Le système vasculaire
L’arbre vasculaire est un réseau complexe et ramifié . Il comprend à la fois une voie afférente constituée par les artères. Les artères sont des vaisseaux sanguins de gros calibre qui distribuent le sang depuis le cœur vers les organes. Elles ont pour rôle d’apporter le sang et les nutriments dans la totalité de l’organisme. Les voies efférentes, constituées par les veines transportent quant à elles le sang et les déchets métaboliques depuis les organes vers le coeur.
Les artères sont constituées de trois couches [Adams and Alitalo, 2007]. La couche interne ou intima est un endothélium en contact avec le sang. La couche intermédiaire ou média est recouverte de cellules de muscle lisse qui lui confère son élasticité. Cette zone peut se dilater et se contracter pour adapter la pression du flux sanguin. La troisième couche périphérique rigide ou adventice est constituée de collagène. Les veines ont une paroi fine et extensible et contrairement aux artères, elles sont recouvertes par peu de cellules de muscle lisses [Cleaver and Melton, 2003] . Les veines comportent également des valves constituées de tissu conjonctif et de cellules endothéliales qui orientent le flux sanguin et permettent le retour veineux des organes vers le coeur.
Le réseau lymphatique contribue également à la circulation des nutriments et des hormones, au drainage des fluides et participe au transport des cellules immunitaires. De plus, en fonction des besoins de l’organisme, le réseau vasculaire peut adapter le débit sanguin dirigé vers les tissus. C’est par ces réseaux que différents messagers moléculaires tels que les hormones et les cytokines sont véhiculés et distribués dans le corps.
La vasculogenèse
Durant l’embryogenèse, c’est à partir du développement du cœur à un stade très précoce (E6.5 chez la souris) que se forme le réseau vasculaire. Pendant la phase de vasculogenèse, l’assemblage en îlots de précurseurs endothéliaux dérivés du mésoderme (angioblastes) [Byrd and Grabel, 2004] donne naissance à un labyrinthe vasculaire primitif [Risau and Flamme, 1995] [Coultas et al., 2005].
Au cours du développement, le sac vitellin est le premier site d’apparition des vaisseaux sanguins. Les cellules endothéliales apparaissent dans les tissus mésodermiques des régions intra et extra‐embryonnaires et dans des îlots sanguins du sac vitellin. Les hémangioblastes au centre de la structure du sac vitellin donnent naissance par leur différenciation aux progéniteurs hématopoïétiques qui composent les îlots sanguins. Les hémangioblastes à la périphérie de ces îlots se différencient en angioblastes et sont à l’origine des cellules endothéliales. Les facteurs de croissance tels que le VEGF (Vascular Endothelial Growth Factor) ou le FGF‐2 (Fibroblast Growth Factor) permettent la migration et l’organisation des cellules endothéliales qui vont s’anastomoser pour former le plexus capillaire primaire.
Par ailleurs, au niveau du mésoderme embryonnaire, les cellules endothéliales issues de la différenciation des angioblastes migrent et forment les principaux vaisseaux de l’embryon : l’aorte et la veine cardinale. Par la suite, ces deux sites de vasculogenèse (embryonnaire et du sac vitellin) se connectent pour former un réseau vasculaire composé de tubes endothéliaux intra et extra‐embryonnaires. Durant cette phase embryonnaire, le réseau vasculaire est relativement instable. Il va progressivement se développer et se ramifier,s’étendre dans tout l’organisme et se stabiliser. Ce sont les premiers battements du cœur qui initient la circulation sanguine. Ceci entraine le remodelage de ce plexus vasculaire primaire en un arbre vasculaire hiérarchisé composé d’artères, de veines et de capillaires.
L’angiogenèse
La cellule endothéliale
La cellule endothéliale est le premier acteur de l’angiogenèse. Sa plasticité cellulaire lui permet d’acquérir des phénotypes différents en fonction des signaux qu’elle perçoit. Les cellules endothéliales sont les cellules qui tapissent la paroi interne des vaisseaux lymphatiques et sanguins. Ces cellules constituent l’endothélium vasculaire, la paroi la plus interne des vaisseaux sanguins en contact direct avec le flux sanguin. Dans les vaisseaux sanguins, les cellules endothéliales sont aplaties, allongées dans le sens du flux sanguin, et constituent une monocouche jointive : l’endothélium [Aird, 2007a]. Les cellules endothéliales quiescentes ont une durée de vie longue (de l’ordre d’une année), elles sont longues d’une centaine de µm, large d’une dizaine et épaisse de 0,5 µm. Elles sont également polarisées, la face apicale est dirigée vers la lumière du vaisseau alors que la face basale est quant à elle fixée à la lame basale qui lui confère une résistance mécanique.
L’endothélium
Dans l’organisme humain, l’endothélium couvre une surface importante de plusieurs centaines de m² de sorte que chaque cellule de chaque tissu ne se trouve qu’à quelques µm d’un capillaire sanguin. Il s’agit donc d’un tissu très abondant dans l’organisme qui constitue le réseau microvasculaire, particulièrement dense et extrêmement ramifié. Les capillaires fonctionnent comme une barrière entre le sang et les organes en permettant et contrôlant les échanges des molécules et des protéines. La perméabilité basale permet les échanges de petites molécules telles que l’eau, les gaz, et les solutés. Mais l’endothélium vasculaire présente une grande hétérogénéité histologique en fonction de l’environnement tissulaire. On peut distinguer trois types différents d’endothélium en fonction du lit vasculaire, différant dans leur fenestration: continu, fenêtré et discontinu (ou sinusoïdal) [Aird, 2007b] .
Le lit capillaire continu est décrit comme tel car les cellules endothéliales qui le constituent sont jointives et laissent passer uniquement l’eau et les sels à travers des espaces intercellulaires, les macromolécules étant quant à elles transportées par des canaux transendothéliaux par transcytose. L’endothélium continu se retrouve dans les gros vaisseaux, les artérioles et les veinules qui alimentent les organes tels que le cœur, la peau, les muscles et les poumons. L’endothélium fenêtré se trouve dans les glandes endocrines, les glomérules du rein, la muqueuse intestinale et le pancréas. La fonction de ces organes nécessite un passage important et efficace des fluides. Les cellules endothéliales de ce lit capillaire sont fixées sur une lame basale et présentent des pores (fenêtres) d’un diamètre de 60 à 80 nm qui permettent en plus du passage de l’eau et des solutés, la diffusion de certaines protéines et de macromolécules.
L’endothélium discontinu se retrouve dans la rate, la moelle osseuse et les sinusoïdes du foie [Nagy et al., 2008] où les échanges avec le sang sont importants. Contrairement aux deux précédents lits vasculaires, celui‐ci se caractérise par une absence de lame basale et le contact direct de cellules épithéliales des parois vasculaires avec la lumière du vaisseau à travers des ouvertures de 30 à 40 µm. Si la principale fonction de l’endothélium est donc de permettre les échanges entre les différents organes et le réseau sanguin, il a également d’autres fonctions [Aird, 2007a]. Il contrôle notamment l’hémostase par la sécrétion de facteurs pro ou anticoagulants, mais également le tonus vasomoteur dans les artérioles, l’angiogenèse, la pression osmotique tissulaire, la perméabilité vasculaire et est impliqué dans les processus inflammatoires.
A l’âge adulte, l’endothélium est quiescent. Mais les fonctions prolifératives et migratoires des cellules endothéliales peuvent être réactivées sous l’influence de facteurs environnementaux pro‐angiogènes.
Les mécanismes de l’angiogenèse
Dans la phase d’angiogenèse qui suit la vasculogenèse, la formation de nouveaux vaisseaux à partir du plexus vasculaire primitif permet le développement d’un réseau d’artères et de veines. L’angiogenèse se définit comme étant la formation de néo‐vaisseaux à partir d’un réseau vasculaire préexistant ([Risau, 1997]; [Geudens and Gerhardt, 2011]). Par la suite, le recrutement de péricytes (pour les capillaires et les petits vaisseaux) et de cellules de muscle lisse (pour les vaisseaux de gros calibre) permet d’assurer la stabilité et la perfusion de ces néo vaisseaux. Si l’angiogenèse est un phénomène très actif au cours du développement, c’est un évènement rare chez l’adulte où l’endothélium est quiescent avec un faible renouvellement des cellules endothéliales. Mais le processus angiogène peut être réactivé sous l’effet de facteurs pro‐angiogènes. De manière physiologique, c’est le cas lors du cycle menstruel chez la femme, au cours des processus de cicatrisation, de réparation cellulaire (ischémie tissulaire, cardiaque ou des membres inférieurs) ou encore pendant la grossesse. L’angiogenèse est également impliquée dans de nombreuses pathologies. Une angiogenèse est observée dans les cancers, dans le diabète, le psoriasis mais aussi dans certaines pathologies oculaires telles que la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) et dans des pathologies auto‐immunes. Dans ces conditions, les vaisseaux néoformés présentent des défauts d’organisation structurelle, et sont peu fonctionnels.
Deux mécanismes distincts d’angiogenèse peuvent avoir lieu :
L’angiogenèse par intussusception
L’angiogenèse par bourgeonnement .
