La communication verbale
La communication verbale (CV) est le fait de communiquer avec autrui par la parole et représente « toutes les informations qui sont échangées verbalement » (Boizumault, 2013). Cette-ci est utilisée pour transmettre des informations. Dans l’enseignement, elle est utilisée pour donner des consignes, des conseils aux élèves.
Selon Caprais (2017), nous communiquons verbalement dès le plus jeune âge par « des sons, tels que des cris, des pleurs, des rires ou des grognements » puis nous remplaçons ses sons par des mots pour exprimer clairement notre message. Ces mots, ces paroles sont exprimés différemment en fonction de la façon de parler, de l’intonation de la voix, du débit vocal. Ainsi ces critères peuvent être considérés comme des aspects vocaux faisant parti de la communication vocale. Selon Boizumault (2013), « Les trois principaux constituants de l’énoncé total (…) sont donc la verbalité (que l’on peut transcrire), la vocalité (que l’on peut décrire) ; la kinésique (que l’on peut décrire). ». Ainsi dans notre mémoire, nous intégrerons « la vocalité » dans la communication non verbale.
La communication non verbale
Nous abordons au sein de ce mémoire, à plusieurs reprises, la notion de communication non verbale (CNV). Cette communication se fait avec le corps, sans les mots, sans la parole. Selon Dufour Bocion et Jilani (2013) « la communication non verbale exprime les émotions et les sentiments. Les silences, les mimiques, l’intonation de la voix, les distances entre les personnes ou encore l’habillement renvoie un message et donne du sens au langage non verbal. ». Alors, nous pouvons comprendre que, ces CNV permettent de renforcer et crédibiliser un message. En reprenant les termes de Cosnier et Brossard (1984), Cadière (2013) nous indique que « l’étude de la communication non verbale ne considère plus la communication comme un acte uniquement verbal et conscient mais comme un procédé « multimodal » ou « multicanal » ». Selon elle « l’apparence et les mouvements du corps deviennent aussi signifiants que le message verbal », les CNV ont donc alors un rôle aussi important que la parole même. En EPS, Boizumault et Cogerino (2012) nous indiquent que « les communications non verbales employées peuvent avoir plusieurs fonctions : contribuer à la mise en place de la situation (complément de la consigne, concrétisation de la tâche ou des mobilisations à effectuer), ou à sa régulation (feed-back (FB) correctifs, d’encouragement, de félicitations, de critiques) ou conservation du contrôle. ». Ainsi, elles seraient utilisées à des fins pédagogiques et favoriseraient l’apprentissage des élèves. Différentes fonctions sont donc associées et définies par Boizumault et Cogerino (2012) au concept des CNV. En effet, ces dernières définissent quatre types de fonctions :
La première fonction identifiée est la fonction technique. Celle-ci renvoie aux gestes permettant « la transmission de techniques sportives », elle est utilisée pour montrer une figure ou un mouvement. Ces interactions non verbales ont pour objectif d’aider les élèves à s’approprier le mouvement adéquat.
La fonction relationnelle est la deuxième fonction identifiée. Celle-ci est relative à l’attitude qu’adopte l’enseignant avec ses élèves et donc à sa relation avec les élèves. Ainsi, les interactions faites entre enseignant et élèves ont pour objectif d’apaiser ou de rassurer les élèves.
Le troisième type de fonction est la fonction déshumanisée. Elle fait référence aux « gestes routiniers » qui sont devenus automatisés. (Bonneton-Tabariès et LambertLibert, 2006).
La quatrième et dernière fonction est la fonction communicationnelle. Celle-ci signifie « le fait d’entrer en interaction avec l’élève » Cette dernière a donc pour objectifd’organiser les situations et les comportements adaptatifs de la part des élèves afin d’obtenir une conduite motrice optimale.
Ainsi, plusieurs catégories de CNV peuvent être définies : la gestualité, le regard, la proximité, le toucher, la posture et l’attitude, les mimiques. Ces faits et gestes sont employés de manière parallèle ou isolé à la voix. Ces CNV peuvent alors donner des informations précieuses sur la façon d’interpréter un message.
