Le présent travail est une réplication de la thèse intitulée « Objectivation de l’organisation de l’action : contribution à l’intervention didactique en athlétisme » présentée et soutenue par Jean Louis Gouju en Juillet 2001 à l’Université de Paris 11, Orsay, France. Cette étude de J. L. Gouju est centrée sur l’élaboration d’un outil pour l’intervention des enseignants ou des entraîneurs dans le but de favoriser la construction des compétences chez des pratiquants. En effet, dans l’accomplissement de leurs tâches, l’enseignant ou l’entraîneur vise toujours la construction des compétences chez les pratiquants ; mais au cours de leur intervention, il rencontre parfois des résistances qui persistent de la part des pratiquants malgré les diverses interventions. C’est durant les phases d’apprentissages que les résistances se manifestent et influencent l’acquisition des compétences du côté des pratiquants. D’où ces pratiquants sont considérés comme incompétents car ils n’arrivent pas à produire le comportement jugé efficace dans une situation. Ces résistances ou difficultés d’acquisition rencontrées dans tous les cadres d’intervention amènent notre chercheur à engager une réflexion sur la complexité de l’organisation de l’action. Certains aspects de l’organisation de l’action ne sont probablement pas pris en compte par l’intervention lorsqu’il y a résistance ; or ces aspects relèvent d’influences culturelles ou sociales sur la cognition, et peut être aussi propres au sujet, voire non conscients. La compréhension des modalités d’organisation et d’évolution des actions sportives pour la production des outils nécessaires à la résolution des résistances finalise cette réflexion sur l’organisation de l’action. Et en plus de cette réflexion, la construction de véritables compétences athlétiques chez tous les pratiquants est aussi la visée essentielle.
DEMARCHE DE REPLICATION DE LA THESE MERE DANS LE CONTEXTE MALAGASY
Contexte et Justification de la réplication
Les professeurs d’Education Physique et Sportive, et les entraîneurs orientent leurs interventions vers l’acquisition des compétences et l’amélioration de la performance de leurs athlètes, et élèves ; mais ils sont parfois heurtés à des résistances de la part des athlètes et des élèves. Des résistances qui freinent l’acquisition des compétences, et l’amélioration de la performance. La constatation de cette situation de résistances durant les interventions des enseignants nous amène à choisir la classe du Sport Etude du Lycée Technique Commerciale Ampefiloha en tant que site d’application de cette réplication. D’autant plus, on peut bien pratiquer dans ce lycée de Sport Etude la discipline sportive de référence de la thèse mère qui est la course de haies, et d’appliquer les mêmes démarches méthodologiques de la thèse mère.
Problématique et Hypothèse
Le choix du Sport Etude Athlétisme du L.T.C. Ampefiloha comme site d’observation nous amène à mentionner que ce Sport Etude regroupe des jeunes sportifs qui cherchent la réussite sportive et scolaire. La réussite sportive se traduit par une acquisition des compétences, et l’amélioration des performances sportives de ces élèves ; or au cours de l’apprentissage moteur de ces élèves, l’encadreur rencontre parfois durant son intervention une difficulté d’acquisition qui devient une résistance du côté des élèves, ce qui implique une répercussion sur la compétence à acquérir, et sur la performance sportive à réaliser. Cette résistance remet eu cause l’intervention de l’enseignant car l’intervention est une pratique visant à favoriser la construction des compétences chez des pratiquants. En plus « l’intervention désigne toutes actions et situations individuelles ou collectives à destination d’une ou plusieurs personnes engagées dans une activité physique sportive ou artistique, et visant des modifications de cette activité ;ces actions sont des natures différentes en fonction des contextes aux seins des quelles elles se découlent, des personnes aux quelles elles s’adressent, des intentions des intervenants, et la nature des modifications envisagées ;ces intentions peuvent être d’éducation, de rééducation, d’entraînement, et de performance… » (R. Refuggi).
