La considération du paysage dans la pratique agricole en moyenne montagne du Livradois-Forez

L’aube du paysage agraire

L’homme et le paysage, c’est une relation de longue date. Gaston Roupnel identifie le paléolithique comme période marquant le début de cette relation. C’est par la sédentarisation des hommes que commence l’organisation des campagnes françaises. La cueillette laisse place aux pratiques culturales et d’élevage de la période du néolithique. Pas moins de trois millénaires suffisent à convertir le territoire qui est aujourd’hui la France (De Boismenu, 2004, p.6).
Les paysages alors engagés dans un processus d’anthropisation attirent curiosité et réflexion pour comprendre ce qui a amené les Hommes à façonner les paysages comme on les connaît à l’heure actuelle. Pour commencer, «Le géographe regarde un paysage et s’efforce de l’expliquer. Il sait que cet objet, véritable œuvre d’art, est le produit d’une longue élaboration, qu’il a été façonné au cours des âges par l’action collective du groupe social installé dans cet espace et qui le transforme encore» (Duby, 1991, p.14). Certaines périodes du XIXe siècle et début du XXe siècle ont permis «le maintien […] d’une paysannerie nombreuse [qui a eu] effet de donner à notre pays des paysages ruraux humanisés dont la diversité et la qualité sont reconnues et admirées» (Ambroise, 2002, p.3). C’est à travers cette dimension plurielle (sociale, naturelle, économique, etc.) et d’accumulation (temporelle) que les paysages prennent leur consistance et richesse. Le paysage peut-être vu comme un palimpseste gardant les traces de tout acte, l’agriculture est l’une des plus marquantes.

Le pétrole, starter d’une nouvelle agriculture, un paysage métamorphosé

L’agriculture est restée pendant des milliers d’années une agriculture paysanne soumise au labeur des hommes et des bêtes. Elle modifie, à sa manière, peu à peu les paysages.
L’avènement du pétrole vient changer la dynamique de ceuxci. Le paysage prend alors une trajectoire nouvelle sans précédent.
Elle se manifeste par la banalisation et la fermeture des paysages ainsi que le brouillage du paysage par l’urbanisation (Ambroise, 2018).
Ce changement intervenu peu après la Seconde Guerre mondiale (1939-1945) s’identifie en France comme une métamorphose des pratiques agricoles ; mécanisation, nouvelles techniques agronomiques à production intensive, etc. De nouveaux objectifs de l’agriculture sont lancés. Ils s’identifient par la mobilisation de syndicats comme la FNSEA ou le CNJA . Ils prônent un discours qui donne à l’agriculture un rôle social et qui «[…] ne devrait pas dépasser les limites de la production issue du travail de la terre. Une production résolument orientée vers la recherche de la productivité la plus rémunératrice, grâce à des méthodes et des techniques élaborées le plus souvent par l’agronomie» (Luginbül, 1991, p.27).
Les agriculteurs voient à travers cette révolution, une ouverture pour leur profession. Les territoires quant à eux supportent et gardent en mémoire ce changement radical de pratique agricole que l’homme opère sur les terres et de facto sur les paysages.

Les politiques agricoles à travers le paysage

Les politiques agricoles ont longtemps omis la question du paysage. Ce n’est qu’au début des années 1980 que les politiques agricoles commencent à encourager les agriculteurs à produire des services environnementaux au service de la collectivité. C’est par cette entrée que le paysage prend place dans le raisonnement de la politique agricole (Candau et coll., 2011, p.691). Elle se manifeste plus concrètement ensuite par la mise en place d’outils comme les MAE qui est l’un des outils de la PAC . Son objectif est d’«inciter les agriculteurs à produire des services collectifs paysagers et environnementaux sous l’égide des autorités publiques relayées par des acteurs locaux. En proposant un cadrage normatif de l’activité en adéquation avec une écologisation et une ‘‘naturalisation’’ des espaces ruraux, les MAE déploient des prescriptions en des domaines où, jusque-là, la PAC n’intervenait pas, comme celui du paysage» (Ibid., p.696). L’espace de réflexion des politiques agricoles et la réalité du terrain génèrent des discordes.
Pour reprendre l’exemple des MAE paysagères, il est proposé aux agriculteurs d’entreprendre des tâches manuelles. Ce qui sur le terrain est vu comme une manière de faire «d’ancien temps» de paysannerie. Il renvoie à une régression dont les agriculteurs «sont fiers de s’être émancipés» (Ibid., p.701). Ce décalage entre les politiques agricoles et les agriculteurs a pour conséquence d’entretenir une tension dans leur relation.
À noter que les politiques agricoles définissent les éléments structurant les paysages comme tout ce qui produit une topographie (haies, mares, arbres isolés ou alignés, bosquets, fossés…) contribuant ou non à la production agricole, aux performances économiques et environnementales et à la résilience de l’exploitation (Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, 2020, p.36). C’est à travers cette représentation du paysage que la PAC prend en compte le paysage dans ses mesures.