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Table des matières
INTRODUCTION
1 LE SYSTEME VASCULAIRE
1.1 LA VASCULOGENESE
1.2 L’ANGIOGENESE
1.2.1 La cellule endothéliale
1.2.2 L’endothélium
1.3 LES MECANISMES DE L’ANGIOGENESE
1.3.1 L’angiogenèse par intussusception
1.3.2 L’angiogenèse par bourgeonnement
1.3.2.1 Phase d’activation
1.3.2.2 Phase de maturation
1.4 PRINCIPAUX ACTEURS DE L’ANGIOGENESE
1.4.1 L’hypoxie
1.4.2 Les facteurs angiogènes
1.4.2.1 Le VEGF (Vascular Endothelial Growth Factor) et ses récepteurs
1.4.2.1.1 Les ligands
1.4.2.1.2 Les récepteurs
1.4.2.2 La voie Notch/Dll4
1.4.2.3 Le FGF‐2 (Fibroblast Growth Factor‐2)
1.4.2.4 Les intégrines, molécules d’adhésion
1.4.2.5 La VE‐Cadhérine et les jonctions endothéliales
1.4.2.6 Autres facteurs et récepteurs impliqués dans l’angiogenèse
2 SIGNALISATION DES RECEPTEURS TYROSINE‐KINASES : CAS PARTICULIER DU VEGFR‐2
2.1 ACTIVATION DU RECEPTEUR
2.2 REGULATION DE LA SIGNALISATION PAR ENDOCYTOSE
2.3 ROLE DES PROTEINES ADAPTATRICES
2.3.1 Recyclage
2.3.2 Dégradation
2.3.3 Clivage protéolytique
2.4 ROLES DES PROTEINES TRANSMEMBRANAIRES, CORECEPTEURS (NRP1, EPHB2, VEGFR‐3…)
2.4.1 L’EphrineB2 et les Héparanes sulfates
2.4.2 Les Neuropilines
2.5 ROLES DES PARTENAIRES CYTOPLASMIQUES
2.6 ROLES DES MOLECULES D’ADHESION (VE‐CADHERINE, OCCLUDINE)
2.7 SIGNALISATION INTRACELLULAIRE
2.8 VOIES DE SIGNALISATION IMPLIQUEES
2.8.1 Phosphorylation sur la tyrosine 1175
2.8.1.1 Voie de la kinase d’adhérence focale (FAK)
2.8.1.2 Voie ERK
2.8.1.2.1 Régulation de Ras
2.8.1.2.2 Régulation de Raf
2.8.2 Phosphorylation sur la tyrosine 1214
2.8.3 Phosphorylation sur la tyrosine 951
2.8.4 Phosphorylation sur les tyrosines 1054 et 1059
2.8.5 La voie des lipides
3 LES TRAITEMENTS ANTI‐ANGIOGENES
3.1 IMPLICATIONS DE L’ANGIOGENESE EN PATHOLOGIE
3.2 PRINCIPES DES TRAITEMENTS ANTI‐ANGIOGENES
3.3 LE VEGF, ACTEUR MAJEUR ET CIBLE DE L’ANGIOGENESE TUMORALE
3.3.1 Inhibiteurs des tyrosinekinases
3.3.2 Les VDAs (Vascular Disrupting Agents)
3.3.3 Autres cibles thérapeutiques
3.4 LIMITATIONS DES TRAITEMENTS ANTI‐ANGIOGENES ACTUELS ET NECESSITE D’ALTERNATIVES
4 LES MODELES D’ANGIOGENESE IN VITRO ET IN VIVO
4.1 TESTS D’ANGIOGENESE IN VITRO
4.1.1 Blessure d’une monocouche endothéliale
4.1.2 Test de migration en chambre de Boyden
4.1.3 Tubulogenèse sur matrice
4.1.4 Bourgeonnement tridimensionnel de sphéroïdes endothéliaux
4.1.5 Bourgeonnement endothélial après différenciation de cellules souches embryonnaires murines
4.1.6 Limites des tests d’angiogenèse in vitro
4.2 TESTS D’ANGIOGENESE IN VIVO : IMPLANTATION D’EPONGE CHEZ DES SOURIS
4.3 AUTRES TESTS D’ANGIOGENESE IN VIVO
5 CRIBLAGE A HAUT DEBIT POUR L’IDENTIFICATION DE NOUVELLES MOLECULES A POTENTIEL THERAPEUTIQUE
5.1 INTRODUCTION AU CRIBLAGE
5.2 CRITERES D’ELIGIBILITE D’UN CRIBLAGE
5.3 CHOIX D’UNE CHIMIOTHEQUE
5.4 LES RESULTATS OBTENUS
5.5 PERSPECTIVES
OBJECTIFS DU TRAVAIL
RESULTATS
CONCLUSION