L’accident nucléaire de Fukushima-Daiichi, survenu le 11 mars 2011 au Japon, a engendré nombre de questionnements et de réticences sur les questions liées à la sureté des installations nucléaires à travers le monde. Bien malgré lui, cet accident a servi d’exemple aux différentes nations exploitant l’énergie nucléaire pour estimer le coût, au sens large, d’un scénario tel qu’une catastrophe et/ou un accident.
En dehors du bilan humain directement provoqué par le tsunami qui a engendré l’accident nucléaire, ce sont les différents impacts dus à cet accident qui ont été scrutés à travers le monde. Toujours d’un point de vue humain, ce sont plusieurs milliers de personnes qui ont reçu de fortes doses de radiation (OMS, 2013), mais l’accident a également impacté l’environnement avoisinant avec le dépôt de radionucléides parfois fortement radioactifs dans les eaux et terres avoisinantes.
Ainsi, l’accident nucléaire représente un véritable coût et donc une perte économique pour le pays. L’Institut de Radioprotection et de Sureté Nucléaire estime à 120 milliards d’euro le coût global moyen d’un accident nucléaire grave . Ce coût se répartirait selon différentes problématiques :
• Coût de décontamination/démantèlement de l’installation nucléaire touchée ;
• Pertes dues à l’électricité non produite par l’installation et la compensation par l’achat d’électricité extérieure ;
• Coût en matière de santé publique suite à la contamination des populations ;
• Coût de la décontamination des sols et terres agricoles, pertes agricoles qui entrainent l’augmentation des importations ;
• Pertes en termes d’image du pays, baisse très importante du tourisme et de l’exportation alimentaire.
Si certains pays, comme l’Allemagne, ont choisi d’accélérer leur sortie du nucléaire suite à cet accident, la France, dont la part d’énergie produite par le nucléaire s’élevait à 77% en 2015 (RTE, 2016) – bénéficiant ainsi d’une certaine indépendance énergétique ainsi qu’un certain pouvoir économique exportable –, a choisi d’améliorer son appréhension des risques liés à l’exploitation de l’énergie nucléaire. Pour cela, le gouvernement français a lancé en 2012 un appel à projet portant sur la recherche en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection. Cet appel à projet, piloté par l’Agence Nationale de Recherche, visait quatre grands axes (ANR, 2012) :
• Étudier les conditions ayant rendu l’accident du Fukushima-Daiichi possible et en tirer des enseignements ;
• Étudier la gestion, par les exploitants et les autorités publiques, de tous les précédents accidents nucléaires ;
• Étudier les différents impacts des rejets nucléaires sur la santé et l’environnement, et étudier les stratégies de reconquêtes des territoires contaminés ;
• Élaborer une stratégie d’application de ces différentes études aux installations françaises actuelles et futures.
Le Projet Investissement d’Avenir (PIA) DEMETERRES (ANR-11-RSNR-0005 DEMETERRES) a fait partie des 23 projets retenus. Il a pour objectif le DÉveloppement de MÉthodes et TEchnologies pour la décontamination et la Remédiation Raisonnée des Effluents et Sols contaminés.
Concrètement, le projet DEMETERRES cherche à développer des outils innovants et efficaces de décontamination, tels que le lavage des « sols » à l’aide de CO2 supercritique (LEYBROS et al., 2016) ou le développement d’un matériau pour colonne de décontamination des effluents, le SORBMATECH 202 (MICHEL, 2015), ainsi que des méthodes de remédiation des sols, tel que la phyto-remédiation (CHAGVARDIEFF, 2014). Le projet est coordonné par le CEA et inclut d’autres acteurs comme Areva, Veolia, l’INRA, le CIRAD ou l’IRSN. Il est divisé en 6 systèmes .
Définition des systèmes chimiques
Les sols et ses composantes
Un sol est une structure complexe et extrêmement variable, composée d’une multitude de composants. Cette grande complexité du sol et des éléments qui le composent rend difficile l’établissement de définition universelle. Chaque corps de métier définira donc le sol selon ses besoins. Dans le cadre de ce manuscrit de thèse, nous décrirons simplement le sol comme une structure composée principalement de 3 phases :
• une phase « solide » (composés minéraux et organiques) ;
• une phase aqueuse (eaux de lixiviation comprenant des espèces solubles) ;
• une phase gazeuse (air, méthane, dioxyde de carbone).
Toujours d’un point de vue granulométrique, les argiles correspondent à la fraction du sol ayant une taille de grain inférieure à 2 µm comprenant la majorité des minéraux argileux. Si les termes argiles et minéraux argileux sont bien souvent confondus, ce manuscrit fera l’effort de distinguer les deux termes afin d’éviter toute confusion, notamment lorsque l’étude portera sur les études d’adsorption dans les sols.
Les minéraux argileux
Dans la nature, les minéraux argileux proviennent de l’altération des roches. Ils représentent une famille de minéraux phyllosilicatés, c’est-à-dire qu’ils s’organisent en empilement de silicates SiO4 formant des feuillets. Généralement, le terme « argile » fait référence aux roches sédimentaires constituées majoritairement de minéraux argileux, différenciables selon plusieurs paramètres structuraux et chimiques. Les avancées technologiques en matière d’analyse de solide ont permis de caractériser et de classifier ces minéraux argileux selon 4 grandes familles selon leurs épaisseurs de feuillet (SPOSITO, 2008).
Minéraux de type 1:1. Ils sont appelés également les minéraux à 7 Å du fait de l’épaisseur d’un feuillet et de son espace interfoliaire. Il s’agit de la famille de la kaolinite. Ils possèdent un empilement de feuillets à deux couches – une couche tétraédrique (T) siliceuse liée à une couche octaédrique (O) alumineuse, soit un empilement T.O, autre nom donné à cette famille de minéraux argileux. Dans le cas des halloysites, l’espace interfoliaire peut être occupé par des molécules d’eau (HILLIER & RYAN, 2002).
Minéraux de type 2:1. Cette famille de minéraux présente quant à elle un feuillet à 3 couches de type T.O.T pour une épaisseur de feuillet proche des 10 Å. Il s’agit du type de minéraux le plus présent dans la nature. Cette famille comprend notamment les micas, les illites et les smectites, différenciables par la composition cationique de leurs motifs tétraédriques et octaédriques. Tous les minéraux argileux de cette famille ne présentent pas nécessairement de propriétés de gonflement. Si les smectites et les vermiculites peuvent gonfler par incorporation des molécules d’eau, ou de cations hydratés, dans l’espace interfoliaire – lors de la compensation de charge des déficits produits par des substitutions isomorphiques –, ce n’est pas le cas pour la plupart des micas ou des illites où le potassium interfoliaire relie fortement les feuillets empêchant l’accès aux cations hydratés.
Minéraux de type 2:1:1. Ils présentent une structure de type T.O.T.O pour une épaisseur de feuillet d’environ 14 Å. Pour cette famille de minéraux argileux, l’espace interfoliaire est occupé par une couche octaédrique. Les chlorites font notamment partie de cette famille de minéraux .
Minéraux interstratifiés. Cette dernière famille se distingue par son hétérogénéité. En effet, les minéraux interstratifiés possèdent des feuillets de différentes natures qui peuvent s’empiler de manière régulière ou non. Dans la nature, on retrouve fréquemment des minéraux interstratifiés illite/smectite ou mica/chlorite.
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Table des matières
TABLE DES MATIERES
Liste des figures
Liste des tableaux
Chapitre I. Introduction
1 Avant-propos
1.1 Généralités
1.2 Objectifs de projet de thèse
1.3 Déroulement du projet de thèse
2 Synthèse bibliographique
2.1 Définition des systèmes chimiques
2.1.1 Les sols et ses composantes
Les minéraux argileux
La matière organique naturelle
2.1.2 Rétention du césium et du strontium dans les sols
Le césium
Le strontium
2.2 Modélisation d’adsorption
2.2.1 Modèles empiriques d’adsorption
2.2.2 Modèles thermodynamiques d’adsorption
Modèles de complexation de surface
Modèles d’échange d’ions
3 Références
Chapitre II. Adsorption of strontium and cesium onto an Na-MX80 bentonite: experiments and building of a coherent thermodynamic modelling
1 Résumé en Français
2 Abstract
3 Publication
3.1 Introduction
3.2 Materials and methods
Materials
Sorption experiments
Experimental protocols
Analytical methods
Modelling
3.3 Results and discussion
Choice of the adsorption parameters of the exchanger
Strontium adsorption
Kinetic experiments
Sorption experiments and modelling
Cesium adsorption
3.4 Conclusions
3.5 References
3.6 Appendices
XRD diffractogram of Na-MX80
Modelling formalism
Saturation curves
Adsorption isotherms of trace elements
Transformation of selectivity coefficient from MISSANA & GARCÍA-GUTIÉRREZ
(2007) in the multi-site ion exchange formalism
Chapitre III. Retention of Cs and Sr onto an Na-illite: application of the multi-site ionexchanger model
1 Résumé en Français
2 Abstract
3 Publication
3.1 Introduction
3.2 Materials and methods
3.2.1 Materials
3.2.2 Experimental protocol
Analytical methods
Characterization of clay minerals
Na-saturation curve and adsorption isotherm on pure clay mineral
mixtures
3.2.3 Modelling
3.3 Results and discussion
3.3.1 Compilation of the existent data from literature
Saturation of illite with Na+
Adsorption isotherms of trace elements
3.3.2 Verification of the additivity approach of the modelling
Adsorption of Cs onto illite/smectite mixtures
Adsorption of Sr onto illite/smectite mixtures
Discussion on the additivity results
3.4 Conclusion
3.5 References
Chapitre IV. On the use the multi-site ion exchange model to predictively simulate the adsorption behaviour of cesium and strontium onto French agricultural soil
1 Résumé en français
2 Abstract
3 Publication
3.1 Introduction
3.2 Materials and methods
3.2.1 Materials
Soils sample collection and characteristics
Chemicals reagents
3.2.2 Experimental protocols
Sample preparation
Characterization of samples
Isotherms protocol
Analytical methods
3.2.3 Modelling
Multi-sites ion-exchanger formalism
K+ illite-smectite database
Database used
3.3 Results & Discussion
3.3.1 Adsorption of Cs+ and Sr2+ onto soils, and simulations in the framework of
the multi-site ion-exchange model
Adsorption of Cs+
Adsorption of Sr2+
Influence of adding kaolinite properties in the simulations
3.3.2 Removal of the natural organic matter
3.3.3 Adsorption onto Herqueville soil after removing the exchangeable aluminium
3.3.4 Adsorption on Etoile-sur-Rhône with a simplified synthetic pore water
3.4 Discussions
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