La gestualité
La gestuelle constitue une grande partie des communications non verbales employées par l’enseignant. En effet, cette dernière peut être utilisée pour diverses raisons : démontrer, désigner, et peut donc être classifiée selon ses typologies. En ce sens, la gestualité est une CNV très variée, on y retrouve des gestes pouvant donner des informations supplémentaires à la parole, des gestes significatifs ou non, des gestes codifiés ou non. Ainsi, Moulin (2004) propose une typologie de gestes : « gestes de répression », « gestes de provocation », « gestes d’injonction », « gestes de désapprobation », « gestes de destination », « gestes de stimulation », « gestes de légitimation », « gestes d’affection », « gestes de séduction », « gestes d’approbation », « gestes de désignation », « gestes de sollicitation », « gestes de consolation », « gestes d’intégration » et « gestes de captation ». Alors, chaque geste a une signification particulière, renforçant ou remplaçant le verbal. De plus, dans la plupart des cas, ils sont présents afin d’accentuer l’aspect affectif. En effet lorsque l’élève effectue un exercice qu’il réussit, il va alors inconsciemment se tourner vers l’enseignant, cherchant un geste de réussite, par exemple un pouce levé de la part de son enseignant.
Le regard
Ce dernier peut être utilisé afin de capter l’attention des élèves. Ainsi, afin d’obtenir l’attention d’un élève discutant, l’enseignant peut alors mettre en place un regard fermé ou soutenu afin de faire comprendre à l’élève en question ce qu’il attend de lui : qu’il soit à l’écoute, ce, sans même prononcer un mot. En ce sens, le regard est un moyen pédagogique fort, un outil important pour l’autorité.
Selon Cosnier (1996), lors d’une interaction, le regard a une valeur importante. En effet, il permet de « marquer l’engagement et le désengagement », c’est-à-dire qu’il permet « la suspension ou la reprise de la conversation ». S’ajoutent à cela les émotions que l’enseignant peut utiliser comme des expressions faciales. Ces dernières ont alors pour objectif de faire éprouver des sentiments, des émotions par les élèves.
Des concepts comme points ressources
Afin de répondre à notre question de recherche, nous nous sommes appuyées sur différents travaux et concepts, notamment le concept « d’immediacy » de Andersen (1979) et Merhabian (1971). Ce concept « peut être défini comme les manifestations non verbales qui produisent un effet sur l’efficacité de l’enseignement. L’idée est que la proximité favorise les liens. Ces études montrent l’impact positif des CNV sur les apprentissages affectifs et cognitifs en classe et sur la motivation, améliorés significativement par ces comportements des enseignants. » (Boizumault et Cogérino, 2012). La manière dont les enseignants se manifestent impacterait donc sur le climat de classe. Ces CNV peuvent devenir des techniques théâtrales pour certains enseignants, en abusant même pour obtenir un comportement souhaité de la part des élèves.
Dans notre travail de recherche, nous voulons comprendre pour quelles raisons l’enseignant utilise un type de CNV plutôt qu’un autre, quels impacts il veut avoir sur les élèves ou un élève en particulier. Quels types de CNV sont susceptibles d’influencer plus ou moins les élèves selon eux. Plusieurs travaux se sont déjà intéressés à ce type de recherche. En effet, les travaux de Boizumault et Cogerino (2012) nous démontrent que le professeur d’EPS, enseignant dans des lieux multiples et variés, est amené à utiliser des communications spécifiques comme une communication par le corps pour montrer, démontrer, corriger à des distances variées. Ainsi, de nombreuses CNV peuvent être mises en place à des fins différentes : communicationnelles, techniques et relationnelles.
Dans notre étude de recherche, nous allons étudier et analyser deux contextes différents. Nous allons comparer deux enseignants de deux établissements différents : un établissement « ordinaire » et un « établissement régional d’enseignement adapté ».
Selon Boizumault (2013) « Les communications non verbales (CNV) diffusent des informations auprès des élèves, peuvent être contradictoires avec les communications verbales, les desservir, ou transmettre, à leur insu, les attentes des enseignants. ». Ainsi, en ce sens, les CNV permettent de créer une interaction avec les élèves dont l’objet peut être pédagogique ou didactique. Ces CNV peuvent alors être utilisées en appui sur la parole, mais peuvent également être employées de manière isolée.
Alors au sein même de ces CNV, des « moyens » peuvent être plus déterminants que d’autres. Bless (2018) explique que « le regard pouvait être un outil puissant pour l’enseignant si celui-ci est pleinement présent à ses élèves, notamment pour susciter leur attention en rencontrant leur regard, mais aussi en le redirigeant vers le savoir à transmettre. ». Ainsi, seul le regard pourrait alors suffire pour obtenir un comportement voulu de la part des élèves. Cette dernière nous démontre également dans son étude, que les gestes « peuvent être para-verbaux, prosodiques, déictiques, iconiques et autonomes. ». Toutes ces fonctions ont plusieurs intérêts. En effet, les gestes peuvent servir autant à « provoquer l’attention par leur aspect démonstratif ou bruyant, qu’à motiver les élèves par l’énergie qu’ils leur transmettent ». En ce sens, ces derniers peuvent permettre de « décrire un élément de savoir » facilitant ainsi sa compréhension. (Bless, 2018)
S’ajoute à ces deux aspects (le regard et les gestes), la voix. Selon GausmandRuelle (2013), la voix peut également avoir une influence sur la place de l’enseignant, ce qu’il attend de la part des élèves. Cette dernière nous explicite dans son mémoire que la voix et plus précisément son intonation, le rythme, le débit peuvent avoir des effets sur le comportement des élèves. Foussard (2011) « souligne que la voix reste « l’outil privilégié des enseignants ». Une voix calme, claire et posée permet d’avoir une écoute attentive de la part des élèves. Une voix forte et un ton ferme sont parfois nécessaires lorsque les élèves sont dispersés.
L’enseignant peut beaucoup jouer de sa voix et cela influence alors le comportement des élèves. En ce sens il est inutile de lever le ton lorsque le niveau sonore de laclasse est déjà élevé, cela ne fera que renforcer le brouhaha régnant dans la classe. » (Gausmand-Ruelle, 2013).
Problématique
La parole est un moyen incontournable pour transmettre une consigne, un savoir, mais qu’en est-il dans l’enseignement de l’EPS ? Lorsque l’enseignant doit faire face à un gymnase partagé, par conséquent être en présence de nombreux bruits. Qu’en est-il lorsque ce dernier doit exercer devant une classe dite « difficile » et « agitée », des élèves n’étant pas à l’écoute ? Face à différents éléments perturbateurs, bloquant ou modifiant la transmission du message de l’enseignant, causant ainsi des problèmes de communication. L’enseignant est ainsi amené à utiliser différentes stratégies pour pouvoir accompagner les élèves dans leurs apprentissages. De plus, en cours d’EPS, les élèves peuvent bouger, ils ne restent pas assis comme ils le sont dans les autres matières. La gestion des élèves dans les grands espaces est un aspect important dans cette discipline. Il s’agit donc pour l’enseignant d’obtenir un certain ordre afin de pouvoir faciliter l’apprentissage de ses élèves.
Ainsi, plusieurs questions peuvent être posées sur le comportement adopté par l’enseignant pour obtenir une adhésion, un apprentissage de ses élèves.
L’enseignant va-t-il adapter son style d’enseignement en fonction des effets qu’il cherche à produire sur l’élève? Quelles postures et attitudes l’enseignant va-t-il adopter pour motiver ses élèves ? Comment va t-il utiliser son corps pour obtenir l’attention de ses élèves ? Quelles réactions veut-il provoquer chez ses élèves en les fixant du regard, en se mettant à leur hauteur ?
METHODE
Nous avons étudié auprès de deux enseignants intervenant dans des contextes différents. Pour cela, nous avons observé les deux enseignants et analysé les intentions qu’ils ont eu en utilisant les différentes CNV. Nous avons pris appui sur une grille d’observation critériée. Deuxièmement, notre étude s’est appuyée sur un entretien avec chacun des deux enseignants.
Les Participants
Pour notre travail de recherche, les participants étaient deux enseignants distincts, que l’on nommera Sylvie et Julien, provenant de deux établissements différents, de contextes différents et d’âge différents.
