La chambre de compensation
Dans le cas d’un « futures contract » uniquement, une chambre de compensation est impliquée et a pour rôle d’en assurer le bon déroulement. Pour se faire, elle demande à l’acheteur de bloquer un certain montant qu’elle détermine elle-même, appelé marge initiale, sur un compte de deposit. Ce montant va servir à absorber, de manière virtuelle, les pertes de l’acheteur vis-à-vis de la variation de prix de la commodité ; il est régulièrement réévalué. Par exemple, si le produit en question est un contrat de 1’000 barils de pétrole, au prix de USD 110.- le baril et que le prix unitaire passe, par la suite, à USD 60.-, l’acheteur fait alors une perte de USD 50.- par baril (puisqu’il s’est préalablement engagé à payer plus), soit une perte totale de USD 50’000.-. Cette somme sera alors virtuellement déduite de la marge initiale bloquée par l’acheteur. La chambre de compensation détermine également un montant en dessous duquel la somme bloquée par l’acheteur ne doit pas passer, il est appelé marge de maintenance. Si cette situation arrive, la chambre de compensation déclenche alors un appel de marge, ce qui signifie que l’acheteur doit reconstituer le montant de sa marge initiale sur le compte de deposit. S’il ne le fait pas, sa position est automatiquement soldée. Cette pratique a pour but de garantir au fournisseur d’obtenir la contrepartie financière de sa marchandise, malgré une fluctuation de marché désavantageuse pour l’acheteur13 ou une faillite de ce dernier. En effet, les prix étant sujets à beaucoup de volatilité, la somme totale bloquée par l’acheteur atteint souvent le prix total du contrat à la fin de la période de trading. Si ce n’est pas le cas et que le contrat arrive à son terme, l’acheteur doit alors verser le solde du montant, afin d’obtenir la marchandise.
Le stress hydrique et la pénurie d’eau Il est également important de comprendre qu’une grande quantité d’eau disponible n’implique pas forcément une sécurité hydrique16. Par exemple, même si l’Inde apparaît dans la liste des pays les plus riches en eau, son nom est également répertorié dans celle des pays en situation de stress hydrique, comme le montre cette représentation des disponibilités en eau douce de chaque pays : (REKACEWICZ Philippe 2008) C’est lorsque la disponibilité de ses ressources en eau passe sous la barre des 1’700 mètres cubes par année et par habitant qu’un pays est considéré en stress hydrique. Si ce volume n’atteint pas les 1’000 mètres cubes, le pays est alors reconnu en état de pénurie. Les causes d’un tel paradoxe sont multiples, mais résident principalement dans trois aspects : l’augmentation constante de la consommation, l’utilisation agricole intensive ainsi que la mauvaise gestion de cette ressource abondante et si précieuse en même temps. En effet, l’Inde est aujourd’hui le second pays le plus peuplé au monde, après la Chine et devrait, selon les prévisions de l’ONU, continuer de s’accroître jusqu’à dépasser la population chinoise d’ici 202217. L’urbanisation et l’industrialisation croissante du pays ainsi que sa croissance démographique font pression sur ses ressources en eau douce : la consommation de cette dernière est de plus en plus accrue et ne cessera d’augmenter durant les années à venir.
De plus, le pays se hisse au rang de 4ème puissance agricole mondiale et fait partie des leaders dans la production de certains produits agricoles très gourmands en eau tels que, entre autres, le thé (6’470 litres d’eau/kg), le riz (entre 1’670 et 2’500 litres d’eau/kg) ou encore le coton (10’000 litres d’eau/kg)18. L’Inde fait ainsi partie des trois pays qui exportent le plus d’eau virtuelle (avec les Etats-Unis et la Chine)19. Voici une représentation des importations nettes (importations – exportations) d’eau virtuelle par pays, en milliards de mètres cubes : Bien que l’agriculture représente 17,9% du produit intérieur brut (PIB) du pays et 49% des emplois de la population active indienne20, il faut garder à l’esprit le coût d’opportunité que l’utilisation de telles quantités d’eau engendre. En effet, le volume de cette ressource affecté à la culture de produits agricoles représente, par conséquent, un volume qui n’est pas exploitable par les ménages, réduisant ainsi encore plus la quantité d’eau mobilisable et renforçant la situation de stress hydrique de la population.
Finalement, malgré les nombreuses rivières que compte l’Inde, les sources de pollution de celles-ci sont nombreuses et reconnues depuis plus de vingt ans : « En 1995, le Bureau Central de Contrôle de la Pollution (Central Pollution Control Board) a identifié des zones extrêmement polluées sur 18 grandes rivières en Inde. Le mode de destruction est toujours le même : pollution industrielle et domestique, urbanisation incontrôlée, occupations illégales, écoulements de pesticides et d’engrais agricoles, érosion et envasement, surexploitation de l’eau et pratiques religieuses inconsidérées. Ainsi, les 44 rivières du Kerala sont en voie d’extinction en raison de la déforestation, de l’extraction de sable, de la fabrication de briques sur les rives des cours d’eau et de la pollution. » (DAS Binayak 2009) Mis à part ces aspects concernant la mauvaise gestion des rejets polluants et les pratiques néfastes pour l’environnement, c’est également l’aspect imperméable des volumes d’eau des nappes phréatiques, vis-à-vis des aléas climatiques du pays, qui rendent celles-ci si attractives. Ainsi, il a suffi de trente ans, entre 1960 et 1990, pour que le nombre de puits passe de 3’000 à 6 millions21. A force d’être surexploitées, les nappes peu profondes se sont épuisées et c’est auprès des nappes fossiles, donc incapables de se réalimenter, que les forages ont continué. Ces pratiques inadaptées et prolongées dirigent l’Inde vers une issue très peu favorable : « L’Inde se précipite vers une pénurie d’eau. En cause : l’exploitation des nappes phréatiques, qui échappe à tout contrôle, et l’agriculture intensive. Le Groupe des ressources en eau 2030, composé d’experts et d’industriels, estime que, si rien ne change d’ici à vingt ans, la moitié des besoins en eau du pays ne pourra pas être satisfaite. » (BOUISSOU Julien 2013) Cet exemple extrême démontre donc clairement que plusieurs composantes sont nécessaires à la pérennité hydrique d’un pays et que celle-ci ne dépend pas uniquement de la quantité d’eau disponible dans ce dernier.
Les inconvénients de la désalinisation
Le premier gros problème rencontré lors de la désalinisation d’eau de mer est sa tendance très énergivore. L’utilisation de combustibles fossiles dans ce procédé est, effectivement, très répandue et engendre des rejets de gaz à effet de serre non négligeables : 680 grammes de CO2 sont rejetés pour une production d’un mètre cube d’eau, en Espagne, soit plusieurs milliers de tonnes de CO2, pour une production de plusieurs millions de mètres cubes d’eau par jour22. De ce fait, dans un monde où le réchauffement climatique est devenu l’une des préoccupations les plus inquiétantes quant à la survie de l’humanité, il est complétement inenvisageable de percevoir la désalinisation comme une solution adaptée. En plus de contribuer à l’effet de serre, la désalinisation représente un danger pour la vie marine et l’écosystème à cause de ses effluents. En effet, les eaux rejetées par les usines de dessalement contiennent non seulement des produits chimiques utilisés dans le procédé en question, mais également de la saumure.
Les différents produits chimiques utilisés et leurs quantités varient selon la méthode de dessalement utilisée, la qualité de l’eau salée prélevée et la qualité de l’eau voulue, soit selon le traitement à appliquer à l’eau. Le procédé par osmose inverse, bien que moins énergivore, présente l’inconvénient d’une utilisation plus intensive de produits chimiques que le procédé par distillation. Il semblerait, cependant, que la quantité de métaux lourds rejetée par ce dernier soit plus élevée et donc plus nocive à la faune et à la flore marine. Les produits utilisés sont les suivants : produits antibactériens et antisalissure, produits anti-mousses, floculants (uniquement dans le procédé par osmose inverse), produits antitartre, solutions acides ou basiques et métaux lourds. Les êtres vivants les plus touchés par ces produits sont les coraux ainsi que les phytoplanctons (base de la chaîne alimentaire océanique). La saumure, un concentré d’eau salée, une fois rejetée dans l’océan, même diluée avec de l’eau de mer, peut avoir des conséquences très importantes sur les écosystèmes marins.
Créant des couches de sel au fond de l’océan, au niveau des déversements des usines, la saumure atténue, voire empêche, le brassage des eaux, ce qui a comme conséquence de réduire l’oxygène et la lumière des fonds marins. Le manque de lumière empêche ainsi les phytoplanctons de créer de l’oxygène, ce qui accentue encore plus le manque d’oxygène engendré par les effluents. De plus, ce manque les empêche de se développer, puisque la lumière est un composant essentiel à la photosynthèse23. Dans des cas extrêmes, le rejet de saumure peut même mener à la création de zones mortes. Les déversements des usines de dessalement, que l’on parle de saumure ou de produits chimiques, représentent donc un danger réel pour la pérennité de la vie marine, car ils ont un impact direct sur les phytoplanctons et affectent, ainsi, toute la chaîne alimentaire marine.
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Table des matières
Déclaration
Remerciements
Résumé
Liste des tableaux
Liste des figures
1Introduction
1.1L’eau douce
1.1.1Une ressource à chérir
1.1.2Les pays les plus grands consommateurs d’eau
1.1.3La répartition de la consommation d’eau par secteur
1.1.4Le principe de l’eau virtuelle
1.1.5La valeur économique de l’eau
1.2Le trading
1.2.1L’histoire du trading
1.2.2La définition d’une commodité
1.2.3L’utilité du trading
1.2.4Les formes de trading abordées
1.2.4.1Le trading de « futures contracts »
1.2.4.2Le trading de « forward contracts »
1.2.5Les parties prenantes impliquées et leur rôle
1.2.5.1Les fournisseurs et les clients finaux
1.2.5.2La banque / le trader
1.2.5.3La chambre de compensation
2Problématique traitée et objectifs
2.1Méthodologie
2.1.1Recherches d’informations sur internet
2.1.2Entretiens auprès de divers acteurs actifs dans le monde de l’eau
2.1.3Discussions avec des professionnels du secteur du trading
2.1.4Rendez-vous au sein de l’OMC
3Analyse
3.1Les problèmes liés à l’eau
3.1.1La répartition inégale des quantités d’eau dans le monde
3.1.1.1Les zones arides
3.1.1.2Les zones sujettes à la mousson
3.1.1.3Les pays riches et les pays pauvres en eau
3.1.1.4Le stress hydrique et la pénurie d’eau
3.1.2L’impossibilité de créer de l’eau
3.1.2.1La désalinisation
3.1.2.1.1Les inconvénients de la désalinisation
3.1.2.1.2La croissance du marché de la désalinisation
3.1.3La qualité de l’eau
3.1.3.1Les différentes sortes de nappes phréatiques
3.1.3.2Les sources de pollution de l’eau
3.1.3.2.1La pollution agricole
3.1.3.2.2La pollution industrielle
3.1.3.2.3La pollution ménagère
3.1.3.2.4La pollution saline
3.1.4Synthèse des problèmes liés à l’eau, leurs causes et conséquences
3.2Le trading d’eau
3.2.1La faisabilité d’un trading physique international d’eau douce
3.2.1.1Le trading du pétrole
3.2.1.1.1Détermination du prix
3.2.1.1.2Logistique
3.2.1.1.3Coûts du transport
3.2.1.2Parallèle entre le trading du pétrole et l’eau
3.2.1.2.1Détermination du prix
3.2.1.2.2Logistique
3.2.1.2.3Coûts du transport
3.2.2Le trading de droits d’accès à l’eau
3.2.3Le trading des eaux usées
3.2.4Synthèse des points positifs et négatifs des concepts de trading
4Recommandations
4.1Mise en évidence du niveau de durabilité des concepts
4.1.1Les avis des différents acteurs du monde de l’eau
4.1.2Le trading physique international d’eau douce
4.1.2.1Le manque d’eau douce
4.1.2.2L’eau douce devenue insalubre
4.1.2.3Synthèse du potentiel de durabilité
4.1.3Le trading de droits d’accès à l’eau
4.1.3.1Le manque d’eau douce
4.1.3.2L’eau douce devenue insalubre
4.1.3.3Synthèse du potentiel de durabilité
4.1.4Le trading des eaux usées
4.1.4.1Le manque d’eau douce
4.1.4.2L’eau douce devenue insalubre
4.1.4.3Synthèse du potentiel de durabilité
4.2Synthèse de l’impact et de la faisabilité des concepts
4.2.1Le trading physique international d’eau douce
4.2.2Le trading de droits d’accès à l’eau
4.2.3Le trading des eaux usées
4.2.4Tableau récapitulatif de l’impact et de la faisabilité des concepts
5Conclusion
5.1Appréciation critique
Bibliographie
Annexe 1: Questionnaire
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