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La circulation systémique
Elle est composée des artères, des capillaires et des veines.
Le secteur artériel prend sa racine à la sortie du ventricule gauche par l’aorte thoracique ascendante. L’ensemble des artères est assimilé à un système à haute pression. La pression artérielle varie en fonction de la phase du cycle cardiaque entre une pression maximale dite systolique (environ 125 mmHg) et une pression minimale dite diastolique (environ 70 mmHg). (Figure 4) (1).
Les artères amènent le sang oxygéné jusqu’aux capillaires, réseau richement ramifié permettant les échanges entre le système circulatoire et les organes. Les échanges d’ions, de gaz, d’eau et de diverses molécules sont rendus possibles par un gradient de pression intra-capillaire. Un accroissement de pression entrainerait une fuite de liquide (dite extravasation) vers le milieu interstitiel, responsable d’œdèmes.
Aux termes des capillaires naissent les veines qui vont converger vers de gros troncs terminaux, les veines caves inférieures et postérieures. Le retour veineux se faisant de manière passive, il doit néanmoins être suffisant pour permettre le remplissage de l’oreillette droite (le facteur de pré-charge).
La circulation pulmonaire
La circulation pulmonaire présente une composition analogue à la circulation systémique.
Les artères pulmonaires quittent le cœur droit jusqu’aux capillaires qui rejettent le dioxyde de carbone et la vapeur d’eau par les alvéoles pulmonaires et chargent le sang en dioxygène, passant par les veines pulmonaires pour remplir le cœur gauche. (Figure 5) (1)
Ce système est dit à basse pression, il varie entre une pression systolique de 25 mmHg et une pression diastolique de 12 mmHg. Cette pression devra être comprise entre 8 et 12 mmHg pour obtenir un remplissage satisfaisant du ventricule gauche, donc une bonne éjection ventriculaire. Si la pression est supérieure, un œdème pulmonaire peut survenir.
Fonctionnement général des ECMO
Un circuit extracorporel est composé de différents éléments :
• Une canulation de sortie permettant l’extraction du sang du patient. Cette canulation est effectuée sur une veine de gros calibre .
• Une pompe permettant la circulation du sang .
• Un oxygénateur à membrane permettant les échanges gazeux à savoir l’oxygénation du sang et son épuration en gaz carbonique .
• Un réchauffeur .
• Une canulation de ré-entrée permettant la réinjection au patient. En fonction de l’indication la canulation pourra être située sur une veine ou une artère différenciant les ECMO veino-veineuse (ECMO VV) et les ECMO veino-artérielle (ECMO VA).
Sur le principe, le sang veineux désoxygéné est extrait par la canule de sortie, poussé dans un oxygénateur à membrane par une pompe puis remis en circulation par voie veineuse ou artérielle après avoir été placé en normothermie par un réchauffeur. (Figure 8)
ECMO Veino-veineuse
En raison de l’implantation des canules, l’ECMO VV n’assiste que les poumons et participe aux échanges gazeux. Une telle stratégie peut être mise en place en réanimation lors de Syndromes de Détresse Respiratoire Aiguë (SDRA), notamment lorsqu’ils sont réfractaires à la ventilation mécanique classique (avec une hypoxie et une hypercapnie persistante) (13–15). L’ensemble des indications est résumé dans le tableau 2 (16).
Classiquement, une canule veineuse fémorale permet le drainage du sang désoxygéné au niveau de la veine cave inférieure.
La réinjection du sang oxygéné et réchauffé est effectuée par canulation jugulaire jusqu’à l’entrée de l’oreillette droite. (Figure 9)
L’objectif est d’atteindre un débit théorique entre 2,5 et 5 L/min et une saturation en dioxygène supérieure à 80%, comme cela avait été proposé par les équipes de Zapol et al en 1979 lors d’une étude prospective randomisée sur 9 centres, le sang oxygéné par ECMO se mélangeant au sang pauvrement oxygéné par la fonction pulmonaire restante (17).
ECMO Veino-artérielle
Cette technique consiste à assister à la fois le cœur et les poumons. Elle est mise en place lors de chocs cardiogéniques réfractaires d’étiologie médicale tels que l’infarctus du myocarde ou les intoxications aiguës par des substances cardiotoxiques (18–20). Elle est aussi envisagée lors de l’échec du sevrage de CEC en post-opératoire d’une chirurgie cardiaque conventionnelle ou d’une transplantation cardiaque (21). L’ensemble des indications est résumé en tableau 3 (16).
Dans ce dernier cas, les canules sont souvent insérées en intra-thoracique. Le sang est prélevé directement au niveau de l’oreillette droite et est réinjecté au niveau de l’aorte thoracique ascendante. Un exemple d’installation intra thoracique est schématisé dans la figure 10.
Dans la grande majorité des cas, notamment dans les chocs cardiogéniques médicaux, une implantation fémoro-fémorale transcutanée sera préférable avec une canule de sortie au niveau de la veine fémorale et une canule de réentrée au niveau de l’artère fémorale commune (22). Dans ce cas un cathéter de reperfusion est inséré au niveau de l’artère fémorale superficielle afin de pallier au risque d’ischémie du membre inférieur induit par l’installation d’une canule de gros calibre sur le membre.
Lors de cette prise en charge, le débit cible se situe entre 2,5 et 7-8 L/min et une saturation en dioxygène complètement assurée par l’ECMO soit environ 95% (17).
Quel que soit le type d’implantation (VV ou VA) il est obligatoire de mettre en place une anticoagulation efficace afin d’éviter tout risque de thrombose avec une cible biologique mesurée par le TCA entre 2 et 3.
LES COMPLICATIONS LIEES AUX ECMO
Lors de la mise en place de solutions thérapeutiques aussi invasives, une attention toute particulière est portée sur les risques de complications potentiellement létales (23–27). Les complications peuvent être de deux origines distinctes :
• Liées à l’intervention en elle-même .
• Liées à la technique de l’ECMO et au type de matériel utilisé.
Les complications les plus retrouvées sont synthétisées dans le tableau 4 (16).
Les complications suite à l’intervention chirurgicale
Ces complications sont liées directement à l’implantation de canules de façon prolongée et sont de deux types.
Un risque infectieux d’une part : une infection nosocomiale se développant sur les canules au niveau fémoral ou thoracique pourrait entrainer une septicémie grave nécessitant un remplacement des canules, voire la prise en charge d’un choc septique.
Une antibioprophylaxie doit être instaurée et une surveillance particulière doit être mise en place, et ce de manière systématique. Biffi et al présentaient en 2017 dans International Journal of Antimicrobial Agent une étude montrant une récurrence de 10 à 12% des cas d’infections durant les ECMO. (28)
D’autre part, les complications hémorragiques sont parmi les complications les plus fréquemment observées. En 2016, Aubron et al publiaient dans Annals of intensive care sur les risques d’hémorragies durant l’ECMO
(29) en précisant que dans leurs études dénombrant 149 ECMO, 60% s’étaient compliquées d’au moins un saignement. Ils sont retrouvés au point d’insertion des canules dans 37% des cas et nécessitent une révision chirurgicale pour contrôler la position des canules et réaliser une hémostase sur site.
Lorsque les canules sont implantées par voie thoracique, une hémorragie peut entrainer soit une tamponnade (dans 17% des cas) soit un saignement important par les drains thoraciques.
Ici encore, une révision chirurgicale devra être pratiquée en urgence et la suspension des traitements anticoagulants et antiagrégants plaquettaires devra être envisagée.
Les complications liées à la technique ECMO
Ces risques de complications sont induits par la machine elle-même.
Le risque thrombotique est le premier à être envisagé. Ce risque est dû à la capacité du sang à coaguler lorsqu’il se trouve en dehors du compartiment vasculaire. Il va réagir au contact des tubulures de la même manière que lors d’une brèche vasculaire : par l’activation de la voie extrinsèque de l’hémostase et le déclenchement de l’agrégation plaquettaire aboutissant à la formation d’un caillot.
C’est pour éviter ce phénomène, qui gênerait l’écoulement normal du sang dans la machine et pourrait induire la formation d’un embole létal, que les tubulures de l’ECMO sont recouvertes d’héparine et qu’une héparinothérapie haute dose est maintenue en continu chez ces patients. Une autre complication induite directement par la technologie utilisée est l’hémolyse.
Elle est due aux turbulences provoquées par la pompe de l’ECMO qui détruit les globules rouges. Cette déglobulisation importante peut entrainer une anémie massive pouvant nécessiter des transfusions fréquentes voire un remplissage volumique important, entrainant à leur tour des sur-complications telles que des accidents transfusionnels ou des œdèmes, d’autant plus lorsque l’ECMO est maintenue sur une longue durée. Une thrombopénie peut aussi être observé pour les mêmes raisons mais aussi par contact prolongé avec la membrane de l’oxygénateur favorisant l’apparition de caillots de fibrine.
Surveillance
Afin d’éviter ces complications potentiellement létales, une surveillance particulière est par ailleurs mise en place de manière pluriquotidienne par l’équipe médicale et paramédicale. De plus, une équipe spécialisée de perfusionnistes (ou praticiens en circulation extracorporelle) veille au bon fonctionnement du matériel une fois par 24h. (30)
Le perfusionniste peut être un infirmier ou un médecin diplômé, formé spécifiquement pour l’activité de surveillance de circulation extracorporelle. Cette formation comprend au moins un an de formation théorique et pratique dans un stage agréé, validé par un Diplôme Universitaire (DU). Parmi les points particulièrement vérifiés par les équipes : le bon fonctionnement de la machine, les dépôts de fibrine et la présence de caillots sur la membrane de l’oxygénateur, de caillots au niveau des canules ou de la tête de pompe, de saignements ou de signes d’inflammation cutanée au niveau des points d’insertions des canules, le débit de la pompe, et les signes cliniques (urines porto) et biologiques (bilirubine) d’hémolyse.
LES DIFFERENTS TYPES DE POMPE POUR ECMO
Actuellement l’AP-HM a référencé deux types de technologies d’assistance mécanique pour la mise en place de l’ECMO VA.
Outre les consoles différentes, il s’agit d’une différence dans la technologie des pompes utilisées qui a amené le référencement de ces deux produits : pompe centrifuge pour le système Cardiohelp® et pompe à lévitation magnétique pour le système Centrimag®.
Les pompes centrifuges : exemple du Cardiohelp®
Le système Cardiohelp® (Maquet®, Inc. Wayne, NJ, USA) est un système cœur-poumon portatif adapté au transport des patients au sein de l’hôpital, ou entre centres hospitaliers pour les transports par ambulance ou hélicoptère.
En effet, la console en elle-même est portative et bénéficie d’une batterie lithium-ion d’une capacité de 90 min. De plus, la pompe reste actionnable manuellement via une manivelle en cas de coupure énergétique prolongée. Un autre élément rend ce système portatif, puisque le bloc pompe intègre l’oxygénateur à membrane ce qui rend tout le système beaucoup plus compact. (Figure 11)
Cette compacité est néanmoins à nuancer par l’ajout obligatoire d’un module réchauffeur et d’obus de gaz permettant l’oxygénation du sang et l’évacuation du dioxyde de carbone (CO2).
La pompe utilisée est une pompe centrifuge : son mode de fonctionnement est celui d’une turbine. La roue est composée de pales ou lames tournant à très haute vitesse. Le sang entre au centre de la roue et est éjecté
à haute pression à la périphérie de la roue qui constitue l’orifice de sortie de la pompe, directement vers l’oxygénateur à membrane. (Figure 12)
L’ensemble des caractéristiques de cette pompe est présenté dans le tableau 5.
En 2018, une étude a comparé les fonctionnements de différents systèmes utilisant des pompes centrifuges (31). Afin de les comparer, Undar et al. ont établi un modèle complexe de circulation en laboratoire afin de mesurer en temps réel la pression impulsée par les systèmes dans le circuit, mais aussi l’énergie hémodynamique générée par les systèmes. Sur ce modèle, les auteurs n’ont pas pu montrer de supériorité d’un système par rapport à un autre. En prenant en compte la compacité du système Cardiohelp® et sa légèreté, les auteurs ont conclu à la supériorité de ce système tout en insistant sur le fait que des tests cliniques seraient nécessaires pour conclure définitivement.
Notons aussi que ce type de pompe ne peut être utilisé sur de longues périodes sans un changement fréquent du bloc pompe/oxygénateur car l’oxygénateur à membrane est intégré. En moyenne, un changement tous les 7 jours est préconisé en cas d’utilisation prolongée.
L’AP-HM s’est dotée de cette technologie suite à la pandémie H1N1.
Les circuits complets ont ainsi été référencés le 20/01/2011, premièrement dans une indication de prise en charge des Syndromes de Détresse Respiratoire Aigüe (SDRA) en canulation veino-veineuse puis plus largement dans les assistances cardio-respiratoires avec une canulation veino-artérielle.
Les pompes à lévitation magnétique : Centrimag®
Ce système ne présente pas un design compact comme c’est le cas pour le Cardiohelp® (Figure 13) et l’oxygénateur à membrane n’est pas intégré au système. Il est donc nécessaire de brancher en ligne un oxygénateur à membrane additionnel tel que le Quadrox-ID® de chez Maquet®. L’ensemble des caractéristiques de ce système peut être retrouvé dans le tableau 5.
La principale caractéristique différenciant ce système par rapport à ses concurrents vient de la pompe à lévitation magnétique. Le principe de base est similaire au fonctionnement d’une pompe centrifuge, le sang entrant toujours au centre d’une roue équipée de lames éjectant le sang à haute pression à la périphérie de la roue. Néanmoins ici la roue n’est pas entrainée par un palan inséré au centre de la roue mais par un champ magnétique maintenant la roue en lévitation au centre de la pompe (Figure 14).
L’intérêt avancé par le laboratoire vis-à-vis de cette technologie est que l’absence de joints, paliers ou valves élimine les zones de stase du sang, élargit les voies de passage du sang et facilite le nettoyage de la pompe, limitant la turbulence dans la pompe. Enfin, tout cela permettrait de diminuer les complications telles que l’hémolyse.
Afin de déterminer le taux d’hémolyse induit par l’utilisation de l’ECMO, une mesure de l’hémoglobine libre est communément utilisée. D’après une étude pilotée par le laboratoire (32), l’utilisation de Centrimag® permet une réduction de 30% du taux d’hémoglobine plasmatique libre par rapport à la norme de l’industrie. (Figure 15)
Une étude mise en avant par le laboratoire montre un taux d’hémolyse relativement bas (5% d’hémolyse) lors d’une étude multicentrique (7 centres) mais avec une cohorte de patients relativement faible (38 patients) et avec une durée moyenne de maintien du système de 13 jours. Cette étude dirigée par John et al et parue en 2011 dans The Journal of Thoracic and Cardiovascular Surgery (33) conclue que le Centrimag® est une solution à court terme viable, tout en insistant sur le fait que ces résultats sont préliminaires.
Une étude rétrospective allemande dirigée par Nersesian a comparé l’utilisation de différentes techniques et technologies chez des patients en choc cardiogénique (34). Le tableau 6 résume les différences constatées par les auteurs. Ils concluent que le système à lévitation magnétique devrait minimiser le potentiel de friction et ainsi diminuer les forces de cisaillement sur les cellules sanguines afin de limiter l’hémolyse. Lors de cette étude, 37 patients ont bénéficié d’une assistance ventriculaire gauche et 69 d’une assistance ventriculaire droite. S’ils ont conclu à l’utilisation du Centrimag® comme étant une alternative viable pour une durée prolongée chez ce type de patient, ils insistent sur le fait que l’exclusion des patients était dépendante du type de technique, qu’il s’agissait d’un essai monocentrique et surtout que les patients bénéficiant du Centrimag® avaient un risque de décès plus important en raison d’une atteinte cardiaque plus grave. De plus, cette étude n’a pris en compte que les taux de survie sans prendre en compte les complications, la qualité de vie ou la récupération du patient à long terme.
Une équipe américaine dirigée par Chen a publié en février 2019 dans Artificial Organs un article concernant l’étude de dysfonctionnements plaquettaires induits par l’utilisation d’assistances circulatoires mécaniques (35). Cette équipe a utilisé une pompe Centrimag® afin de démontrer que les effets de cisaillement dus aux lames du rotor (et ce même si la pompe était à lévitation magnétique) pouvaient dégrader les plaquettes de deux manières. D’une part, le contact répété avec une surface non biologique provoque une activation plaquettaire qui augmente l’adhésion des plaquettes au fibrinogène et peut induire un risque de thrombose important. C’est dans cet objectif qu’un traitement prophylactique par antiagrégant plaquettaire est fréquemment utilisé chez ces patients. D’autre part, la pompe Centrimag® induit la perte des récepteurs GPIV et GPIba ce qui diminue l’adhésion des plaquettes au collagène et au facteur von Willebrandt (vWF) et tend à augmenter le risque hémorragique chez ces patients Dans cette étude, il a donc été démontré que les pompes.
Centrimag® comme les autres pompes centrifuges pouvaient dégrader les cellules sanguines en raison des forces de cisaillement induites par la vitesse de rotation des pales.
Une méta-analyse publiée en mars 2019 par une équipe iranienne a tenté de comparer les différents systèmes d’ECMO en termes économiques et cliniques (36). Au total, seulement 7 études ont pu être incluses dans cette méta-analyse (sur 1316 entrées éligibles). Seules deux études rétrospectives comparaient le système Centrimag® et le système Cardiohelp®.
Les critères de comparaison comprenaient :
• Efficacité clinique : étaient pris en compte HR-QOL (Health Related Quality of Life), QALY (Quality-adjusted life year), taux de mortalité, taux de survie sous ECMO, taux de survie total et taux de survie après arrêt de l’ECMO.
• Sécurité : basée sur la technologie, les alarmes disponibles, mais aussi les effets indésirables telles qu’hémolyse, ischémie des membres inférieurs, insuffisance rénale, thrombose, complications neurologiques et hémorragies.
• Coût : principalement le coût par patient.
En termes de sécurité, aucune différence particulière n’a pu être mise en avant entre Cardiohelp® et Centrimag® et la survie à 30 jours était la même quel que soit le système considéré. L’étude n’avait cependant été faite que sur 11 patients et le texte intégral n’est pas accessible, ni sur les bases de données classiques, ni en contactant directement les auteurs.
Quel que soit le type d’étude, le coût par traitement est toujours supérieur avec Centrimag® par rapport à Cardiohelp®.
UTILISATION DES ECMO EN CARDIOLOGIE
Les maladies cardiovasculaires sont la première cause de mortalité dans le monde et la deuxième cause de mortalité en France (la première pour les femmes). Malgré une baisse constante de la morbi-mortalité imputée à ce groupe de pathologies, notamment grâce à la politique de santé publique mais aussi aux avancées médicales, ces maladies restent à l’origine de 140 000 décès par an. (37)
Parmi celles-ci, le choc cardiogénique présente un taux de mortalité particulièrement important à court terme. Le choc cardiogénique est une défaillance de la pompe cardiaque qui va en premier lieu se traduire par une augmentation des pressions de remplissage et une diminution du débit cardiaque.
Les mécanismes de régulation vont se mettre en marche tels qu’une tachycardie, la sécrétion de catécholamine et une vasoconstriction (entrainant l’augmentation des résistances vasculaires périphériques). Tout ceci concourt à une diminution drastique de la pression artérielle et ainsi de la micro-perfusion, propre à favoriser l’hypoxie tissulaire et ainsi une défaillance multi-viscérale.
Un syndrome inflammatoire peut aussi être observé, dû à la cause primaire du choc cardiogénique. L’augmentation des cytokines pro-inflammatoires (IL-6, TNF-a) qui en résulte peut majorer l’état de choc par la diminution de la contractilité du muscle cardiaque et du débit dans les artères coronaires. (38)
La cause la plus fréquente de choc cardiogénique est l’infarctus du myocarde étendu. Les autres causes peuvent être les myocardites aiguës, les fuites valvulaires aiguës (rupture de cordage de la valve mitrale, endocardite infectieuse avec destruction valvulaire), le choc post cardiotomie, les rejets aigus de greffe cardiaque et les chocs septiques sévères.
La prise en charge classique d’un tel trouble est basée sur:
• L’augmentation de la contractilité cardiaque est obtenue par l’administration d’un traitement inotrope positif par voie intraveineuse (dobutamine) .
• La correction d’une hypovolémie par une épreuve de remplissage .
• En cas de signe de surcharge, un diurétique de l’anse peut être prescrit (furosémide) .
• Si une hypotension artérielle réfractaire s’installe, il sera possible de remplacer la dobutamine par de l’adrénaline qui présente une action a et b-agoniste (39) .
• lors des infarctus du myocarde notamment, la mise en place temporaire d’un ballon de contre-pulsionintra-aortique permet d’augmenter la pression coronaire et de diminuer la consommation en dioxygène du muscle cardiaque. En effet, ce ballon se gonfle lors de la diastole et se dégonfle lors de la systole permettant ainsi de maintenir la pression intra-aortique.
En cas d’échec des stratégies précédentes, le choc cardiogénique devient réfractaire. L’indication d’ECMO VA peut être alors posée s’il existe a priori une possibilité de récupération myocardique ou un projet de transplantation cardiaque ou d’assistance de longue durée.
Les suites de la prise en charge dépendront des options disponibles et de l’indication initiale :
• Maintien de l’assistance en l’attente de récupération dite « bridge to recovery », l’objectif étant de suppléer le cœur sur une période courte (quelques jours). Une telle situation se présente lors des myocardites aiguës, les cardiopathies toxiques (dont médicamenteuses), la cardiopathie du post-partum, les chocs cardiogéniques post-infarctus du myocarde et post-CEC .
• L’assistance est maintenue en l’attente d’une prise de décision ultérieure en fonction de l’évolution du patient lors de la stratégie dite de « bridge to decision » .
• La mise en place d’une assistance définitive (type cœur artificiel) lors d’une stratégie dite de « bridge to bridge » ou « destination therapy ». L’objectif est ici la suppléance cardiaque chez des patients pour qui la transplantation cardiaque est contre-indiquée (en raison de l’âge, des comorbidités, des néoplasies…) mais chez qui le maintien d’une assistance permettrait l’amélioration de leur survie et de leur qualité de vie en leur évitant des hospitalisations à répétition pour décompensation cardiaque.
• En l’attente d’une transplantation cardiaque dans le cadre d’une stratégie « bridge to transplantation ». Il s’agit de la stratégie nécessitant la plus longue période d’assistance, puisqu’elle nécessite d’attendre l’obtention d’un greffon disponible et compatible. Néanmoins, les résultats des transplantations sont actuellement plus favorables après la mise sous assistance, le patient étant stabilisé, plutôt qu’effectuées en urgence lorsque le patient présente des défaillances multi-viscérales. (40).
ÉTAT DE DISPONIBILITE DES GREFFONS CARDIAQUES
Pour de nombreux patients dont la fonction cardiaque est trop altérée, la seule solution thérapeutique viable sur le long terme semble être la greffe cardiaque.
Cette possibilité se heurte cependant à la disponibilité des greffons qui ne peuvent être prélevés que chez un patient décédé et greffés dans un temps imparti très court (4 à 6h) limitant la zone géographique et les circonstances de la mort. En effet, si pour les autres organes les donneurs peuvent être en état de mort cérébrale, le prélèvement peut aussi être fait « à cœur arrêté » c’est-à-dire consécutif à un arrêt cardiaque jugé irréversible. Dans ce cadre, les donneurs sont classés selon la classification de Maastricht (tableau 7) et une assistance circulatoire peut être mise en place afin de maintenir la perfusion des tissus lors de la préparation de la greffe.
Une telle disposition est bien entendu impossible pour une greffe cardiaque, réduisant d’autant les donneurs potentiels.
C’est dans ce cadre que l’agence de biomédecine étudie la cinétique liée aux greffes, dont la greffe cardiaque, afin de permettre l’évolution des pratiques et d’analyser les comportements sociétaux. Le recensement des greffes et de la liste d’attente entre 2011 et début 2017 est observable sur le tableau 8. On peut donc suivre une évolution favorable du nombre de patients greffés par an tout en maintenant constant le nombre d’inscrits sur la liste d’attente de greffe. Une telle évolution peut être expliquée par des améliorations constantes des techniques de transplantation et de suivi des patients, ainsi qu’une amélioration de la détection précoce des donneurs potentiels.
C’est toujours dans ce bilan d’activité de greffe de 2016 (41) que l’agence de biomédecine présente l’évolution des principaux indicateurs de pénurie de greffon. Cette évolution peut être mesurée en rapportant le nombre de patients sur la liste d’attente au nombre de greffes effectuées. C’est ainsi que nous pouvons observer un maintien entre 2011 et 2016 de ce rapport à 2 patients en attente pour un greffon. (tableau 9)
Néanmoins comme montré sur le tableau 10, la situation semble se dégrader depuis 2017 et particulièrement en 2018, le nombre de greffes ayant diminué de plus de 5% par rapport à 2016 à nombre d’inscrit en liste d’attente constant.
Dans son rapport d’activité de 2018 (42), l’agence de biomédecine n’incrimine pas les changements de législation. En effet, c’est à cette période que le législateur renforce le consentement présumé et permet la déclaration de non-consentement via internet. En effet, l’opposition au don d’organe de la population n’a pas augmenté depuis cette loi, l’agence présente une tendance à la baisse (33% en 2016, 30,5% de refus en 2018).
En revanche, la mise en place d’un dispositif efficace de secours aux personnes atteintes d’accidents vasculaires cérébraux a permis une diminution du taux de mortalité de 15% diminuant par la même occasion le nombre de donneurs potentiels en situation de mort encéphalique.
Si l’agence de biomédecine propose une diversification des sources de greffons en se focalisant sur les donneurs vivants et les donneurs classés Maastricht II et III afin de palier à cette diminution pérenne pour les autres types de greffe, de telles solutions ne sont pas envisageables actuellement en France.
Devant la pénurie de plus en plus marquée de greffons cardiaques, une répartition nationale des greffons est réalisée par l’intermédiaire de l’agence médicale de médecine. Chaque patient mis sur liste de greffe se voit attribuer un score dit « le Score-Coeur » qui évolue en fonction de l’état clinique et biologique du patient, permettant ainsi une attribution la plus équitable possible avec un taux de survie post greffe le mieux optimisé.
Malgré cela, le délai d’attente de greffon reste important, même pour les patients sous ECMO obtenant le score maximal. Les patients sous ECMO en « bridge to tranplant » peuvent actuellement attendre plusieurs semaines avant d’être greffés, ce qui n’est pas sans conséquences avec des risques d’hémolyse, de saignement, de transfusion, d’infection.
DEMANDE DE REFERENCEMENT A L’AP-HM
Dans le cadre d’une pénurie de greffon, les patients attendent parfois plusieurs mois sur liste d’attente, voyant leur état se dégrader. Une telle dégradation nécessite parfois de recourir à une assistance dans une stratégie de « bridge to transplantation ». La mise en place de l’assistance cardiaque dans cette stratégie thérapeutique permet donc la stabilisation du patient sur des périodes allant de quelques semaines à plusieurs mois, augmentant les chances de succès de la greffe.
C’est pour cette raison et afin de permettre la mise en place de cette assistance de longue durée tout en diminuant le risque d’hémolyse lié à l’ECMO que le service de Chirurgie cardiaque adulte de l’hôpital de la Timone (AP-HM, Marseille) a demandé le référencement du Centrimag® fin 2017. (Annexe 1)
Lors de cette demande de référencement, il était avancé que la technologie par lévitation magnétique Centrimag® permettait une diminution de l’hémolyse donc une diminution des transfusions et une nécessité de changement de circuit faible à inexistante contre un changement de circuit tous les 5 à 7 jours actuellement. De plus, il était précisé que sur les 50 à 70 assistances réalisées à la Timone, seules 7 à 10 nécessitaient un maintien prolongé.
Tout ceci devait concourir, pour un surcoût modéré (3 950€ TTC pour Centrimag® contre 3 550€ TTC pour Cardiohelp®), à permettre un bénéfice important pour la santé des patients.
Cette demande a été défendue devant le comité de référencement des dispositifs médicaux stériles du COSEPS (COmité de SEcurisation des Produits de Santé) de l’AP-HM du 29 janvier 2018 et y a reçu un avis favorable. (Annexe 2)
Cet avis permet la signature d’un contrat de marché avec le fournisseur, permettant au pharmacien de l’établissement de passer commande du matériel nécessaire et ainsi de traiter les premiers patients.
Les hôpitaux publics sont astreints au code des marchés publics. Dans ce cadre afin de pouvoir référencer un nouveau produit ou service ou de renouveler un contrat, la mise en place d’un appel d’offre est obligatoire. Il doit être publié officiellement, une phase d’essai doit être mise en place et le résultat de l’appel d’offre doit être justifié et officiellement annoncé.
Cette procédure est longue et parfois peu adaptée aux obligations hospitalières (ou au type de produit/service visé).
Afin de permettre un accès rapide aux dernières technologies parfois très spécifiques, des procédures particulières existent de manière à pouvoir effectuer un référencement sans concurrence ni publicité. C’est le cas lorsque l’opérateur est le seul à pouvoir répondre aux besoins de l’acheteur, pour des raisons techniques ou pour des raisons d’exclusivité liées à la propriété intellectuelle.
En ce qui concerne le référencement du Centrimag®, l’objectif étant de référencer une tête de pompe à lévitation magnétique, nous nous placions dans la situation où Thoratec® était le seul à proposer cette technologie. L’utilisation de cette console nécessite l’achat de circuits à usage unique, spécifiques de cette machine. Il s’agit ici d’un marché dit « captif » ou exclusif lié à la propriété intellectuelle, ne nécessitant pas de mise en concurrence ou de publicité.
MISE EN PLACE DU QUESTIONNAIRE ET RECUEIL DES DONNEES
Afin de faciliter le recueil et l’accès aux données et puisque la sécurité de l’identité des patients était assurée par l’anonymisation préalable, il a été décidé la mise en place d’un questionnaire électronique par l’application gratuite Google form® (Google®) permettant la génération automatique de données sous forme de classeur Excel® facilitant leur analyse.
Ce questionnaire a été divisé en plusieurs partie :
• L’identité du patient comportant le numéro d’anonymat permettant de retrouver le patient grâce à la clef d’anonymisation, le sexe, l’IMC (Indice de Masse Corporelle), l’âge, les dates d’entrée et de sortie d’hospitalisation .
