Insertion professionnelle et accompagnement : cadres théoriques

Insertion professionnelle et accompagnement : cadres théoriques

La thématique de l’insertion est apparue en France au début des années 80 dans un rapport commandé par le gouvernement de l’époque à Bernard Schwartz (1982), portant sur l’exclusion du travail des publics faiblement qualifiés. En effet, l’explosion du chômage de masse, et plus précisément, de celui de longue durée ont entraîné de profondes modifications du marché du travail en influençant considérablement le développement et la gestion de carrière des salariés. Ceux-ci sont désormais confrontés à la précarité de leur situation professionnelle, à des formes particulières d’emploi (contrat à durée déterminée, intérim et autres formes de contrats dits précaires), ou bien encore à une banalisation des transitions professionnelles. Scouarnec (2009, p. 37) avance d’ailleurs le remplacement des logiques de carrières stables et sécurisées valables encore jusqu’aux années 80 par les trajectoires professionnelles d’aujourd’hui, affectées par « des exigences de flexibilité, d’adaptabilité, de réactivité, de concurrence accrue ». Un grand nombre d’individus se retrouvent en conséquence confrontés à des périodes de chômage de durée variable, dites désormais de « transitions professionnelles », ainsi qu’à des difficultés d’insertion professionnelle.

Allard et Ouellette (2002, p. 498) définissent l’insertion socioprofessionnelle comme étant un « processus conduisant à l’intégration d’une personne à son milieu social ou de vie et à un milieu de travail ». En ce sens, les diverses politiques de l’emploi menées en France au cours de ces trente dernières années ont favorisé la mise en place de dispositifs tendant à promouvoir l’insertion professionnelle des demandeurs d’emploi. Les pouvoirs publics ont ainsi pris des mesures successives visant à renforcer les missions et les moyens des services publics de l’emploi. C’est dans ce contexte qu’avec la mise en place du RMI (Revenu Minimum d’Insertion) en 1988, la notion d’insertion s’est associée à son corolaire, celle d’exclusion. Ainsi, il conviendrait d’établir une distinction entre les personnes dites «insérées», et les autres, exclues d’un groupe d’appartenance, celui des individus en poste (Castra, 2003). L’auteur met également en exergue le manque de clarté de la notion d’insertion, en ce qu’elle « désigne autant un processus que son résultat final » (p. 10). L’insertion professionnelle considérée comme un processus sera alors envisagée comme l’accession à un emploi, tandis que le fait d’occuper un emploi constituera son état final.

L’insertion professionnelle : différents modèles

L’insertion professionnelle : une approche transitionnelle 

Si la littérature portant sur la thématique de l’insertion professionnelle est conséquente, on y trouve cependant peu de modèles théoriques susceptibles d’analyser et d’expliquer ce concept, comme le constatent Allard et Ouellette (2002). Certains travaux, tels que ceux menés dans le cadre d’une revue de question par Fournier et al. (1992) permettent néanmoins d’appréhender les contours théoriques de l’insertion professionnelle. Les auteurs décrivent différents modèles basés sur une conception transitionnelle de l’insertion professionnelle. Ils mettent en exergue différentes théories relatives à cette problématique, certes relativement datées, mais qu’il convient cependant de présenter brièvement dans le contexte de nos recherches. Ces travaux mettent la notion d’insertion professionnelle en perspective avec une conception de la vie envisagée comme une succession de périodes de stabilité entrecoupées de transitions permettant à l’individu d’évoluer.

Ainsi, s’inscrivant dans ce courant de recherche, Levinson (1978) fait émerger, lors d’une étude conduite auprès d’un échantillon de 40 sujets âgés de 35 à 45 ans, un modèle décrivant les périodes de transition survenant lors de cycles de vie structurés. En liant ce modèle au développement vocationnel de l’adulte, ces travaux laissent penser qu’une personne occupera dans un premier temps une succession d’emplois précaires. Ceux-ci lui permettront de se confronter à ses choix vocationnels et d’apprécier le marché de l’emploi. Dans un second temps, l’individu trouvera un poste stable, assimilable à une insertion réussie. Cette dernière s’inscrirait en conséquence dans un cycle constitué de périodes de transition, correspondant par exemple à une évolution de carrière, et suivi de périodes de stabilité au cours desquelles l’individu s’adapte au nouveau contexte au sein duquel il évolue.

De même, en s’inspirant des travaux de Neugarten (1979), il est possible de considérer l’insertion professionnelle comme une transition majeure de l’existence. Celle-ci serait alors un processus résultant « d’une interaction dynamique entre soi, l’environnement, et le temps personnel et social » (Fournier et al., 1992, p. 275). L’individu trouverait ainsi sa place sur le marché de l’emploi à la suite d’un compromis entre ses aspirations de carrière, ses aptitudes, et les exigences du monde du travail. Adoptant également un point de vue décrivant l’insertion professionnelle comme un processus linéaire, Laflamme (1984, p. 200), orientant ses travaux vers un public de jeunes diplômés, définit l’insertion professionnelle comme « une période de temps comprise entre la sortie du système d’enseignement et l’intégration au marché du travail et à un poste de travail relativement stable qui assure aux jeunes travailleurs la sécurité d’emploi et la garantie d’un revenu régulier ». Dans le cadre de travaux ultérieurs (1993), l’auteur propose un modèle de l’insertion professionnelle en trois étapes.

Tout d’abord, l’individu est engagé dans un cursus de formation qui prépare à l’entrée sur le marché du travail, par le biais de l’acquisition de diplômes, de compétences professionnelles, d’aptitudes sociales et de l’ensemble des apprentissages effectués en milieu scolaire. Ensuite survient une étape de transition professionnelle, qui considère l’environnement de l’individu (marché de l’emploi, situation économique, etc…) ainsi que la valeur de son parcours académique. Concrètement, une transition professionnelle sera selon cette conception d’autant plus efficace que l’individu s’est engagé dans un cursus de formation porteur lui offrant l’opportunité de travailler dans un secteur d’activité favorable à l’embauche. Enfin, la dernière étape du modèle se rapporte à l’intégration professionnelle de l’individu, en considérant l’adaptation aux nouvelles conditions de vie liées au succès de l’insertion professionnelle.

Abordant également la problématique de l’insertion professionnelle d’un point de vue transitionnel, Riverin-Simard (1984) assimile l’entrée dans la vie professionnelle et le départ en retraite à « deux transferts planétaires » se rapportant au développement vocationnel de l’individu. L’auteur évoque ainsi un « univers vocationnel » représentant la « trajectoire vocationnelle au fil des âges » (p. 20) et incluant trois « planètes » (la planète « école » ; la planète « travail » ; la planète « retraite ») symbolisant différentes « étapes spécifiques qui sont autant de passages prévisibles du vécu occupationnel » des individus. Il s’agit ici d’envisager les différentes étapes du développement vocationnel, en assimilant chacune d’entre elles à un apprentissage donnant l’opportunité à l’individu de se confronter à son environnement. Ce modèle avance la mise en place chez l’individu, à différents moments de la vie, de stratégies d’adaptation afin d’identifier « ses capacités et compétences qui lui permettront de réaliser un développement vocationnel » (p. 43). Ce dernier est ainsi envisagé comme « une réalité permanente qui se présente tout au long de la vie » (p. 134). Riverin-Simard (1984) assimile une insertion professionnelle réussie à la qualité de l’ajustement effectué par l’individu tout au long de sa vie entre ses aspirations, ses exigences, ses limites et les contraintes liées au marché de l’emploi ou plus globalement, à son environnement. Ces différentes approches théoriques s’appliquent à l’insertion professionnelle en la présentant globalement comme une succession d’étapes relativement courtes à franchir avec succès entre un parcours scolaire ou de formation et l’entrée sur le marché du travail. Comme le note Dubar (2001, p. 24), ces modèles pouvaient refléter les parcours d’insertion au cours des Trente Glorieuses, puisque « le passage de l’école ou de l’université à l’emploi s’effectuait, pour la grande majorité des jeunes, sans problème particulier, de manière quasi instantanée ». Or, les évolutions des caractéristiques du travail inhérentes à celles des contextes politiques et économiques actuels rendent désormais délicate l’élaboration de stratégies stables autour d’un projet professionnel unique et inscrit dans la durée. En effet, le concept de carrière, « au lieu d’être associé à la sécurité, à la stabilité, à la continuité ou à la progression réfère davantage à l’incertitude, à l’imprévisibilité, à l’insécurité, à la mobilité accrue, au travail autonome et à temps partiel » (Gingras, 2005, p. 116). Concrètement, la vie professionnelle est désormais ponctuée de formations, de perte d’emploi, de réorientations, de recherche d’emploi, etc…, qui correspondent à autant de transitions professionnelles. Comme le note Bachelart (p. 109, 2002), celles-ci peuvent ainsi s’opérer « au sein de l’emploi (temps partiel/temps plein, travail salarié/travail indépendant) ; entre formation et emploi ; entre chômage et emploi ; entre emploi et activités socialement utiles et l’inverse ; entre emploi et retrait d’activité ».

Or, au regard des multiples alternances entre chômage et emplois plus ou moins précaires auxquelles sont confrontés de nombreux actifs de nos jours, force est de constater que les différentes conceptions de l’insertion professionnelle évoquées ci-dessus ne correspondent plus à la réalité socio-économique actuelle, se limitant à la réduire à l’obtention d’un emploi. Dubar (2001, p. 34) avance ainsi que l’insertion devrait être « analysée comme la résultante d’interactions complexes », intervenant d’une part à un niveau institutionnel par le biais des politiques de l’emploi et du contexte économique, et d’autre part à un niveau individuel, en se rapportant aux conduites des individus.

Allant en ce sens, nous allons maintenant évoquer les modèles abordant l’insertion professionnelle selon une approche multidimensionnelle.

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Table des matières

INTRODUCTION
Chapitre 1 – Insertion professionnelle et accompagnement : cadres théoriques
1.1 – L’insertion professionnelle : différents modèles
1.1.1 – L’insertion professionnelle : une approche transitionnelle
1.1.2 – L’insertion professionnelle : une approche multidimensionnelle
1.2 – L’accompagnement : un outil au service de l’insertion professionnelle ?
1.2.1 – Que signifie accompagner ?
1.2.2 – Les conceptions théoriques de l’accompagnement professionnel
Chapitre 2 – Accompagnement professionnel : les dispositifs et leurs effets
2.1 – L’accompagnement en orientation professionnelle
2.1.1 – Les structures d’aide à l’orientation au profit des lycéens et des étudiants
2.1.2 – Les dispositifs d’accompagnement à destination des salariés
2.1.3 – Les effets du conseil en orientation professionnelle
2.2 – L’accompagnement professionnel à destination de demandeurs d’emploi
2.2.1 – Généralités
2.2.2 – Le suivi des demandeurs d’emploi : une volonté de renforcer les dispositifs
2.2.3 – Le profilage des demandeurs d’emploi
2.2.4 – Les parcours individualisés de retour à l’emploi
2.3 – Les prestations d’accompagnement dispensées par les services publics de l’emploi
2.3.1 – Présentation des dispositifs
2.3.2 – Evaluation des effets des dispositifs d’accompagnement de la recherche d’emploi
Chapitre 3 – Dimensions psychologiques et insertion professionnelle
3.1 – Les dimensions « modératrices » lors d’un accompagnement à la recherche d’emploi
3.1.1 – L’employabilité
3.1.2 – Le sentiment d’efficacité personnelle
3.1.3 – La détresse psychologique
3.1.4 – L’estime de soi
3.2 – Les variables « explicatives » lors d’un accompagnement à la recherche d’emploi
3.2.1 – Le soutien social
3.2.2 – L’indécision vocationnelle
3.2.3 – Mobilisation des ressources psychologiques lors d’une transition de carrière
3.3 – Les variables « résultats » lors d’un accompagnement professionnel
3.3.1 – La dynamisation des bénéficiaires
3.3.2 – La satisfaction des bénéficiaires de l’accompagnement
Chapitre 4 : Contours théoriques d’un accompagnement différencié
4.1 – L’individualisation des dispositifs d’insertion professionnelle
4.2 – La formalisation d’un conseil différencié
4.2.1 – Le conseil adaptatif
4.2.2 – La catégorisation des problématiques vocationnelles de bénéficiaires d’accompagnement professionnel
4.2.3 – Attentes et représentations
4.2.4 – L’approche ATI
CONCLUSION

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