Sylvie, une enseignante « expérimentée » provenant d’un collège dit « ordinaire », dans un milieu urbain. Cette dernière a 35 ans d’expérience, mère de famille, elle a toujours exercé le métier d’enseignante d’EPS. Elle a enseigné une dizaine d’année en région parisienne avant d’arriver dans la région nantaise.
L’autre enseignant est un homme de 36 ans, Julien, il a 12 ans d’expérience en tant qu’enseignant d’EPS. Il a enseigné pendant 9 ans en région parisienne et enseigne dans la région Pays de la Loire depuis 3 ans. Il a obtenu sont CAPEI (Certificat d’aptitude professionnelle aux pratiques de l’éducation inclusive) en 2019. Il est actuellement sur deux établissements : dans un EREA (Établissement régional d’enseignement adapté), avec des élèves en grande difficulté scolaire et certains élèves en dispositif ULIS (Unités localisées pour l’inclusion scolaire) et dans un lycée professionnel de l’académie de Nantes. Ces deux enseignants exercent donc auprès d’un public différent.
Les élèves quant à eux, sont observés mais pas analysés, nous avons porté notre attention sur l’enseignant.
Méthode de recueil des données
L’observation sur le terrain
En premier lieu, nous avons pris rendez-vous avec les enseignants pour venir les observer sur plusieurs cours de badminton avec une classe précisément. Durant ces observations sur le terrain, nous nous tenions à l’écart de manière volontaire afin de ne pas gêner la leçon. Nous observions les enseignants lors de la prise en main des élèves dans la cour de récréation jusqu’à la sonnerie de fin du cours. Nous prenions des notes sur les différents critères présents dans notre grille d’observation (Annexe 1, 1.1, 1.2) afin de relever les différentes CNV utilisées par les enseignants. Cette grille d’observation se composait de plusieurs catégories.
RESULTATS
Lors de l’entretien à distance, composé de questions ouvertes, les enseignants nous ont orientées vers leurs visions de la CNV, pourquoi ils utilisaient telle ou telle façon d’être à l’égard de leurs élèves et dans quels objectifs.
Présentation détaillée
Qu’est-ce que la CNV, avec quelle fonction et dans quelles conditions est-elle exploitée ?
Premièrement Sylvie, fait une différence entre la communication verbale qu’elle définit comme s’exprimer « oralement haut et fort devant les élèves » tandis que selon elle, la CNV se définit comme « tout ce qui est plutôt expressif et qui vient de mon attitude comportement (…) Tout ce qui vient de la gestuelle. Tout ce que je peux ajouter en plus de la parole, ou bien même sans la parole d’ailleurs ». Selon Julien, la différence entre la CV et la CNV se fait au niveau du média utilisé, « soit le langage corporel, soit le langage verbal ». Pour lui, « c’est vraiment deux façons de communiquer qui sont vraiment hyper complémentaires ». Il définit la communication non verbale comme « une communication qui se fait sans les mots, uniquement avec le corps, sur des signaux visuels ». Il ajoute à cela : « si on fait du langage verbal, il y a toujours du non verbal à coté, c’est difficile de (…) dissocier les deux. »
Ces deux enseignants semblent avoir une définition similaire de la CV et de la CNV, nous remarquons dans leurs propos cette notion de complémentarité entre ces deux communications.
Ainsi, en lien avec ces définitions autour des différents types de communication, nous avons décidé de nous pencher sur le versant élève, en nous demandant si les CNV peuvent sensibiliser les apprenants. Sylvie, avec son expérience et la mise en place de ces CNV durant ses leçons, pense que quand les élèves sont en situation de stress ou d’incertitude/de questionnement, effectivement on peut influencer/influer des élèves (pas tous) par notre attitude non verbale pour pouvoir les aiguiller négativement ou positivement. Ainsi, notre comportement aurait un impact sur leurs apprentissages que ce soit, selon elle, de manière positive ou négative. Cependant, deux distinctions sont nécessaires selon cette dernière quant à l’utilisation des CNV.
En effet, « Je resterai sur la parole dans un premier temps et trop d’interrogations chez les élèves, trop de questionnements, là je rassemble tout le monde et je reprends du frontal avec tout le monde pour réexpliquer et renvoyer les élèves en situation. Le non verbal sera plutôt dans les interventions individuelles ou par petits groupes, des ateliers pour essayer faire mûrir la réflexion et élaborer des réponses de la part des élèves. Utilisé plutôt de manière individuelle. » nous dit cette dernière.
Ainsi, celle-ci utiliserait davantage les CNV de manière individuelle ou face à un petit groupe d’élèves dans un souci de réflexion sur leur activité proposée.
L’enseignant de l’EREA, nous affirme que « certains y sont sensibles », mais ils n’en ont pas ou peu conscience. Pour ses élèves, la CNV est une prémisse, il se doit d’ajouter un langage verbal en plus de cette CNV pour être sûr que ses élèves aient bien compris le message. En effet, selon lui ses élèves de l’EREA « n’ont pas tous les codes », ils ne comprennent pas forcément les signaux visuels utilisés par l’enseignant. Ainsi pour lui, « c’est difficile de se passer des mots malgré tout, il y en a besoin », la communication verbale semble donc nécessaire pour se faire comprendre. Julien nous donne l’exemple suivant : lorsqu’il attend le silence de la part d’un élève et qu’il le fixe volontairement, l’élève ne va pas interpréter ce regard, il continuera à discuter avec son camarade, et les autres élèves ne vont pas forcément réagir non plus. A la différence des élèves du lycée professionnel qui, selon lui, « comprennent par un regard ou une posture » et il ajoute que « si la personne à qui tu t’adresses n’a pas compris, les autres vont le comprendre et lui transmettre le message. »
Ces deux enseignants sont persuadés que les CNV impactent les élèves, leurs comportements. Cependant nous remarquons qu’ils n’affirment pas que les CNV impactent tous les élèves mais certains d’entre eux et à certains moments. Ainsi certaines CNV toucheraient plus tels ou tels élèves et d’autres CNV impacteraient davantage d’autres élèves.
L’exploitation de l’espace
Suite aux observations sur le terrain, nous avons décidé lors de l’entretien, d’aborder la question de l’exploitation de l’espace. Quelle utilisation de l’espace ont ces enseignants, dans quels objectifs, quelles incidences cela peut avoir sur les élèves ? Sylvie nous indique qu’elle utilise l’espace de deux manières différentes : « Je me déplace davantage pour aller au contact de mes élèves quand ceux-là sont par groupe, par binôme. Quand ils sont en situation de travail collectif, mon déplacement est réduit, je les regarde davantage de loin. ». Selon elle, l’utilisation de l’espace par l’enseignant peut aider à transformer le comportement des élèves. En effet, lorsque les élèves sont par groupe, par atelier, le contact peut être bénéfique afin de démontrer et donner du sens à ce qu’ils font. De plus, s’ils ont un comportement plutôt négatif, ne respectent pas les règles, ne font pas ce qui est attendu, « je serai plus en retrait dans un endroit où je vois tout le monde et où les élèves me voient aussi » affirme-t-elle. Les élèves repèrent facilement où l’enseignant est placé, ainsi s’ils ont une attitude négative et si leur regard est orienté vers l’enseignant, celui-ci peut exploiter un regard, une attitude non verbale dans le but d’influencer les élèves de manière positive.
Lors des observations de Julien, nous avons pu remarquer qu’il se déplaçait dans tout le gymnase et restait rarement statique à un endroit. Lors de l’entretien, il nous a confirmé cette observation en nous affirmant l’idée que « plus tu as un lieu de cours qui est vaste, plus, toi en tant que personne, il faut l’occuper, (…) te montrer partout ». En effet, selon lui, « il y a cette idée d’occuper tout l’espace, de passer voir tout le monde et de faire de la régulation de proximité mais aussi de la régulation de loin pour montrer qu’on est hyper présent ». Avec cette « pression visuelle », les élèves auraient ainsi l’impression que le professeur les regarde constamment et cela lui permettrait d’avoir une meilleure « tenue de classe ».
Julien semblerait plus se déplacer que Sylvie, en effet cette dernière serait plutôt statique et lui plutôt mobile. Julien varie ses déplacements et les distances entre lui et ses élèves tout au long de la séance, tandis que l’utilisation de l’espace par Sylvie dépend des groupements des élèves.
La proxémie
Lors de l’observation sur le terrain, nous avons pu voir que Sylvie utilisait fréquemment le contact physique lors des démonstrations. Lors de notre entretien auprès d’elle, nous avons donc évoqué cet aspect observé, selon cette dernière, ce contact physique permet de faire comprendre, donner du sens, mais également de rassurer l’élève comme par exemple : la parade en gym. De plus, cette manipulation tactile de l’enseignant envers les élèves permettrait de « faire apparaître quelque chose de précis chez eux ».
Lors des observations de Julien sur le terrain, nous avons pu remarquer qu’il utilisait le contact facilement avec ses élèves. Au début de son cours, il serrait la main à certains de ses élèves, lors du trajet pour aller au gymnase il mettait son bras autour de leur cou, pendant son cours, il était souvent proche de ses élèves et rentrait régulièrement en contact avec eux. Lors de l’entretien, nous avons donc questionné Julien sur cette proximité. Comme Sylvie, Julien utilise le contact physique pour l’aspect sécuritaire, notamment pour les parades. Mais il l’utilise aussi pour accentuer sa présence en rentrant en contact avec l’élève. Par exemple, « pour féliciter, je mettrais facilement ma main sur leur bras ou ma main dans le dos » nous dit-il. Le contact physique peut aussi permettre de calmer, de canaliser les élèves selon lui. L’impact que l’enseignant veut avoir sur l’élève est ciblé grâce au type de contact, en effet, il y a différentes façons de rentrer en contact avec eux, soit un contact « ferme » qui a pour but de « les calmer et les poser » ou plutôt un contact rassurant. En utilisant le contact, Julien souhaite apporter du « poids, du crédit » à ce qu’il dit, il l’utilise donc en complément de la CV. Pour lui, plus les signaux sont nombreux, plus on utilise les différents sens, plus le message se précise et mieux il sera interprété par l’élève. En effet, par la CV ; on joue sur l’audition, par la posture, les gestes ; on joue sur la vue et par le toucher, le contact ; on joue sur le toucher, ainsi la présence de l’enseignant est renforcée. Julien nous indique qu’il utilise beaucoup le contact physique avec ses élèves de l’EREA mais très peu avec les élèves du lycée. « Ce n’est pas forcément nécessaire » nous dit-il, « le langage corporel plus le langage verbal ça suffit amplement à se faire comprendre » par les lycéens. Ainsi nous pouvons en déduire qu’il adapte sa proximité en fonction des élèves.
La proximité est utilisée différemment par ces deux enseignants. Sylvie utiliserait le contact à des fins pédagogiques uniquement alors que Julien semble l’utiliser de manière plus naturelle, pour féliciter, pour prendre en considération ses élèves.
Cependant nous pouvons remarquer une similitude : ils veulent tous les deux permettre une meilleure compréhension du message par les élèves grâce aux contacts physiques.
L’exploitation du silence et les éléments sonores
Les éléments sonores peuvent être, pour les élèves, des moyens de percevoir les attentes de l’enseignant.
Dans notre observation sur le terrain, l’enseignante utilisait souvent une voix forte et exploitait parfois des temps de silence. Il nous a donc semblé nécessaire que cette dernière nous explique ce qu’elle attendait par ce silence. Il en est ressorti alors, que le silence permettrait de récupérer le calme du groupe, lorsqu’elle a du mal à avoir de l’attention de tous ses élèves, de plus cela permettrait une meilleure concentration pour ses élèves. « Il s’agit de créer, de demander et d’attendre le silence » nous ditelle. Sylvie utilise aussi le silence pour laisser les élèves réfléchir quand ils sont en train de chercher une solution en autonomie. Elle utilise le silence de façon ponctuelle.
