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L’origine de la supraconductivité
Les supraconducteurs conventionnels
La théorie BCS donne une explication microscopique du mécanisme d’origine de la supraconductivité. Elle concerne les supraconducteurs connus jusqu’alors, qu’on appelle supraconducteurs conventionnels. Avant d’être élaborée, elle a nécessité diverses étapes. Le rôle des phonons (vibrations de réseau) fut tout d’abord reconnu dans l’intervention des mécanismes de supraconductivité au travers de l’effet isotopique(3) et de calculs d’interaction effectués par H. Fröhlich. Cette mise en évidence fut essentielle pour considérer l’existence d’un potentiel attractif pour les électrons.
Puis une description du comportement électronique fut proposée par Cooper qui montra que deux électrons situés dans une bande de largeur ћωD au dessus du niveau de Fermi et en interaction attractive forment une paire.
L’énergie d’une paire est en effet inférieure à la somme des énergies des électrons non appariés. C’est ce qui est représenté (figure 1-3).
Les champs critiques
On distingue deux familles de supraconducteurs :
– Les supraconducteurs de type (I) sont, en général, des corps simples tels que l’étain ou le plomb. Ce sont les premiers supraconducteurs à avoir été découverts.
Ce type de matériau présent un diamagnétisme parfait tant que l’état supraconducteur subsiste. L’état supraconducteur peut être détruit par l’application d’un champ extérieur. La valeur du champ pour laquelle le matériau revient à l’état normal est appelée champ critique et notée Hc (voire la figure précédente (1-5);illustration de champ critique pour un supra-conducteur de type (I)).
Lorsque le champ magnétique extérieur est inférieur à Hc, le champ magnétique dans le volume du supraconducteur est nul, sauf dans une petite zone de circulation des courants.
La largeur de cette zone est égale à la longueur de London λL définie sur la figure précédente (1-1).
– Il existe des supraconducteurs pour lesquels il est énergétiquement favorable de créer une cohabitation de zones normales et de zones supraconductrices lorsque le champ magnétique dépasse une certaine valeur appeléeHc1. Au delà de cette valeur de champ, le matériau est toujours supraconducteur, mais dans unétat mixte.
L’état supraconducteur est maintenu jusqu’à une certaine valeur du champ magnétique appeléeHc2 au delà de laquelle la supraconductivité disparaît.
Ces supraconducteurs dits de type (II) sont, en général, des alliages ou des corps composés de plusieurs éléments comme, par exemple, NbTi ou le BiSrCaCuO.
– Lorsque le supraconducteur est dans l’état mixte, une partie du champ magnétique le traverse. Il coexiste donc des zones normales et des zones supraconductrices. Ces zones normales appelées vortex laissent passer un quantum de flux ı0. Avec, si (h) est la constante de Planck et (e) la charge de l’électron,Φ = (h/2e) = 2.10-15Wb; la figure (1-18) illustre la constitution d’un vortex.
Température critique
Comme nous l’avons mentionné dans l’introduction, MgB2 a d’abord attiré l’attention par sa température critique relativement élevée, environ d’ 39K pour un composé de cette composition chimique. La place de MgB2 dans un digramme représentant la température critique en fonction du coefficient de la contribution électronique de la chaleur spécifique (qui est relié au nombre de porteurs) est bien particulière. En effet, comme le montre la figure (2-3), sa Tc le place au niveau des SHTc alors que le nombre de porteurs correspond à celui de supraconducteurs conventionnels de type éléments purs.
Afin de tenter de comprendre la nature du mécanisme responsable de l’appariement, des mesures d’effets isotopiques ont été réalisées[4]. La théorie BCS qui s’applique aux supraconducteurs conventionnels (voir chapitre1) prévoit : où M est la masse de l’élément etσ, le coefficient isotope, doit être égale à0.5 si on suppose le coefficient de couplage indépendant de M. Les mesures effectuées sur Mg B en utilisant les isotopes du bore 11B et 10B ont mis en évidence un décalage de la température critique de près de 1K. Cette valeur correspond à un exposant ı = 0.26 ± 0.03 (en considérant M = MB). Cet exposant, bien que différent du 0.5 attendu théoriquement concorde avec un mécanisme ed couplage électron-phonon de type BCS. On verra plus loin les causes de la différence. MgB2 appartient donc bien à la famille des supraconducteurs conventionnels.
Mais la question de savoir comment ce composé peut avoir une température critique aussi élevée avec un mécanisme d’appariement “classique” reste toujours en suspens.
Si les faibles masses entrant en jeu dans MgB2 augmentent la fréquence des phonons ( ) et permettent partiellement d’expliquer une Tc relativement élevée, il est nécessaire de prendre en compte d’autres facteurs issus de la structure électronique et des phonons pour donner une réponse satisfaisante à cette question.
Structure électronique
Etats électroniques
La vraie grande particularité de MgB réside dans plusieurs bandes de dimensionnalité différente intervenant dans le mécanisme de la supraconductivité. La supraconductivité multi-bande avait été prédite il y a 40 ans par Suhl, Matthias et Walker [6] pour des composés tels que les métaux de transition présentant des bandes et d. Toutefois aucun matériau possédant une telle propriété n’avait été clairement identifié. D’autres composés sont à l’étude comme notamment Nb3Sn qui possèdent une structure de bandes composée d’une vingtaine d’entités susceptibles de jouer un rôle dans la supraconducti vité mais les températures en jeu sont beaucoup moins accessibles que celles intervenant dans MgB2.
Les états électroniques situés au niveau de Fermi roviennentp principalement de bandes nomméesσ et π [7].
Ces bandes sont issues des orbitales atomiques p et sp2 du bore qui va s’hybrider pour former les orbitales σ et π comme représenté sur la figure (2-4). Les orbitales atomiques sp2 sont localisées dans les plans (ab) et sont séparées par des angles de120°.
Couplage inter bandes
Les deux bandes π et σ ne sont pas indépendantes l’une de l’autre. Il existe un couplage qui tire son origine dans la présence de diffuseurs dans le matériau. Ces diffuseurs sont principalement des impuretés ou des défauts cristallins. Typiquement, dans MgB2, on trouve des lacunes de magnésium, des impuretés en ubstitution sur Mg (qui se produisent facilement), des substitutions sur le bore par des atomes comme N ou C (qui ont lieu plus difficilement). En général, ils tendent à moyennerles valeurs distinctes des gaps vers 3.6kBTc. Mais dans notre cas, ces diffuseurs ne sont pas efficaces car les bandes π et σ n’ont pas la même symétrie. Ceci signifie que les diffusions interbandes (i.e. entre les deux bandes) sont plus faibles que les diffusions intrabandes (i.e. à l’intérieur de chaque bande) mais elles permettent néanmoins un couplage non négligeable entre les deux bandes [21].
S’ils étaient parfaitement découplés, les deux gapsne se fermeraient pas à la même température ni au même champ. Une des conséquencesdu couplage réside donc dans l’existence de la supraconductivité dans la bande π sur toute la gamme de champs et de températures. Ce couplage permet également d’avoir valeur MgB2 pour la Tc donnée.
Concernant les diffusions intra bandes, les bandes π et σ ne sont pas équivalentes. En effet, les défauts responsables des diffusions vont principalement se loger dans les plans de magnésium. Or les états électroniques de la bandeσ (2D) ne se superposent que faiblement avec les états de ces plans. La bande σ sera donc moins affectée que la bande π par les impuretés et autres défauts du cristal. En résumé, en appelant Γn,n’ le taux de diffusions de la bande n vers la bande, n’ Mazin a estimé que, pour des défauts de type lacune de magnésium : Γπ,π > Γσ,σ > Γπ,σ (2.5)
La phase La2-xSrxCuO4 (LSCO)(8)
Les cuprates
Propriétés électroniques générales
Diagramme de phase (T, Dopage)
Le changement complexe des propriétés électroniquesdes cuprates est décrit par leur diagramme de phase (T, Dopage). En variant le dopage en porteurs, les propriétés électroniques varient d’une région antiferromagnétique à un liquide de Fermi en passant par la région supraconductrice. Au dopage optimum, la température de transition supraconductrice est maximale. Les régions à droite et à gauche de c e dopage optimal s’appellent respective-ment la région surdopée et sousdopée du diagrammeedphase. En dessous de la température de pseudogap T*, il y a suppression des excitations électroniques de basse énergie. Entre l’état antiferromagnétique et la région supraconductrice, il y a ségrégation de spins et de trous dans la région stripes.
Le diagramme de phase de la figure (2-18) ci-dessus est générique aux différentes familles de cuprates. Mais les valeurs de Tc, TN varient non seulement d’un composé à un autre, mais également, au sein d’une famille, lorsqu’on change le nombre de plans de CuO 2 par maille. De plus, il est rarement possible de recouvrir l’ensemble du diagramme de phase pour un matériau et un type de dopage donné. Ces variations d’une famille à l’autre sont résumées, pour les familles de cuprates les plus étudiées, dans le tableau (2-3).
Etat normal
On considère maintenant la partie du diagramme de phase au dessus de la température critique de supraconductivité (T > Tc). Tandis que la partie sur dopée du diagramme de phase (figure 2-18) présente les propriétés électroniques les plus proches de celles d’un métal, la partie sous dopée montre l’existence d’un pseudo gap en dessous de T*(>Tc). Le rôle du pseudo gap vis à vis de la supraconductivité est débattu. Il y a également discussion sur l’influence du dopage sur T*.
Comportement non liquide de Fermi
Dans l’état normal, les cuprates supraconducteurs très sur dopés sont métalliques comme le vérifient les mesures ARPES [71] et de transport [72, 73]. Dans un métal conventionnel, la dépendance en température de la ésistivitérρ dépend des mécanismes microscopiques de relaxation. La résistivité reflètles interactions : ρD, ρph et ρel.
• ρD : interactions électrons-défauts (impuretés) de la structure, indépendant de la température et efficace à basse température.
• ρph : interactions électrons-phonons, varie en fonction de la température et contribue majoritairement à la résistivité à haute températur. La résistivité suit loi de Bloch-Grüneisen qui prédit un comportement linéaire à haute température (T >> ΘD température de Debye). A plus basse température (T << ΘD), la résistivité varie enT5.
• ρel : interactions électrons-électrons, à un rôle mineur car souvent masqué par les autres types d’interactions. A plus haute température, la résistivité sature (critère d’Ioffe-Regel) lorsque le libre parcours moyen s’approche des paramètres du réseau.
Pour Bi2Sr2CuO6, la variation linéaire de la résistivité s’étendusqu’àj 10K [74] ce qui correspondrait à une valeur faible de ΘD. Néanmoins, les données de chaleur spécifique déterminent une température de DebyeΘD comprise entre 200 et 300K [75, 76].
De plus, les SHTc montrent un comportement linéaire de la résistivitésur un intervalle de température très large, au delà de 1000K pour La2-xSrxCuO4 [77, 78]. Ceci n’étant pas permis par le couplage électron-phonon, le principal mécanisme responsable de la dépendance linéaire de la résistivité en température a une autre origine. Les porteurs de charge dans les cuprates supraconducteurs ne sont pas des particules libres sans interactions comme dans un métal normal, mais des particules fortement corrélées.
A basse température, et sous champ magnétique intense, le comportement supra-conducteur est remplacé par un comportement semiconducteur [79]. Cette particularité montre de nouveau que les cuprates ne se comportent pas comme un métal ordinaire.
Phase de pseudogap
Une autre signature du comportement non-liquide de Fermi dans l’état normal est la réduction partielle des excitations électroniques au niveau de Fermi à des températures comprises entre Tc et une plus haute température T*. La présence d’un tel pseudo gap dans le spectre d’énergie électronique au delà de Tc, a été directement visualisée par des expériences de dynamique de charge et de mesures magnétiques.
• Les expériences de photoémission résolue en angle (ARPES) [47, 80, 81, 82] montrent une diminution progressive de la surface de Fermi en dessous de T* jusqu’aux nœuds de symétrie d à Tc figure (2-29). Cela signifie que la surface de Fermi n’est pleinement définie qu’à haute température.
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Table des matières
Introduction générale
CHAPITRE 1 : Introduction et généralités à la supraconductivité
1-1 Rappels historiques
1-2 L’origine de la supraconductivité
1-2-1 Les supraconducteurs conventionnels
1-2-2 Les supraconducteurs à haute température critique
1-2-3 Les Supraconducteurs exotiques
1-3 Les propriétés générales
1-4 Les deux types de supraconducteurs
1-4-1 Les Supraconducteurs de type (I)
1-4-2 Les Supraconducteurs de type (II)
1-5 Éléments de physique des vortex
1-6 Supraconducteur et conducteur parfait
1-7 Les grandeurs critiques (Tc, Hc, Jc, Sc)
1-7-1 La température critique
1-7-2 Les champs critiques
1-7-3 La densité de courant critique
1-7-4 Surface critique
1-8 Chaleur spécifique et Gap d’énergie
1-8-1 Chaleur spécifique
1-8-2 Gap d’énergie
1-9 Effet isotopique
CHAPITRE 2 : Présentations des composés
2-1 Composé MgB2
2-1-1 Structure cristallographique
2-1-2 Température critique
2-1-3 Structure électronique
2-1-3-1 États électroniques
2-1-3-2 Structure de bandes
2-1-3-3 Surface de Fermi
2-1-4 Couplage inter bandes
2-1-5 Anomalie de chaleur spécifique
2-2 La phase La2-xSrxCuO4 (LSCO)
2-2-1 Les cuprates
2-2-1-1 Propriétés électroniques générales
2-2-1-1-1 Diagramme de phase (T, Dopage)
2-2-1-1-1-1 Region antiferromagnétique
A) Effet des composés parents
B) Effet du dopage en trous
2-2-1-1-1-2 État supraconducteur
A) Théorie BCS : une description microscopique
B) Symétrie (d) du gap dans les SHTc
C) Théorie de Ginzburg-Landau : une description phénoménologique
2-2-1-1-1-3 État normal
A) Comportement non liquide de Fermi
B) Phase de pseudogap
2-2-1-1-1-4 Approche théorique-Modèles
A) U << t : Modèles de corrélations faibles
B) U >> t : Modèles de corrélations fortes
2-2-1-2 Conductivité thermique
2-2-1-2-1 Conductivité thermique de la phase supraconductrice
2-2-1-2-2 Conductivité thermique de la phase normale à T = 0
2-2-1-2-3 Conductivité thermique dans les cuprate : L’état de l’art
2-2-1-2-3-1 Phase supraconductrice
2-2-1-2-3-2 Phase normale
2-2-1-2-3-3 Une chute de conductivité thermique ambarrassante
2-2-2 Propriétés Structurales de LSCO
2-2-2-1 Structure cristalline de La2CuO4
2-2-2-2 Effet du dopage
2-2-2-2-1 Effet du dopage sur Tc cas La2-xSrxCuO4-δ
2-2-2-2-2 Effet du dopage du Sr dans La2-xSrxCuO4-δ sur la structure cristallographique
CHAPITRE 3 : Théorie de Ginzburg-Landau et concepts de base du modèle statistique de (G-L)
3-1 Théorie de Ginzburg-Landau
3-1-1 La fonctionnelle et les équations de (G-L)
3-1-1-1 Fonctionnelle de Ginzburg-Landau
3-1-1-2 Expressions microscopiques des coefficients
3-1-1-3 Equations de Ginzburg-Landau
3-1-2 Les grandeurs caractéristiques
3-1-3 L’état mixte des supraconducteurs de type (II)
3-1-4 Limite de validité de la théorie
3-1-4-1 Fluctuations au seuil de Tc
3-1-4-2 Validité du développement en puissances à basse température
3-1-5 Anisotropies et corrections non-locale
3-1-5-1 Théorie de Ginzburg-Landau anisotrope
3-1-5-2 Corrections non-locales
3-2 Modèle statistique de (G-L)
3-2-1 La théorie des transitions de phase de Landau
3-2-2 Fluctuations : au delà du champ moyen
3-2-3 Approximation harmonique et région critique
3-2-4 Le groupe de renormalisation
3-3 Concepts de la matière condensée et la transformation de HubbardStratonovitch
3-3-1 Concepts de la matière condensée
3-3-1-1 Représentation de l’interaction
3-3-1-2 Formalisme du temps imaginaire
3-3-1-3 Intégrale de chemin en supraconductivité
3-3-2 Le modèle de Hubbard
3-3-3 Le modèle de Hubbard dégénéré
3-3-4 Le modèle (d-p)
3-3-5 La transformation de Hubbard-Stratonovitch
3-4 Simulations Monte Carlo
3-4-1 Algorithme
3-4-1-1 Échantillonnage aléatoire et pondéré
3-4-1-2 Chaîne de Markov pour échantillonner le système à l’équilibre
3-4-2 Algorithme pour le modèle statistique de (G-L)
CHAPITRE 4 : Approche variationnelle du le modèle statistique de (G-L) et thermodynamique des supraconducteurs non conventionnels
4-1 Approche variationnelle
4-1-1 Choix de la bonne approche variationnelle
4-1-2 Rétrospective
4-1-3 L’action effective
4-2 Thermodynamique des SHTc
4-2-1 Motivation
4-2-2 Modèle et action effective
4-2-3 Méthode variationnelle
4-2-4 Méthode de la valeur moyenne
4-3 Chaleur spécifique-Résultats des simulations (MC)
4-3-1 Symétrie (d)
4-3-1-1 Méthode variationnelle
4-3-1-2 Méthode de la valeur moyenne
4-3-2 Extraction du diagramme de phase
4-3-3 Discussion
Références
Conclusion
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