Interaction entre l’inflammation musculosquelettique et l’entraînement

Interaction entre l’inflammation musculosquelettique et l’entraînement

Au niveau spinal, des évidences font état d’interaction entre les changements mésadaptatifs liés à l’ activité nociceptive et les changements adaptatifs associés à différents protocoles induisant de la plasticité activité-dépendante comme le conditionnement de réflexe ou l’entraînement locomoteur. Par exemple, il a été observé que l’activité nociceptive, sous forme de choc électrique de forte intensité (Grau et al., 1998, Crown and Grau, 2001 , Ferguson et al., 2006) ou d’inflammation périphérique (Hook et al., 2008, Baumbauer et al., 2009), diminue la capacité de conditionnement du réflexe de flexion tout en induisant un état d’hypersensibilité mécanique (Crown et al., 2002a). Le déficit de conditionnement perdure pour une période d’environ 48 h, puis le réflexe peut être conditionné à nouveau (Crown et al., 2002b). Le développement d’hypersensibilité mécanique et de déficits d’apprentissage représenteraient des formes de plasticité qui s’opposent au conditionnement et à l’entraînement locomoteur par un mécanisme impliquant les récepteurs NMDA (Ferguson et al., 2012).

Récemment, il a été observé que l’activité nociceptive sous forme de choc électrique atténue la récupération locomotrice à la suite d’une LM partielle (Garraway et al., 20 Il). Toutefois, on ne sait pas si ce phénomène est médié par des changements ciblant les circuits spinaux ou supraspinaux. Considérant l’influence majeure des processus liés à la récupération locomotrice ainsi qu’à la nociception et sa modulation sur les circuits spinaux, leur contribution à l’interaction entre douleur et motricité doit être clarifiée. Comme ces mécanismes sont cliniquement importants et permettraient d’optimiser la récupération fonctionnelle des patients, notre objectif est de décrire, à l’aide d’un modèle de souris spinale, l’implication des réseaux spinaux dans l’impact de l’activité nociceptive sur la récupération locomotrice.

Hypothèse 1: L’inflammation des muscles lombaires atténue la récupération locomotrice à la suite d’une section spinale complète.

Les processus reliés à la douleur et la récupération semblent concurrencer pour influencer des circuits spinaux communs. Comme décrit au chapitre 3.2, la FDD du réflexe-H est un prédicteur électrophysiologique de la récupération fonctionnelle à la suite d’une LM. Des évidences récentes suggèrent également que cette mesure peut être altérée par des changements spinaux impliqués dans les processus liés à la douleur inflammatoire et neuropathique (LeeKubli and Calcutt, 2014). Considérant l’influence opposée de l’entraînement et des processus inflammatoires sur la FDD lorsqu’évaluée séparément, notre objectif secondaire est de décrire les changements affectant la FDD lors de la présence concomitante d’entraînement et d’inflammation lombaire.

Hypothèse la: L’inflammation des muscles lombaires perturbe la dépression du réflexe-H dépendante de la fréquence durant la récupération post-lésion.

Afin de déterminer les changements neuroanatomiques responsables des déficits locomoteurs associés à l’inflammation lombaire, notre troisième objectif est d’évaluer l’expression de molécules modulée de façon opposée par l’inflammation et l’entraînement locomoteur à la suite d’une section spinale complète. L’expression de la microglie est augmentée dans la moelle épinière lors d’administration de CFA (Chacur et al., 2009). À l’inverse, l’expression de KCC2 est augmentée lors d’entraînement (Côté et al., 2014) et diminuée lors de douleur (Hasbargen et al. , 2010) lorsque ceux-ci sont présentés séparément.

Influence d’une approche pharmacologique et d’entraînement combinée

Des facteurs bénéfiques influencent également la récupération locomotrice à la suite d’une LM. Les systèmes monoaminergiques contribuent fortement à la récupération locomotrice à la suite d’une lésion partielle, notamment par des changements neuroanatomiques ciblant la voie réticulo-spinale (Ballermann and Fouad, 2006), les voies propriospinales (Zaporozhets et al., 2011 , van den Brand et al., 2012, Cowley et al., 2015) et les réseaux locomoteurs spinaux (Saruhashi et al. , 1996). La présence de nombreux récepteurs monoaminergiques dans les niveaux spinaux où se situe le CPG (Giroux et al., 1999, Otoshi et al. , 2009) et l’influence de l’entraînement locomoteur sur leur expression (Chopek et al., 2015) suggère un rôle de ce système dans la réexpression de la locomotion à la suite de section spinale complète et qu’ il contribue à l’effet positif de l’ entraînement.

Rôle du système sérotoninergique dans la locomotion

La démonstration de l’effet marqué de la DOPA, intermédiaire métabolique des catécholamines, sur l’ activité des voies réflexes impliquées dans la locomotion (Jankowska et al., 1967b) ou encore de la c1onidine, agoniste noradrénergique U2, sur la facilitation de la récupération de la marche chez le chat spinalisé à l’âge adulte (Chau et al., 1998b, a) ont encouragé la réalisation d’études sur l’utilisation d’outils pharmacologiques pour améliorer la récupération locomotrice à la suite d’une LM. Parmi les différentes interventions qui influencent l’activité locomotrice chez les rongeurs, l’ administration de sérotonine (5-HT) est celle qui active les réseaux locomoteurs spinaux de la façon la plus robuste (Cazalets et al., 1992, Cowley and Schmidt, 1995, Schmidt and Jordan, 2000, Zaporozhets et al. , 2011) et possiblement celle qui possède le meilleur potentiel thérapeutique. En outre, contrairement à la transmission synaptique permettant à un neurone présynaptique d’ influencer un neurone postsynaptique, les monoamines, incluant la 5-HT, peuvent influencer des cibles situées loin du site de relâche et agissent donc sur un ensemble de neurones, ce qui les définit comme neuromodulateurs (Zoli et al. , 1999; Descarries and Mechawar, 2000).

Il a été démontré que la 5-HT promeut la locomotion (Jordan et al., 2008) et favorise son activité stéréotypique par la régulation de réflexes spinaux (Jankowska et al. , 2000, Schmidt and Jordan, 2000). La 5-HT est relâchée dans la moelle épinière par l’ action de neurones de la région mésencéphalique locomotrice (MLR) sur leurs cibles réticulo-spinales (Jordan, 1998). Celles-ci comprennent des neurones sérotoninergiques situés dans la région parapyramidale (PPR) récemment identifiée comme médiateur de l’activité rythmique du CPG (Liu and Jordan, 2005, Jordan et al., 2008) et médiés par les récepteurs 5-HT2A et 5-HT7 (Liu and Jordan, 2005) (Jordan et al., 2008). L’impact fonctionnel de l’administration d’antagonistes et de l’ablation génétique de ces sous-types de récepteurs a également été démontré par l’ altération du rythme et la perte d’alternation droite-gauche du patron cinématique et EMG chez la souris in vivo (Liu et al.,2009), supportant les découvertes des modèles in vitro. En plus des récepteurs 5-HT2A et 5-HT7, d’autres récepteurs 5-HT participent à la régulation de la locomotion, incluant les récepteurs 5- HT 1 (Beato and Nistri, 1998, voir section 1.4.2.2).

Les neurones 5-HT projettent vers les cornes ventrales et dorsales par le funicule ventrolatéral (Carlsson et al., 1964). Ceux-ci agissent en activant des récepteurs abondamment distribués dans tout le SNC, incluant les interneurones et motoneurones des réseaux locomoteurs spinaux (Giroux et al., 1999, Otoshi et al., 2009). L’effet de la relâche de 5-HT dépend de sa concentration. À des concentrations basses, la 5-HT augmente le rythme et la coordination entre les bouffées électroneurographiques (ENGs) enregistrées aux racines ventrales de L2 (fléchisseurs) et L5 (extenseurs) de l’activité locomotrice induite par administration de NMDA ou DOPA (Jiang et al. , 1999, Madriaga et al., 2004, Pearlstein et al., 2005). À de hautes concentrations, la 5-HT seule permet de générer une activité rythmique et coordonnée (Nishimaru et al., 2000), potentiellement dû à l’activation de récepteurs non sérotoninergiques (ex. : dopaminergiques; Madriaga et al., 2004) et à la modulation directe de l’excitabilité des motoneurones par la plus grande diffusion de la 5-HT dans l’espace extracellulaire (Perrier et al., 2013).

Facilitation de la récupération

En présence d’une lésion complète de la moelle épinière, la contribution des voies réticulo- et propriospinales à la récupération locomotrice est supprimée. Cependant, l’activation des récepteurs 5-HT peut influencer des mécanismes spinaux pour favoriser la récupération. Au jour 3 post- section, la concentration de 5-HT sous-lésionnelle est drastiquement abaissée à environ 5-10 % de sa quantité d’ origine (Andén et al., 1964, Carlsson et al. , 1973, Magnusson, 1973), laissant les intemeurones spinaux sérotoninergiques la seule source de 5-HT souslésionnelle (Newton and Hamill, 1988). L’expression de différents sous-types de récepteurs 5- HT, incluant les récepteurs 5-HT1A (Otoshi et al., 2009), 5-HT2NC (Kim et al., 1999, Chopek et al., 2015), 5-HT7 (Chopek et al., 2015) est augmentée dans la moelle épinière lombaire souslésionnelle et ciblent les réseaux locomoteurs spinaux (Otoshi et al., 2009, Chopek et al., 2018).

De plus, l’activité constitutive de certains récepteurs est augmentée, notamment les 5-HT2C (Fouad et al., 2010, Murray et al., 2010). Encore plus important, l’entraînement locomoteur amplifie ces changements d’ expression et d’activité constitutive (Ballermann and Fouad, 2006, Engesser-Cesar et al. , 2007). En absence de transmission supra-spinale, ces changements associés à l’entraînement pourraient être médiés par l’activité des afférences sensorielles. C’est le cas pour la régulation de l’expression du récepteur 5-HT1A au niveau des motoneurones des extenseurs, pour lesquels l’intégrité des afférences sensorielles est requise pour observer une augmentation de leur expression associée à l’entraînement post-section (Otoshi et al., 2009).

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Table des matières

Résumé 
Abstract
Table des matières
Liste des tableaux 
Liste des figures 
Liste des sigles
Liste des abréviations 
Remerciements
Chapitre 1 : Introduction et contexte théorique
1.1 Introduction générale aux lésions de la moelle épinière
1.2 Rôle des réseaux locomoteurs spinaux dans la locomotion
1.2 .1 Générateur de patron central
1.2.2 Composition du CPG
1.2.3 Contribution des afférences sensorielles à l’activité du CPG
1.2.3.1 Afférences la
1.2.3.2 Autres afférences
1.3 Récupération locomotrice à la suite d’une lésion spinale
1.3.1 Rôle des afférences sensorielles dans l’adaptation des réseaux locomoteurs spinaux à la suite d’une lésion
1.3.2 Plasticité des réseaux locomoteurs spinaux et entraînement
1.4 Facteurs influençant la récupération
1.4.1 Influence des comorbidités sur la récupération
1.4.1.1 Activité nociceptive et inflammation
1.4.1.2 Modèle expérimental d’ inflammation musculaire
1.4.1.3 Interaction entre l’inflammation musculosquelettique et l’entraînement
1.4.2 Influence d’une approche pharmacologique et d’entraînement combinée
1.4.2.1 Rôle du système sérotoninergique dans la locomotion
1.4.2.2 Facilitation de la récupération
1.4.2.3 Utilisation de la buspirone pour améliorer la récupération locomotrice
1.5 Considérations méthodologiques
1.5.1 Le réflexe monosynaptique
1.5.2 Action pharmacologique de la buspirone
1.5.3 Paradigme de double lésion
Chapitre II : Article 1 – Lumbar muscle inflammation alters spinally-mediated locomotor recovery induced by training in a mou se model of complete spinal cord inj ury 
Chapitre III: Article 2 – H-reflex disinhibition by lumbar muscle inflammation in a mouse model of spinal cord in jury
Chapitre IV: Article 3 – Locomotor deficits induced by inflammation involve spinal microglia and are independent of KCC2 expression in a mouse model of complete spinal transection
Chapitre V: Article 4 – Facilitation of locomotor spinal networks activity by buspirone after a complete spinallesion in mice
Chapitre VI : Discussion
6.1 Interaction entre l’activité non nociceptive et nociceptive dans le recrutement de voies réflexes communes aux réseaux locomoteurs spinaux
6.2 Changements centraux impliqués dans l’ influence opposée de l’entraînement et de l’ inflammation
6.2.1 Implications de la voie microglie-BDNF-KCC2
6.3 Contribution supraspinale et spinale au contrôle moteur du tronc impliqué dans la récupération locomotrice
6.4 La locomotion médiée par les réseaux locomoteurs spinaux est déclenchée par
la buspirone
6.5 La buspirone facilite l’adaptation plastique des réseaux locomoteurs spinaux
6.6 Effets limités de l’entraînement seul sur la récupération locomotrice
Chapitre VII : Conclusion 
Bibliographie

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