La diversité des systèmes agraires

«Les qualificatifs ‘‘d’exploitants’’ et plus récemment ‘‘d’entrepreneurs’’ ne recouvrent pas une vision globale de la profession agricole aujourd’hui. [L’entrepreneur] élabore certes, à l’aide de compétences techniques et de machines, des produits agricoles, alimentaires ou autres, mais, par ses pratiques, il mobilise des propositions, des échelles, des rythmes, des couleurs, des ombres et des lumières ; il est aussi créateur de formes. Il y a un langage visuel de l’agriculture qui résulte des processus techniques de production» (Deffontaines, 1994, p.337 ; 1995, p.356). C’est ce que l’on identifie par pratique agricole. On observe des «logiques du quotidien [qui] confèrent aux pratiques agricoles plusieurs dimensions imbriquées : une dimension ‘‘utile’’ (dépendant de finalités productives), une dimension ‘‘sociale’’ (répondant à des normes de comportement), et une dimension ‘‘agréable’’ (dépendant d’un système de valeur)» (Caillault et coll., 2009, p.11). C’est exactement par ces piliers que l’on comprend que ce sont les «manières concrètes d’agir des agriculteurs» (Landais et coll., 1988, p.128) et qu’elles impactent directement ou indirectement les paysages. Elles nous permettent alors de considérer les pratiques agricoles comme genèse des  formes paysagères et éventuellement des objets paysagers emblématiques d’une région (Ménadier, 2012, p.3). Comme l’ajoute Lydie Ménadier (2012), les pratiques agricoles et leurs mises en œuvre influencent, de manière réciproque la sensibilité au paysage que l’agriculteur a de son territoire.
Les itinéraires des pratiques agricoles choisies par les agriculteurs amènent à identifier des types d’agricultures cataloguées dans des systèmes agricoles génériques. Sans rentrer dans les détails, nous allons juste exposer ces différents types d’agriculture.
Elles se différencient par la posture et les choix techniques et personnels de l’agriculteur. Par ses choix, sa pratique lui confère une relation spécifique avec son territoire et donc, un paysage marqué par ses actions. On identifie sept formes d’agriculture : l’agriculture biologique ; l’agriculture raisonnée ; l’agriculture durable ; la production fermière ; l’agriculture paysanne ; l’agriculture de précision ; la production intégrée (Brossier, 2008, p.4). La liste n’est pas exhaustive, car de nombreux agriculteurs cherchent de nouvelles alternatives aux types d’agriculture déjà existants. Ils font alors émerger de nouvelles désignations.

Les éléments structurant le paysage : le découpage agraire

Le parcellaire renvoie généralement au sujet de la propriété. Il n’en a pas toujours été ainsi. Il génère un ordonnancement notable dans les paysages. «L’individualisation  du droit de propriété généralisé par la Révolution aboutit à la multiplication des haies. Il est nécessaire, en effet, de clore sa propriété, d’en identifier les limites, de la protéger contre les intrusions des voisins et la divagation du bétail» (De Boismenu, 2004, p.7).
Ce maillage parcellaire répandu à travers le territoire marque ainsi un temps dans l’évolution des paysages. Le parcellaire tant foncier que cultural, «contribue à conférer aux paysages et à leur utilisation rigidité et durabilité. Il faut des mutations profondes, techniques (mécanisation lourde), juridiques (remembrement, collectivisation), ou économiques (changement de vocation) pour le bouleverser. §3 […].
Le parcellaire est le support le plus clairement lisible de la confrontation entre le morphologique, le statique et le fonctionnel et le dynamique §4» (Chiva, 1991, p.22) dans le paysage. Il en fait une variable incontournable pour comprendre et faire projet agro-paysager.
Le statut de la propriété privée n’est pas le seule. Il existe celui de la propriété collective. Aujourd’hui, c’est un statut d’exploitation peu répandu. Elle existe encore sur les hautes terres (Montagne) appelées les biens communs ou sectionnaux, etc. La parcelle collective à fonction d’usage ne s’identifie plus que par des «traces» comme «les chemins ruraux (les fossés en pays de bocage) [qui] peuvent être considérés comme un reliquat de cette forme de propriété (entre collective et privée)» (Defontaine et coll., 2002, p.57).
Les propriétaires terriens s’emparent rapidement de mesures, dans le but de faire exploiter le potentiel de leurs parcelles par autrui. Les baux ruraux définissent un cadre qui est contractualisé avec un propriétaire et l’exploitant.
C’est généralement le cas des agriculteurs. Il existe deux formes de baux, le métayage qui n’est aujourd’hui quasiment plus utilisé et le fermage. Ce dernier est le plus utilisé par les «propriétaires, les bailleurs [qui] confient à un preneur, le fermier, le soin de cultiver une terre sous contrat» (Wikipédia, 2020, §1). Le fermage est pour certain un frein dans la liberté des pratiques des agriculteurs, car «[…] il conduit à mettre en doute la capacité des seuls agri culteurs à maîtriser le processus ‘‘production de paysage’’, fût-il qualifié d’agricole. De sur croît, en France, 55 % des terres agricoles sont exploitées en fermage, ce qui réduit la capacité d’une partie des agriculteurs à mettre en œuvre des stratégies à long terme» (Laurent, 1994, p.235). Il cadre d’une certaine manière les actions entreprisesà travers leurs pratiques agricoles.

Le paysage agraire, une affaire de perception

Le paysage du quotidien comme définition du paysage

La convention européenne donne cette définition du paysage : Le «‘‘Paysage’’ désigne une partie de territoire telle que perçue par les populations, dont le caractère résulte de l’action de facteurs naturels et/ou humains et de leurs interrelations» (Convention européenne du paysage, 2000).
La notion de cadre de vie prend pleinement place dans cette définition du paysage. C’est à travers cette notion qu’il est possible de comprendre les enjeux de la prise en compte du paysage dans les pratiques agraires. L’objectif étant bien de «guider et harmoniser les transformations induites par les évolutions sociales, économiques et environnementales» (Convention européenne du paysage, 2000). «[Et] comment le paysage peutil devenir un outil pour guider la mise en œuvre d’une agriculture contribuant au développement durable des territoires, et faire l’objet d’un projet pour conduire à plus d’harmonie des cadres de vie et des modes d’organisation entre les gens (J.-S. Laumond & coll., 2017)» (Ambroise, 2019, p.2).
On prend alors conscience que le paysage est le point névralgique de nombreux enjeux territoriaux, environnementaux, sociétaux, etc. «Les paysages, on le sait bien, sont des créations de l’homme. […] Ils portent toujours des traces, si menues soient-elles, de l’occupation et du travail des hommes, plus précisément des paysans» (Duby, 1991, p.11). C’est pour cette raison que se pencher sur les pratiques de l’agriculture est essentiel pour la vie de nos territoires.
Pour interroger les paysages, il faut comprendre avant tout, les «déterminations culturelles, sociales et historiques de la perception [que peut avoir un agriculteur sur son territoire]. Autrement dit, ce qui constitue la subjectivité humaine» (Berque, 1995), ici l’agriculteur. Dans ce «complexe paysager» (Lunginbühl, 1995, p.39), il ne faut pas exclure les «descriptions des éléments objectifs s’appuyant sur les connaissances géographiques et historiques du territoire : «le support physique du paysage ou ‘‘paysage objet’’ est composé d’objets naturels (roche et sol relief ou végétaux, traces d’une histoire naturelle du lieu) et d’empreintes laissées sur les lieux dans les sociétés qui s’y sont succédées» (Ambroise, 2002, p.7).
C’est dans cette formulation du «complexe paysager» (Lunginbühl, 1995, p.39) que l’on comprend qu’« en zone rurale, la création du paysage est d’abord le fait des agriculteurs […] qui structurent l’espace en réseau de parcelles et orientent les dynamiques végétales par leurs pratiques de gestion. On ne peut donc imaginer intervenir sur le paysage sans prendre en compte les stratégies et les motivations des artisans directs de son édification» (Michelin, 2000, §1).

L’agriculteur et son rapport au paysage

Avant de faire l’état de la connaissance sur le rapport qu’entretien l’agriculteur avec les paysages, il est intéressant de remarquer la représentation que ce font les urbains, de la campagne.
Ils n’associent pas directement le paysage de la campagne avec celui des pratiques agricoles (Ambroise, 2002, p.24). Pour comprendre ce rapport mutuel entre agriculteur et paysage, il faut annoncer comment s’élabore cette production de paysage. Jean-Eudes Beuret le définit de cette manière : «La production des paysages cultivés peut mettre en jeu trois types d’actes : des actes productifs non spécifiques (le paysage est un effet induit, la production paysagère n’induit aucun coût pour I’agriculteur), des actes spécifiques de production paysagère (entretenir un muret, planter une haie…), avec un coût direct, ou encore des actes spécifiques liés au fait de renoncer à une action susceptible de dégrader le paysage (comme abattre une haie…), ce qui génère un coût d’opportunité» (Beuret, 2002, p.48). À travers cette production de paysage, l’agriculteur n’accorde pas forcément une grande familiarité au mot «paysage». Le «terme est très rarement employé par les éleveurs [ou plus généralement par les agriculteurs], et même lorsque c’est le cas, c’est toujours rapporté à l’évocation de pratiques, effectives ou envisagées, destinées à assurer le fonctionnement ou parfaire l’état de leur exploitation agricole» (Candau et coll., 2011, §26). C’est alors que l’on identifie les valeurs de ce que représente le paysage à leurs yeux. Il s’agit en particulier de «l’attachement sensible aux objets matériels qu’ils façonnent au quotidien» (Candau et coll., 2011, §26). Il conduit à se demander ce qu’est un joli paysage pour un agriculteur. Yves Lunginbül (2001 et 1995) nous apprend qu’à travers ses travaux, il constate que ce jugement est directement lié au travail bien fait. C’est en observant le paysage que l’agriculteur voit les marques de ses pratiques et qu’ils «[…] observent les bonnes manières de cultiver, comme celles de bien labourer un champ et de n’y laisser aucune trace qui puisse être interprétée comme un travail négligé» (Lunginbühl, 2001, p.6). A contrario, les agriculteurs identifient rapidement les signes d’abandon ou de mauvais entretien par l’apparition de friches ce qu’ils qualifient de paysage laid. Une vision qui est largement partagée par les agriculteurs (Lunginbühl, 1995, p.36). C’est en reprenant, par exemple, le terme de «paysage laid» de Luginbühl que l’on peut aborder la pression sociale que peuvent subir les agriculteurs. L’esthétique de la ferme fait parties des pressions que subit l’agriculteur. Il réalise des actes spontanés qui visent directement un entretien des abords de la ferme. Jean-Eudes Beuret nous parle «d’embellissement obligatoire des abords de ferme. […] Ces règles ne sont écrites nulle part et pourtant I’agriculteur met un point d’honneur à les respecter» (Beuret, 2002, p.49).
C’est à travers la prise en compte de ce rapport propre entre les agriculteurs et le paysage qu’il est possible de reconnaître les pratiques «agri-paysagères» (Henry, 2005).
L’acte des agriculteurs dans les paysages est conscient même s’ils ne le formalisent pas forcément, mais il s’agit bien d’une conséquence de leurs pratiques agricoles. De facto, on considère ces pratiques comme «délibérément paysagères» (Bigando et coll., 2017, §8). Nous pouvons partir du postulat que l’agriculteur et plus particulièrement les actions de sa pratique fait qu’il appartient à une «société dite “paysagère“» (Berque, 1994).