Ainsi, l’intervention des enseignants dans les actions et situation au cours de la pratique des activités physiques et sportives chez les élèves participe bien à la construction des compétences. Alors pour trouver une solution aux problèmes de résistances chez les élèves pendant les apprentissages moteurs, nous pensons qu’il est indispensable de se pencher sur l’intervention de l’enseignant d’où notre problématique : « Comment rentabiliser l’intervention de l’enseignant du Sport Etude Athlétisme pour favoriser le développement des compétences chez les élèves ? » .
Si telle est notre problématique, nous pouvons se référer au programme de perspective technologie d’aide à l’intervention des enseignants ou des entraîneurs. En effet, si l’on considère que l’intervention vise la transformation des actions d’un pratiquant pour un accroissement de sa compétence, il est d’un grand intérêt d’approcher la mieux possible ses actions, y compris dans le contexte même où s’exerce cette compétence par exemple une compétition.
Or cette approche est souvent extrêmement indirecte, reposant sur une analyse de la tâche prescrite; indépendamment du pratiquant, ou bien sur des inférences opérées à partir des comportements, voire des traces physiologiques recueillies au cours des actions produites. Dans les faits, l’intervenant n’appuie son intervention que sur des données très génériques de l’action d’un pratiquant, issues le plus souvent des conceptions préétablies des actions athlétiques, diffusées dans la littérature professionnelle, il s’agit de tenter de dépasser cet obstacle et permettre à l’intervenant de mieux identifier son objet d’intervention au sein d’un système complexe, et pertinent du point de vue d’un projet de transformation.
Cadre Conceptuel
La notion d’action
Comme nous avons avancé que la prise en compte de l’action du pratiquant rentabilise l’intervention de l’enseignant ; alors il s’avère nécessaire de situer la place de l’action en tant qu’élément d’un système fondé sur la co-émergence de trois instances, dont la première instance est un contexte dans le quel le pratiquant peut appréhender avec toute sa subjectivité ; la seconde est l’activité en tant qu’engagement de ce pratiquant dans ce contexte ; enfin la troisième est ce pratiquant lui-même détenteur d’une certaine identité dans ce contexte et cette activité (Faingold, 1998). Ce système fonde une situation (Suchman, 1987) qui se codétermine avec ses trois instances.
Pour chaque situation, trois composantes intégrées sont décelables en permanence; une composante sociale qui ne permet de définir la spécificité d’un pratiquant qu’en tant que membre d’un groupe ; une composante individuelle qui ne concerne qu’un pratiquant, du fait de ses caractéristiques propres ; et une composante locale intégrée dans cette dernière définissant la relative originalité ou banalité d’une situation donnée pour un pratiquant. Dans la cadre de notre travail, nous optons l’analyse des composantes individuelles et locales de la situation. Ceci nous permet de préciser la notion d’action en tant que composante individuelle de l’activité. Il s’agit ici de distinguer les actions en tant que procédures concrètement vécues par un pratiquant en situation, de l’activité, forme de dénominateur commun, d’arrière plan de toutes ses actions, de toutes celles des membres du groupe auquel il appartient lorsqu’il la mène.
L’action met en relation trois données indissociables :
– un engagement intentionnel immédiat qui se traduit par une focalisation de l’attention du pratiquant. Le niveau de conscience de cet engagement est tel qu’il permet la verbalisation relativement spontanément.
– un monde spécifique qui surgit du fait de, et pendant le déroulement de l’action. Il sert de référent subjectif au pratiquant. C’est le monde que l’action fait exister, que ce soit sur le monde visuel, auditif, ou encore kinesthésique.
– une expérience sémiotique construite par ce pratiquant qui lui permet de donner du sens à ce qui se présente. Cette expérience est conceptualisée par le pratiquant au cours des situations antérieures.
Ces données composent ainsi l’action du point de vue sémiotique, c’est-à-dire de ce qui fait signe à un pratiquant (ECO, 1997). Au sein de l’action, ces trois types de données sont mis en relation avec la composante locale de la situation. En effet, chaque situation est à priori composée d’aspects de grande banalité pour un pratiquant, c’est-à-dire correspondant fortement liés à des vécus antérieurs d’une situation similaire ou proche du point de vue du sens. Cette banalité ou normalité de la situation ouvre le registre des opérations (Galperine, 1966), en tant qu’engagement concret de moyens au profit d’une action, et à un niveau de conscience tel que cela ne requiert pas la focalisation de l’attention, ce qui n’en permet pas une verbalisation spontanée. Les opérations composent ainsi des signes ne requérant pas le même niveau de conscience que les actions et surtout intimement intégrées à l’action ou incorporées.
Ces sortes de micro signes mettent en jeu des aspects très fins, et très périphériques à ce qui mobilise l’attention du pratiquant. Le registre de ces signes est celui des différents modes de la sensibilité humaine, très difficiles à verbaliser autrement que sur le mode du « ressenti ». L’intérêt de l’analyse de leurs liens avec les actions est primordial pour l’intervention. Car, si les actions recèlent de grandes parts d’opérations, que ce soit dans les activités usuelles ou bien relevant d’expertise socialement reconnue, il est difficile de décrire immédiatement et finement le « comment je fais », puisqu’une bonne part ne nécessite plus un niveau de conscience compatible avec la verbalisation spontanée. Et c’est justement là, dans cette périphérie attentionnelle, que se joue la réussite ou l’échec des actions entreprises. Ainsi, nous pouvons tirer qu’un premier en jeu en intervention consiste alors à mettre les relations construites entre, d’une part, une action, et d’autre part, les opérations intégrées au sein de cette action par le vécu et l’expérience du pratiquant. Cela doit nous permettre notamment de comprendre pourquoi certaines opérations semblent « échapper »au pratiquant dans certaines situations, c’est-à dire se dérouler sans que celui-ci ne puisse décrire, expliquer, ou modifier immédiatement ce déroulement. La second en jeu consiste à mettre en place les conditions nécessaires à des modifications ou des transformations de cette organisation, au profit d’une plus grande compétence du pratiquant.
A partir du premier enjeu en intervention qui met en relief le vécu et l’expérience du pratiquant, il est évident d’évoquer la nécessité de prendre en compte les différents sens que donne l’élève à son action car le niveau d’habilité atteint par l’apprenant reflète dans une certaine mesure le sens qu’il donne à son action. Ce sens de l’action se traduit par la représentation de l’action qui est essentielle dans l’apprentissage moteur, et qui est aussi source de l’acquisition des compétences.
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Table des matières
INTRODUCTION
I – PRÉSENTATION DE LA THÈSE MÈRE
1.1. Objet de la thèse mère
1.2. Problématique et hypothèse
1.3. Cadre conceptuel
1.3.1. L’action au sein de l’activité
1.3.2. La situation comme système et implications
1.3.3. Modélisation de l’activité
1.3.4. Le contexte et l’identité dans la situation
1.4. Méthodologie
1.5. Résultat et interprétation
1.6. Discussion et Conclusion de la 1ère Partie
II – DEMARCHE DE REPLICATION DE LA THESE MERE DANS LE CONTEXTE MALAGASY
2.1. Contexte et Justification de la réplication
2.2. Problématique et Hypothèse
2.3. Cadre Conceptuel
2.3.1. La notion d’action
2.3.2. La représentation
2.3.3. Le feed-back
2.4. Méthodologie
2.4.1. L’approche psycho phénoménologique et ses conséquences
2.4.2. Investigation empirique
2.4.2.1. Présentation du cas étudie
2.4.2.2. Recueil des données
2-5- Résultats
2.5.1. Identification des actions et opérations
2.5.2. Analyse de tâche extrinsèque et expérience subjective
2.5.3. Analyse des actions
2.5.3.1. Tâches de franchissement
2.5.3.2. Tâches de course
2.5.4. L’identité
2.6. Interprétations
2.7. Discussion – Conclusion
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
TABLE DES MATIERES
ANNEXES