Typologie des PME dans la mondialisation
Les PME ne sont pas toutes affectées de la même façon par la mondialisation. En effet, il serait faux de considérer les PME comme un ensemble homogène (Julien et St-Pierre, 2009; Laghzaoui, 2006; Nummela, 2004; Torrès, 1998). Par exemple, la manière dont elles prennent les décisions, leurs processus d’internationalisation, leurs stimuli à l’ exportation sont différents d’ une PME à l’autre (Nummela, 2004).
Selon les thèmes abordés, elles sont souvent classées par typologies. Dans l’ étude de Julien et St-Pierre (2009), les PME sont regroupées en six catégories en fonction de leur sensibilité à la mondialisation.
Les PME échappant plus ou moins à la mondialisation. Dans cette catégorie on compte environ un quart des PME (ou la moitié dans les pays en développement).
Elles ne sont, en effet, que très peu concernées par la mondialisation parce qu’ elles n’agissent que très localement. Elles n’ opèrent pas sur les marchés internationaux. Leur concurrence est également locale. On compterait dans ce groupe, aussi bien les fermes familiales que les artisans, les électriciens ou les coiffeurs.
Les PME agissant surtout localement ou régionalement et de façon passive vis-à-vis de la mondialisation. Dans ce groupe, on considère les PME qui s’approvisionnent en petite partie sur les marchés internationaux. Par exemple, les fleuristes, les agences de voyage ou les fabricants de meubles font partie de cette catégorie dont la concurrence se compose essentiellement de regroupements ou de chaînes commerciales qui prennent la place des PME locales.
Les PME achetant fortement sur les marchés globaux. Cette catégorie concerne environ 10 % des PME et regroupe toutes celles qui se fournissent de façon importante sur les marchés internationaux. C’ est le cas, par exemple, des pharmacies.
Les PME en liens avec des moyennes ou grandes entreprises exportatrices. Celles-ci représentent environ un dixième des PME (moins de 5 % dans les pays en développement) et concernent celles qui sont au service ou celles qui fournissent des moyens ou grands exportateurs. Leur concurrence se trouve dans les pays émergents, où on peut les remplacer par d’ autres firmes en raison des faibles coûts de main-d’œuvre.
Les PME faiblement exportatrices. Ce sont les PME qui exportent moins de 15 % de leur production vers des pays ou des régions géographiquement ou culturellement proches. L’exportation, dans leur cas, n’ est pas stratégique et les commandes sont non sollicitées.
Les PME mondiales. Ces PME sont les plus internationalisées et opèrent sur la scène mondiale de façon stratégique et délibérée. Cette catégorie concerne moins de 5 % des PME dans les pays développé.
Théories de l’internationalisation
L’ internationalisation des entreprises a suscité beaucoup d’intérêt dans la littérature. Ce terme est utilisé à l’ échelle de l’ entreprise pour désigner son engagement sur les marchés internationaux (Nummela, 2004). Cependant, il n’ existe pas de définition ni de concept universellement reconnu pour l’internationalisation.
Différentes théories se sont succédées au fil des années pour comprendre et expliquer le phénomène de l’internationalisation. En 1977, Johanson et Vahine ont introduit le modèle d’Uppsala (U-Modèle) selon lequel l’internationalisation serait un processus incrémentai et graduel. Le modèle voit le manque de connaissances et d’ informations à l’international comme un obstacle significatif au développement international des entreprises. Ainsi, les auteurs considèrent l’internationalisation comme l’acquisition graduelle de connaissances sur un marché étranger qui va permettre aux entreprises de s’ engager par étape, de façon successive sur ces marchés. C’ est le manque d’informations et de connaissances ainsi que l’incertitude qui en découle qui explique l’internationalisation par étape. Selon ce modèle, les connaissances et les informations nécessaires au développement s’acquièrent avec l’expérience des opérations internationales. De la même façon, les entreprises tendraient à s’internationaliser, dans un premier temps, vers un pays psychologiquementl proche pour ensuite, avec l’expérience, se diriger vers d’autres. L’internationalisation serait le fruit d’ une série de prise de décisions mises bout à bout de façon incrémentale (Johanson et Vahine, 1977).
Au même moment, Bilkey et Tesar (1977) introduisent le modèle d’innovation (1-modèle). Celui-ci présente l’internationalisation des PME comme un processus progressif en plusieurs étapes successives.
La première étape présente l’entreprise avant toute initiative de développement international. L’entreprise n’est pas intéressée par l’exportation et ne répondrait pas à une demande non sollicitée.
Dans la seconde étape, l’entreprise répond à une offre non sollicitée mais n’ envisage pas d’exporter davantage ni de formaliser ses opérations internationales.
Dans la troisième étape, l’entreprise envisage activement l’exportation et explore les possibilités qui s’offrent à elle.
Au cours de la quatrième étape, l’entreprise teste l’exportation de façon expérientielle vers un pays psychologiquement proche.
Dans l’ étape cinq, l’entreprise a acquis de l’expérience à l’exportation vers ce premier pays et optimise son développement en fonction du taux de change.
L’ étape six est marquée par la volonté de l’entreprise d’exporter vers d’autres pays qui sont psychologiquement plus éloignés de son pays d’ origine.
Les barrières à l’exportation pour les PME
Malgré des conditions favorables à l’ internationalisation des PME, un certain nombre d’ entre elles éprouvent encore de la difficulté ou renoncent à se développer sur les marchés étrangers. Les causes sont multiples et d’ autant plus marquées compte tenu de leurs faibles ressources (Arteaga-Ortiz et Fernandez-Ortiz, 2008). Indépendamment du mode d’ internationalisation, les PME sont confrontées à des barrières, des obstacles ou des freins à leur engagement.
La littérature n’ aborde que très peu les difficultés rencontrées par les PME lors de l’internationalisation et se limite davantage aux barrières, aux menaces ou aux freins liés aux activités d’ exportation. Par ailleurs, les barrières peuvent être très différentes d’ une PME à une autre et il n’ existe pas de consensus quant à leur nombre (Arteaga-Ortiz et Fernandez-Ortiz, 2008).
La perception des barrières est également différente selon le stade de développement de la PME. Leonidou (2004) identifie trois groupes de PME pour lesquelles la perception sera différente: les «non exportateurs» qui projettent d’ exporter, les «exportateurs actuels» qui sont présentement engagés dans des contrats d’ exportation et qui perçoivent les barrières selon leurs expériences quotidiennes et les « ex-exportateurs », qui combinent les points de vue des deux autres types. Une étude qui a été menée auprès de PME européennes confirme que la perception des barrières des PME qui ne se sont pas encore internationalisées est plus importante que chez celles qui ont déjà une activité internationale (European Commission, 2010).
LE CONCEPT DE DISTANCE
La notion de distance est très souvent évoquée dans la littérature en relation avec l’internationalisation des entreprises. Zaheer, Schomaker et Nachum (2012) prétendent même que le management international est le management de la distance4 (Zaheer et al., 2012). Coordonner l’ activité d’ une entreprise et de ses unités dispersées sur le globe implique une adaptation aux différentes formes de distances: certaines semblent évidentes comme la distance géographique alors que d’ autres le sont moins comme les distances culturelles, institutionnelles et économiques (Ghemawat, 2001; Zaheer et al., 2012).
Beckerman (1956) est le premier à avoir mis en relation la notion de distance et l’internationalisation des entreprises. Plus précisément, il a étudié l’impact de la «distance économique» (dans laquelle il regroupe la distance géographique, les coûts de transport et les barrières tarifaires) sur les échanges commerciaux en Europe occidentale. Il conclut qu’il pourrait exister une relation entre la concentration des échanges et la proximité géographique expliquant que les pays européens en marge du continent (comme la Grèce ou le Portugal) échangent moins avec les pays plus centraux (la France, l’Allemagne ou la Belgique), ce qui pourrait expliquer également leur plus faible développement économique. L’ importance de la distance géographique a été confirmée dans la littérature par la suite (Ghemawat, 2001; Hâkanson et Ambos, 2010; Klysik-Uryszek et Kuna-Marszalek, 2014; Métais, Véry et Hourquet, 2010).
La notion de distance est perçue comme une réelle barrière au développement international (Ellis, 2007; Frankel et Rose, 2002). La distance imposée par l’internationalisation augmente à la fois les coûts liés au transport (Clark, Dollar et Micco, 2004; Ellis, 2007) mais aussi ceux liés à l’incertitude et la méconnaissance du nouveau marché (Ellis, 2007). Les coûts engendrés par l’ apprentissage de la culture étrangère, des différences linguistiques ou liées aux pratiques d’ affaires encourageraient les entreprises à choisir des destinations culturellement plus proches. Les coûts correspondent à la fois aux frais occasionnés pour transporter un bien sur un marché et à ceux liés à l’ apprentissage des caractéristiques de ce marché (Ellis, 2007).
L’impact de la distance culturelle sur l’internationalisation
Dans la littérature, la distance culturelle est vue comme une barrière pour l’internationalisation. Elle influe sur l’ internationalisation de plusieurs façons. D’une manière générale, elle augmenterait les coûts liés à la recherche d’ informations sur le nouveau marché, ses consommateurs et la culture du pays d’accueil. Les différences culturelles perturbent les codes de communication rendant l’intégration du produit ou du service plus difficile. L’ entreprise doit adapter son offre aux nouveaux consommateurs en tenant compte des spécificités culturelles (Quer, Claver et Rienda, 2012). Dans le cadre d’ une étude menée par Kang et Jiang (2012) sur des entreprises chinoises, la distance culturelle aurait une influence négative sur le choix de destination des IDE. Les multinationales chinoises tendent à investir dans des économies culturellement proches de la Chine (Kang et Jiang, 2012). La distance culturelle augmenterait la perception du risque à l’ international, ce qui influencerait ainsi la prise de décision (Kraus et al. , 2015).
La distance culturelle influence également le mode d’ internationalisation (Drogendijk et Slangen, 2006; Jean-Amans et Abdellatif, 2013). Les résultats de l’ étude de Drogendijk et Slangen (2006) expliquent que les multinationales néerlandaises favorisent l’implantation d’une filiale à l’acquisition d’une entreprise locale lorsque l’entreprise étrangère est située dans un pays très distant culturellement en raison des grandes disparités organisationnelles, managériales et les styles de communication qui compliquent l’intégration de la nouvelle entité dans le réseau de la multinationale. L’étude de Jean-Amans et Abdellatif (2013) confirme cela. Leurs résultats montrent que plus la distance culturelle est grande, plus les dirigeants de PME ont tendance à implanter des filiales contrôlées et détenues à 100 %.
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Table des matières
INTRODUCTION ET PROBLÉMATIQUE
CHAPITRE 1 – CONTEXTE GÉNÉRAL
1.1 La mondialisation et ses conséquences pour les PME
1.1.1 Définition
1.1.2 Conséquences pour les entreprises
1.1 .3 Conséquences de la mondialisation pour les PME
1.2 L’ internationalisation
1.2.1 Théories de l’ internationalisation
1.2.2 Modes d’internationalisation
1.2.3 Les facteurs de succès à l’ exportation
1.3 L’internationalisation des PME
1.3.1 Les barrières à l’ exportation pour les PME
1.3.2 Les motivations à l’ exportation
1.3.3 Le propriétaire-dirigeant et l’équipe de direction
1.4 L’ incertitude et le risque
1.4.1 Définitions
1.4.2 Risques à l’ international
1.5 Le concept de distance
1.5.1 La distance, un concept multidimensionnel
1.5.2 Lien entre distance psychique et distance culturelle
1.5.3 L’ impact de la distance culturelle sur l’ internationalisation
CHAPITRE 2 – CULTURE ET INTERNATIONALISATION DES PME
2.1 Définition de la culture
2.2 L’impact de la culture sur les activités des entreprises
2.2.1 L’impact de la culture sur la communication
2.2.2 L’ influence de la culture sur la négociation
2.3 Les compétences interculturelles dans la littérature
2.3.1 Définition
2.3.2 Conceptualisation des compétences interculturelles
2.3.3 La CI, un avantage en entreprise?
2.4 Question de recherche
CHAPITRE 3 – CADRE CONCEPTUEL ET MÉTHODOLOGIE
3.1 Cadre conceptuel
3.2 Méthodologie
3.2.1 Collecte de données
3.2.2 Échantillon
3.2.3 Variables
3.2.4 Méthode d’ analyse
CHAPITRE 4 – RÉSULTATS ET DISCUSSION
4.1 Résultats
4.1.1 L’ influence des compétences interculturelles sur le degré d’ internationalisation des PME
4.1.2 L’ influence des compétences interculturelles sur la distance culturelle entre les pays d’origine et le pays d’ implantation
4.2 Discussion
LIMTES ET AVENUES DE RECHERCHE
CONCLUSION
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