La communication politique et le confessionnalisme au liban

Dans le souci de protéger les chrétiens dans un Moyen-Orient musulman à la suite de l‟effondrement de l‟empire ottoman, le Général Gouraud, Haut-commissaire de la République Française au Liban et en Syrie, proclame, le 1er septembre 1920, la naissance du Grand Liban en présence notamment du Patriarche maronite Elias Hoyek et du Mufti des musulmans Moustapha Naja. Le Grand Liban relie la Moutassarifiya du Mont Liban (circonscription autogérée dans l‟empire ottoman) à grande majorité maronite et à présence druze, à d‟autres régions (Beyrouth, Bekaa, Nord et Sud) dont nombreuses sont à majorité musulmane. C‟est de là que le Liban actuel tire son identité multicommunautaire.

Ce multi-communautarisme a conduit, depuis 1920, à de nombreux conflits intercommunautaires, non religieux, entre des groupes qui s‟arrachent le pouvoir. Ces conflits opposaient souvent les chrétiens qui ont, pour la plupart, une vision pro-occidentale d‟une part aux musulmans qui sont plus orientés vers les pays arabes d‟autre part, notamment la Syrie, pays frontalier.

Toutefois, il semblerait que plusieurs phénomènes de l‟Histoire contemporaine du Liban aient modifié cette dualité chrétienne-musulmane. En effet, l‟apparence du leadership sunnite de la reconstruction du Liban d‟après-guerre dans les années 1990, soutenu par l‟Arabie Saoudite, pôle sunnite des pays du Golfe ; l‟enracinement de l‟idéologie de la résistance chiite, particulierement depuis le retrait israélien du Liban-Sud en 2000, appuyée par l‟Iran, nouvelle superpuissance du Moyen-Orient depuis la chute de la dictature irakienne de Saddam en 2003 et l‟émigration massive des chrétiens ont changé le visage du conflit.

L‟assassinat de Rafic Hariri, leader sunnite, en février 2005 en plein cœur de Beyrouth et la guerre israélienne contre le Hezbollah, parti chiite par excellence en juillet-août 2006 ont modifié la donne pour de bon. En effet, il semblerait que, à partir de ces évènements qui se sont succédés, un conflit sunnito-chiite se serait déclenché au Liban, un conflit non annoncé qui reflèterait une guerre froide dans la région du Moyen-Orient, entre les Etats de cette région du monde qui se basent sur la religion, à avoir essentiellement l‟Iran et l‟Arabie Saoudite.

De nos jours, nombreux sont les conflits qui se font à travers la communication politique, qui serait pour reprendre la définition de Dominique Wolton (1997), « l‟espace où s’échangent les discours contradictoires des trois acteurs qui ont la légitimité à s’exprimer publiquement sur la politique et qui sont les hommes politiques, les journalistes et l’opinion publique à travers des sondages » (Wolton, 1997).

En ce qui concerne le Liban, ce pays a assisté à une évolution sans précédent en matière de communication politique électorale depuis le retrait des troupes syriennes du territoire libanais en avril 2005. Les élections législatives de mai-juin 2005 étaient certes très importantes et ont constitué un tournant remarquable dans la vie politique libanaise; toutefois, les élections législatives de juin 2009 revêtent un caractère spécial, precisément en communication politique.

Il existe plusieurs angles sous lesquels nous pourrons étudier la question des élections législatives et du conflit sunnito-chiite au Liban, surtout en période d‟élections. D‟ailleurs, la plupart des études se font sous l‟angle géopolitique comme celle de Khalil Ferezly par exemple qui étudie « la géographie confessionnelle au Liban à travers les listes électorales » . Nous n‟échappons pas à une analyse géopolitique du conflit sunnito-chiite au Liban; néanmoins, la réponse à la question de recherche passe selon nous nécessairement par une étude des pratiques communicationnelles qui se distinguent de l‟analyse géopolitique proprement dite. La question de recherche est ouverte mais bien précise, en ce qu‟elle permet d‟avoir une réponse qui peut être positive ou négative. Nous proposons une étude de la communication politique d‟une période électorale récente à travers notamment les discours politiques des deux partis sélectionnés.

La période électorale étant l‟objet de notre thèse, nous considérons que la campagne commence le jour qui suit la clôture officielle des candidatures, à savoir le 22 avril 2009. La durée de notre étude s‟étendra donc du 23 avril 2009 au 6 juin 2009, la veille du jour des élections. Toutefois, pour des raisons qui seront certes argumentées dans notre processus de recherche, il se peut que certains discours soient sélectionnés en dehors de cette durée ci-dessus délimitée.

Nous nous intéresserons en particulier à deux partis politiques de confessions différentes:
• le Courant du Futur (Sunnite)
• le Hezbollah (Chiite)

La raison pour laquelle nous avons choisi d‟étudier la communication de ces deux partis politiques en particulier réside dans le fait que nous voulons ressortir les tensions interconfessionnelles de leurs discours électoraux pour pouvoir discerner si conflit sunnito-chiite il y a, comme tendent à l‟assurer les analyses géopolitiques. Il s‟agit, en effet, dans notre projet de recherche de chercher à prouver ou à réfuter, à travers la communication politique – plus précisément les discours électoraux –, les analyses géopolitiques selon lesquelles le conflit chrétien-musulman se serait récemment tourné en conflit sunnito-chiite au Liban ; ce qui pourrait d‟ailleurs refléter un conflit sunnito-chiite dans la région du Moyen-Orient. Quant aux partis politiques des autres confessions présentes au Liban, notamment les partis chrétiens et druzes, ils ne feront pas partie de notre champ d‟étude, essentiellement parce qu‟ils se trouvent, à chaque fois, dans telle ou telle lignée politique ; c‟est-à-dire soit dans le camp du 14 mars avec le Courant du Futur sunnite soit dans le camp du 8 mars du Hezbollah chiite (Vannier, 2009).

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Table des matières

Introduction générale
1- L’objet de recherche
2- La question de recherche
3- Le choix d‟une problématique
4- Les hypothèses de recherche
5- La méthodologie et les ressources
6- La formulation du plan
7- L’opportunité et l’intérêt du projet
Première partie : Vers une mondialisation de la communication politique
I- L’emergence de la communication politique
II- La méthode de la communication politique électorale
III- Les outils de la communication politique
IV- Les acteurs de la communication politique
V- La communication de crise
Deuxième partie : La communication politique au Liban
VI- La structure confessionnelle du Liban
VII- La culture politique et informationnelle au Liban
VIII- Le contexte des élections législatives de 2009
IX- La communication politique au Liban
X- La communication politique des deux partis politiques étudiés
Troisième partie : Les tensions intercommunautaires du discours électoral au Liban
XI- Les méthodes d‟analyse de discours
XII- La méthode adoptée
XIII- L’analyse qualitative des discours
XIV- L’analyse quantitative des discours
Conclusion générale

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