Discussion autour de la notion de métaphore
À l’entrée « Métaphore » du Petit Robert (2014), on trouve la définition suivante : Figure de rhétorique, et par extension Procédé de langage qui consiste à employer un terme concret dans un contexte abstrait par substitution analogique, sans qu’il y ait d’élément introduisant formellement une comparaison.
On y apprend également que le terme vient du latin metaphora, signifiant « transposition ».
Le Larousse en ligne (« Métaphore », s.d.) précise l’origine grecque metaphora, issue de metapherein correspondant au verbe « transporter ».
Pourtant, la littérature abondante existant sur le procédé le définit de manière assez variable, voire floue – il regroupe parfois des phénomènes assez hétéroclites. Pour cette raison, nous prenons, dans ce travail, le parti pris de le définir d’abord par ses traits distinctifs.
Situé dans un environnement notionnel assez large, il pourra ensuite être abordé du point de vue de ses différentes réalisations.
Définition en compréhension
Dans une première définition en compréhension, nous allons explorer les traits définitoires proposés par différents auteurs au sujet de la métaphore. Deux approches se dessineront : la première, linguistique, distinguera le procédé en tant que figure du discours indirect, la deuxième, constructiviste, le hissera au rang de mécanisme de pensée et d’action élémentaire. Le but étant de situer la métaphore par rapport à l’arrière-plan conceptuel qui s’y rattache, nous pourrons évoquer à certains moments des phénomènes en semblant relativement éloignés (tels que, pour n’en citer que quelques-uns, la litote et l’ironie chez Fontanier, ou les tropes pragmatiques chez Kerbrat-Orecchioni). Nous chercherons par là à lever certaines confusions existant à propos de la figure métaphorique.
La rhétorique classique
Aristote et la métaphore
Dès l’Antiquité, Aristote définit le stylecomme un des aspects de la rhétorique. Celuici concerne les caractéristiques propres à un discours donné et la métaphore constitue un des procédés susceptibles d’y participer. D’après lui, deux qualités peuvent caractériser le style : la clarté selon laquelle les mots sont utilisés de manière adéquate, et l’ornementrelevant de « ce qui s’écarte de l’usage courant » (Aristote, cité par Moeschler & Reboul, 1994, p. 400). Grâce au mécanisme d’analogie sur lequel elle se base, la métaphore relève de la première qualité.
Définie par le fait de « rassembler des objets et des formes sur la base d’une certaine ressemblance, d’un appariement » (p. 400), elle est, de plus, très proche de la comparaison.
Celle-ci n’est d’ailleurs rien d’autre qu’une « forme de la métaphore » qui s’en distingue par son caractère explicite. Ainsi, Aristote explique : « Achille s’élance tel un lion ; c’est une= comparaison. Ce lion s’élance ; nous avons formé une métaphore » (Aristote). L’outil de comparaison présent dans le premier procédé – le terme telici – est absent dans le deuxième.
Les linguistes ont depuis introduit les termes de comparé et comparant pour désigner respectivement l’élément décrit et celui qui sert à décrire le précédent.
Fontanier
Plus proche de nous, au XIXe siècle, la conception de la rhétorique chez Fontanier s’inscrit dans la tradition d’Aristote. Le discours figuré y est défini comme un « écart par rapport à la norme » (Fontanier, 1830/1968, cité par Moeschler & Reboul, 1994, p. 401), constituée par le discours littéral. Au sein de celui-ci, les tropes ou figures de mots « consistent à fournir à un terme un nouveau sens en l’appliquant à un nouvel objet ou à une nouvelle « idée » » (p. 401).
En tant que « trope de la ressemblance » (Fontanier, 1830/1968, cité par Moeschler & Reboul, 1994, p. 407), la métaphore ne fait plus partie de la clarté mais constitue un écart de langage. Elle se distingue, en outre, des autres tropes par la nature de la relation existant entre le sens habituel – ou littéral – et le sens nouveau – ou figuré – qu’elle met en jeu (Fontanier, cité par Kerbrat-Orecchioni, 1986). La relation d’analogie intervenant dans le procédé métaphorique s’oppose à la relation de contiguïté ou d’inclusion impliquées dans la métonymie ou la synecdoque. De cette manière, alors que dans la métaphore Ce lion(Achille) s’élancedes caractéristiques analogues entre Achilleet le lionsont exigées, la métonymie une bonne plumedésignant un écrivain, oula synecdoqueboire un verrepour « boire le contenu d’un verre », se basent sur des correspondances instrument-métier ou contenant-contenu.
Concernant la litote ou l’hyperbole, la relation entre les deux sens présents consiste en une différence d’intensité. Dans la litote « Je ne te hais point » (Corneille), le sens second « Je t’aime »est plus fort que le sens littéral, qui exprime moins d’amour ; au contraire, dans les hyperboles C’est un géantou J’ai milles choses à vous dire, les sens littéraux sont plus forts que les sens seconds « C’est un homme grand » ou « J’ai beaucoup de choses à vous dire ».
Enfin, le trope de l’ironie est sous-tendu par une relation d’antonymie ou au moins d’opposition (Fontanier cité par Kerbrat-Orecchioni, 1986). Ainsi, la formulation ironique Quel joli temps aujourd’hui !, signifiant en réalité « Quel sale temps aujourd’hui ! »,se fonde sur une opposition.
La métaphore doit également être distinguée de la catachrèse qui est un trope de la ressemblance dont le sens figuré est devenu habituel, autrement dit extensif (cité par Moeschler & Reboul, 1994). Nous mentionnerons ici l’exemple suivant :Cette chambre est une porcherie où le terme porcherie renvoie communément à un endroit sale. Quant à la comparaison, en tant que discours littéral, elle ne fait pas partie des tropes mais est plutôt représentative de la norme.
Théories de la comparaison et théories de la double signification
Les conceptions de la rhétorique classique s’inscrivent dans la lignée des théories de la comparaison, celles-ci appartenant elles-mêmes aux théories de la double signification (Moeschler & Reboul, 1994). Ces théories sont de nature non constructiviste, dans le sens où elles ne considèrent pas la métaphore comme un processus participant à l’élaboration de la réalité des locuteurs, mais comme un phénomène marginal de langage relevant du discours figuré (Proulx, 2007).
Dans le cadre des théories de la comparaison, le sens figuré d’une métaphore équivaut à une comparaison donnée – par exemple, le sens figuré de la métaphore Achille est un lion correspondra à la comparaison Achille est comme un lion. Au sein de celles de la double signification, les énoncés métaphoriques se voient attribuer deux sens : un sens littéral et un sens figuré. Selon ces conceptions, la spécificité définitoire de la métaphore se situerait au niveau sémantique : alors que son sens figuré équivaudrait à une comparaison donnée, son sens littéral présenterait une « malformation lexicale » ou une « fausseté » (Moeschler & Reboul, 1994, p. 407-408).
La théorie standard étendue du trope
Tropes classiques
Dans sa théorie standard étendue, Catherine Kerbrat-Orecchioni (1986) prolonge la conception non constructiviste de la figure métaphorique. Cette dernière conserve son statut de trope classique défini sémantiquement, i.e. linguistiquement, et relève du discours figuré correspondant à un aspect dérivé du langage. Elle se distingue donc, au sein de la catégorie du trope, par les traits pertinents déjà décrits par la rhétorique classique (cf. 1. 1. 1. 2., p. 13 ).
Cependant, Catherine Kerbrat-Orecchioni choisit d’exclure la propriété distinctive, proposée par Fontanier, qui faisait de cette catégorie une figure de mots. Les figures de pensée qui s’opposaient aux tropes classiques sont alors réintégrées; et le trait définitoire retenu réside dans la « conversion d'(un) contenu dérivé en contenu dénoté » (p. 97). En effet, dans le cas d’un trope, le contenu dénoté, qui « constitue en co(n)texte l’objet véritable du message » (p. 98), ne peut être extrait du sens littéral qui vient perturber « la cohérence interne et l’adéquation externe de l’énoncé » (p. 96). Celui-ci doit alors être trouvé dans une signification seconde dérivée venant rétablir cette cohérence et cette adéquation.
De cette manière, l’énallage, classé par Fontanier dans les « Figures du discours autres que les tropes » (cité par Kerbrat-Orecchioni, 1986, p. 107), est réintégré en tant que trope pragmatique. Défini comme un écart de langage fondé sur l’« échange d’un temps, d’un nombre, ou d’une personne, contre un autre temps, un autre nombre, ou une autre personne » (Fontanier, 1830/1977, p. 283), cette figure diffère, pour l’auteure, des tropes traditionnels en ce qu’elle touche des éléments déictiques. Dans ce cadre, l’infinitif de narration, ou encore le « nous » de majestéou de modestiepeuvent être considérés comme des cas d’énallage.
La compréhension des métaphores chez les enfants
Dans ce chapitre, nous nous intéresserons aux conceptions piagétiennes et néopiagetiennes qui adoptent un point de vue cognitif sur le traitement des métaphores ; puis nous aborderons celles qui optent pour un point de vue plus linguistique ou métalinguistique.
Nous compléterons notre présentation en considérant des travaux proches portant sur la compréhension des expressions idiomatiques. Enfin, nous analyserons les différents types de tâches expérimentales utilisées dans les travaux qui nous intéressent.
Conceptions piagétiennes et néo-piagétiennes
Plusieurs études portant sur la compréhension de la métaphore chez les enfants s’inscrivent dans une conception piagétienne ou néo-piagétienne. Il s’agit, dans celles-ci, de relier l’émergence de la capacité de traitement des métaphores à l’évolution des capacités cognitives générales de l’enfant. Pour cela, les auteurs se basent sur les différents stades de développement décrits par Piaget (1964).
Compréhension des métaphores et opération de classification
Billow (1977, cité par Franquart-Declercq & Gineste, 2001, p. 726) a, tout d’abord, cherché à rattacher l’acquisition de la compréhension des métaphores à la maîtrise de l’opération de classification. Selon Piaget, cette opération est présente chez les enfants au stade concret comme au stade formel . Cependant, si elle se base sur la notion de ressemblance lors du premier stade, elle prend appui sur celle de proportionnalité lors du deuxième. C’est pourquoi Billow a choisi de tester l’interprétation de métaphores de ressemblance et de métaphores proportionnelles chez des enfants de 5 à 14 ans. Les métaphores de ressemblance étaient du type la branche de l’arbre est son poneydans laquelle « deux objets (…) sont comparés et rassemblés dans la même classe sur la base d’un attribut partagé » (cité par Franquart-Declercq & Gineste, 2001, p. 726). Elles correspondaient ainsi à la définition des métaphores nominales in praesentia que nous avons présenté dans notre premier chapitre (cf. 1.2. 1. 1., p. 18).
Analyse
Relevé des formes problématiques
Relevé des formes métaphoriques éteintes
N.B :Nous fournirons ce relevé dans un souci de rigueur et afin que le lecteur puisse juger de la pertinence de la sélection proposée ensuite. Bien que Rémi-Giraud (2006) remarque, dans son approche sémantico-énonciative de la métaphore, l’extrême plasticité de celle-ci et la difficulté à déterminer des frontières claires entre ses différents types de réalisations, nous qualifierons, selon sa définition, l’aspect métaphorique des formes suivantes d’éteint ou de mort. D’après l’auteure, de telles productions sont en rupture complète avec le monde virtuelauquel renvoie leur sens littéral et s’inscrivent très naturellement dans le monde actuel impliqué par leur sens dérivé. Pour notre part, nous avons choisi d’exclure celles-ci malgré l’expression d’un domaine cible dans les termes d’un domaine source, cette dernière ne nous paraissant que très faiblement consciente lors de leur emploi en situation. Les termes qui sont principalement à l’origine de notre questionnement seront en gras dans les énoncés.
Problématique
À l’issue de notre état de l’art, deux caps particulièrement saillants ont retenu notre attention concernant la compréhension des métaphores chez l’enfant. Le premier a lieu autour de 7 ans. Les études d’origine piagétienne, mais aussi celle de Gentner (1988), y rattachent l’émergence de la capacité à traiter des informations de nature métaphorique. Les données de Levorato & Cacciari (1995) ou de Cainet al. (2009), portant sur les formes idiomatiques, renforcent cette hypothèse. Les auteurs ayant utilisé une tâche à choix multiples fixent, pour leur part, à cet âge, la compréhension aboutie du procédé métaphorique (Cicone et al., 1981 ; De Groot et al., 1994 ; Winner et al.,1980).
Le deuxième cap important se situe autour de 10-11 ans. Les auteurs qui relient l’apparition des capacités de traitement du langage figuré au premier cap y voient l’âge de perfectionnement de ces dernières (cf. ci-avant).
Nous interrogerons, à notre tour, dans notre analyse l’existence de ces deux caps. Nous ferons l’hypothèse que celle-ci les fera apparaître. Cependant, nous nous questionnerons quant à leur définition. Cela faisant, nous esquisserons une réponse à la problématique qui suit :
De quelle manière les élèves réagissent-ils aux métaphores de l’enseignant dans un contexte de discussion à visée réflexive ?
Premières observations
Afin de commencer à répondre à notre problématique, nous remarquerons que des tendances intéressantes se dégagent de notre premier relevé. Ainsi, on ne relève qu’une unique métaphore sur l’ensemble du corpus de CP, celle-ci ayant été produite par l’enseignant. En CE1/CE2, on observe une quantité non négligeable de formes métaphoriques dans les propos de l’enseignante, alors qu’une seule est formulée par les enfants. Chez les CM2, la production est quasiment nulle chez l’adulte (une occurrence) mais elle est assez conséquente chez les enfants. Enfin, en 5e, l’emploi du procédé augmente très nettement chez les éducateurs comme chez les élèves.
Le corpus Philosophèmes révèle « une différence significative dans le mode d’organisation de la parole (…) stipul(ant) que les enseignants n’ont pas la même manière d’animer ces ateliers » (Auriac-Slusarczyk &Colletta, à paraître). Les observations précédentes n’en constituent pas moins des indices indirects du développement de la compréhension des métaphores. En effet, l’emploi de formes métaphoriques par les enseignants pourrait témoigner d’une bonne réception de celles-ci par leurs élèves. De ce point de vue, notre analyse révélerait un premier tournant autour de 7-8 ans puisque la production augmente nettement entre les niveaux CP et CE1/CE2. Les données concernant l’enseignante de CM2 semblent entrer en opposition avec cette interprétation. Pourtant, elles pourraient être rattachées au mode d’organisation de l’enseignante, paraissant privilégier la parole des enfants plutôt que la sienne. Un deuxième tournant pourrait avoir lieu autour de 10-11 ans, la production des enseignantes de CM2 s’avérant nettement plus importante que dans les autres classes.
On serait ensuite tenté de voir dans l’emploi d’énoncés métaphoriques par les enfants un deuxième indice de leur compréhension. Ici, le cap observé se situerait autour de 9-10 ans puisque la production passe de quasiment nulle à notable. Les compétences métaphoriques progresseraient ensuite jusqu’en 5e . L’ensemble de ces observations gagnera à être confronté à l’analyse d’autres ateliers philosophiques impliquant les mêmes niveaux scolaires.
Conclusion
Le travail présent est né du sentiment que la métaphore occupait une place centrale au sein du langage. Il a cherché à apporter un début d’éclairage concernant les manifestations de la compréhension du procédé, chez les enfants, dans un contexte de discussion à visée réflexive. Avant de proposer notre propre analyse, nous avons visé à ancrer notre sujet dans un cadre théorique solide. Une approche en compréhension puis en extension nous a permis d’observer une évolution importante de la définition même du procédé métaphorique, s’étalant entre l’Antiquité et le XXe siècle. Faisant appel à des critères stylistiques chez Aristote, elle aboutit à des facteurs cognitifs chez Lakoff & Johnson, en passant par des caractéristiques sémantiques (Fontanier, Kerbrat-Orecchioni) ou pragmatiques (Davidson). Seul son fondement analogique est récurrent.
Le flou conceptuel ainsi révélé est resté perceptible dans le panorama des études expérimentales que nous avons présenté. Nous avons été frappée par la diversité des types de métaphores définis par les auteurs pour en tester la compréhension chez les enfants.
Témoignant d’une conception classique ou conceptuelle, très peu sortent en revanche du cadre de la métaphore nominale. Ces disparités s’accompagnent en outre d’une variété concernant le type de tâche expérimentale employée. Il en ressort que les travaux utilisant des tâches d’explication rattachent l’acquisition du traitement métaphorique à l’évolution des capacités cognitives de l’enfant ou à celles de ses connaissances encyclopédiques (Gentner). Ceux-ci fixent l’âge d’apparition de la capacité autour de 7 ans, et son aboutissement autour de 10-11 ans. Les études cherchant à contourner la verbalisation, grâce à des tâches à choix multiples ou de mimes, axent leurs interprétations sur les habiletés métalinguistiques des sujets. D’après celles-ci, les compétences métaphoriques sont déjà présentes autour de 5 ans et se perfectionnent vers 7 ans. Les résultats, obtenus également avec des tâches à choix multiples, à partir d’expressions idiomatiques soutiennent le rôle des habiletés métalinguistiques (analyse sémantique, inférences à partir du contexte). Cependant, elles se rapprochent davantage des premiers travaux mentionnés concernant les âges d’acquisition de ces aptitudes.
Face à la diversité des résultats constatés, nous avons privilégié une analyse de données naturelles, obtenues à partir d’extraits du corpus Philosophèmes. Visant à contourner les biais expérimentaux, elle s’inscrit dans une approche qualitative et longitudinale, en impliquant des groupes d’enfants allant du niveau CP à 5e. Elle présente l’avantage d’étudier la compréhension des métaphores, chez ces derniers, en contexte ̶ i.e. celui d’ateliers philosophiques. Nous avons avancé l’hypothèse selon laquelle les deux tournants prégnants révélés par les travaux expérimentaux, autour de 7 ans et de 10-11 ans, seraient confirmés par notre étude. Nous avons laissé ouverte la question de la définition de ces deux caps.
Notre démarche a impliqué de clarifier, dans un premier temps, notre propre définition du phénomène étudié. Séduite par le modèle de Lakoff & Johnson, nous avons été contrainte d’y apporter quelques restrictions. Dans le but d’étudier des formes présentant une saillance métaphorique suffisamment pertinente, nous avons mis la définition conceptuelle du procédé en parallèle avec celle plus linguistique de Fontanier. Nous avons rappelé la constitution analogique qui caractérise les formes métaphoriques, et avons retenu l’idée d’une double signification. Nous avons distingué la métaphore de la comparaison, ainsi que de divers tropes, classiques ou non, grâce à la classification proposée par Kerbrat-Orecchioni. Nous avons également choisi d’écarter des productions pouvant présenter un caractère métaphorique éteint. En réponse aux études expérimentales mentionnées, nous avons opté pour une prise en compte de toutes les catégories syntaxiques concernées par le procédé ; l’ensemble des formes de métaphores recensées aussi bien dans les typologies classiques que conceptuelles a également été inclu.
Lors de notre analyse, nous avons d’abord pu constater que certaines productions, issues du discours enseignant comme élève, traduisaient des concepts métaphoriques, au sens de Lakoff & Johnson, mais étaient trop éteintes pour faire appel à des processus de compréhension spécifiques. Après avoir écarté ce type d’énoncés ainsi que des cas de tropes paraissant ambigus, nous avons pu nous concentrer sur la production des formes considérées comme pertinentes. Nous avons vu dans l’emploi qu’en fournissaient les éducateurs d’une part, et les élèves d’autre part, deux sortes d’indices indirects de la compréhension des enfants.
Alors que le premier indice jouerait en faveur du tournant précédemment situé autour de 7 ans, les productions des deux groupes d’âge iraient dans le sens de celui repéré vers l’âge de 10 ans. À cela s’ajoute que l’ensemble du corpus révèle une quasi absence de métaphores avant le premier cap, et que le discours des enfants témoigne d’un usage croissant du procédé après le deuxième. De cette manière, l’émergence du traitement métaphorique à l’âge de 7 ans n’est pas exclue. Son perfectionnement pourrait, en outre, se prolonger après 10-11 ans.
Ces conclusions partielles ouvrent le champ pour un prochain travail. En effet, un échantillon tendant à être davantage représentatif des tranches d’âge étudiées mériterait d’être pris en compte ; il pourrait même être étendu à des groupes d’âges adultes. L’analyse systématique de données, issues de méthodes de recueil ainsi que de contextes plus diversifiés, pourrait permettre de confirmer ou d’infirmer les observations effectuées. L’étude d’indices indirects de compréhension sera complétée par celle d’indices plus directs : reprises métaphoriques, réponses congruentes, etc. À partir d’un classement rigoureux s’appuyant, dans un premier temps, sur une typologie classique puis, dans un deuxième, sur une catégorisation conceptuelle, nous étendrons notre questionnement aux processus sous-jacents à la compréhension des métaphores.
Nous caressons l’espoir que la continuité de nos deux travaux puisse apporter des éclairages sur la dichotomie toujours interrogeante entre approche linguistique et approche constructiviste du procédé. Nous nous plaisons également à penser que notre analyse pourrait apporter des éléments de réflexion à des lecteurs intéressés par la pédagogie ou le dialogue avec les enfants.
|
Table des matières
Remerciements
Introduction
PARTIE1 – LA MÉTAPHORE : DÉFINITION ET COMPRÉHENSION CHEZ LES ENFANTS
CHAPITRE1 – DISCUSSION AUTOUR DE LA NOTION DE MÉTAPHORE
1. 1. Définition en compréhension
1. 1. 1. La rhétorique classique
1. 1. 1. 1. Aristote et la métaphore
1. 1. 1. 2. Fontanier
1. 1. 1. 3. Théories de la comparaison et théories de la double signification
1. 1. 2. La théorie standard étendue du trope
1. 1. 2. 1. Tropes classiques
1. 1. 2. 2. Tropes « non classiques »
1. 1. 2. 3. La métaphore : un trope sémantique
1. 1. 3. La rhétorique constructiviste
1. 1. 3. 1. Critique des théories de la double signification
1. 1. 3. 2. Les métaphores conceptuelles
1. 2. Définition en extension
1. 2. 1. Typologie des métaphores selon la rhétorique classique
1. 2. 1. 1. Les métaphores nominales
1. 2. 1. 2. Les métaphores verbales et adjectivales
1. 2. 1. 3. Les métaphores filées
1. 2. 1. 4. Métaphores vives et lexicalisées
1. 2. 2. Typologie des métaphores conceptuelles
1. 2. 2. 1. Métaphores structurelles et métaphores d’orientation
1. 2. 2. 2. Les différents types de métaphores ontologiques
1. 2. 2. 3. Métaphores primaires et métaphores complexes
CHAPITRE2 – LA COMPRÉHENSION DES MÉTAPHORES CHEZ LES ENFANTS
2. 1. Conceptions piagétiennes et néo-piagétiennes
2. 1. 1. Compréhension des métaphores et opération de classification
2. 1. 2. Compréhension des métaphores et pensée formelle
2. 1. 3. Compréhension des métaphores et élaboration de classes d’intersection
2. 1. 4. Compréhension des métaphores et processus de projection
2. 2. Conceptions linguistiques et métalinguistiques
2. 2. 1. Compréhension des métaphores et connaissances encyclopédiques
2. 2. 2. Compréhension des métaphores et connaissances linguistiques
2. 2. 3. Compréhension des métaphores et habiletés métalinguistiques
2. 2. 3. 1. Complexité des formes linguistiques
2. 2. 3. 2. Inférences à partir du contexte
2. 2. 4. Compréhension des métaphores et compétences métaphoriques
2. 3. La compréhension des formes idiomatiques
2. 3. 1. Compréhension des formes idiomatiques et analyse sémantique
2. 3. 2. Compréhension des expressions idiomatiques et inférences à partir du contexte
2. 3. 3. Rôle conjoint de l’analyse sémantique et de l’inférence à partir du contexte
2. 4. Les différents types de tâches employées dans les expériences
2. 4. 1. Tâche d’explication
2. 4. 2. Tâches à choix multiples
2. 4. 3. Tâches de mime et de mémoire
PARTIE2 – ANALYSE DE CORPUS
CHAPITRE 3 ̶ DESCRIPTION DE LA MÉTHODOLOGIE
3. 1. Description du corpus et de l’analyse
3. 1. 1. Description du corpus
3. 1. 1. 1. Le corpus Philosophèmes
3. 1. 1. 2. Le corpus utilisé
3. 1. 2. Description de l’analyse
3. 1. 3. Examen critique de la méthodologie employée
3. 2. Définition du phénomène étudié
3. 2. 1. Définition en compréhension
3. 2. 2. Définition en extension
5 CHAPITRE 4 ̶ ANALYSE
4. 1. Relevé des formes problématiques
4. 1. 1. Relevé des formes métaphoriques éteintes
1. 2. Cas de tropes non métaphoriques
2. Relevé des formes métaphoriques pertinentes
4. 2. 1. Catégorisation partielle des formes observées
4. 2. 2. Relevé complet
3. Problématique
4. Premières observations
Conclusion
Bibliographie
Table des annexes
Télécharger le rapport complet