Télécharger le fichier pdf d’un mémoire de fin d’études
Moyen-Âge : 476 à 1492
Au VIIe siècle, les astrologues arabes lièrent la mélancolie (qui est, rappelons-le, liée à la bile noire) à la couleur de Saturne. Saturne aurait une influence néfaste sur l’humeur. De plus, les Babyloniens auraient fait de cet astre la plus puissante des planètes.
Ainsi, durant cette période, on assiste à une prédominance de la magie et de la religion sur la médecine. Les signes de dépression sont alors vus comme des péchés. Ce serait une remise en question de la miséricorde divine. Au XIIIe siècle, Saint Thomas d’Aquin définit l’acedia comme une « tristesse accablante qui produit dans l’esprit de l’homme une dépression telle qu’il n’a plus envie de faire quoi que ce soit, à la manière de ces choses qui, mordues par l’acide, deviennent toutes froides : et c’est pourquoi l’acedia produit un dégoût de l’action. ». Cette acedia est intégrée dans la liste des sept péchés capitaux à la place de la tristesse et en la redéfinissant comme « une tristesse de Dieu ». L’acedia est un péché spirituel dont le corps n’est que l’instrument.
A cette période, le suicide était considéré comme un crime3. Effectivement, il représente encore une fois le doute de la Miséricorde divine, la conviction de ne pouvoir être sauvé. La main du suicidaire était guidée par le diable. Enfin, la conduite du suicidaire aurait une conséquence sur les proches comme par exemple le rejet social et le châtiment.
Temps moderne : 1492 – 1789
Durant la Renaissance, on revient vers un aspect médical. Cependant, seules les formes les plus bruyantes et spectaculaires de mélancolie auront un intérêt médical. Les formes les plus discrètes ne seront abordées que dans les domaines plus artistiques ou philosophiques. Il s’agit désormais d’un mal et non plus d’une punition divine. Paul Zacchias (1584 – 1659), médecin légiste du pape Innocent X, voyait le mélancolique soit comme une malade qui délirait sur un seul objet, soit comme un hypocondriaque qui ne délirait pas du tout. Daniel Sennert (1572 – 1637), médecin allemand, estimait que la mélancolie était une concentration de l’âme sur une seule idée, il pouvait donc existait des mélancolies gaies.4
Temps contemporains : 1789 – 1957
On assiste au XIXe siècle à l’indépendance de la psychologie. L’œuvre de Philippe Pinel (1745-1826), célèbre savant français, est encore aujourd’hui d’actualité et représente une révolution dans la représentation des maladies mentales. Son traité médico-philosophique posera les bases d’un traitement se voulant plus humain, basé sur l’écoute, un traitement moral. Avant lui, on considérait les « aliénés » comme incurables, comme des personnes à isoler dans des asiles et même dans des prisons. Ces asiles furent créés par Louis XIV pour mettre à l’écart tous types de « marginaux ». Pinel su s’adresser à l’homme derrière « l’aliéné ». Il affirma que ces sujets ne devaient être punis mais qu’ils étaient des malades dont l’état nécessite les égards. En effet, ces malades étaient contraints de porter des chaînes et subissaient nombreuses répressions/punitions. Ces « chaînes qui les attachaient à leurs loges comme des chiens à leurs niches »5 furent ainsi enlevées.
Jean-Etienne Esquirol (1772-1840), élève de Pinel, est le premier clinicien sensible à la souffrance du malade psychiatrique. En 1838, il publie son traité : Des maladies mentales considérées sous le rapport légal médical, hygiénique et médico-légal qui sera le premier ouvrage français entièrement consacré aux maladies mentales et constituera la base des connaissances en psychiatrie une partie du XIXe siècle. Il séparera la mélancolie antique en deux termes : la monomanie et la lypémanie.
• Monomanie : délire partiel avec idée fixe prévalente.
• Lypémanie : forme de monomanie accompagnée de tristesse.
C’est de cette dernière qu’est née notre définition actuelle de la dépression. Bien que le terme de lypémanie soit tombé en désuétude, son contenu est toujours d’actualité.
