces gens. La recherche d’alternative de développement plus respectueuse de l’environnement forestier s’avère primordiale. Pour identifier des axes d’interventions appropriés, l’analyse des comportements et du système de production de la population de ces quatre villages constitue une étape obligatoire pour identifier des axes stratégiques permettant d’aboutir à un développement durable. C’est dans cette optique que ce mémoire intitulé « Contribution à l’identification des alternatives techniques au tavy dans la zone périphérique Est du Parc National Andringitra »a été développé.
Sa finalité est de proposer des stratégies d’amélioration qui réconcilient les besoins d’une population locale avec les intérêts de la conservation. La présente contribution consiste en premier lieu à faire un bref compte-rendu des processus clés liés à la dégradation des ressources naturelles suivant des aspects écologiques, économiques et socioculturels. En deuxième lieu, la synthèse des résultats de recherche sera présentée en vue d’une proposition des pistes de solutions.
PRESENTATION DE LA ZONE D’ETUDE
Localisation géographique
Classé Réserve Naturelle Intégrale depuis 1927, Andringitra a été déclassé en Parc National (PN) le 08 octobre 1999 par le décret n° 98 – 376. Il est le quatorzième des 18 Parcs Nationaux existants à Madagascar. Il s’étend sur une superficie de 31.160 ha. Le Parc est situe sur le massif d’Andringitra dans le haute et unique formation de granite et de gneiss. L’altitude varie entre 720 mètres et 2.658 mètres au pic d’Imarivolanitra (Pic BOBY), le plus haut sommet accessible à Madagascar. Il fait partie des écorégions de l’Est. Il est constitué dans sa partie Est par la forêt pluviale malagasy. Trois sur les cinq domaines biogéographiques de Madagascar y sont représentés : Le domaine de l’Est, le domaine du centre et le domaine des hautes montagnes. Il se trouve entre 22º 07’ et 22º 21’ de latitude Sud et entre 46º 47’ et 47º 02’ de longitude est, dans la Province de Fianarantsoa, à 47 km au sud d’Ambalavao. Les AP les plus proches d’Andringitra sont la Réserve Spéciale (RS) du Pic d’Ivohibe, au sud à environ 20 km des limites Sud du parc et le PN de Ranomafana, au Nord à environ 120 km d’Andringitra. Entre ces trois AP, existe un couloir forestier le plus long à Madagascar qui permet une liaison entre elles. Le maintien de la diversité spécifique du parc est fortement dépendant de la pérennité de ces couloirs forestiers. Le versant Est du parc est couvert de formations forestières de basse, de moyenne et de haute altitude, alors que celui de l’Ouest est constitué par des affleurements rocheux avec des mosaïques de formations végétales ouvertes. Les quatre villages (Ankarena-Nord, Antevamena, Ampasy, Ambatomboay) qui font l’objet de notre étude pratiquent la culture sur brûlis pour des raisons culturelles et à cause de l’inexistence d’autres alternatives. Ils sont rattachés à la commune rurale d’Ivongo, Sous-Préfecture d’Ivohibe. Cette région est très enclavée.
Eléments physiques
Géomorphologie
Le relief est caractérisé par la dominance des zones d’altitudes où la pente est variable et peut devenir forte à certains endroits allant jusqu` à 70%. En moyenne, la pente est de l’ordre de 50%. Les bas-fonds n’occupent qu’une faible superficie du milieu. Ils sont surtout utilisés pour la riziculture irriguée.
Climat
Les relevés de données météorologiques concernant les régions Est du Parc sont assurés par le poste d’observation climatique du service météorologique et par le projet depuis 1995. Les parties orientales du PN Andringitra reçoivent annuellement une pluviométrie supérieure à 1300mm. Les mois les plus arrosés sont le mois de décembre jusqu’au mois de février. La saison sèche dure 2 à 3 mois (juillet, août, septembre). La température moyenne ne dépasse pas 25°C pendant la période chaude (octobre). La température moyenne annuelle est de 16° 80C, les mois les plus froids sont juin, juillet, août dont la température varie entre 12 à 13°C (Station Antanifotsy). L’humidité est très importante vers 7 heures du matin, moins importante dans le midi et peu importante à 17 heures. Les mois les plus humides sont le mois de janvier et février. Le mois d’octobre est la période la plus sèche et la plus ensoleillée, elle devient faible pendant le mois de juin et juillet. C’est le vent de l’Est (Alizé Sud Est), qui amène des nuages à l’origine des brouillards sur la zone d’altitude, et le vent souffle faiblement dans la basse altitude. Le climat est du type tropical humide où la saison sèche est faiblement marquée à basse altitude.
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Table des matières
INTRODUCTION
1ère Partie : PRESENTATION DE LA ZONE D’ETUDE
1.1. Localisation géographique
1.2. Eléments physiques
1.2.1. Géomorphologie
1.2.2. Climat
1.2.3. Hydrographie
1.2.4. Forêt
1.2.5. Pedologie
1.2. Cadre démographique
1.3. Le PN Andringitra et ses zones périphériques
1.4. Cadre social
1.5. Cadre économique
2eme Partie : METHODOLOGIE D’ETUDE
2.1. Objectifs généraux
2.2. Diagnostic du milieu
2.2.1. Etudes préliminaires
2.2.1.1. Documentation
2.2.1.2. Contact aux personnes ressources
2.2.1.3. Préparation des outils de travail
2.2.2. Travaux de terrain
2.2.2.1. Diagnostic de la situation socio-économique
2.2.2.2. Enquête auprès de la population riveraine
3ème Partie : ETUDE DE DIAGNOSTIC SOCIO-ECONOMIQUE ET INTERPRETATION DES RESULTATS
3.1. Identification socio-économique
3.1.1. Caractéristiques de la population
3.1.1.1. Organisation sociale
3.1.1.2. Infrastructure sociale
3.1.1.3. Culture traditionnelle
3.1.2. Caractéristiques du système de production
3.1.2.1. Agriculture
3.1.2.2. Elevage
3.1.2.3. L’artisanat
3.2. Interprétation des résultats
3.2.1. Fonctionnement du système
3.2.1.1. La pratique agrosylvopastorale
3.2.1.2. Pratique sylvoagricole
3.2.1.3. Pratique sylvopastorale
3.2.2. Système global de production
3.2.3. Identification des contraintes et les potentialités du milieu
3.2.3.1. Contraintes du milieu
3.2.3.2. Potentialités du milieu
4ème Partie : LES ALTERNATIVES PROPOSEES EN MATIERE DE DEVELOPPEMENT DURABLE
4.1. Amélioration de l’efficacité économique
4.1.1. Amélioration technique du système de production
4.1.1.1. Amélioration de la riziculture pluviale
Amélioration du mode de défrichement
4.1.1.2. Amélioration de la rizicultures irriguées
4.1.1.3. Amélioration de production d élevage
4.2. Amélioration de l’équité sociale
4.2.1. Infrastructure sociale
4.2.1.1. Education
4.2.1.3. Désenclavement
4.2.2. Appuis techniques
4.2.2.1. Intensification de la formation paysanne
4.2.2.2. Intensification de la sensibilisation
4.2.2.3. Motivation
4.2.2.4. Création des groupements villageois
4.3. Le maintien de l’intégrité écologique
CONCLUSION GENERALE
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES