La chimie des eaux superficielles, interstitielles et souterraines

La chimie des eaux superficielles, interstitielles et souterraines

Introduction

La contamination des eaux douces par les nitrates représente un enjeu majeur, puisque le cycle de l’azote et ses excès sont décrits comme ‘le cycle le plus perturbé par l’activité humaine’ (Howarth et Gene 2009) et ‘la troisième menace la plus importante pour la planète’ (Giles 2005).
Depuis quelques décennies, la fertilisation excessive des zones agricoles par les engrais – pour satisfaire la demande croissante de la population- a entraîné un excès d’éléments nutritifs sur les terrains cultivés qui chemine vers les cours d’eau par ruissellement superficiel et hypodermique ainsi que par drainage vers la nappe phréatique (Corriveau 2009). Cet excès d’éléments nutritifs perturbe l’équilibre des écosystèmes aquatiques d’une part, en modifiant les propriétés physico-chimiques et biologiques des cours d’eau, et en induisant le phénomène d’eutrophisation et d’autre part, menace la santé humaine puisque des concentrations en nitrates trop élevées dans l’eau potable peuvent provoquer la méthémoglobinémie chez le nourrisson et le cancer gastrique chez l’adulte (European Environment Agency 2000; Institut de la santé publique au Québec 2003).
Les rivières, les cours d’eau et même les oueds sont des systèmes de transport, à grande échelle d’eau et de matériaux provenant du bassin versant, dans lesquels les processus biogéochimiques de rétention et de transformation des éléments biogènes diffèrent entre l’amont et l’aval dans les écosystèmes lotiques (Vannote et al. 1980; Elwood et al. 1983; Grimm 1987; Thomas et al. 2001). Ces processus se produisent à l’interface entre les rivières et les aquifères appelée la zone hyporhéique.
Cette dernière est définie comme la section des sédiments fluviaux dans laquelle les eaux de surface et souterraines sont mélangées (Gooseff 2010; Stelzer et al. 2011). Triska et al. (1989) définissent la zone hyporhéique comme étant une eau de subsurface qui coule dans les sédiments du lit de la rivière et en contient plus de 10% mais moins de 98% d’eau de surface. Suite à ces processus de transport, la zone hyporhéique joue un rôle crucial dans la dynamique physico-chimique et biologique de l’eau, ainsi que dans le fonctionnement de l’écosystème aux échelles locale, régionale et du bassin versant (Mulholland et al. 2008; Böhlke et al. 2009; Gomes et al. 2012). La zone hyporhéique constitue un «point chaud» (McClain et al. 2003) en raison de son hétérogénéité écologique et structurelle considérable et de son impact sur la dynamique des nutriments (Lautz et Fanelli 2008; Boano et al. 2010; Zarnetske et al. 2011; Bardini et al. 2012).

 Rôle de la zone hyporhéique dans les cycles biogéochimiques

La zone hyporhéique est une zone d’échange dynamique importante pour l’écohydrologie des eaux souterraines et constitue un site d’une forte activité biogéochimique (Boulton et al. 1998; Sophocleous 2002; Krause et al. 2011). Plusieurs recherches ont montré l’importance de la zone hyporhéique sur les cycles biogéochimiques des nutriments (Valett et al. 1996; Pinay et al. 1998; Lewandowski and Nützmann 2010; Marmonier et al. 2012).

Apports naturels

Les apports météoriques sont liés à la présence d’azote dans l’eau de pluie (de 0.5 à 2 mg/l) (Tabatabai 1983). Pour une pluie annuelle de 800 mm, cet apport représente entre 4 et 16 kg/ha/an. Ces apports sont d’autant plus importants que les bassins d’étude sont situés près de grandes villes ou de sites industriels. Sur les bassins peu agricoles situés à proximité de pôles urbains, cette entrée peut être l’apport majoritaire qui participe au flux d’azote à l’exutoire d’un bassin (Belan 1979).

Contexte géologique 

Le bassin versant de la Tafna se subdivise en deux principales zones :
Le bassin amont : représenté par les versants Nord et Sud des Monts de Tlemcen qui font partie des formations du Jurassique supérieur (Fig. 8) constituées de dolomies riches en carbonates magnésiens. Ces formations recèlent les plus grands aquifères de la région (Gentil 1903).
Le bassin aval : représenté par la moyenne et la basse Tafna, il est orienté vers le Nord ; il appartient globalement aux formations tertiaires du Miocène caractérisées par des marnes et des grés (Gentil 1903).
Sur la rive gauche de l’oued Tafna, le miocène moyen recouvre de larges surfaces. Sur la rive droite, le miocène forme la plus grande partie de la vallée, les argiles sont sableuses intercalées de lits gréseux. Les roches éruptives sont très fréquentes dans la basse Tafna sur les deux rives de l’oued.

Description des stations d’étude

Dans cette étude, Dix stations d’échantillonnage ont été choisies (fig. 7) en prenant en considération l’ordre du cours d’eau, l’accessibilité aux différentes sections du cours d’eau (la nature du substrat « très vaseux », les cultures et les vergers sur les rives constituent parfois des contraintes de terrain pour accéder à certaines stations) et de leur représentativité au sein de la zone d’étude.

Echantillonnage – Méthodes d’étude

 Eau : L’échantillonnage de l’eau dans les trois milieux : superficiel, hyporhéique et souterrain a été réalisé mensuellement depuis Février 2013 jusqu’à Avril 2014, période couvrant deux situations hydrologiques différentes : Hautes Eaux (HE) et Etiage (E) dans dix stations réparties dans le bassin versant de la Tafna.
a) l’eau de surface (un prélèvement par station) et l’eau souterraine est prélevée par un simple remplissage manuel de flacon de polyéthylène d’un litre.
b) L’eau hyporhèique: Un réseau de 20 mini piézomètres (P1-P20) a été installé dans les stations choisies du bassin versant de la Tafna (Fig. 7). Le pompage de l’eau hyporhéique est effectué à 30 cm de profondeur dans deux unités géomorphologiques différentes par station Seuil (S) et Mouille (M) en faisant appel à la technique de prélèvement de Bou-Rouch (Bou & Rouch 1967 ; Bou 1974) en raison de sa relative simplicité et de son faible coût.

Analyses statistiques
Analyses de variance et tests non paramétriques

Les fluctuations spatio-temporelles de chaque paramètre physico-chimique particulièrement les nitrates de l’eau hyporhéique ont été étudiées en faisant appel à l’ANOVA I et du test non paramétrique de Kruskal-Wallis du logiciel MINITAB 17. Ce test permet d’analyser la variance à un facteur contrôlé et par conséquent mettre en évidence d’éventuelles différences entre les trois milieux, entre les stations de l’amont et celles de l’aval pour les paramètres physico-chimiques et des différences entre les deux périodes hydrologiques.

Comparaison entre la chimie des eaux superficielles, interstitielles et souterraines à l’échelle du bassin versant de la Tafna

L’analyse comparative des données physico-chimiques récoltées sur les eaux de trois milieux superficiel, hyporhéique et souterrain de l’oued Tafna et ses deux affluents l’Isser et Chouly pendant deux périodes hydrologiques distinctes (soit un total de 430 prélèvements) a permis d’identifier les variations spatiales (verticales et longitudinales) des paramètres qui caractérisent l’hydrosystème. De plus, elle a révélé des échanges significatifs entre la surface et la zone hyporhéique, traduits par la présence des valeurs de dioxygène dissous et des chlorures qui se rapprochent de celles du milieu superficiel.
Dans le bassin versant de la Tafna, les caractéristiques chimiques de l’eau de surface (SW) diffèrent significativement de celles de l’eau souterraine GW (p <0,05), mais elles sont similaires à l’eau interstitielle (Fig. 25) sauf pour les concentrations de l’oxygène dissous (DO), qui suivent un gradient vertical décroissant et sont toujours faibles dans l’eau souterraine à cause de la profondeur de la nappe. L’eau souterraine est significativement plus concentrée en NO3-N et en chlorure (Cl-) que l’eau de surface et l’eau interstitielle (p <0,05). Les valeurs moyennes de NO3-N de l’eau souterraine sont deux fois supérieures à celles de l’eau de surface et l’eau interstitielle (Fig. 25a).

Conclusion générale

La zone hyporhéique joue un rôle crucial dans le fonctionnement biogéochimique et écologique des écosystèmes d’eaux douces, puisque les échanges hyporhéiques sont susceptibles de contribuer au transfert des nutriments et des polluants entre les eaux superficielles et les eaux interstitielles et favoriser la transformation et la rétention des nutriments et matières organiques (Kasahara et Hill 2006).
Bien que la dynamique des échanges d’eau et de nutriments à l’interface nappe-rivière et le rôle de la zone hyporhéique dans les écosystèmes aquatiques soient connu depuis plusieurs années (chapitre 1) et se développent de manière diverse suivant les échelles spatiales d’étude, le fonctionnement de la zone hyporhéique à large échelle reste peu étudié.
L’objectif principal de cette thèse est de caractériser la dynamique et la variabilité spatio-temporelle des nitrates dans les eaux superficielles, hyporhéiques et souterraines afin de mettre en évidence la contribution de la zone hyporhéique dans le fonctionnement biogéochimique des cours d’eau mais aussi de déterminer les points chauds au niveau du bassin versant de la Tafna dans un climat semi aride qui caractérise la région d’étude.

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Table des matières

Introduction
Chapitre 1 : Etude bibliographique
1.1 Fonctionnement des cours d’eau
1.1.1 La zone hyporhéique
1.1.2 Rôle de la zone hyporhéique dans les cycles biogéochimiques
1.1.3 Facteurs de contrôle des échanges au niveau hyporhéique
1. 2 Dynamique des nitrates à l’échelle du bassin versant
1.2.1 Cycle de l’azote
1.2.2 Sources de nitrates à l’échelle du bassin versant
a) Apports anthropiques
b) Apports naturels
1.2.3 Processus de transformation de l’azote
Chapitre 2 : milieu physique
2.1 Le bassin versant de la Tafna
2.1.1 Réseau hydrographique
2.1.2 Contexte géologique
2.1.3 Contexte topographique
2.1.4 Contexte pédologique
2.1.5 Régime hydrologique
2.1.6 Climatologie régionale
2.1.7 Occupation du sol
2.2 Présentation générale du sous bassin de l’Isser et de l’oued Chouly
2.2.1 Sous bassin versant de l’Isser
2.2.2 Sous bassin versant de Chouly
2.3 Description des stations d’étude
2.4 Caractéristiques des points de prélèvement de l’eau souterraine (puits) des différentes stations étudiées
Chapitre 3 : Matériel et Méthodes
3. 1 Echantillonnage – Méthodes d’étude
3.1.1 Eau
Le sondage Bou-Rouch
3.1.2 Sédiments
3.2 Analyses physico-chimiques de l’eau
3.2.1 Mesures réalisées in situ
3.2.2 Analyses réalisées au laboratoire
Les chlorures (Cl)
Les nitrates (NO3-)
3.3 Analyse granulométrique
3.3.1 Préparation des échantillons
3.3.2 Dosage du carbone organique
3.3.3 Conductivité Hydraulique
3.4 Analyses statistiques
3.4.1 Analyses de variance et tests non paramétriques
3.4.2 Analyses Multivariées
a) analyse en composantes principales (ACP)
b) Principe de l’ACP
Chapitre 4 : résultats et interprétations
4.1 Chimie de l’eau de surface
4.1.1 Evolution spatio-temporelle des paramètres physico-chimiques de l’eau de surface
4.1.2 Analyse en composantes principales de l’eau de surface
4.1.3 Discussion
4.2. Milieu hyporhéique
4.2.1 Echanges hydrologiques
a) Gradient hydraulique vertical
B) Mélange des eaux dans le milieu hyporhéique
4.2.2 Evolution spatio-temporelle des paramètres physico-chimiques de l’eau hyporhéique
4.2.3 Evolution spatio-temporelle des nitrates de l’eau hyporhéique
a) Evolution amont/aval du bassin versant de la Tafna
b) Evolution longitudinale des nitrates (par station) dans le cours d’eau principal la Tafna et ses affluents Isser et Chouly
4.2.4 Rétention des nitrates
4.2.5 Influence de la géomorphologie sur la variabilité des nitrates
4.2.6 Relation entre les concentrations en NO3-N de l’eau hyporhéique, DO, K, la granulométrie des sédiments et l’ordre des cours d’eau à l’échelle du bassin versant
4.2.7 Les facteurs qui contrôlent les concentrations en nitrates
4.3 Milieu phréatique
4.3.1 Niveau de la nappe
4.3.2 Hydrochimie de la nappe
4.3.3 Conclusion
4.4 Comparaison entre la chimie des eaux superficielles, interstitielles et souterraines à l’échelle du bassin versant de la Tafna
Discussion générale
Conclusion générale

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