Intérêt des huiles hydrolysées dans les systèmes alimentaires

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Alimentation conventionnelle

Dans l’Union Européenne, tous les produits en lien direct avec l’alimentation sont très réglementés. De nombreux textes législatifs sont apparus ces dernières années et sont réévalués constamment. La politique de la sécurité alimentaire développée par l’Union Européenne, ainsi que l’EFSA (European Food Safety Authority) visent à protéger les consommateurs. Pour cela, une traçabilité est développée pour garantir la qualité des denrées alimentaires ou des aliments ; de la matière première au produit fini. Le règlement européen 178/2002 du 28 janvier 2002, définit les aliments comme « toute substance ou produit, transformé, partiellement transformé ou non-transformé, destiné à être ingéré ou raisonnablement susceptible d’être ingéré par l’être humain. Ce terme recouvre les boissons, les gommes à mâcher et toute substance, y compris l’eau, intégrée intentionnellement dans les denrées alimentaires au cours de leur fabrication, de leur préparation ou de leur traitement ». Ce même règlement met en place les mesures d’hygiène à appliquer pour éviter des contaminations alimentaires (appelé « Food Law »). Depuis sa mise en place, les fabricants doivent veiller de façon encore plus attentive aux différentes étapes de production, de la transformation à la distribution et vérifier que les aliments répondent aux demandes de la législation en vigueur.

Alimentation certifiée biologique

Les produits certifiés biologiques sont soumis à la réglementation européenne, leur réglementation est plus stricte que celle des produits dits conventionnels. La réglementation entrée en vigueur le 1er janvier 2009 indique que pour revendiquer un produit « biologique » ou « Bio », il faut que le produit agricole ou la denrée alimentaire suive et respecte les règles spécifiques de l’agriculture biologique et ce de la production jusqu’à la commercialisation (Bertrand, et al., 2011). Depuis le 1er janvier 2021, le nouveau règlement européen n°2018/848 du 30 mai 2018 relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques est entré en vigueur. Ce dernier précise les principes de la transformation des produits biologiques comme suit :
– Utiliser des ingrédients issus de l’agriculture biologique pour la fabrication de denrées alimentaires biologiques ;
– Restreindre l’utilisation des additifs alimentaires, des ingrédients non biologiques (lorsque l’ingrédient n’est pas disponible sur le marché sous la forme biologique) ayant des fonctions principalement technologiques ou organoleptiques, ainsi que des micronutriments et des auxiliaires technologiques, afin qu’il y soit recouru le moins possible et seulement lorsqu’il existe un besoin technologique essentiel ou à des fins nutritionnelles particulières ;
– Exclure les substances et méthodes de transformation susceptibles d’induire en erreur quant à la véritable nature du produit ;
– Transformer avec soin les denrées alimentaires biologiques et recourir de préférence à des méthodes biologiques, mécaniques et/ou physiques ;
– Exclure les denrées alimentaires contenant des nanomatériaux ou consistant en de tels nanomatériaux.
La liste des additifs et des auxiliaires technologiques autorisés dans la fabrication de matrices alimentaires biologiques reste celle de l’annexe VIII du règlement n°2019/2164 de la commission du 17 décembre 2019 « Produits et substances utilisés dans la production de denrées alimentaires biologiques transformées, de levures et de produits à base de levures biologiques ». De plus, lors de la formulation d’un produit « biologique », en plus de suivre la réglementation et de vérifier les produits autorisés dans les annexes, il est important de respecter certaines conditions. En effet, il faut qu’au moins 50% des produits soient d’origine agricole (hors eau et sel de cuisine) et qu’au moins 95% de ces produits soient certifiés biologiques. Les produits agricoles non biologiques qui peuvent être utilisés sont listés dans l’annexe IX du règlement n°889/2008.

Le concept du « clean-label »

Le terme « clean-label », qui renvoie à la notion littérale d’étiquette propre, est un concept apparu il y a une quinzaine d’années. Bien que cette appellation se soit démocratisée dans le domaine agroalimentaire, aucune réglementation n’existe. Les fabricants doivent alors développer de nouveaux produits en se consacrant aux principales demandes des acheteurs. En effet, les consommateurs souhaitent s’orienter vers des produits dont la liste d’ingrédients est la plus courte possible. Ils recherchent aussi des produits fabriqués avec des ingrédients de consommation courante (le terme « ingrédients du placard » est plébiscité) (Asioli, et al., 2017). De plus, ils désirent que les produits soient authentiques, plus naturels et respectueux de leur santé. Ils veulent éviter de consommer des produits contenant des substances dont les noms ont une forte connotation « chimique » (Volkert & Serrur, 2020). Ils donnent aussi de l’importance à la façon dont les ingrédients sont cultivés (végétaux), produits et transformés. Ils tolèrent difficilement la présence d’organisme génétiquement modifié (OGM) dans les produits transformés. Par ces notions, de clean-label et de naturalité, les consommateurs demandent à avoir des déclarations claires et transparentes de la part des fabricants (Figure 1.1) (Jorge, et al., 2020; Osborn, 2015; Román, et al., 2017).
La population française est très attentive à ces principes de consommation alimentaire. Une étude menée dans l’ensemble des pays européens a permis de mettre en évidence les sujets qui préoccupent le plus les consommateurs en matière de sécurité alimentaire (EFSA, 2019). Les Français, contrairement à la moyenne des européens, sont plus soucieux de la présence de certains additifs comme les colorants, les conservateurs et les arômes présents dans les aliments et les boissons (43% contre 36%, Figure 1.2).
L’ensemble de ces choix, d’une importance grandissante chez les consommateurs, oriente le comportement des industriels qui favorisent de plus en plus ce concept de « clean-label » lors de la fabrication de leurs produits. Ainsi, parmi les concepts précédemment évoqués, le remplacement des additifs est devenu, pour eux, une priorité. Cela se traduit par de nombreuses recherches dans ce domaine sur le plan scientifique. Le nombre de publications sur ces thèmes ne cesse d’ailleurs d’augmenter significativement sur ces dernières années (Figure 1.3).

Les additifs

Les additifs sont des substances introduites lors de la fabrication de produits alimentaires. Dans ce domaine, ils sont définis par le règlement européen N°1333/2008 du 16 décembre 2008 comme : « toute substance habituellement non consommée comme aliment en soi et non utilisée comme ingrédient caractéristique dans l’alimentation, possédant ou non une valeur nutritive, et dont l’adjonction intentionnelle aux denrées alimentaires, dans un but technologique au stade de leur fabrication ; transformation, préparation traitement, conditionnement transport ou entreposage a pour effet, ou peut raisonnablement être estimée avoir pour effet, qu’elle devient elle-même ou que ses dérivés deviennent, directement ou indirectement, un composant de ces denrées alimentaires » . Les additifs sont donc ajoutés dans le but d’apporter une amélioration aux produits finis, tels que la conservation, le goût, la coloration, la texture … Ils peuvent être classés en six principales catégories (Figure 1.4) qui sont : les conservateurs, les agents nutritionnels, les colorants, les agents aromatisants ou les texturants et une catégorie « divers » (Carocho, et al., 2014; Cox, et al., 2020; De Reynal & Multon, 2009; Faustino, et al., 2019; Saltmarsh, 2021).

Les auxiliaires technologiques

Pour éviter l’utilisation d’additifs, les industriels peuvent avoir recours à des auxiliaires technologiques. D’après le règlement européen N°1333/2008 du 16 décembre 2008, on entend par auxiliaire technologique « toute substance non consommée comme ingrédient alimentaire en soi, qui est volontairement utilisée dans la transformation de matières premières, de denrées alimentaires ou de leurs ingrédients pour répondre à un certain objectif technologique pendant le traitement ou la transformation et pouvant, avoir pour résultat la présence non intentionnelle mais techniquement inévitable de résidus de cette substance ou de ses dérivés dans le produit fini, à condition que ces résidus ne présentent pas de risque sanitaire et n’aient pas d’effets technologiques sur le produit fini ». Les auxiliaires technologiques sont ajoutés au cours du procédé pour la fonctionnalité qu’ils apportent. Ils peuvent notamment faciliter la mise en œuvre, améliorer la stabilité du produit … Contrairement aux additifs, les auxiliaires technologiques sont éliminés ou désactivés durant le procédé de fabrication (De Reynal & Multon, 2009). Ils sont classés en différentes catégories en fonction des effets apportés lors de leur utilisation et n’ont actuellement aucune obligation d’être déclarés sur l’étiquette (Figure 1.7).
La réglementation relative aux auxiliaires technologiques n’est pour l’instant pas harmonisée au niveau européen et il convient de se référer aux dispositions nationales. Seule la catégorie des solvants d’extraction est réglementée (directive 88-344 du 13 juin 1988). Une étude pour la proposition de règlement relative aux enzymes alimentaires est en cours. Pour cela, chaque enzyme est étudiée de façon à vérifier son utilité et la sécurité de cette dernière notamment au niveau santé.
En France, tout comme les additifs, les auxiliaires technologiques sont réglementés et se basent sur le principe de « listes positives ». Dans la fabrication de denrées alimentaires, il est donc interdit d’employer des additifs ou des auxiliaires technologiques dont l’usage n’est ni déclaré ni listé par arrêté.
Nous venons de mettre en avant que l’utilisation des additifs et des auxiliaires technologiques est très réglementée. Ils sont malgré tout nécessaires car ils apportent des fonctionnalités essentielles pour améliorer et/ou préserver les produits alimentaires. Les aliments étant des matrices complexes qui évoluent dans le temps, il est donc nécessaire de comprendre la physico-chimie de certains systèmes dispersés et le rôle joué par les émulsifiants pour atténuer ces évolutions. Dans un premier temps, nous décrirons les émulsions et les mousses, principaux systèmes dispersés présents en agroalimentaire puis, dans un second temps, nous verrons quels sont les principaux additifs utilisés pour stabiliser ces systèmes.

Systèmes dispersés et agents stabilisants

Les émulsions

La plupart des matrices alimentaires sont des émulsions complexes. Ce sont par définition des dispersions constituées de deux phases non miscibles ; le plus souvent de l’huile et de l’eau. L’une des deux phases se retrouve généralement sous la forme de gouttelettes. Les émulsions étant des systèmes thermodynamiquement instables, il est nécessaire d’y associer des agents stabilisants tels que des tensioactifs ou des polymères, pour augmenter leur durée de vie (Leal-Calderon, et al., 2007; Zembyla, et al., 2020). La phase formant des gouttelettes est appelée la phase dispersée alors que la phase environnante est nommée la phase continue (Israelachvili, 1994). Il existe différents types d’émulsions qui sont détaillés ci-après.

Emulsions simples

Dans les émulsions simples, il existe deux catégories (Figure 1.8) :
– Emulsions directes dans lesquelles la phase lipophile (huile : H) est dispersée dans la
phase aqueuse (eau : E), elles sont notées huile-dans-eau ou H/E.
– Emulsions inverses où cette fois, la phase aqueuse est dispersée dans la phase huileuse, elles sont notées eau-dans-huile ou E/H.
D’une manière générale, la fraction volumique des constituants (φ) a une incidence sur le sens préférentiel de l’émulsion à savoir que la phase continue se trouve souvent en proportion majoritaire par rapport à la phase dispersée.
Dans l’industrie agroalimentaire, de nombreuses émulsions directes sont recensées telles que les produits laitiers, la mayonnaise, les vinaigrettes, les produits céréaliers…. Certains produits comme la margarine ou le beurre sont des émulsions inverses.

Emulsions de Pickering

Les émulsions de Pickering ou émulsions solides sont, contrairement aux émulsions standards, stabilisées par des particules solides colloïdales (Figure 1.9). Le terme Pickering est une référence aux travaux de Spencer Umfreville Pickering qui, en reprenant les travaux de Ramsden a démontré la possibilité de stabiliser des émulsions à l’aide de particules colloïdales (Pickering, 1907; Ramsden & Gotch, 1904). Ces émulsions de Pickering sont stabilisées par l’adsorption de particules à l’interface liquide-liquide formant ainsi une barrière empêchant une recombinaison rapide des gouttelettes et une séparation irréversible des phases (Berton-Carabin & Schroën, 2015; Vignati, et al., 2003). Ces émulsions présentent des perspectives intéressantes notamment pour le remplacement de tensioactifs d’origine synthétique. Elles sont généralement plus stables que les émulsions standards. En effet, l’adsorption des particules colloïdales si elle a lieu, est irréversible. Cette adhésion très forte empêche les phénomènes de coalescence (fusion entre les gouttes) (Leal-Calderon & Schmitt, 2008).
Dans l’industrie agroalimentaire, ce type d’émulsions est typique des ganaches au chocolat (Merachli, et al., 2020) où la rugosité de surface générée par les particules de cacao impacte leur texture. Afin de stabiliser ces émulsions, des travaux récents ont démontré l’utilisation de nombreuses particules alimentaires dont les cristaux d’amidon, les fibres de cellulose, les flavonoïdes, les micro-gels de protéines ou encore les tourteaux d’oléagineux et de la poudre de cacao (Joseph, et al., 2019a; Joseph, et al., 2019b). Pour être adsorbées à la surface, les particules doivent posséder une dualité hydrophile-hydrophobe et mouiller partiellement les deux phases (Finkle, et al., 1923). Cette notion sera détaillée plus loin dans ce chapitre.

Emulsions concentrées

Ce sont des systèmes dispersés particuliers où la phase continue est inférieure à 30% en moyenne. Dans ce type d’émulsion, les gouttes sont fortement déformées lors du cisaillement ; de ce fait, les propriétés rhéologiques de ces émulsions sont impactées. Les contacts permanents entre gouttes entraînent une élévation d’énergie aux interfaces qui se traduit macroscopiquement par une augmentation de la viscosité globale du système (Princen, 1983). Elles sont considérées comme des liquides viscoélastiques. Dans ce système (Figure 1.10), les gouttes sont dispersées et distribuées de manière aléatoire dans un volume donné et vont invariablement se toucher à partir d’une fraction volumique seuil (φ*) appelée Random Close Packing (Brochette, 2013). Les émulsions concentrées de type mono-disperses ont généralement une fraction volumique (φ*) de la phase dispersée supérieure à 64% (Berryman, 1983). Pour des émulsions dites poly-disperses, cette même concentration se trouve plutôt vers 74% (Radin, 2008; Scott & Kilgour, 1969). En deçà de cette fraction seuil, l’énergie dissipative globale de l’émulsion est uniquement gouvernée par le mouvement hydrodynamique des particules dans la phase continue (Scott, 1960; van Aken, et al., 2011). L’exemple le plus courant en agroalimentaire qui illustre ce phénomène est la mayonnaise où l’émulsion se texture progressivement lorsque de l’huile est incorporée et progressivement dispersée dans le jaune d’œuf.

Emulsions multiples

Il existe aussi des systèmes plus complexes comme les émulsions multiples, les plus courantes étant les émulsions doubles. Il en existe deux catégories :
– Les émulsions doubles directes notées E/H/E (Figure 1.11(A)) où une phase aqueuse est dispersée dans une phase huileuse elle-même dispersée dans une phase aqueuse.
– Les émulsions doubles indirectes notées H/E/H (Figure 1.11(B)) où une phase lipophile est dispersée dans une phase aqueuse, le tout étant dispersé dans une phase huileuse. Selon la même logique elles sont codifiées H/E/H.
Les émulsions doubles sont généralement réalisées par un procédé multi-étape (Figure 1.12). Ainsi, au cours de la formation d’une émulsion E/H/E, une première émulsion inverse est réalisée, suivie d’une seconde émulsification où l’émulsion primaire est ensuite redispersée dans une phase aqueuse externe (De Luca, et al., 1991 ; Sapei, et al., 2012; Ursica, et al., 2005).
En 2001, le Programme National de Nutrition Santé (PNNS) a été lancé visant à améliorer l’état de santé de la population en priorisant des actions de recherche sur l’amélioration nutritionnelle. Ce programme vise à sensibiliser les consommateurs sur une alimentation moins grasse, moins salée et moins sucrée. Pour limiter la teneur en matières grasses, la réalisation d’émulsions doubles constitue une piste de recherche très prometteuse. En effet, l’utilisation d’émulsions doubles dans les produits alimentaires permettrait d’alléger le produit sans pour autant dénaturer le goût. En émulsionnant la matière grasse, la proportion d’eau augmente, le profil nutritionnel du système est amélioré tout en conservant les qualités gustatives du produit (les globules de gras, vecteurs du gout sont toujours présents). Le second intérêt des émulsions multiples concerne l’encapsulation d’actifs (arômes, Vitamine C …) ou de minéraux (magnésium) afin d’enrichir les aliments pour traiter des carences ou restaurer l’apport en nutriments essentiels (Bonnet, et al., 2009; Bonnet, et al., 2010; Serdaroglu, et al., 2015).

Les mousses

Les mousses sont des systèmes colloïdaux très présents dans l’industrie agroalimentaire. Ce sont, tout comme les émulsions, des dispersions ; toutefois dans ce cas, la phase dispersée est un gaz non miscible et la phase continue est bien souvent une phase aqueuse. Les bulles de gaz sont séparées entre elles par des films qui sont plus ou moins fins (Salager & Choplin, 2008; Schramm & Wassmuth, 1994). En fonction de la fraction volumique d’air dispersée dans la phase aqueuse, on trouve les dénominations suivantes : mousses sèches, humides ou liquides bulleux (Figure 1.13). Les mousses sèches contiennent très peu de liquide, le film qui sépare les différentes bulles de gaz est très fin et ces dernières deviennent polyédriques. Plus la fraction volumique de gaz sera faible (point de bascule à une fraction volumique critique notée φc), moins il y aura de contact entre les bulles d’air. Elles retrouveront ainsi leurs formes sphériques et les problématiques liées à leur instabilité seront moindres (Langevin, 2017).
Les mousses obtenues par ajout d’air sont également appelées des produits foisonnés car l’étape d’incorporation d’air dans une matrice est littéralement appelée foisonnement. Cet ajout d’air permet non seulement de diminuer la densité du produit, d’augmenter le volume mais également de modifier sa texture, sa couleur et sa tenue en bouche. Classiquement, la mesure du taux de foisonnement permet de déterminer la quantité d’air ajoutée et stabilisée au sein de la matrice (Schorsch, 2007). Dans l’industrie agroalimentaire, on retrouve des mousses aussi bien dans les produits salés (mousse de foie de volaille, de légumes, de poisson…), que sucrés (mousse au chocolat, crème fouettée…) et dans les boissons (bière, champagne…).
Tout comme les émulsions, les mousses sont des systèmes thermodynamiquement instables et fragiles. Pour aider à la distinction, on parle alors de mousse éphémères (durée de vie de l’ordre de la seconde ou de la minute) ou bien de mousses durables (durée de vie en heures ou en jours).
Pour stabiliser les émulsions ainsi que les mousses, des agents stabilisants (appelés émulsifiants en agroalimentaire et tensioactifs ou détergents dans le domaine des cosmétiques) sont utilisés et permettent d’abaisser la tension de surface entre deux liquides naturellement immiscibles favorisant ainsi la stabilisation globale du système. Ils peuvent aussi stabiliser les différents systèmes en induisant des répulsions stériques ou électrostatiques (Chen, 2015; Thomas, et al., 2003). Lors du cisaillement, les agents stabilisants viennent s’adsorber aux interfaces afin d’éviter que les gouttelettes ne fusionnent entre elles trop rapidement. Ce phénomène est appelé effet « Marangoni ». Les mécanismes d’action des différents émulsifiants seront décrits plus loin.

Molécules assurant la stabilisation des émulsions et des mousses

Les systèmes dispersés décrits ci-avant sont des systèmes thermodynamiquement instables. Il est donc nécessaire de recourir à des molécules pour les stabiliser. Pour assurer cette fonction, il faut agir sur l’interface grâce à l’emploi d’émulsifiants ou d’agents texturants.

Les tensioactifs

Les tensioactifs présentent (Figure 1.14) une partie hydrophile (tête polaire) et une autre lipophile (queue aliphatique), ces molécules sont dites amphiphiles (Hasenhuettl, 2008a; Larpent, 1995). De par leur dualité hydrophile – hydrophobe, ils se placent naturellement aux interfaces eau/huile ou eau/air modifiant ainsi la tension interfaciale du système, ce qui favorise l’émulsification et la stabilité du système obtenu.
Les tensioactifs peuvent être classés en fonction de leurs caractéristiques chimiques (Miller, 2016). En fonction de la nature de la tête polaire, il est possible de distinguer les tensioactifs en quatre sous-catégories (Cousin, et al., 2010; Hutin, 2019) :
– Les anioniques (tête polaire chargée négativement),
– Les cationiques (tête polaire chargée positivement),
– Les amphotères (tête polaire chargée à la fois positivement et négativement),
– Les non ioniques (tête polaire non chargée).
Les tensioactifs les plus couramment utilisés sont les non ioniques car ils présentent l’avantage d’être insensibles aux effets de pH.
Selon la nature de la partie lipophile des tensioactifs, et notamment de par leurs structures, ils peuvent être également classés en quatre sous-catégories distinctes (Guilbot, 2006) :
– Les monocaténaires (une chaîne carbonée et une tête polaire),
– Les bicaténaires (deux chaînes carbonées reliées à une tête polaire),
– Les bolaformes simples ou doubles (plusieurs têtes hydrophiles reliées à une ou plusieurs chaînes carbonées),
– Les géminis (qui ont deux têtes polaires qui sont reliées entre elles).
Les molécules tensioactives peuvent être répertoriées en tenant compte de leur HLB (Hydrophilic – Lipophilic Balance) ou de leur paramètre d’empilement. La première échelle de HLB établie par Griffin permet de classer les tensioactifs de 0 à 20 (Griffin, 1949). Plus la valeur est grande plus la dispersion dans l’eau est favorisée. Davies a fait évoluer cette notion et a proposé une méthode de calcul simple en prenant en compte les contributions respectives des parties hydrophiles et lipophiles de l’émulsifiant (Davies, 1957). Différentes méthodes de calcul peuvent être employées dans le cas d’une molécule où la structure est parfaitement connue (Pasquali, et al., 2008). L’une des formules les plus utilisées est celle décrite par l’Équation 1.1 mais, dans le cas de structures plus complexes, le calcul peut s’avérer plus compliqué à déterminer. Dans la Figure 1.15 sont listés les HLB des principaux tensioactifs utilisés en agroalimentaire.

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Table des matières

Chapitre 1 : Etude bibliographique
1. Introduction
2. Réglementation
2.1. Alimentation conventionnelle
2.2. Alimentation certifiée biologique
2.3. Le concept du « clean-label »
2.4. Les additifs
2.5. Les auxiliaires technologiques
3. Systèmes dispersés et agents stabilisants
3.1. Les émulsions
3.1.1. Emulsions simples
3.1.2. Emulsions de Pickering
3.1.3. Emulsions concentrées
3.1.4. Emulsions multiples
3.2. Les mousses
3.3. Molécules assurant la stabilisation des émulsions et des mousses
3.3.1. Les tensioactifs
3.3.1.a. Les lécithines
3.3.1.b. Les mono- et diglycérides
3.3.2. Le Polyglycerol polyricinoleate (PGPR)
3.3.3. Les protéines
3.3.4. Les particules solides stabilisantes
3.3.5. Agents de texture
3.4. Instabilités des systèmes dispersés
3.4.1. Les émulsions
3.4.1.a. Crémage et sédimentation
3.4.1.b. Floculation
3.4.1.c. Coalescence
3.4.1.d. Murissement d’Ostwald
3.4.2. Les mousses
4. Impacts des mono et diglycérides dans les matrices alimentaires
4.1. Rôle sur le rassissement
4.2. Rôle sur le développement de l’alvéolation
4.3. Rôle sur l’émulsification et le foisonnement
4.4. Rôle sur la texture des huiles végétales
5. Les enzymes comme auxiliaires technologiques
5.1. Nomenclature et classification
5.2. Structure et activité
5.3. Mode d’action
5.4. Grandes classes d’enzymes utilisées dans l’agro-alimentaire
6. Conclusion
7. Références bibliographiques
Chapitre 2 : Caractérisation des MDGs et des huiles végétales
1. Introduction
2. Caractérisations des MDGs
2.1. RMN
2.1.1. Intérêt de la méthodologie
2.1.2. RMN 1H d’un mélange de MDGs
2.1.3. RMN des standards
2.1.3.a. Déplacements chimiques en RMN 1H
2.1.3.b. Déplacements chimiques en RMN 13C
2.1.3.c. RMN 2D
2.1.4. Attribution des signaux des MDGs commerciaux en RMN 1H
2.2. Identification des molécules des MDGs commerciaux
3. Caractérisations des huiles végétales de colza et de tournesol
3.1. RMN
3.1.1. RMN 1H
3.1.2. RMN 13C
3.1.3. Analyse des huiles par RMN 13C
3.2. Chromatographie en phase gazeuse (CPG)
3.3. Tension de surface
3.4. DSC
4. Conclusion
5. Partie expérimentale
5.1. Liste des produits utilisés
5.2. Identifications des standards par RMN
5.3. Analyses de la composition en acide gras de l’huile par CPG
5.4. Tension de surface
5.5. DSC
6. Références bibliographiques
Chapitre 3 : Lipolyse enzymatiques des huiles végétales
1. Introduction
2. Principe de la lipolyse enzymatique sur une huile végétale
3. Lipolyse enzymatique de l’huile de colza avec l’enzyme Sumizyme® NLS
3.1. Suivi par indice d’acidité
3.2. Suivi par tension de surface
3.3. Identification des molécules formées au cours de la lipolyse
3.3.1. Analyse CPG
3.3.2. Analyses RMN
3.3.2.a. RMN 1H
3.3.2.b. RMN 13C
3.4. Etude de recyclage de l’enzyme Sumizyme® NLS
3.4.1. Suivi par indice d’acidité
3.4.2. Analyse RMN 13C
4. Lipolyse avec changement du substrat
4.1. Suivi par indice d’acidité
4.2. Analyse RMN 13C
5. Lipolyse avec changement d’enzyme
5.1. Suivi par mesures d’indice d’acidité
5.2. Suivi par tension de surface
5.3. Analyse RMN 13C
5.3.1. Production en AGLs
5.3.2. Production en DGs
5.3.3. Production en MGs
5.4. Analyse thermique des huiles hydrolysées
6. Conclusion et perspectives
7. Partie expérimentale
7.1. Produits commerciaux utilisés
7.2. Réactions enzymatiques
7.2.1. Activation des enzymes
7.2.2. Catalyse en milieu émulsionné
7.2.3. Prélèvements et inactivation des enzymes
7.2.4. Recyclage des enzymes
7.3. Détermination de l’indice d’acidité
7.4. Détermination de l’indice de peroxyde
7.5. Analyse CPG
7.6. Analyse RMN
7.6.1. RMN 1H
7.6.2. RMN 13C
7.7 Analyse DSC
9. Références bibliographiques
Chapitre 4 : Intérêt des huiles hydrolysées dans les systèmes alimentaires
1. Introduction
2. Applications des huiles hydrolysées dans les émulsions
2.1. Les émulsions inverses
2.1.1. Caractérisations
2.1.1.a. Rhéologie oscillante
2.1.1.b. Microscopie optique
2.1.1.c. Granulométrie laser
2.2. Les émulsions doubles
3. Réactions enzymatiques en lot pilote
3.1. Indice d’acidité et mesure de tension de surface
3.2. Etude RMN 13C
4. Utilisation des huiles hydrolysées dans des matrices alimentaires
4.1. Les crèmes glacées
4.1.1. Fabrications
4.1.2. Etude d’écoulement
4.1.3. Etude de la dureté
4.2. Les barres pâtissières
4.2.1. Fabrication
4.2.2. Substitution de l’huile végétale
4.2.3. Ajustement de la quantité d’huile hydrolysée
4.2.4. Suivi dans le temps de la dureté
4.2.5. Sensibilité à l’oxydation
4.3. Les brioches
4.3.1. Fabrication
4.3.2. Substitution de l’huile
4.3.3. Etude du recyclage des enzymes
4.3.3.a. Mesure de la dureté à t0
4.3.3.b. Suivi de la dureté dans le temps
5. Conclusion et perspectives
6. Partie expérimentale
6.1. Ingrédients utilisés
6.2. Réactions enzymatiques sur pilotes
6.2.1. Stephan®
6.2.2. CDH®
6.2.3. Séparation des phases
6.3. Analyse de l’oxydation des huiles végétales
6.4. Analyse du rancissement des huiles
6.5. Analyse des teneurs en phospholipides des lécithines
6.6. Fabrication des émulsions
6.6.1. Emulsions inverses
6.6.2. Emulsions doubles
6.7. Caractérisations des émulsions
6.7.1. Rhéologie
6.7.2. Microscopie optique
6.7.3. Granulométrie
6.8. Fabrication des matrices alimentaires
6.8.1. Fabrication des crèmes glacées
6.8.2. Fabrication des barres pâtissières
6.8.3. Fabrication des brioches
6.9. Mesures de texturométrie
6.9.1. Des crèmes glacées
6.9.2. Des produits céréaliers
6.9.3. Mesure du taux d’écoulement des glaces
7. Références bibliographiques
Conclusion générale 

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