Les enjeux du paysage pour l’agriculture : l’investigation

Ce parcours réalisé à travers l’état de la connaissance nous amène sur-le-champ de la réflexion. Nous considérons que le paysage et l’agriculture sont, et seront, des sujets majeurs pour l’avenir de notre société. La sphère agricole entretient une intime relation avec le paysage, pour autant, depuis l’industrialisation de l’agriculture, il y a une distanciation entre les deux.
Les personnes concernées sont les agriculteurs mais aussi l’ensemble de la population. Certes, la population l’est indirectement, mais c’est elle qui jouit des paysages agricoles à travers son cadre de vie et qui y trouve en plus toute son alimentation. C’est bien eux, les agriculteurs qui sont en première ligne. Ils sont le point névralgique des questions environnementales, alimentaires, paysagères, etc. La contribution à la réflexion sur ce sujet peut permettre de valoriser le savoir-faire paysan, l’enjeu de leur présence dans nos territoires, leur rôle dans les paysages et même, d’aborder les projets agricoles différemment. Il nous faut, pour avoir un regard transversal, une compréhension plus objective de la réalité du monde agricole. Il nous permettra de mieux appréhender la relation de celle-ci avec les paysages. Sur le profil du projet agricole d’avenir, le paysage peut être un outil pour l’investir, le penser et le dessiner.
Il nous amène à étudier la façon dont les agriculteurs entretiennent leurs relations avec les paysages et plus particulièrement, l’influence réciproque de la pratique agricole sur les paysages.
Il nous permettra ainsi de donner notre avis sur l’avenir de l’agriculture et de la prise en compte des paysages. Dans cet entrain, le fait de porter matière à la transition agro-écologique permet aujourd’hui, de prendre une place dans les politiques agricoles tout en mettant en avant les projets agropaysagers.
Pour entreprendre cette réflexion, il nous faut des outils pour la tester.
C’est à travers trois hypothèses que nous allons mettre en œuvre notre réflexion. Chacune complémentaire les unes aux autres, vont aborder un horizon, qui sont : la spatialité, à travers l’échelle et la géospacialisation des pratiques agricoles de l’exploitation ; la perception sensible du paysage par l’agriculteur ; la dynamique temporelle d’évolution des pratiques agricoles garantes des richesses paysagères.
Après avoir identifié nos horizons d’étude, nous pouvons émettre clairement nos hypothèses à tester.
Celles-ci peuvent prendre une forme de pari.
La première, annonce que les pratiques agricoles dans les paysages sont en lien avec l’échelle d’exploitation et leur organisation parcellaire.
L’objectif est bien de déceler si les actions de l’agriculteur dans sa pratique sont influencées ou non, par des facteurs spatiaux qui impactent visuellement ou non les paysages.
Avant de poursuivre, nous entendons par échelle d’exploitation plusieurs facteurs qui sont : la surface d’exploitation, le nombre d’animaux, le nombre d’individus travaillant et la propre perception de la taille d’exploitation par l’agriculteur luimême. C’est dans l’imbrication de ces caractéristiques que nous définissons l’échelle d’exploitation.
1 Les actions directes ou indirectes dans la pratique agricole. Sujet développé dans : Brossier, 2008 et Deffontaines, 1994.
2 Nous entendons dans la pratique agricole, les actions directes qui suivent une action volontaire de l’agriculteur qui a délibéré son acte d’agir et l’action indirecte, un acte spontané ou involontaire par le sous-produit d’une action volontaire. Qu’elle soit directe ou indirecte, l’agriculteur agit toujours pour un intérêt, qu’il soit professionnel, collectif ou personnel.
L’organisation parcellaire est entendue comme la disposition de parcelles cadastrées, ou visuellement formant une parcelle d’un même tenant ; disposées dans un territoire aux caractéristiques géomorphologiques et écologiques variées.
La deuxième hypothèse annonce que la lecture paysagère de l’agriculteur influence ses rapports avec son territoire et sa pratique agricole. Il nous conviendra de tester la filiation qui pourrait exister dans la lecture du paysage de l’agriculteur et de sa répercussion dans ses choix décisionnels. C’est-à-dire que son regard personnel l’amène à décrypter son environnement qui ensuite le conduit à l’interpréter subjectivement. C’est dans cette concomitance que le rapport qu’entretient l’agriculteur avec son territoire peut être influencé.
À même titre, il peut agir sur sa pratique agricole.
Nous entendrons dans ce travail par pratique agricole les actions directes ou indirectes des agriculteurs. Elles peuvent être momentanées ou habituelles et à des échelles de temps plus ou moins long. Dans tous les cas, elles ont un impact dans les paysages, même infime soit-il.
Le territoire est ici, vu comme une région où s’implante l’exploitation agricole et dont elle dépend. Elle peut avoir comme équivalent le « pays».

Conclusion

Ce travail de recherche avait pour ambition d’explorer le monde agricole au travers de ses pratiques ainsi que par son intime relation avec le paysage. Depuis l’industrialisation de l’agriculture, il y a eu une distanciation dans cette relation. Cependant, le paysage est un outil pour penser les projets agricoles de demain.
Cela nous a amenés à nous poser la question suivante : comment les agriculteurs entretiennent leurs relations avec les paysages et plus particulièrement, l’influence réciproque entre la pratique agricole et les paysages ?
La méthode qui a été employée pour entreprendre cette recherche a été l’identification de trois hypothèses.
Chacune intégrant une branche d’investigation particulière. La première est la question spatiale ; puis la lecture singulière du paysage par l’agriculteur ; et pour finir les dynamiques du paysage par les pratiques agricoles garantes des paysages.
La méthode se poursuit par la rencontre d’agriculteurs au sein de cinq exploitations. Elle s’est constituée d’échanges constructifs à l’appui de documents iconographiques et du cadre paysager de la ferme qui nous entourait. Cette méthode d’investigation nous a permis d’extraire les matériaux essentiels à notre recherche.
Le travail de recherche nous enseigne alors que les agriculteurs ont une relation avec le paysage.
Il y a des facteurs qui viennent influencer les relations réciproques qu’ont les pratiques agricoles avec le paysage. C’est ce que nous allons voir.
Les inters-relations se réalisent sur une «matrice parcellaire» ayant des paramètres hétéroclites (organisation parcellaire, échelle d’exploitation). Cette «matrice parcellaire» conditionne d’une part, les spatialités des pratiques et d’autres, l’influence de la pratique agricole.
Les actions marginales et les actions primaires font partie des pratiques de l’agriculteur.
Elles participent à la fabrication des évolutions des paysages.
Cependant, les actions marginales sont celles qui représentent le plus, le fruit de cette lecture ingénieuse de l’agriculteur. Le «regard connaisseur» le conduit à réaliser des actions marginales contribuant pleinement à la préservation des «traces» héritées dans les paysages, et à la richesse des paysages actuels «indice».
Ce «regard connaisseur» contribuant aux actions, est issu d’une lecture fine de son milieu ambiant. Il s’agit là, d’un regard paysagiste, qui ne se figure pas en tant que tel, mais s’y réfère bien.
Le discours des agriculteurs nous permet de déceler comment ce «regard connaisseur» permet aux agriculteurs de projeter l’évolution de leurs pratiques. Celles-ci se traduiront alors, dans les paysages, par des actes marginaux et primaires. Ce sont alors des «signaux» qui s’illustrent dans ces discours. Ils nous enseignent, les possibles trajectoires d’évolution des paysages.
La plus-value de ce travail nous permet de prendre davantage conscience de la relation qu’entretient l’agriculteur avec le paysage dans sa pratique agricole.
Ses actes, marginaux ou primaires, sans certains obstacles, font de l’agriculteur un véritable artisan paysagiste d’une une pratique agri-paysagère. Il permet aussi, à travers ce «regard connaisseur» d’identifier les «signaux» et en faire des enseignements pour les outils d’aide à la décision des politiques publiques liées aux aménagements territoriaux. Il s’agit aussi d’un outil d’aide à la prise en compte du paysage dans les projets de territoire et notamment dans les projets agricoles.
Toutefois, notre recherche s’est investie dans des branches qui s’avèrent être vastes et riches de complexité. La recherche nous a permis d’avoir des matériaux et résultats intéressants pour en tirer des enseignements. Un travail complémentaire pourrait être conduit afin d’investir plus profondément les différentes branches rencontrées dans ce travail. De même, ce travail pourrait être accompagné d’un panel plus large d’agriculteurs et de situations géographiques différentes. Il permettra de voir si ce constat peut être généralisé ou non. Les résultats pourraient alors s’enrichir mutuellement et compléter ce travail de recherche.

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Table des matières
Introduction
Partie 1 — Les discours du paysage agraire
1 • L’Homme, l’agriculture et le paysage : une attache continuelle
2 • Le paysage agraire, une affaire de perception
3 • L’agriculture et le paysage, un projet d’avenir
4 • Les enjeux du paysage pour l’agriculture : l’investigation
1 • Le cas des agriculteurs en moyenne montagne du LivradoisForez
2 • Rencontres et échanges avec les agriculteurs sur leur exploitation : tentative d’acquérir une parole spontanée et intérieure
3 • Les discours hétéroclites des agriculteurs face au paysage en moyenne montagne du Livradois-Forez
Partie 2 – La considération du paysage dans la pratique agricole en moyenne montagne du Livradois-Forez
Partie 3 – Des discours aux projections : la réflexion des agriculteurs soucieux et tributaires de leurs paysages
1 • Le paysage dans une conjoncture spatiale : les agriculteurs tributaires
2 • Des agriculteurs avec un regard de paysagiste : une influence dans leurs pratiques
3 • Les préoccupations des agriculteurs pour l’avenir de leur pays
4 • Regard transversal : les obstacles au génie paysagiste de l’agriculteur
Conclusion 
Bibliographie 
Annexes 

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