Intégration d’un micro-initiateur sécurisé sur silicium

L’amorce pyrotechnique

            On définit par amorce, le système qui, à partir d’une commande d’un opérateur ou bien sous l’effet d’événements extérieurs, va permettre de transmettre au matériau énergétique une énergie électrique ou mécanique pour l’initier. Par souci d’intégration et pour donner plus de souplesse à la commande, l’amorçage est la plupart du temps commandé électriquement. Mais des amorçages par percussion sont aussi possibles. De nos jours cette solution ne se retrouve que dans les munitions de petit calibre, intégrant seulement la fonction d’allumage du matériau pyrotechnique. Dans les systèmes de plus grandes dimensions et plus complexes (missile, propulseur…), l’amorce comprend, outre la fonction d’initiation du matériau énergétique, plusieurs fonctions ou modules permettant d’assurer l’autonomie énergétique, le traitement logique, la commande, la sécurité. Pour des raisons d’interactions entre toutes ces fonctions, il est évident qu’une commande électrique s’impose.

La charge pyrotechnique secondaire

             Le rôle d’une amorce est de venir réaliser l’allumage d’une charge pyrotechnique secondaire. Cette charge peut être soit propulsive (propulseur) soit explosive (obus). On parlera dans ce dernier cas de charge explosive secondaire. Les explosifs secondaires sont utilisés pour des ondes de choc de grande amplitude. Les charges propulsives ne vont pas détoner mais brûler en dégageant une grande quantité de gaz. Elles sont particulièrement adaptées aux applications de propulsion. L’allumage de la charge pyrotechnique secondaire qu’elle soit propulsive ou explosive est réalisé en général par la décomposition de la charge primaire contenue dans l’initiateur. L’utilisation de charges pyrotechniques intermédiaires (relais, booster….) est parfois nécessaire au vu de la faible sensibilité des charges secondaires à initier par l’amorce. Cette faible sensibilité aux diverses sollicitations extérieures est un atout en terme de sécurité. On parle de charge MURAT (Munition à Risques Atténués). L’intérêt est de s’assurer que l’initiation de la charge pyrotechnique secondaire à allumer au contact de l’amorce n’intervienne que lors du fonctionnement de l’initiateur.

Initiateurs de type Slapper ou EFI (Exploding Foil Initiator)

                 C’est une variante américaine du « fil explosif ». Il est le résultat de recherches initiées en 1976 par le Lawrence Livermore Laboratory [21] et tend à s’imposer aujourd’hui dans les équipements militaires. L’onde de choc créée par la vaporisation du fil n’est plus utilisée pour initier la charge pyrotechnique mais pour projeter un disque diélectrique (mylar, kapton) à travers un trou au fond duquel se trouve la charge à initier. C’est l’impact de ce disque appelé slapper ou flyer qui fournit l’énergie nécessaire à l’initiation d’une charge primaire ou bien, comme pour le fil explosif, secondaire. Le transfert d’énergie se fait sur toute la surface du disque qui a un diamètre de l’ordre du millimètre contrairement aux détonateurs de type EBW dans lequel il est beaucoup plus ponctuel. Or, une initiation de qualité nécessite d’amener un volume minimum d’explosif à latempérature et à la pression à laquelle l’initiation se fait. L’augmentation de la surfaced’échange va permettre d’atteindre plus facilement ces conditions et ceci, pour des énergies plus faibles. Ce choix d’initiation par impact permet d’initier des charges pyrotechniques encore moins sensibles que celles initiées par le fil explosif. Notons qu’il n’y a aucun contact physique entre les parties conductrices et la charge à initier, ce qui renforce la sécurité. Toutefois comme pour l’initiateur à fil explosif, les forts courants d’initiation nécessitent une architecture particulière qui fait obstacle à la miniaturisation. Sa structure est aussi plus complexe qu’un simple initiateur à fil chaud.

