La coexistence du kabyle et du français dans le contexte algérien

Le berbère et ses variétés

  Le berbère fait partie de la famille des langues dites « chamitosémitiques » c’est la langue des autochtones des pays du nord africain : « L’ethnonyme du type latin BARBARU(S), plus justement de BARBARI (-ōrum), que les Romains appliquaient à tous les peuples autres que les Grecs et les Romains, après avoir été eux-mêmes qualifiés dans un premier temps de « barbares » par les Grecs » (Manzano, 2006 :183). Le berbère comporte deux appellations : berbère et tamazight (Bektache, 2013 : 33). Chacune de ces deux appellations est porteuse de charge sémantique, généralement péjorative pour le berbère et méliorative pour le tamazight, du moins au sein de la communauté kabylophone (Bektache, idem. : 42, lieu de son enquête). Nous retenons, à ce sujet, que les deux concepts : berbère et tamazight renvoient à « une langue standard dans laquelle se regrouperaient plusieurs variétés » (idem, 33). En effet, le berbère comprend en Algérie différents parlers : Le kabyle au Nord du pays dans des régions du centre: Boumerdes Tizi-Ouzou, Bejaia, Bouira, Sétif, Bourdj Bouréridj ; Le chelouh à Tlemcen ; Le chenoui dans la région de Tipaza ; Le chaoui au sud-est région du massif des Aurès et de l’Atlas saharien ; Le mozabite dans le Mzab au sud ; Le targui dans le grand Sahara algérien (Beddadi, 2013 : 53) ; le chleuh et le tamazight (Ourgla), ainsi qu’une variété proche du Songhaï : tabelbalt. Le rapport entre le berbère et ses parlers Ameur (2009 :75) le compare à la métaphore de la marguerite de Corbeil : « La métaphore de la marguerite de Corbeil (1986) sied parfaitement à la situation de l’amazighe : la marguerite est l’ensemble du cœur jaune (le noyau central, c’est-à-dire le fonds commun) et d’un certain nombre de pétales (les différentes variantes) ; une fois effeuillée, il ne reste plus de marguerite, mais seulement une masse jaune au bout d’une tige. C’est dire, l’importance de la prise en compte des soussystèmes de la langue. ». Longtemps confiné au rang des dialectes regionales, les revendications pour la reconnaissance de la culture berbère ont commencé depuis le Mouvement national : « Depuis le mouvement national des années quarante, il existe une frange militante qui revendique pour la reconnaissance de l’identité berbère, qu’on retrouvera dans la future Algérie indépendante. Ces militants sont appelés les Berbéro-nationalistes. Le manque d’alliés et de stratégie politique ainsi que le nombre restreint de militants au sein du PPA expliquent leur échec dans la crise dite berbérsite de 1949. » (Benmokhtar, 2014 :24).

L’arabe et ses variétés

   L’arabe comprend en Algérie deux variétés, l’arabe classique : langue nationale et officielle du pays. M .Dridi (2009) affirme que : « Cette variété a un système hautement confectionné véhiculant un corps écrit abondant et utilisée principalement dans des communications écrites ou orales formelles mais elle est rarementutilisée dans des conversations ordinaires ». La promotion de la politique d’arabisation a été mise en œuvre au lendemain de l’Independence (Morsly, 2011) la résume en trois phases majeures : en 1963, l’Algérie affirme le statut de l’arabe comme langue nationale et officielle du pays ; au milieu des années soixante-dix : L’État promulgue l’arabe au rang de langue fonctionnelle, à travers son introduction dans l’administration et dans le secteur éducatif ; Enfin, 1989 et 1996,l’Article 3. n’est qu’une réponse aux mouvements de contestations menées par le mouvement culturel berbère ;De nos jours, on reconnait que l’arabe classique est réduit à une langue d’enseignement (Asselah-Rahal et al. 2007); aucun enfant ne l’aurait apprise s’il ne passait par l’école « C’est une langue essentiellement écrite et absolument incompréhensible à l’oral pour un public arabophone illettré » (Arezki,2008 :22). En effet, l’arabe classique tire sa légitimité de la religion : «le statut de modèle assigné à l’arabe Classique s’expliquent habituellement par le fait que le Coran, le Livre sacré des Musulmans, a été révélé au Prophète Mohamed dans cette langue. Bien plus, toutes les générations plus tardives croient que le texte coranique était le meilleur exemple du ‘Arabiyya, » (Dridi, 2011 :10).L’arabe algérien, comme le désignent certains sociolinguistes, par opposition à d’autres variétés dialectales comme l’arabe tunisien ou l’arabe marocain, est adopté dans des communications quotidiennes. Majoritairement pratiqué dans les situations informelles, l’arabe algérien véhicule la littérature moderne : la musique et le théâtre (Asselah-Rahal & Mefidene, 2008) et varie principalement selon les régions. L’arabe algérien est caractérisé par un métissage et des emprunts notamment au français, à l’espagnol et l’italien mais aussi au turc. Ceci étant on signale l’existence de noyaux irréductibles de très vieilles variétés qui remontent à l’arrivée des premières tribus arabes. L’arabe algérien découle de l’arabe maghrébin celui-ci se distingue nettement de l’arabe du Moyen-Orient. Cette différence, comme le souligne aussi Rabah Kahlouche, est due aux contacts des parlers arabes avec le berbère.