Au même titre que Sylvie, Julien utilise le silence pour capter l’attention des élèves lors des moments de transmission de consigne. Cependant, il nous avoue que cela ne fonctionne pas vraiment avec ses élèves de l’EREA, pour eux, si « t’es silencieux, c’est que tu n’existes pas ». De plus, il utilise le silence pour ponctuer ses consignes, pour laisser un temps de réflexion à ses élèves, afin d’améliorer leur compréhension des consignes.
Par l’utilisation du silence, Sylvie et Julien veulent produire les mêmes effets sur leurs élèves. Nous apercevons deux objectifs : être silencieux pour demander le silence mais aussi utiliser le silence pour laisser réfléchir les élèves.
Quant à la tonalité de la voix, selon Sylvie, elle semblerait très importante. En effet, en fonction de l’endroit où l’on se trouve, « je vais parler plus ou moins fort » indiquet-elle. De plus, il semblerait que lorsqu’il s’agit de passer des consignes importantes, le fait de hausser la voix permettrait de plus capter les élèves, notamment en classe entière. A contrario lorsqu’elle parle face à un seul élève, elle aurait tendance à adopter une voix plus posée, plus calme de façon à réexpliquer la consigne calmement, sans « agresser » l’élève. Et quand cette dernière attend une réflexion de la part de ses élèves, elle utilise des phrases « provocatrices » telles que « On n’est pas à l’heure de la sieste donc on active la cervelle » avec une intonation de voix plutôt sèche. Ainsi, elle modifie sa voix en fonction de ses attentes. De plus cette enseignante se déplace peu pendant ses cours, de ce fait, lorsqu’elle prend la parole, c’est souvent avec une forte intonation de voix.
Pour Julien, les enseignants d’EPS auraient tendance à parler fort spontanément et inconsciemment à cause du lieu d’enseignement. Mais « ce n’est pas nécessaire » selon lui. En effet, « plus tu baisses le volume, plus ça leur demande un effort d’écoute et d’attention, si on parle fort ça laisse de la place à la parole de leur part parce que du coup ça s’entendra moins vu qu’on fait déjà beaucoup de bruit. Donc le volume faible favorise de l’attention ». L’important serait de « varier les intonations » en fonction du message que l’on veut faire passer. L’intonation permettrait de donner plus de « crédit » au message transmis. Pour Julien, parler fort permettrait d’envoyer des messages à longue distance, mais cela montrerait une « sorte d’agressivité » et beaucoup de ses élèves y sont sensibles. Donc « l’idée c’est de parler le plus normalement possible » nous dit-il.
Nous remarquons des différences entre Julien et Sylvie dans l’utilisation de leur voix.
Sylvie hausse le ton pour capter ses élèves tandis que Julien baisse le volume pour favoriser leur attention. Cependant, nous remarquons que ces deux enseignants varient leurs intonations en fonction du message à faire passer et de leur contexte d’enseignement. De plus, ils associent forte intonation de voix et agressivité envers l’élève.
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Table des matières
I. INTRODUCTION
I.1 Apports théoriques
I.1.1 La communication
I.1.1.1 La communication verbale
I.1.1.2 La communication non verbale
I.1.2 Des concepts comme points ressources
I.2 Problématique
I.3 Hypothèses
II. METHODE
II.1 Les Participants
II.2 Méthode de recueil des données
II.2.1 L’observation sur le terrain
II.2.2 Les entretiens
II.3 Procédure d’analyse des données
III. RESULTATS
III.1 Présentation détaillée
III.2 Comparaisons des interventions et conceptions des enseignants
IV. DISCUSSION
IV.1 Interprétation des résultats
IV.2 Apports pour les enseignants
V. CONCLUSION
V.1 Résumé des apports de la recherche
V.2 Les limites de notre travail
V.3 Les perspectives
VI. BIBLIOGRAPHIE
VII. ANNEXES
VII.1 Annexe 1 : Grille d’observation
VII.1.1 Annexe 1.1 : Grille d’observation de Sylvie
VII.1.2 Annexe 1.2 : Grille d’observation de Julien
VII.2 Annexe 2: Guide de questionnement
VII.3 Annexe 3 : Entretien avec Sylvie réalisé par Orna-Fiona
VII.4 Annexe 4 : Entretien avec Julien réalisé par Mémona
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