L’initiateur sur membrane diélectrique

                La conception de l’initiateur de type fil chaud retenu est basée sur les travaux précédemment développés par l’équipe [4]. Il consiste en un élément résistif en polysilicium déposé sur une membrane diélectrique bicouche SiO2(1.4µm)/SiNx(0.6µm). Le matériau pyrotechnique est ensuite placé au contact de la résistance sur le dessus de la membrane ou bien en dessous, dans la cavité ménagée dans le substrat de silicium, comme présenté sur la Figure 22. Le rôle de la membrane est primordial car elle permet de limiter les pertes thermiques tout en assurant une tenue mécanique suffisante pour maintenir le matériau pyrotechnique [5]. Depuis 1997, les membranes bicouches SiO2/SiNx ont fait l’objet d’études qui ont conduit à la réalisation de micro-initiateurs pyrotechnique performants. La Figure 24 donne les courbes d’échauffement (température maximale en fonction de la puissance) pour ces trois plateformes. Une courbe expérimentale de la plateforme sur membrane diélectrique permet de valider le modèle qui a été réalisé. La structure sur membrane, qui nécessite à peine 40mW pour atteindre 250°C, est nettement plus performante que les structures sur substrat massif qui nécessitent 230mW (verre) et 400mW (alumine) pour obtenir la même température. Pour compléter cette analyse, nous avons calculé les temps d’initiation d’un matériau énergétique de type PAG/PA3 , utilisé au LAAS dans le cadre des applications de micropropulsion pour l’espace, ayant une température d’initiation de 250°C, placé au contact de l’élément chauffant pour les deux structures ayant donné les meilleurs résultats en terme d’échauffement, à savoir plateforme sur membrane et sur substrat en verre (Figure 25). Nous avons constaté que quelle que soit la puissance appliquée, la différence est de 250ms en faveur de l’initiateur sur membrane SiO2/SiNx. De plus ce type de substrat ne facilite pas l’intégration de fonctions électroniques. Ces résultats nous ont donc confortés dans le choix d’un initiateur sur membrane SiO2/SiNx.

Dimensionnement de l’interrupteur OFF-ON

            L’interrupteur OFF-ON se compose d’une plateforme chauffante pour la commande thermique sur laquelle sont déposées 2 pistes en cuivre à connecter, une couche de colophane et une bille Sn/Pb. La colophane ainsi que les billes de brasure Sn/Pb nous ont été fournies par NOVATEC. La plateforme chauffante consiste en une résistance chauffante en polysilicium dopé N sur une membrane diélectrique SiO2/SiNx, comme pour le micro-initiateur et l’interrupteur ONOFF. La forme de la résistance choisie est un carré de 690×680µm² permettant d’avoir d’une part une épaisseur de piste constante sur la zone de brasure mais aussi de chauffer des billes de brasure Sn/Pb de 350µm de diamètre. Un trou au centre de la résistance de 150×150µm² permet d’augmenter la valeur de la résistance et donc de limiter les niveaux de courants sans perturber la planéité de la zone de brasure. La Figure 35 donne la forme et les dimensions des résistances de l’interrupteur OFF-ON. La forme triangulaire de la résistance pour rejoindre les contacts permet de limiter le point chaud au niveau du passage de la zone de conduction métallique en cuivre à la zone résistive en polysilicium comme le montre les simulations rapportées dans le Tableau 5 qui compare des géométries avec et sans amenées de courant oblique.

Le dépôt de la bille Sn/Pb

           Le dépôt de la bille de l’interrupteur OFF-ON se fait en deux phases. Dans un premier temps, la colophane qui vient faire l’interface entre les pistes et la bille est déposée par stamping (cf Figure 54). La technique de stamping consiste à venir prélever le produit à déposer par trempage d’une aiguille puis, par contact, le reporter sur la zone désirée. La quantité déposée dépend de la géométrie de l’aiguille, de la viscosité du produit et de la durée d’application lors du report. C’est une technique qui ne fonctionne que pour des produits à l’état liquide ou bien visqueux. En effet, ce sont les forces de capillarité qui permettent l’accroche sur l’aiguille puis le transfert sur le substrat lors du contact. La colophane étant solide à température ambiante, le substrat ainsi que le réservoir de colophane sont portés au delà de sa température de fusion , qui est, pour la colophane utilisée, 83°C. L’aiguille est ensuite trempée dans la colophane liquide. Lorsqu’elle est retirée, la goutte de colophane accrochée se refroidit directement au contact de l’air et devient solide. Lors du contact avec le substrat chauffé, elle se liquéfie de nouveau et peut donc s’étaler. Après des tests de mise au point du dépôt, nous utilisons une aiguille de dépose de dosage2000 de diamètre intérieur de 0.20mm et extérieur de 0.41mm et la température de chauffage est de 150°C, ce qui permet d’avoir une viscosité de colophane optimisée. Pour une température plus faible, on a une viscosité qui entraîne la création de fils parasites, se refroidissant au contact de l’air, entre le réservoir et l’aiguille de stamping. Pour une température plus élevée, la viscosité se réduisant, la quantité de colophane déposée est faible et elle s’évapore de manière trop rapide. La bille de 350µm de diamètre est ensuite déposée sur la colophane à l’état liquide à l’aide d’une pince. Par capillarité, la colophane remonte sur la bille. Pour la température choisie, elle n’est toutefois pas assez liquide pour recouvrir toute la bille. Une fois la bille déposée, la température est augmentée légèrement jusqu’à que la colophane soit assez liquide pour remonter par capillarité et recouvrir totalement la bille. Ceci à un double rôle à la fois de protection de la bille ainsi que de maintien mécanique. Finalement le substrat est remis à température ambiante, la colophane se solidifie emprisonnant la bille.

