Depuis le début du XXème siècle, la proportion de populations vivant dans les villes n’a cessé d’augmenter. Cette urbanisation croissante a entrainé une multiplication des recherches consacrées aux villes. Plusieurs spécialistes d’origines diverses se sont penchés sur la question. Parmi eux, on peut citer des géographes, des économistes, des sociologues, des historiens entre autres.
L’urbanisation foisonnante a donné naissance à un certain nombre de problèmes notamment la macrocéphalie des grandes villes, le développement anarchique d’habitations à la périphérie des agglomérations. Comme l’ont souligné certains dans des études essentiellement consacrées à la ville. Beaujeu-Garnier et Chabot (1963) dans leur ouvrage Traité de géographie urbaine, 3ème édition, n’ont pas manqué de souligner les fonctions des villes ainsi que les problèmes nouveaux relatifs aux plans urbains et aussi à l’extension des villes. Max Derruau lui, dans son ouvrage Géographie humaine (1976) en plus des fonctions de la ville, parle de l’influence qu’elle exerce dans sa région en soulignant les relations ville-campagne qui contribuent largement au développement de la ville. Mainet (G) qui s’est intéressé à la ville sénégalaise a, dans son article intitulé « La conquête urbaine au Sénégal », in Urbanisation et développement dans les pays tropicaux (1991), montre l’importance de la migration, surtout rurale, dans les villes sénégalaises ; ce qui explique la croissance de certaines d’entres elles.
Tous ces problèmes évoqués dans ces études, sont la conséquence de la centralisation des gestions et d’une concentration de l’essentiel des services dans une seule ville. Pour résoudre ces problèmes, la décentralisation, concept nouveau, a été adoptée comme solution. Le Sénégal a depuis longtemps misé sur la décentralisation. Hérité de la colonisation, ce processus se poursuit toujours sur le territoire national. Ainsi, en 1996, une nouvelle réforme territoriale fait de la région une collectivité locale. C’est ce qui a abouti à la création de nouvelles régions en 2008 parmi lesquelles la région de Kaffrine qui devient une nouvelle collectivité locale.
Cette collectivité régionale de Kaffrine, nouvellement créée, doit jouer un rôle de leadership dans son espace régional pour impulser le développement. C’est dans ce contexte que s’inscrit notre étude qui pose la problématique de l’apport de la décentralisation dans le processus d’urbanisation et de développement de Kaffrine.
Cette étude s’articule autour des concepts clés que sont la ville, l’urbanisation, la décentralisation, la gouvernance urbaine et l’aménagement régional. Tous ces concepts feront l’objet de discussion dans ce document.
Contexte de la recherche et justification de choix du sujet
Contexte de l’étude
Les pays sous développés se caractérisent actuellement par un phénomène d’urbanisation accélérée. En tant que pays en développement, le Sénégal n’échappe pas à cette dynamique. Dans les pays en développement, l’Etat ne peut atteindre les objectifs fixés en matière de développement sans pour autant s’appuyer sur des organisations à la base, c’est-à-dire au niveau local, d’où l’importance de la décentralisation. C’est ainsi que le Sénégal a engagé un processus de décentralisation visant à intégrer les populations locales dans la gestion de leurs localités.
Ainsi dans l’architecture administrative du Sénégal, la région joue des fonctions d’impulsion, de programmation et de coordination des actions de l’Etat et des Collectivités locales. De ce fait, elle a pour mission d’œuvrer à l’accélération du développement économique du pays, tout en rapprochant les pouvoirs de décision de la base. Le découpage du territoire national en espaces offrant des potentialités relativement différentes s’accompagne souvent de disparités régionales plus ou moins importantes qu’il convient de corriger progressivement.
Déjà au lendemain de son accession à la souveraineté internationale, dans les années 1970, pour tenter de résoudre les disparités régionales et les conséquences qui en découlent, le Sénégal avait érigé certaines de ses agglomérations, notamment Kaolack, Ziguinchor, Tambacounda entre autres, en métropoles d’équilibre dans le cadre de la politique d’aménagement du territoire (DAT, 1967). Ces métropoles d’équilibre devaient jouer au niveau régional, un rôle dynamique, de contre-pied équilibrant face au développement hypertrophique de la capitale ; en étant le siège d’équipements collectifs, économiques, socioculturels, de formation, de services administratifs et de projets industriels susceptibles de créer des emplois à terme. Ces métropoles d’équilibre sont de véritables villes-relais ayant les équipements d’une véritable agglomération urbaine : lycée, hôpital, centre administratif. Même si ces politiques ont été ambitieuses, elles n’ont pas produit les résultats escomptés ; faute de moyens.
Toujours, dans cette même dynamique de recherche d’équilibre dans son appareil administratif, le nombre de régions ne cesse de croître. Ainsi, ayant hérité en 1960 de 07 régions de l’administration coloniale, le nombre de régions a progressivement évolué en passant à 8 en 1976, puis à 10 en 1984 et ensuite 11 en 2002 et enfin 14 en 2008. Dans cette même optique, il est constaté qu’aujourd’hui l’étendue spatiale de certaines régions du Sénégal notamment Kolda, Kaolack et Tambacounda, ne leur permet pas de remplir correctement ces fonctions de proximité. En effet, avec leur 95 995 km2 elles couvrent à elles seules plus de 48 % du territoire national, soit 15 436 km2 pour Kaolack, 21 089 km2 pour Kolda et 59.468 km2 pour Tambacounda.
Justification du choix du sujet
Les thèmes portant sur l’urbanisation et la décentralisation sont très en vogue dans la littérature de ces dernières années. Ils ont intéressé autant les géographes que les autres spécialistes. L’étude des relations entre urbanisation et décentralisation a souvent été appréhendée sous l’angle de la production foncière. Nous avons choisi d’axer notre analyse sur le développement économique régional. Ce choix trouve sa légitimité dans le contexte actuel de décentralisation qui vise la promotion du développement local.
Le choix de Kaffrine s’explique par sa position géographique au milieu d’un espace presqu’entièrement rural, déjà dominé par la ville de Kaolack qui est d’une polarité sousrégionale. Ce nouveau statut de la ville de Kaffrine est accompagné de défis à relever par la nouvelle capitale régionale. L’intérêt de cette recherche est de savoir si Kaffrine peut faire face à ses nouvelles responsabilités. Et par là, faire face à l’enjeu de se doter d’une autonomie suffisante pour pouvoir rivaliser avec la ville de Kaolack qui a été pendant longtemps sa tutelle. Le choix de Kaffrine peut aussi être expliqué pour des raisons personnelles. En effet, étant native de la dite ville, nous nous sentons dans l’obligation de participer d’une manière ou d’une autre à son développement. A travers ce document nous allons participer à mieux faire connaître notre ville d’origine et à informer ceux qui le souhaitent des défis et des enjeux qui accompagnent son nouveau statut.
La revue de la littérature
La ville, l’urbanisation et la décentralisation sont des thèmes très présents dans la littérature. Mais les angles d’attaque des auteurs diffèrent naturellement. Voici ce que nous avons retenu des quelques œuvres que nous avons visités. Beaucoup de géographe ont mené des études sur la ville. Vidal de la Blache (1948) a développé dans une étude la genèse et l’évolution des villes dans les différents sites urbains possibles. Selon Vidal, les sites urbains vont des bordures de mer au seuil des déserts passant par les bords de montagnes et le long des fleuves. Il a aussi développé dans cette même étude la spécificité de chaque ville en fonction de son site et de ses caractéristiques socioculturelles. Dans cette même dynamique d’étude approfondie sur la ville, Georges Chabot (1948) a fait un développement très large sur toutes les questions qui interpellent la ville.
Dans une étude entièrement consacrée au fait urbain, Beaujeu-Garnier et Chabot (1963) ont fait un long développement sur la définition de la ville. Ils ont souligné l’impossibilité de fournir une définition universelle de la ville du fait que le fait urbain évolue dans le temps et sa conception diffère d’un pays à l’autre. Cette étude a fourni une large analyse des villes dans le monde allant successivement des villes d’Europe et de l’URSS, d’Amérique et d’Australie, d’Afrique du nord et d’Asie périphérique avant de finir avec les villes d’Afrique au sud du Sahara. Ils ont aussi consacré un long développement aux fonctions urbaines avant d’en arriver aux problèmes nouveaux dans la ville, notamment le problème des plans urbains et de l’extension des villes. Ils ont terminé cette étude en abordant largement la vie en milieu urbain et le rôle de la ville dans la région comme zone d’influence dans le réseau urbain.
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Table des matières
INTRODUCTION
I- Contexte de la recherche et justification de choix du sujet
II- Problématique
III- Les objectifs et les hypothèses
IV- Méthodologie
PREMIERE PARTIE: PRESENTATION DE LA VILLE DE KAFFRINE ET ETAT ACTUEL DES LIEUX
CHAPITRE I : HISRORIQUE, SITE ET SITUATION DE KAFFRINE
CHAPITRE II : CARACTERISTIQUES DEMOGRAPHIQUE ET SOCIO-ECONOMIQUE
DEUXIEME PARTIE: ROLE DES ACTEURS ET APPORT DES PARTENAIRES DANS LE PROCESSUS D’URBANISATION
CHAPITRE III : PLACE DE LA VILLE DANS SON ESPACE REGIONAL
Chapitre IV : PRESENTATION DES ACTEURS ET LEUR APPORT DANS LE PROCESSUS D’URBANISATION
Troisième PARTIE: LES PERSPECTIVES DE DEVELOPPEMENT ET LES DIFFERENTES POLITIQUES MIS EN ŒUVRE DANS LA VILLE DE KAFFRINE
Chapitre V : LES PROBLEMES LIES AU DEVELOPPEMENT DANS LA VILLE DE KAFFRINE
Chapitre VI : LES PERSPECTIVES DE DEVELOPPEMENT ETABLIES PAR LES AUTORITES LOCALES
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES