La dématérialisation des services financiers. A l’instar des autres branches de droit, le droit financier a été profondément bouleversé par le développement des nouvelles technologies qui a entraîné une dématérialisation massive des transactions financières. Entamée dès les années 1980 , la dématérialisation a touché aussi bien le système bancaire , les valeurs mobilières (actions, obligations ou encore leurs portefeuilles (OPCVM, SICAV) et les effets de commerce par la création dès 1973 de la lettre de change relevé afin de permettre une circulation informatisée des créances mobilisées facilitant ainsi leur prestation en ligne). Ainsi, et grâce à leur dématérialisation, les services financiers ont pu être commercialisés à distance comme l’a souligné la DSF : « En raison de leur nature immatérielle, les services financiers se prêtent particulièrement à la vente à distance » , et particulièrement sur Internet.
Le recours au site Internet. Les établissements de crédit et les établissements financiers disposent ainsi par le biais du site Internet d’une plateforme supplémentaire pour commercialiser leurs produits et entrer en contact avec leurs clientèles et conquérir de nouvelles. C’est le concept du ‘’multicanal ’’ que beaucoup de banques –notamment françaises- ont privilégié suite à l’échec de nombreuses banques 100% virtuelles qui n’ont pas pu résister à une concurrence d’ampleur mondiale. Ainsi, le développement des nouvelles technologies a ainsi permis de passer de sites simplement ‘’informatifs’’ qui mettent à la disposition de leur clientèle toutes les informations nécessaires sur les produits financiers proposés à des sites ‘’transactionnels’’ qui permettent la conclusion en ligne d’opérations pour lesquelles une présence en agence était indispensable.
L’ouverture de sites Internet a permis le rapprochement des prestataires de services financiers de leurs clients en leur offrant une palette de services à domicile. Le dialogue est certes virtuel, indirect, se passe entre ordinateurs, mais permet d’exprimer la volonté aussi bien du client que celle de l’opérateur financier.
Plan. La dématérialisation croissante des services financiers a fait donc du site Internet un nouveau support de commercialisation des services financiers au même titre des autres supports classiques (TITRE I) qui a permis la conclusion des contrats financiers en ligne que nous étudierions dans une optique de protection des consommateurs (TITRE II). Toutefois, en raison de la mondialisation des échanges financiers qui peuvent s’effectuer sur la toile, Internet a conduit à réguler et à moderniser les règles du commerce électronique pour les adapter à un contexte nouveau. Cela se vérifie notamment en matière de règlement des conflits (TITRE III).
LE SITE INTERNET, SUPPORT DE COMMERCIALISATION DE SERVICES FINANCIERS À DISTANCE
Internet : un média ou un multimédia ?
Etant à la fois considéré comme un support publicitaire , un moyen d’information, de recherche et de divertissement, Internet a la particularité de réunir l’ensemble des modes de télécommunications déjà existants (son, image, texte, vidéo, autrement dit la télévision, la radio et la presse écrite). Le site Internet se trouve ainsi ‘’….au carrefour de la presse et de l’édition, de l’informatique et des télécommunications, de la communication électronique et de l’audiovisuel ». C’est ce qu’on appelle un multimédia, terme d’origine américaine qui s’est inscrit progressivement dans le droit européen. De ce fait, Internet est-il alors considéré comme un nouveau média à part entière nécessitant l’adoption de règles spécifiques adaptées ou bien un multimédia, et lui sera applicable alors, les réglementations applicables à chacun de ces médias? Ou ni l’un ni l’autre, comme le prétendent certains qui considèrent qu’Internet est une zone de non droit qui échappe à toute réglementation ?
‘’Le mythe du vide juridique’’
Prétextant la dématérialisation des services prestés en ligne et qu’Internet constitue uniquement une relation entre ordinateurs, certains acteurs du commerce électronique ont souhaité soustraire les opérations en ligne de toute réglementation nationale. Cette approche a bien évidemment été contestée, et il a été considéré qu’Internet, malgré sa virtualité et son immatérialité, n’échappe pas à l’emprise du droit. Messieurs BONNEAU et DRUMMOND ont justement souligné que « l’absence d’autorité centrale propriétaire du réseau ne signifie pas qu’il existe un vide juridique» . Le même constat a été fait par la mission interministérielle sur l’Internet présidée par Mme FALQUE –PIERROTIN qui a affirmé que « ….contrairement à ce qui a pu être dit ici ou là, il n’ y a pas de vide juridique sur l’Internet mais au contraire pléthore de textes applicables, certaines adaptations doivent cependant être mises en œuvre par chaque branche du droit afin de faciliter le respect par les services en ligne d’un genre nouveau des règles protectrices de la personne et du consommateur ».
Quelles règles applicables à Internet ?
Les premières réponses du droit français quant à la question de savoir si Internet nécessitait l’élaboration de règles spécifiques ou demeurait soumis aux règles générales et sectorielles applicables à chaque activité ont été fournies entre autres, par le Conseil d’Etat, par les autorités de régulation, en l’occurrence la Commission des opérations de bourse (COB) et le Conseil des marchés financiers (CMF) déjà confrontées aux questions de Minitel, par la Banque de France dans son livre blanc qui comporte une série de recommandations en matière prudentielle dans le contexte électronique. Le Conseil d’Etat a tranché en faveur de l’application des dispositions nationales sous réserve de quelques adaptations : « Les questions juridiques suscitées par le développement d’Internet et des réseaux numériques ne sont pas de nature à remettre en cause les fondements mêmes de notre droit », au contraire, « l’ensemble de la législation existante s’applique aux acteurs d’Internet (…)» . Par ailleurs, la COB a rappelé, en son temps, à travers plusieurs recommandations que la réglementation financière préexistante s’applique également dans le contexte électronique : « les règles relatives à la diffusion de l’information financière s’appliquent également à la diffusion sur Internet » . De même, elle a rappelé que les ‘’règles relatives à la promotion et à la commercialisation de produits de placement collectif et de services de gestion sous mandat s’appliquent également aux opérations effectuées via Internet’’ . Quant au CMF, il a prévu dans une décision générale en septembre 1999 un ensemble de dispositions spécifiques destinées aux prestataires de services d’investissement commercialisant les services en ligne . Par ailleurs, la Banque de France a publié en décembre 2000 un important livre blanc intitulé « Internet, quelles conséquences prudentielles ? » qu’elle a rédigé en collaboration avec les représentants des établissements de crédit, d’entreprises d’investissement et du secrétariat général de la Commission bancaire. Ce livre contient une série de recommandations et de conseils concernant l’exercice des services financiers en ligne. Il prévoit sur ce point que ‘’réaliser des opérations bancaires ou financières par Internet ne constitue pas un type nouveau d’activité. Le réseau joue simplement le rôle d’un nouveau média permettant l’exercice de ces opérations à distance, sans considération de frontières géographiques’’ .
Elaboration de règles spécifiques à Internet en parallèle des règles classiques
L’exercice des services via Internet a constitué un sérieux défi pour les Etats qui ont amélioré peu à peu leurs droits nationaux afin d’appréhender ce nouveau mode de fourniture de services. Par ailleurs, ils ont transposé dans leurs droits nationaux les dispositions européennes spécifiques et harmonisées relatives à la prestation des services en ligne. Le droit de l’Union européenne s’est constamment adapté (à travers notamment la mise à jour régulière des directives et par l’adoption de nouvelles directives spécifiques) afin de réglementer les services qui transitent en ligne, et afin de mieux appréhender les questions juridiques posées par ce nouveau mode de prestation de services. Grâce à ces efforts, en l’espace de quelques années seulement, le socle de la réglementation de services financiers en ligne s’est peu à peu élargi.
Il regroupe actuellement plusieurs directives européennes spécifiques dont : la DCE, la DSF, la directive du 16 septembre 2009 relative aux établissements de monnaie électronique , la directive du 13 décembre 1999 sur la signature électronique, la directive du 12 juillet 2002 dite de vie privée et communications électroniques , etc.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : LA COMMERCIALISATION DES SERVICES FINANCIERS EN LIGNE
TITRE I : LE SITE INTERNET, SUPPORT DE COMMERCIALISATION DE SERVICES FINANCIERS A DISTANCE
Chapitre I : Le site Internet mode d’établissement ou de libre prestation de services ?
Chapitre II : Le contrôle prudentiel adapté aux services financiers en ligne
TITRE II : L’EXPRESSION DU CONSENTEMENT EN LIGNE
Chapitre I : L’expression des volontés dans le monde financier numérique
Chapitre II : La naissance du formalisme probatoire électronique et la preuve des transactions financières en ligne
TITRE III : LE REGLEMENT DES LITIGES DES TRANSACTIONS FINANCIERES ELECTRONIQUES
Chapitre I : L’adaptation des règles de conflit de lois et de juridictions au contexte électronique
Chapitre II : Le règlement des litiges en ligne
DEUXIEME PARTIE : LA SECURITE DES TRANSACTIONS FINANCIERES EN LIGNE
TITRE I : LA SECURISATION DES PAIEMENTS EN LIGNE
Chapitre I : La cryptologie
Chapitre II : L’usage de la cryptologie dans la sécurisation du paiement en ligne
TITRE II : LE PAIEMENT ELECTRONIQUE
Chapitre I : Le paiement via un porte monnaie électronique
Chapitre II : Le paiement via un téléphone mobile
TITRE III : LA PROTECTION DES DONNEES NOMINATIVES NUMERISEES DANS LE SECTEUR FINANCIER
Chapitre I : Le traitement et le transfert des données à caractère personnel dans le secteur bancaire et financier
Chapitre II : Les mesures de protection des données nominatives dans le secteur bancaire et financier
CONCLUSION
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