Bilan de fabrication et perspectives d’amélioration des procédés de fabrication

               Différentes étapes du procédé de fabrications ont pu être vérifiées. On remarque que le bon respect des dimensions définies lors de la conception détermine :
– La bonne tenue mécanique des membranes qui est une des caractéristiques critiques pour la filière technologique que nous proposons.
– La qualité de réalisation de la brasure de l’interrupteur OFF-ON par l’obtention d’une épaisseur minimale de cuivre.
– La valeur des éléments résistifs, définissant le couple tension/courant à appliquer pour la commande.
Parmi ces trois points, le plus important est la tenue des membranes qui définit en fin de fabrication le rendement de fabrication du système. En l’occurrence pour nos réalisations nous avons obtenu plus de 95% de membranes utilisables. Toutefois le démonstrateur étant constitué de 4 membranes, pour une membrane cassée le système n’est plus utilisable donc virtuellement 4 membranes sont inutilisables. Le pourcentage système tombe donc à 80%, ce qui met en évidence la nécessité d’avoir des membranes robustes en particulier dans le cadre d’une intégration multiple dans un système. Dans le procédé de fabrication qui a été détaillé, nous n’avons pas observé de points de défaillance. Le micro-initiateur sécurisé PYROSECURE présente toutefois quelques points identifiés comme limitant :
– Actuellement, n’ayant pas accès aux matériaux pyrotechniques, l’utilisation d’un propergol composite ne nous permet pas de tirer pleinement profit des capacités de nos initiateurs et de nos interrupteurs ON-OFF pyrotechniques. Il serait en l’occurrence intéressant d’étudier quels types de matériaux pyrotechniques, générateurs de gaz, peuvent améliorer de manière significative les performances des interrupteurs ON-OFF pyrotechniques.
– Concernant les interrupteurs OFF-ON, la directive européenne RoHS4 impose une réduction des substances dangereuses, notamment le plomb, dans les systèmes manufacturés. Un remplacement de l’alliage utilisé (Sn/Pb) par un alliage de substitution doit être envisagé. Toutefois ces alliages ont l’inconvénient d’avoir des points de fusions plus élevées que le Sn/Pb. Pour garder des énergies de commutation faible, il faudra donc réduire le volume de l’élément d’apport. A terme, on pourra réaliser un dépôt en phase vapeur ou bien par croissance électrolytique de l’étain Sn pur. Sa température de fusion plus élevée (232°C) que le Sn/Pb eutectique ne constituerait pas un problème à ces faibles dimensions. Cela supprimerait aussi les étapes non collectives et donc coûteuses de report de l’élément d’apport actuellement du Sn/Pb. Pour l’interrupteur ON-OFF ainsi que l’initiateur, la réduction des dimensions est limitée par le report du matériau pyrotechnique. Une alternative est de venir déposer des matériaux en phase vapeur et fonctionnant en couche mince tel que le PETN5 [11,12]. Pour augmenter encore le niveau d’intégration (taille <mm²), les nanotechnologies ouvrent des perspectives nouvelles en permettant l’élaboration de matériaux purs, dont on maîtrise la taille des grains, le rapport surface active/volume, l’homogénéité des composants, la pureté… [13-16]

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE 1: LES MICRO-AMORCES PYROTECHNIQUES : ETAT DE L’ART ET PROBLEMATIQUE
1. Introduction
2. Domaine d’application de la pyrotechnie
3. Etat de l’art des systèmes d’amorçage traditionnels
3.1. L’amorce pyrotechnique
3.2. Les constituants d’une amorce à usage militaire
3.2.1 Les initiateurs (détonateur et inflammateur)
3.2.2 Systèmes sécuritaires de l’amorce
3.2.3 Le module énergétique
3.2.4 La commande
3.2.5 Les capteurs
3.2.6 La charge pyrotechnique secondaire
3.3. Les différents types d’initiateurs à commande électrique
3.3.1 Les initiateurs faible énergie
3.3.2 Les initiateurs haute énergie
3.3.3 Les autres solutions développées
3.4. Les différentes solutions de sécurisation des initiateurs
3.4.1 Sécurité électrique
3.4.2 Sécurité mécanique : interruption de chaîne pyrotechnique
3.5. Résumé des solutions d’initiation et leur niveau de sécurité associé
3.6. Notre problématique
4. Conclusion
CHAPITRE 2: CONCEPTION D’UN MICRO-INITIATEUR PYROTECHNIQUE SECURISE SUR SILICIUM, PYROSECURE
1. Introduction
2. Présentation de l’architecture proposée
2.1. Spécifications générales du micro-initiateur
2.2. Détails des fonctions assurées par le micro-initiateur sécurisé
2.2.1 Fonction initiation
2.2.2 La mise en veille sécurisée
2.2.3 Fonction armement
2.2.4 Fonction désarmement
2.2.5 Fonction stérilisation
2.3. Architecture logique du microsystème d’initiation sécurisé
2.4. Nos choix technologiques
3. Conception de l’initiateur pyrotechnique sécurisé ou PYROSECURE
3.1. L’initiateur sur membrane diélectrique
3.2. Conception des interrupteurs
3.2.1 Etat de l’art des interrupteurs mécaniques existants
3.2.2 Notre proposition d’interrupteurs pyrotechniques
4. Conclusion
CHAPITRE 3: INTEGRATION DU MICRO-INITIATEUR SECURISE PYROSECURE SUR SILICIUM 
1. Introduction
2. Description du démonstrateur du micro-initiateur sécurisé PYROSECURE
2.1. Dimensionnement de l’initiateur pyrotechnique
2.1.1 L’élément résistif
2.1.2 Le matériau énergétique
2.2. Dimensionnement de l’interrupteur ON-OFF pyrotechnique
2.3. Dimensionnement de l’interrupteur OFF-ON
2.4. Dimensionnement de PYROSECURE
3. Le procédé de fabrication du démonstrateur PYROSECURE
3.1. Les étapes micro technologiques
3.2. Les étapes d’assemblage
3.2.1 Le dépôt de la bille Sn/Pb
3.2.2 Le remplissage des cavités avec PAG/PA
4. Vérification dimensionnelle et évaluation des conséquences
4.1. Evaluation de l’épaisseur réelle des couches déposées
4.2. Effets des dispersions sur le rendement de fabrication et prédiction des défaillances
4.2.1 Epaisseur des couches de la membrane SiO2/SiNx
4.2.2 Valeur des résistances en polysilicium
4.2.3 Protection électrique de la couche d’oxyde
4.2.4 Epaisseur des pistes en cuivre
5. Bilan de fabrication et perspectives d’amélioration des procédés de fabrication
6. Conclusion
CHAPITRE 4: VALIDATION EXPERIMENTALE DES CONCEPTS PYROSECURE
1. Introduction
2. Caractérisation de l’initiateur pyrotechnique
2.1. Description de l’expérimentation
2.2. Résultats obtenus et analyse
3. Caractérisation des interrupteurs ON-OFF pyrotechniques
3.1. Description des échantillons de test
3.2. Caractérisation de l’état initial ON
3.3. Performances de commutation de l’interrupteur
3.3.1 Description de l’expérimentation
3.3.2 Résultats et analyse
3.4. Caractérisation de l’état final OFF
4. Caractérisation de l’interrupteur OFF-ON
4.1. Description des échantillons tests
4.2. Caractérisation de l’état initial : état OFF
4.3. Performances de commutation de l’interrupteur
4.3.1 Description de l’expérimentation
4.3.2 Résultats et analyse
4.4. Caractérisation de l’état final ON
4.4.1 Vérification du contact formé entre Cu et Sn/Pb
4.4.2 Evaluation de la résistance de contact engendrée par la brasure
4.4.3 Tenue en courant
5. Vérification fonctionnelle du démonstrateur PYROSECURE
6. Conclusion
CONCLUSION GENERALE

Télécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *