La condition périurbaine saisie par l’agence d’urbanisme de la région de Saint-Nazaire – Etudes et représentations

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Une typologie des « études périurbaines » (Cailly et Vanier, 2010)

Notre thèse se positionne dans le champ des études urbaines, c’est-à-dire dans une sociologie de l’action urbanistique. En effet, si l’urbanisme renvoie plutôt à une pratique professionnelle, mais aussi à des connaissances mobilisables pour la pratique, les études urbaines mobilisent différents cadres théoriques autour d’un thème, ici l’urbain (Scherrer, 2010). Il s’agit de décrire et d’analyser des « énigmes spatiales de la vie en société » (Devisme et Breux, 2018, p. 1), avec dans notre cas des interrogations sur les transformations de pratiques dans l’action publique aménagiste en situations périurbaines.
Avant d’expliciter notre positionnement, nous allons identifier ci-dessous de manière non exhaustive plusieurs courants d’études périurbaines. Cette typologie s’appuie sur les trois grands courants théoriques en recherche urbaine présentés plus tôt5.
La production du périurbain en tant que projet capitaliste visant la création de plus-value (économie politique)
Le développement des villes en France, fondé sur des logiques d’attractivité métropolitaine, tend renforcer la concentration des populations et des emplois au sein de grandes agglomérations urbaines. Cette urbanisation entraine des dynamiques de périurbanisation que l’on peut observer proximité des grandes métropoles. Cette dynamique est accentuée dans certaines régions où les logiques de financiarisation de la ville entrainent une hausse des loyers obligeant les ménages à trouver un logement toujours plus loin, les logiques de gentrification opérants (Donzelot, 2009). Aussi le périurbain est ici étudié comme la résultante de dynamiques de marché, la ville centre devient le lieu de la création de la plus-value foncière et immobilière et le logement y devient un actif pour des investisseurs. Dans le même temps, les configurations périurbaines deviennent attractives avec un foncier peu cher et des infrastructures de transports permettant de rallier le centre d’agglomération et les emplois, de nouveaux services urbains s’y développent et des acteurs privés de la construction se positionnent sur ces marchés.
Deux objets d’études principaux sont repérés : la production de foncier et de services urbains mais aussi une approche plus actorielle qui analyse les conditions permettant aux logiques financières de se déployer.
Ainsi, à travers la notion de périurbanisation ce sont plusieurs dynamiques qui sont observées, d’abord un étalement urbain à partir des villes, mais aussi des logiques d’émiettement urbain (Castel, 2007) observées notamment au sein d’espaces ruraux à travers le phénomène de la rurbanisation (Bauer et Roux, 1976).
Par ailleurs, cette croissance périurbaine est aussi le fruit de logiques actorielles. En effet, elle résulte d’un malthusianisme foncier (Charmes, 2007), logique d’action foncière portée par des acteurs publics locaux, mais aussi de stratégies d’acteurs privés. En effet, les configurations périurbaines se sont construites avec le développement de modèles d’habitat pavillonnaires d’abord imaginés aux USA par William Levitt puis importés en France par Roger Bouteville et André Pux, inventeurs de la maison Phénix. A la manœuvre, des sociétés de constructions, pavillonneurs et constructeurs (Jaillet, 1982) qui développent des modèles standardisés, mais aussi des promoteurs dont les stratégies spatiales sont analysées au regard de dynamiques économiques structurelles et d’injonctions étatiques dans des contextes de faible gouvernance. Du côté des effets socio-spatiaux, logiques d’inégalités et de clubbisation (Charmes, 2011) sont au programme de ce courant.
La production du périurbain sous l’angle de l’institutionnalisation et de la régulation de la production des espaces périurbains (gouvernance)
Une autre approche, portée par la recherche urbaine, sur la production des espaces périurbains considère sa construction sous l’angle du gouvernement local et des instruments de régulation. De fait, ces situations font l’objet — comme l’ensemble du territoire national — de logiques de régulations opérées par des instruments d’action publique relevant de l’Etat comme les logiques de fiscalités du logement par exemple, mais aussi via des outils de planification pilotés au local : Schéma de Cohérence Territoriale (SCOT), Plan Local d’Urbanisme (PLU) et Plan Local de l’Habitat (PLH) notamment concernant le développement de l’habitat.
Plusieurs sujets d’études y sont repérés : la gestion des milieux, des ressources et les conflits d’aménagements comme les aéroports, barrages et littoraux (Darly, 2008), la planification et la prospective territoriale, ainsi que la construction de formes d’actions publiques interterritoriales (Dumont et Hellier, 2010 ; Vanier, [2000] 2010) ou de politiques sectorielles comme l’action foncière, la participation, avec l’élu local pour figure centrale (Charles, 2020).
Ainsi le périurbain apparaît ici le plus souvent comme un territoire ressource pour les ménages, constitué de ressources forestières, minières, aquatiques, agricoles, mais surtout foncières donnant lieu à des projets d’infrastructures d’envergure suscitant problématiques environnementales et conflits spatiaux. Ces conflits peuvent également s’observer à de plus petites échelles dans le cadre de cohabitations entre néo-ruraux et agriculteurs par exemple, ou plus souvent dans le cadre de projets d’habitat denses en centre-ville ou centre-bourg relevant de logiques NIMBY6.
Ces projets d’habitat denses et de renouvellement des centres-bourgs s’inscrivent dans la pensée aménagiste de ces dix dernières années prônant une limitation de l’étalement urbain et une densification des bourgs avec des objectifs traduits au sein de documents de planification, souvent d’échelle supra-communale. Ces projets d’habitat sont complexes à mettre en œuvre pour les édiles locaux disposant d’une ingénierie publique faible et de moyens financiers limitant une action foncière stratégique. Dans ce contexte, l’échelle intercommunale et les multiples formes de partenariats interterritoriaux apparaissent comme des pistes stratégiques et opérationnelles pour ces situations intermédiaires, c’est en tout cas ce que soutiennent plusieurs chercheurs (Vanier, [2000] 2010).
La production du périurbain sous l’angle de nouvelles interactions entre acteurs de la fabrique urbaine locale (interactionnisme et processus)
Les logiques de périurbanisation s’inscrivent dans une logique de périphérisation de l’urbain par rapport à un centre ponctuel ou linéaire, tantôt perçu comme instrument de pouvoir (Bentham, 1977), instrument de politique publique — la ceinture verte par exemple —, tantôt comme projet (Devisme, 2005), prisme d’analyse de pratiques urbanistiques s’y déployant. L’intégration croissante de ces situations au fonctionnement métropolitain, la reconnaissance des interactions complexes qui y ont lieu (Arlaud, Jean et Royoux, 2005) mais aussi les logiques de régulation à l’œuvre — limitation de l’étalement urbain, densification — (Touati, 2010) entraînent le développement de nouveaux outils, d’expérimentations, de nouvelles méthodes d’aménagement voire le développement d’un projet périurbain. L’hybridité de ces situations périurbaines, leur vitesse d’évolution, se prête particulièrement à une approche pragmatique de l’action, du périurbain « en train de se faire ».
Les projets orientés vers la transformation des systèmes de production constituent les terrains d’enquête privilégiés de cette fabrique périurbaine.

Notions et concepts de la recherche

Des situations et configurations périurbaines, une condition commune

Savenay, Crossac, Saint-Lyphard, Saint Brévin les Pins, ces communes sont marquées par une grande diversité de dynamiques socio-spatiales9. Cette variété relève de la taille de ces communes, de l’évolution de leur population (de 3000 à plus de 10 000 habitants), renvoyant à des niveaux de maturités variés, mais aussi à une diversité des dynamiques d’urbanisation et des formes urbaines qui s’y déploient, si tant est que l’on adopte un regard à hauteur d’Homme et non uniquement vu du ciel où figures et motifs génériques sont mis en relief. Petites villes pour certaines, polarités pour d’autres, ces communes relèvent pourtant toutes bien d’une condition périurbaine — non pas rurale — commune marquée par de fortes similitudes. D’abord, celle-ci se caractérise par des processus d’urbanisation similaires marqués par la périurbanisation des centres-villes, des centres-bourgs, mais aussi des villages et hameaux, nous le verrons plus longuement au chapitre 4. Deuxièmement, nous y repérons des conditions de détermination communes marqueurs de territoires « sous influence » (Devisme et al., 2008, p. 158). Ces influences sont liées aux villes centres mais pas uniquement, elles sont aussi liées aux communes voisines par exemple. Ainsi, cette influence est moins caractérisée par la dépendance que par la circulation dans le cadre d’activités quotidiennes (travail, loisirs, commerce) ou de migrations résidentielles renvoyant là à la définition que propose Martin Vanier des territoires périurbains en tant qu’espaces privilégiés de l’interterritorialité (Vanier, [2000] 2010, p. 50). A contrario, des communes comme Pornichet, Orvault ou St Herblain pour la région nantaise, s’inscrivent dans des dynamiques d’agglomérations fortes qui n’ont plus grand-chose à voir avec le périurbain. De fait, elles ne sont plus uniquement dans des relations interterritoriales, fruit de pratiques sociales, mais dans des constructions politiques structurantes. Un autre type d’influence peut ici être mentionné, il s’agit des politiques publiques intéressant la limitation de l’étalement urbain et les stratégies de densification sur lesquelles nous reviendrons au chapitre 3. Enfin, c’est aussi une condition commune marquée par des problématiques relevant du rapport urbain-nature ou encore d’une gestion difficile des interfaces entre espaces agricoles et habitat. Nous pouvons d’ailleurs noter un renforcement de cette question avec la montée en puissance des enjeux de durabilité et de limitation de l’artificialisation des sols, mettant en lumière ces territoires.

Dès lors, comment nommer ces territoires périurbains sur lesquels nous enquêtons ?

Les territoires périurbains dont il est question ici relèvent de situations géographiques, politiques, institutionnelles variées, marquées néanmoins par une condition commune (problématiques foncières, gestion des interfaces entre habitat et agriculture, constructions politiques interterritoriales…). Au cours de cette thèse, nous mobiliserons donc la notion de situations périurbaines pour évoquer le contexte institutionnel et relationnel dans lequel s’inscrivent les pratiques des urbanistes et opérateurs que nous allons suivre. En outre, cette notion nous permettra de mettre l’accent sur des pratiques variées relevant de situations proches de l’urbain diffus à des contextes plus métropolitains.
Par ailleurs, nous avons vu que les territoires périurbains sur lesquels nous enquêtions relevaient d’une condition périurbaine commune marquée par des paysages concrets (périurbanisation, habitat individuel…), mais aussi par des pratiques quotidiennes interterritoriales permettant d’évoquer l’idée de territoires sous influence (Devisme et al., 2008, p. 158) et inscrits dans un système de relations interterritoriales (Vanier, [2000] 2010). Aussi, la récurrence des formes urbaines et des fonctionnements interterritoriaux nous semble pouvoir caractériser une configuration spatiale spécifique, une configuration périurbaine où s’agencent des espaces10. Ces configurations périurbaines nous invitent alors à réfléchir au rapport entre ces formes urbaines et ce fonctionnement interterritorial. Si ce système d’interactions a engendré cette configuration spécifique, Denise Pumain (2004) explique qu’en retour cette configuration produit des contraintes, des effets, sur les interactions sociales dans la zone considéré11. Aussi, nous verrons comment les urbanistes analysent ces configurations et tentent de les faire évoluer à partir de règles d’aménagement. Ces configurations territoriales sont également caractérisées par des formes d’intermédiarité empruntant des caractéristiques à la fois urbaines et rurales : densités intermédiaires en matière d’habitat, implications locales et globales, enjeu de développement et limitation de l’étalement urbain. Néanmoins, la définition que proposent Emmanuelle Bonerandi, Pierre-Antoine Landel et Emmanuel Roux (2003, p. 71) souligne une dimension « moyenne » et « incertaine », au potentiel fragilisé, loin des territoires en développement que nous observons. Nous parlerons donc au cours de cette thèse d’une variété de situations périurbaines lorsque nous évoquerons des situations institutionnelles ou relationnelles entre différents territoires, acteurs. Toutefois nous parlerons de configurations spatiales périurbaines pour évoquer des espaces où se déploient des dynamiques de périurbanisation liées par une condition périurbaine qui associe des formes de vie et des espaces spécifiques » (Lussault, 2019) dont nous décrirons davantage les facteurs au cours de la partie 2.
Ces configurations périurbaines constituent ici le terrain de l’enquête, le fond de scène, et non pas l’objet de la recherche. Nous y enquêterons au même titre que d’autres chercheurs enquêtent dans des centres urbains ou des quartiers d’habitat social.

Des pratiques entre urbanisme et aménagement

Notre recherche s’intéresse à l’action publique territoriale dans les champs de l’aménagement et de l’urbanisme. L’ urbanisme et l’aménagement sont ici très proches, Frédéric Santamaria cité par Sabine Barles (2018, p. 206) nous rappelle que « l’aménagement est consubstantiel à l’urbanisme lorsqu’il porte sur les villes ou des parties de villes, ou plus autonome lorsqu’il travaille des territoires plus vastes ou réputés non urbains ». Néanmoins, cette définition pointe une différence d’échelle d’intervention que relève également Laurent Devisme dans le dictionnaire de l’espace des sociétés (Lussault et Lévy, [2003] 2013, p. 1050) en décrivant l’urbanisme comme activité de « conception urbaine proposant d’organiser des morceaux de ville, voire de villes entières […] ». A contrario, l’aménagement se conçoit à des échelles très diverses et s’appuie tout autant sur des pratiques urbanistiques que des actions de développement local par exemple. Par ailleurs, Martin Vanier pointe la différence notoire entre pensée de l’aménagement et pensée de l’urbanisme (Vanier, 2020a, p. 19). L’aménagement reste attaché à un système de valeurs où la notion d’équilibre domine avec les enjeux de d’armatures urbaines, de désenclavement ou encore de spécialisation productive tandis que l’urbanisme a connu des crises profondes l’amenant à évoluer à de nombreuses reprises.
Aussi, nous mobiliserons le terme aménagement pour parler de la pensée aménagiste ainsi que de l’action publique territoriale en situations périurbaines qui investit des territoires hors agglomération et déploie des activités qui oscillent entre urbanisme et développement local. Nous parlerons donc de l’action publique aménagiste pour préciser le champ dans lequel s’inscrit l’action publique territoriale que nous analysons. Par ailleurs, nous parlerons d’aménagement pour évoquer les savoirs et savoir-faire mobilisés par les aménageurs publics et privés dans le cadre d’opérations de logement nécessitant un aménagement préalable. De fait, les opérations d’aménagement périurbaines se déroulent pour beaucoup en dehors du cadre d’opérations de renouvellement urbain.
Néanmoins, nous ne sommes pas ici dans un questionnement sur l’aménagement du territoire à grande échelle (réseaux de transports, énergie), ni sur des politiques étatiques très structurantes comme elles ont pu être développées après-guerre avec l’appui de la Délégation interministérielle
l’Aménagement du Territoire et à l’Attractivité Régionale (DATAR). Aussi, nous préciserons notre propos en évoquant des pratiques urbanistiques lorsqu’il s’agira de désigner les pratiques des urbanistes en matière de planification et de conception urbaine œuvrant au sein d’organismes publics ou d’agences de MOE.
A ce titre, nous emploierons également les termes maîtrise d’ouvrage (MOA) et maîtrise d’œuvre pour distinguer les activités des urbanistes et des architectes suivants qu’ils se trouvent en donneurs d’ordre ou en prestation de conception. Cette segmentation, en France notamment, s’est renforcée selon Véronique Biau avec la diversification des formations dans l’enseignement supérieur et la professionnalisation de la commande publique (Biau et Tapie, 2009a, p. 71). Ainsi, nous parlerons de MOA publique pour évoquer l’action des collectivités locales et des organisations publiques tandis que nous parlerons de MOA privée pour évoquer les activités de promotion foncière et immobilière conduites par les opérateurs. Nous mobiliserons le terme opérateur », employé par les urbanistes, pour désigner l’ensemble des professionnels de la promotion foncière et immobilière ainsi que, par extension, les constructeurs de maisons individuelles qui coordonnent des opérations de construction12. Nous reviendrons sur l’usage de ce terme qui témoigne aussi de transformations et notamment d’une extension des prérogatives des promoteurs immobiliers (Peynichou, 2018, p. 275).
Différents régimes d’aménagement entre opérations, projets négociés et expérimentations
Dans une tradition anglo-saxonne, la question de la transformation matérielle des villes est focalisée sur la planification urbaine. Une différence émerge vers 1950 entre urban planing et urban design avec la naissance d’un idéal de rationalisation de la pensée planificatrice et des thèses sur la « bonne planification ». Toutefois, l’émergence du pragmatisme permet de documenter différemment ces activités par une approche quasi-ethnographique de cas, bien que beaucoup de travaux resteront centrés sur l’élaboration stratégique de ces documents de planification mettant de côté leur concrétisation opérationnelle. Pourtant, la question de la planification au sein des projets opérationnels reste d’actualité et l’avènement de l’urbanisme de projet y contribue. Dans ce schéma nous ne sommes plus dans une relation linéaire ou dans un urbanisme de « poupée russes », les orientations stratégiques sont redéfinies de manières itératives. La mise en œuvre des projets opérationnels n’est pas ou plus entièrement déterminée par l’élaboration des orientations stratégiques mais contribue à les faire évoluer. Malgré tout, la place de la mécanique opérationnelle est peu étudiée. C’est pourquoi nous faisons le choix de rentrer ici dans l’analyse de la petite fabrique périurbaine, c’est-à-dire la boîte noire des acteurs opérationnels qui construisent les arrangements par lesquels s’actualise concrètement la fabrique des espaces périurbains. Nous sommes bien ici à l’interface entre des orientations stratégiques (SCOT, PLUI …) et des choix techniques dans le cadre de projets d’aménagement, nous invitant à observer les rapports entre MOA publique, MOA privée et concepteurs ainsi que plus largement les interactions entre petite et grande fabrique urbaine. Même si plusieurs chercheurs sont venus combler un vide conceptuel propos des phases amont du projet urbain (Arab, 2004 ; Blanchard, 2018), il est important de poursuivre l’analyse des processus de projet et les interactions entre acteurs y prenant part. Sous ce vocable de projet, nous distinguerons ce qui relève des démarches d’expérimentation pilotées par les organismes publics, des projets urbains et architecturaux développées par les équipes de MOA-MOE. Ces projets urbains et architecturaux, négociés, se distinguent également de logiques d’opération — de lotissement par exemple — ou d’urbanisation diffuse. Ainsi, les pratiques aménagistes et urbanistiques que nous observons répondent à différentes représentations, processus, instruments mais aussi systèmes d’acteurs, elles relèvent donc de différentes modalités de coordination. Notre intérêt pour les logiques de coordination mais aussi de régulation nous invite à privilégier une approche par les régimes (péri)urbains qui permet de mettre l’accent sur une pluralité de modalités de coordination. Par ailleurs, cela permet d’analyser simultanément des coalitions d’acteurs, l’usage d’instruments d’actions publiques ainsi que les différentes modalités de résolution des conflits dans l’optique de la réalisation d’opérations d’aménagement et de construction.
Aussi, bien que l’urbanisme qui s’y déploie relève encore largement de logiques fonctionnalistes, nous explorerons les possibilités du projet territorial et architectural périurbain avec une focale particulière sur les projets relevant de logiques d’action expérimentales voire d’expérimentations en urbanisme alors que certains chercheurs voient dans ces configurations des « laboratoires de l’urbain ».
Les périphéries urbaines – en particulier en France où le phénomène de grandes agglomérations reste peu marqué à l’exception de l’agglomération parisienne – constituerait des “laboratoires de l’urbain” au sens de lieux et de territoires dans lesquels se sont déplacés les enjeux de connaissances et d’action. Ce déplacement du regard vers les périphéries et les phénomènes de périurbanisation s’accroit avec le tournant environnemental […] ». (Dumont et Hellier, 2010, p. 11)
Des cultures et des segments professionnels variés au sein des mondes de l’aménagement  périurbain
Notre recherche s’inscrit dans une approche pragmatique privilégiant ainsi l’étude des effets et conséquences pratiques de la mise en place de nouveaux dispositifs sur les professionnels. Il s’agira plus précisément d’observer les transformations au cœur des mondes de l’aménagement périurbain, c’est-à-dire les évolutions de normes, de règles et de principes d’action au sein des réseaux d’acteurs qui coopèrent au développement de projets de logements. Howard S. Becker rappelle que les « mondes » sont des formes d’actions collectives perméables au changement (Becker, [1982] 2010). Aussi, ces nouveaux champs d’expérience font évoluer les cultures professionnelles des urbanistes au travail mais aussi celles des maitres d’ouvrages privés et des architectes. Les cultures professionnelles sont ainsi entendues par Howard S. Becker comme l’apprentissage et le partage de nouvelles conventions. Nous analyserons ainsi les dynamiques de mise en partage de nouveaux buts communs, de divergences naissantes, de luttes entre acteurs au sein d’un même groupe, mais aussi la redistribution des rôles et des places des acteurs dans le système de production du logement. Nous analyserons enfin l’élaboration de ces nouvelles conventions collectives (normes, règles) ainsi que la redistribution des savoirs et savoir-faire dans le champ de l’aménagement périurbain.
Entendons-nous ici, il ne s’agira pas de conduire l’analyse d’un groupe professionnel en particulier mais plutôt de se positionner dans une perspective interactionniste et d’observer la construction de nouveaux segments professionnels. Pour Anselm Strauss, un segment professionnel renvoie à une construction commune de situations et de croyances partagées sur le sens subjectif de l’activité professionnelle (Dubar, Tripier et Boussard, [1998] 2011, p. 114). Ainsi, l’approche de ces nouveaux segments nous conduira dans la troisième partie à suivre les stratégies de différenciation territoriale des acteurs, les alliances professionnelles, ainsi que les reconnaissances matérielles et symboliques qu’ils tentent d’obtenir et de mettre en place pour agir dans le périurbain.

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Table des matières

Cartographies
Introduction générale
La périurbanisation, problématiques et promesses de l’action publique
Chapitre 1. Enquêter sur l’action publique territoriale en situations periurbaines, entre Nantes et Saint-Nazaire
1 – Origines et positionnement du sujet de recherche
2 – Notions et concepts de la recherche
3 – Problématique et hypothèses
4 – Une recherche en études urbaines mobilisant la sociologie pragmatique et des travaux sur la gouvernance
5 – Les méthodes de la recherche – Une approche combinatoire
6 – Retour croisé sur la constitution d’une collection de cas
Chapitre 2. La condition périurbaine saisie par l’agence d’urbanisme de la région de Saint-Nazaire – Etudes et représentations
1 – Une agence d’urbanisme en territoires périurbains
2 – Les représentations du périurbain – Discours et regards d’urbanistes
Chapitre 3. L’action publique territoriale à l’épreuve de la périurbanisation – Instruments d’action publique et rôles des urbanistes
1 – Le périurbain, un sujet d’étude récurrent pour l’action publique
2 – De la mesure du phénomène à la logique d’aménagement – Analyse de l’évolution des logiques de l’action publique territoriale en situations périurbaines
3 – La périurbanisation à l’épreuve des pratiques – Enjeux et contraintes de l’action publique territoriale périurbaine
Chapitre 4. Une fabrique ordinaire de l’habitat – Un urbanisme 1.0 ? (Lorrain, 2018).221
1 – Une périurbanisation générique en contextes spécifiques
2 – Acteurs et processus de construction de l’habitat
3 – Des modèles de régulation locaux plus ou moins outillés – L’élu local, la commune et les structures d’ingénieries parapubliques
Chapitre 5. Une nouvelle trame pour la coordination publique-privée ? Analyse croisée de deux dispositifs d’expérimentation sur le logement dans le périurbain
1 – La démarche « Habitat périurbain » – PMNSN
2 – La démarche « Démonstrateurs pour l’habitat individuel » – ADDRN
3 – Expérimenter un modèle de conception négocié dans le périurbain
Chapitre 6. Les épreuves de la démarche « Habitat périurbain », témoins d’engagements exploratoires
1 – Problématiser une démarche – Concerter les citoyens, synthétiser les attentes et matérialiser le carnet des attentes, un référentiel d’habitat innovant
2 – Mobiliser des acteurs – L’appel à projets à l’épreuve des répondants
3 – Concevoir des projets – Constituer les équipes, négocier le projet et sélectionner des projets et des équipes
4 – Réaliser les expérimentations – Faire aboutir en continuant d’explorer, capitaliser et valoriser l’expérimentation
Chapitre 7. Urbanisme ordinaire et exceptionnel – Hybridations et transformations des pratiques de projet
1 – Des logiques d’actions ordinaires et expérimentales
2 – Des régimes d’aménagement en discussion – Les produits des démarches expérimentales
3 – Des hybridations entre innovations, traductions et transformations
Transition de la partie 2 – Vers la construction d’une « culture de l’urbanisme » en situations périurbaines
Transformation du système de production de l’habitat dans le périurbain
Cultures professionnelles, acteurs émergents et nouveaux cadrages
Chapitre 8. Les effets de l’émergence de logiques d’action expérimentales sur les « mondes de l’amÉnagement périurbain »
1 – Une redistribution des rôles des acteurs de l’aménagement
10 Kévin Chesnel – Thèse pour le doctorat en aménagement de l’espace et urbanisme – 2021
2 – Une mise à l’épreuve technique et politique des relations entre organisations publiques
3 – Une mise à l’épreuve des mondes de l’aménagement périurbain et de leurs conventions
4 – Une transformation des pratiques professionnelles des opérateurs et des architectes – De nouvelles conventions
Chapitre 9. Vers une redéfinition du système de production de l’habitat en situations périurbaines – Acteurs émergents, circulation de dispositifs et repositionnement de l’action publique territoriale
1 – Trajectoires de « segments professionnels » des opérateurs de l’habitat
2 – Des mondes professionnels en interaction, individus circulants et transferts de bonnes pratiques
3 – Vers un repositionnement de l’action publique territoriale
Conclusion générale – Vers un tiers urbanisme périurbain
Epilogue
Liste des acronymes
Bibliographie

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