Le français

  Le français, quant à lui, est première langue étrangère du pays depuis l’indépendance. L’Algérie compte aujourd’hui le plus grand nombre de francophones au monde après l’hexagone, une réalité qui témoigne de la place de la langue française dans ce pays. L’ancrage de la langue française en Algérie est justifié, si on tient compte du contexte historique : cent-trentedeux ans d’occupation française en Algérie. Cette langue occupe un statut institutionnel en Algérie de par sa fonction économique, politique, etc.,. A ce propos Chériguen (1987) voit une co-officialité « dans la mesure où elle est utilisée à titre officiel (prise de parole du Président de la République et desresponsables politiques, parution du Journal Officiel et de la presse dans cette langue) ». Donc, le français est «Sans être la langue officielle, véhicule l’officialité( en Algérie ). » (Sebaa, 2002). Au niveau des pratiques sociales, le français est doté d’un certain privilège avec l’ouverture du secteur privé. On constate que certains parents choisissent d’inscrire leurs enfants dans des écoles privées où l’enseignement se fait entièrement en français, sans parler du rôle des mass-médias : journaux d’expression française, chaînes satellitaires : TF1, F2, CANAL+ etc.,. Cette diffusion médiatique a, néanmoins, connu un recul ces dernières années avec l’émergence des chaînes des pays du Golf et celles du Moyen-Orient. La place de la langue française en Algérie a valu la reconnaissance du chef de l’état algérien Abdelaziz Bouteflika qui a affirmé au sommet de la francophonie à Bayrouth en 1999 que : « L’Algérie est un pays qui n’appartient pas à la francophonie mais nous n’avons aucune raison d’avoir une attitude figée vis-à-vis de la langue française qui nous a tant appris et qui nous a, en tout cas, ouvert la fenêtre de la culture française » (Benazouz ,2011). De nos jours, on reconnait le staut du français oscillant entre « langue seconde» et celui de « langue étrangère » (Asselah-Rahal et al., 2007 :15). Dans le système éducatif algérien, le français était langue d’enseignement au lendemain de l’indépendace. Puis progressivement, c’est l’arabe qui devient langue d’enseignement. C’est en 1983 que des textes officiels insistent sur le statut de langue étrangère pour le français selon les propos de Benhouhou & Blanchet (2007 :39). Le français devient « la première langue étrangère » et a été introduit dès la deuxième année primaire après la reforme éducative en 2004 tout en lui fixant comme objectif d’accéder à la documentation scientifique(ibid., 42).

L’enseignement du français en Algérie

   Officiellement, le français occupe en Algérie le statut de LE1, son introduction comme langue d’enseignement dans de nombreux domaines scientifiques à l’université suffirait toutefois à remettre en question son statut de langue étrangère à cette langue. Notons aussi son hétérogénéité quant à sa présence dans les pratiques sociales; Le français n’a pas la même influence positive soit elle ou négative auprès des locuteurs algériens et varie principalement selon certains paramètres. Nous pouvons constater qu’actuellement la langue française est divisée entre nécessité de l’introduire comme langue d’accès à la documentation scientifique et désapprobation quant sa présence dans le paysage linguistique. Il convient de noter, à cet effet, que la dénomination de langue étrangère suscite de nombreuses controverses : « Le concept de langue étrangère se construit par opposition à celui de langue maternelle et on peut dire dans un premier temps que toute langue non maternelle est une langue étrangère. On veut dire par là qu’une langue ne devient étrangère que quand un individu ou un groupe l’oppose à la langue ou aux langues qu’il considère comme maternelle(s) » . Ceci étant dit, en Algérie « bien que non reconnue officiellement, le français joue encore un rôle social important dans le système éducatif ou dans la production culturelle » . D’autant plus que l’enseignement des composantes linguistiques de la langue française est fortement privilégiés (Aouni, 2013 :40). Ce qui n’est pas conforme aux objectifs assignés pour l’enseignement d’une langue étrangère.La définition de langue étrangère ne sied pas donc à la situation de la langue française en Algérie, et plus particulièrement dans l’espace kabylophone. Elle demeure, par conséquent, au rang des langues secondes après les langues maternelles.

Représentations sociolinguistiques

  La notion de « représentations sociolinguistiques » est empruntée aux sciences humaines : « Elles désignent une forme courante et non savante de connaissance sociale et partagée » (Gueunier,1997). Les représentations renvoient à l’imaginaire linguistique des locuteurs et discours de ces derniers sur la manière dont ils conçoivent leurs langues et les langues des autres véhiculés, le plus souvent, par des facteurs bien déterminés (politiques, historiques…).Pour Calvet, les représentations sont « ce que les locuteurs disent, pensent des langues qu’ils parlent (ou de façon dont ils les parlent) et de celle que parlent d’autres (ou de la façon dont ils les parlent ». L’étude des représentations a pour intérêt d’explorer la question du registre de langue, des statuts des langues et de contact des langues (Gueunier, ibid.).Dans le cadre de l’enseignement d’une langue étrangère, il est nécessaire de tenir compte des représentations des apprenants. Dans la préface du livre de Moore et Castelloti, Jean-Claude Beacco et Michael Byram (2002 :6) rapportent ceci: « Les auteurs expliquent aussi que l’on peut tenir compte des représentations pendant l’enseignement de langues, pour dépasser les stéréotypes par exemple, ou pour exploiter les liens entre les langues. Dans la planification de politiques d’éducation linguistique il est donc important d’analyser les représentations qui existent, et de les prendre en compte dans la promotion de l’apprentissage de langues ».

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1 : Problématique
Introduction
1.1 . Des caractéristiques du contexte de l’étude
1.1.1. La coexistences des langues
a. Le berbère et ses variétés
b. L’arabe et ses variétés
c. Le français
d. L’anglais
1.1.2. L’enseignement du français en Algérie
1.2. De la linguistique et didactique des contextes mulilingues
1.2.1. Représentations sociolinguistiques
1.2.2. Contact des langues
1.2.3. La langue maternelle
1.2.4. Bilinguisme
1.2.5. Plurilinguisme
1.2.6. Diglossie
1.2.7. Alternances codiques
1.2.8. Les interférences codiques
1.2.9. Compétence plurilingue
1.2.10. La langue maternelle dans l’histoire de l’enseignement
1.3. De la théorie de la grammaire
1.3.1. La morphologie
1.3.2. La syntaxe
1.3.3. De l’histoire de l’enseignement de la grammaire
1.4. Questions de recherche 
1.5. Hypothèses 
1.5.1. Aspects sociolinguistiques
1.5.2. Aspects didactiques
1.6. Indications méthodologiques
Conclusion
Chapitre 02 : Analyse comparative de faits morphologiques et syntaxiques
Introduction
2.1. Analyse contrastive au niveau de la langue 
2.1.1. Les faits de morphologie
2.1.1.1. Les articles
2.1.1.2. Le genre
a. Le genre en français
b. Le genre en kabyle
2.1.1.3. Le nombre
a. Le pluriel en français
b. Le pluriel en kabyle
c. Les différentes formes du pluriel en français
2.1.1.4. Les verbes
a. Les verbes en français
b. Les verbes en kabyle
c. La conjugaison en français
d. La conjugaison en kabyle
2.1.2. Les faits de syntaxe
2.1.2.1.Les déterminants démonstratifs
2.1.2.2. Les déterminants possessifs
2.1.2.3. Les adjectifs
2.1.2.4. La coordination
a. Éléments convergeants
b. Eléments divergents
2.1.2.5. La subordination
a. Proposition subordonnée complétive
b. Propositions circonstancielles
2.1.2.6. La juxtaposition
2.2. L’analyse contrastive au niveau de la parole 
2.2.1. Analyse comparative, Texte 1 « Le type explicatif »
2.2.1.1. Les faits de morphologie
a. Les verbes
b. Le genre
c. Le nombre
d. Les déterminants possessifs
e. Les pronoms indéfinis
f. Les substituts lexicaux
2.2.1.2. Faits de syntaxe
a. Les déterminants démonstratifs
b. Les adjectifs qualificatifs
c. Les phrases
2.2.1.3. Les emprunts
2.2.2. Analyse comparative : Texte 2 « Type conversationnel »
2.2.2.1. Les faits de morphologie
a. Les verbes
b. Les déterminants démonstratifs
c. Les adverbes
d. Le nombre
e. Les pronoms
2.2.2.2. Les faits de syntaxe
a. Les locutions
b. Les phrases
2.2.2.3. Les emprunts
2.2.3. Analyse comparative : Texte 3 « Le type rhétorique »
2.2.3.1. Les faits de morphologie
a. Les verbes
b. Les personnes
c. Les sujets
d. Les présentatifs
e. Le nombre
2.2.3.2. Les faits de syntaxe
a. Les adejctifs indéfinis
b. Les conjonctions
c. Les prépositions
d. Les syntagmes verbaux
e. Les adverbes
f. Les phrases
2.2.3.3. Les figures de style
2.3. Synthèse globale
Conclusion
Chapitre 03 : Propositions didactiques
Introduction
3.1. La sociodidactique : de la sociolinguistique à la didactique
3.2. La didactique intégrée et convergente des langues
3.2.1. Naissance et évolution de la didactique convergente
3.2.2. Les fondements et objectifs de la didactique convergente
3.3. L’approche curriculaire en Algérie
3.4. Propostions d’activités
3.3.1. Fondements des centrations sur l’apprenant et sur l’apprentissage
3.3.2. Exemples d’activités
a. Activité 1 : l’étude du genre à partir de deux langues
b. Activité 2: repèrage des équivalences entre les deux langues
c. Activité 3 : traduction du kabyle vers le français
d. Activité 4 : style direct et style indirect
e. Activité 5: exploiter les proverbes en classe de FLE
f. Activité 6: la grammaire à partir de proverbes bilingues
g. Activité 7: Une tâche à partir des proverbes
Conclusion
Conclusion générale
Références bobliographiques

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