• Le type de pompe utilisée, sa durée d’utilisation, la nécessité de changement de circuit, et l’indication de pose .
• Un bilan de médication permettant de relever les informations sur les anticoagulants, les antiagrégants et les antiinfectieux .
• Un point sur les complications les plus fréquemment décrites (hémorragies, thromboses, infections, arythmies, Accidents Vasculaires Cérébraux/encéphalopathies, hémolyses, embolies gazeuses et thrombopénies). Afin de grader l’importance de ces complications dans la prise en charge des patients, une échelle de valeur numérique de gravité a été mise en place, s’étalant de 0 à 5 :
o 0 signifie absence de complication .
o 1, 2 et 3 signifient l’apparition de la complication avec une importance croissante de la prise en charge nécessaire (par exemple, une transfusion ponctuelle ou des transfusions quotidiennes) ;
o 4 signifie qu’une reprise chirurgicale (ou changement de circuit) avec passage au bloc opératoire a été nécessaire .
o 5 signifie une imputabilité directe de la complication dans le décès du patient.
• Le devenir du patient est estimé de manière immédiate par quatre modalités (décès, récupération ou sevrage, greffe, cœur artificiel) et à plus long terme selon deux modalités (décès et sortie d’hospitalisation).
L’intégralité du questionnaire est disponible en Annexe 3.
Le recueil de ces données a été rendu possible par l’accès à la traçabilité papier du suivi perfusionniste, l’accès au dossier du patient via le logiciel Axigate® (Malta Informatique SARL) et l’accès à toutes les prescriptions du patient via le logiciel d’aide à la prescription Pharma® (Computer Engineering®).
DESCRIPTION DE LA POPULATION
Le nombre d’ECMO posés à des patients de plus de 18 ans entre le 01 janvier 2018 et le 31 août 2019 et surveillés par l’équipe de perfusionnistes de l’hôpital de la Timone est de 285.
Parmi ceux-ci, 145 ont bénéficié d’une technologie utilisée uniquement par voie veino-veineuse, incompatible avec une assistance cardiaque.
Enfin parmi les 140 patients restant, 20 patients ont bénéficié d’une assistance dans le cadre d’une indication autre qu’en cardiologie ramenant la cohorte à 120 patients. (Figure 16)
Parmi les patients ayant bénéficié d’une assistance par Cardiohelp® en VA dans une indication autre que cardiologique, des indications dans le SDRA, des greffes hépatiques et bipulmonaires, des pneumopathies ont été retrouvées.
De la même manière, les patients exclus ayant bénéficié d’une ECMO avec une canulation veino-veineuse présentaient principalement des indications de la sphère pulmonaire (grippes, légionellose, SDRA, pneumopathie, mucoviscidose, emphysème, BPCO, fibrose).
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Table des matières
REMERCIEMENTS
1. INTRODUCTION
1.1. Le système cardiovasculaire
1.1.1. L’anatomie du coeur
1.1.2. Connexions vasculaires et système valvulaire
1.1.3. Le cycle cardiaque
1.1.3.1. La systole ventriculaire
1.1.3.2. La Diastole ventriculaire
1.1.4. Le système circulatoire
1.1.4.1. La circulation systémique
1.1.4.2. La circulation pulmonaire
1.2. La circulation extra-corporelle (cec) avec oxygénateur à membrane
1.2.1. Définitions
1.2.2. Historique
1.2.3. Fonctionnement général des ECMO
1.2.4. ECMO Veino-veineuse
1.2.5. ECMO Veino-artérielle
1.3. Les complications liées aux ECMO
1.3.1. Les complications suite à l’intervention chirurgicale
1.3.2. Les complications liées à la technique ECMO
1.3.3. Surveillance
1.4. Les différents types de pompe pour ECMO
1.4.1. Les pompes centrifuges : exemple du Cardiohelp®
1.4.2. Les pompes à lévitation magnétique : Centrimag®
2. PROBLEMATIQUE
2.1. Utilisation des ECMO en cardiologie
2.2. État de disponibilité des greffons cardiaques
2.3. Demande de référencement à l’AP-HM
3. MISE EN PLACE DE L’ETUDE
3.1. Objectifs
3.2. recrutement des patients
3.3. mise en place du questionnaire et recueil des données
4. RESULTATS
4.1. Description de la population
4.2. Complications
4.3. Traitements
4.4. Devenir des patients
5. ÉTUDE COMPARATIVE DES COUTS
5.1. Financement des consoles
5.2. Coût des consommables
5.3. Cout des traitements
6. DISCUSSION
7. CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
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