La biodiversité dans l’agriculture
Les agroécosystèmes
Les agroécosystèmes peuvent être définis comme des écosystèmes qui ont été délibérément simplifiés par l’Homme et qui ont pour objectif la production de biens spécifiques aux humains. La simplification amène à l’utilisation de quelques espèces végétales et animales. Dans un sens écologique, ce système peut être vu comme celui qui est maintenu par des perturbations fréquentes, dans un stade de succession précoce. Les agroécosystèmes sont gérés par la substitution et la supplémentation de nombreuses fonctions naturelles de l’écosystème par le travail de l’Homme et/ou par l’énergie pétrochimique et ses produits dérivés. Les exemples de services de l’écosystème particulièrement importants pour les agroécosystèmes et les paysages agricoles sont: le maintien d’une diversité génétique essentielle pour des récoltes et des élevages prospères ; les cycles de nutriments ; le contrôle biologique des maladies et des parasites ; le contrôle de l’érosion et la rétention de sédiments ; et la régulation de l’eau (Swift et al. 2004). Le premier et le plus évident des rôles de la biodiversité dans ce contexte est d’assurer la multiplicité des fonctions qui peuvent être attribués aux organismes du sol. Un second, en corrélation avec la biodiversité est en plus de s’assurer que ces fonctions soient maintenues, face à d’éventuelles perturbations (Giller et al. 1997).
La biodiversité dans l’agriculture
Les organismes représentent un des cinq facteurs majeurs de la formation des sols (Coleman 2008). Ainsi, le fonctionnement du sol est affecté par l’abondance et la diversité des organismes du sol (Loranger et al. 1998). En accord avec de récentes estimations, les animaux du sol représenteraient à peu près 23% de la diversité totale des organismes vivants qui ont été décrits à ce jour (Lavelle et al. 2006). Les auteurs s’accordent à dire que la faune et flore du sol jouent un rôle crucial dans le fonctionnement des écosystèmes terrestres. Ils sont ainsi considérés comme le système supportant la vie sur notre planète. Tout ceci a provoqué un intérêt renaissant pour la biodiversité du sol et ses rôles fonctionnels (Barrios 2007).
Dans un agroécosystème, la biodiversité comprend la biodiversité « prévue », i.e. les produits de culture et/ou le bétail que les fermiers désirent produire, mais aussi la biodiversité « imprévue », i.e.
toute la faune et flore existantes, et introduites dans le système. Cette faune et cette flore peuvent être considérées comme bénéfiques, comme les insectes pollinisateurs, ou nuisibles, comme les pathogènes, les parasites ou les mauvaises herbes. Toute cette biodiversité « imprévue » peut devenir « prévue » dans le sens où elle est gérée de façon utile. Une telle gestion peut être dirigée vers l’élimination des pestes par exemple (amélioration des processus contrôlant les populations) ou les processus de l’écosystème, comme la fixation de l’azote, qui sont associés respectivement à la diversité des espèces et à celle des groupes fonctionnels (Brussaard et al. 2007).
Parmi les animaux qui composent la faune du sol, la macrofaune édaphique comprend les plus gros invertébrés (diamètre > 2mm), incluant des groupes comme les fourmis, les coléoptères, les araignées, les vers, les myriapodes, les termites, etc. La mésofaune, quant à elle, comprend les invertébrés plus petits (diamètre < 2mm), comme les acariens et les collemboles.
Groupes fonctionnels d’organismes du sol
Les ingénieurs de l’écosystème sont les organismes qui directement ou indirectement contrôlent la disponibilité des ressources pour les autres organismes en modifiant l’environnement biotique ou abiotique. Les effets écologiques de l’ingénierie sur les autres espèces se produisent du fait que les
changements d’état physique contrôlent directement ou indirectement les ressources utilisées par ces autres espèces (Jones et al. 1997; Wolters et al. 2000). Les ingénieurs écologiques du sol construisent de grandes et résistantes structures organo-minérales qui peuvent persister durant de longues périodes (des mois voire des années) et qui peuvent profondément affecter l’environnement pour des organismes plus petits. Ces invertébrés peuvent développer des relations mutualistes avec les microorganismes qui vivent dans leurs systèmes digestifs ou dans les structures qu’ils ont construites (Lavelle et al. 1998). Ce groupe inclut les termites, les vers de terre et les fourmis.
A un niveau plus bas de la hiérarchie, les transformateurs de la litière produisent de simples structures organiques qui sont bien moins persistantes (Giller et al. 1997 ; Byers et al. 2006). Leur rôle essentiel est de modifier la litière, i.e., les débris végétaux et animaux qui tombent au sol. En réduisant cette litière en particules minuscules, ils en modifient la nature physique et chimique, faisant généralement baisser son rapport C/N (par leur respiration et leur assimilation), la rendant ainsi plus favorable à l’activité microbienne et à une décomposition plus poussée. Ils peuvent permettre aussi une meilleure disponibilité de certains éléments nutritifs pour la plante (Lavelle et al. 1998).
Enfin, il y a les prédateurs, qui contribuent à une régulation de l’activité biologique du sol, en agissant au plus haut rang de la chaîne trophique inféodée au sol, en se nourrissant de tous les autres organismes (Brévault et al. 2007)
Couverture du sol, couverture végétale
Des études montrent qu’une couverture de litière permanente limite la perte de diversité et d’abondance de la macrofaune du sol. La couverture végétale au sol et la litière contribuent à une plus forte abondance de la faune du sol (Barros et al. 2002). De plus, cette couverture, ou cette litière, est importante pour l’établissement d’une faune du sol diversifiée (Barros et al. 2002). Par exemple, la diversité des petits insectes et autres prédateurs sont fortement augmentés par l’apport de paillage et par la présence d’une communauté importante de mauvaises herbes (Wardle et al. 1995). L’apport d’une plante de couverture (légumineuses le plus souvent) permet aussi d’augmenter significativement la biodiversité du sol, tout en fournissant, du fait de leurs caractéristiques, un supplément d’azote à la culture étudiée (Blanchart et al. 2006, DuPont et al. 2009). La seule rupture du couple formé entre les plantes et les organismes du sol peut avoir des conséquences critiques sur le fonctionnement des écosystèmes terrestres (Velasquez et al. 2007).
Les champs de bananes représentent de très simples agroécosystèmes qui sont intéressants à étudier en partie car il y a un nombre limité d’espèces dans la communauté de plantes associée.
Jusqu’à maintenant, la diversité des plantes associées avec la monoculture de bananes desserts est limitée aux herbacées (Duyck et al. in press).
Historiquement, les cultivateurs de banane mesurent la fertilité du sol comme une partie de leur programme de gestion des éléments nutritifs, mais il y a très peu de connaissances sur les propriétés physiques du sol et encore moins à propos du statut biologique du sol, excepté sur la présence des pathogènes. De manière similaire, il y a très peu d’informations disponibles sur les interactions entre les propriétés chimiques, physiques et biologiques des sols où poussent les bananiers (Pattison et al. 2008).
Echantillonnage de la faune du sol
L’échantillonnage s’effectue selon la méthode « Tropical Soil Biology and Fertility » modifiée (TSBF, Anderson & Ingram 1993). Cette méthode consiste à prélever des monolithes des sols de 30*30*30 cm et à trier manuellement le sol afin d’y collecter la macrofaune (individus dont le diamètre est supérieur à 2 mm). Ces monolithes ont été séparés en deux parties : 0-5cm et 5-30cm de profondeur , dans lesquelles ont été récupérés les macroinvertébrés. Les prélèvements ont été effectués du 14 janvier au 10 mars. Ces prélèvements ont été effectués, dans le cas du traitement J
(bananeraie après jachère), là où la couverture était minimale, et dans le cas du traitement S (bananeraie sous couverture soja), là où la couverture était maximale. Dans chaque sous-parcelle, six monolithes ont été prélevés, permettant ainsi d’obtenir un échantillonnage le plus exhaustif possible de la macrofaune présente, du point de vue de la diversité. La macrofaune présente est triée manuellement sur le terrain et placée dans du liquide de Pampel (30 volumes d’eau, 15 volumes d’éthanol à 95°, 6 volumes de formol à 40% et 4 volumes d’acide acétique).
Au laboratoire, les échantillons sont tout d’abord séparés en grands groupes taxonomiques, avant d’être déterminés à l’espèce, lorsque cela est possible. Lorsque la détermination à l’espèce n’a pas été possible, les individus ont été identifiés à la morpho-espèce (individus morphologiquement semblables). Une fois les individus déterminés, ils ont été classés par grands groupes trophiques :
phytophages, rhizophages, prédateurs, microphages (se nourrissant de matière organique vivante);
saprophages (se nourrissant de matière organique morte) ; géophages (vers ingérant du sol) et polyphages.
|
Table des matières
1. Introduction
1.1. Les agroécosystèmes
1.2. La biodiversité dans l’agriculture .
1.2.1. Rôles
1.2.2. Groupes fonctionnels d’organismes du sol.
1.3. Couverture du sol, couverture végétale
1.4. Objectif et hypothèses de travail
2. Matériels et méthodes
2.1. Dispositif expérimental
2.2. Sol et climat
2.2.1. Sol
2.2.2. Climat
2.3. Echantillonnage de la faune du sol
2.3.1. Macrofaune
2.3.2. Mésofaune
2.4. Propriétés physiques du sol
2.5. Traitement des données
2.5.1 Représentations graphiques
2.5.2. Indices de diversité
2.5.3. Analyses statistiques
3. Résultats
3.1. Propriétés physiques du sol
3.1.1. Indices volumétriques
3.1.2. Test de stabilité structurale
3.2. Faune du sol
3.2.1. Abondances et diversités spécifiques
3.2.2. Diagrammes rang-abondance
3.2.3. Indices de diversité
3.2.4. Analyses multidimensionnelles
4. Discussion
5. Conclusion et perspectives
Télécharger le rapport complet