« Dans la lypémanie, les traits de la face sont immobiles, ou crispés et concentrés ; les yeux sont fixes, le regard est inquiet ; le jaune ou pâle. Les lypémaniaques sont en proie à des idées tristes, douloureuses ; ils sont craintifs, féfiants, soupçonneux, recherchent la solitudes. […] Se refusent à tout exercice, parlent peu ; toutes leurs fonctions se font péniblement et avec lenteur »6.
Au milieu du XIXe siècle, le terme « dépression » apparaît. Effectivement, Emil Kraeplin (1856-1926), psychiatre allemand, introduit le terme de « maniaco-dépression » pour évoquer l’alternance d’épisodes de dépression et d’agitation maniaque. Cela marquera la distinction entre les troubles de l’humeur et la schizophrénie. Il ne put mettre en évidence des lésions cérébrales bien spécifiques chez des patients souffrant de ce trouble de l’humeur. Cependant, il maintient l’idée selon laquelle cette psychose apparaît uniquement à cause d’un caractère endogène présent chez le psychotique (et plus particulièrement son hérédité) : l’influence du milieu extérieur et de la société dans la genèse des maladies mentales est totalement exclue à cette époque. Donc, l’aliéné est un individu malade qu’on ne peut traiter car sa maladie est endogène.
Arrivée des médicaments antidépresseurs : 1957 – aujourd’hui
Au milieu du XXe siècle, le psychiatre français Jean Delay (1907-1987) développe la première théorie biologique de l’humeur. Il y aura alors distinction entre les « dépressions endogènes » et « psychogènes ». Ces dernières sont moins sévères que les premières, elles surviennent en réaction à des évènements de vie négatifs, ou viennent compliquer des désordres psychodynamiques prédisposants. En d’autre terme, les dépressions « psychogènes » auraient en partie pour cause l’environnement social/extérieur. Cette distinction semble être le parfait compromis : les dépressions endogènes répondent aux avancées modernes de la biologie/génétique et les dépressions psychogènes aux théories psychodynamiques du début du siècle.
En 1957, la découverte des antidépresseurs va venir bouleverser les conceptions éthiopathogéniques. En effet, l’iproniazide révélera des propriétés euphorisantes chez des patients atteints de tuberculose et marquera la découverte de molécules aux vertus thérapeutiques sur les symptômes de la dépression. L’amitryptiline et l’imipramine seront des molécules pionnières, utilisées avec succès chez les patients déprimés. Elles seront d’ailleurs efficaces sur tous les types de dépressions et remettront ainsi en doute la dichotomie avancée par Delay. En outre, la théorie biologique de l’humeur de Delay sera abandonnée progressivement jusqu’à l’apparition des classifications officielles c’est à dire vers le début des années 1980. Mais, ces traitements montreront leurs limites et d’autres moyens thérapeutiques prouveront leur efficacité.
Les classifications modernes des troubles mentaux (DSM et CIM) tenteront de classer de façon purement descriptive. Cependant, elles proposeront un langage commun pour la communauté internationale scientifique. Environ cent ans après l’apparition du « trouble maniaco-dépressif », le terme de « dépression » seul apparaît. Leonhard différencie pour la première fois les troubles bipolaires des troubles unipolaires de l’humeur dont la dépression.7
Définition
Classification
Comme évoqué dans le I.4., les classifications antérieures distinguaient les différents types de dépression selon un modèle éthiopathogénique. La nosographie actuelle, quant à elle, se base sur des critères de diagnostic. De nos jours, les deux principales classifications en vigueur sont :
• Le Manuel Diagnostique et Statistique des troubles mentaux ou DSM. Il est publié par l’Association Américaine de Psychiatrie. L’édition actuelle, la cinquième, fut publiée en 2013. Elle constitue la classification de référence pour toute publication internationale.
• La Classification Internationale des Maladies ou CIM est publiée par l’Organisation mondiale de la santé. L’édition actuelle, la onzième, est publiée en 2019 mais sera effective le 1er janvier 2022. On se basera alors sur la dixième version. Elle est très utilisée en Europe.
Dépistage en France
Selon la Haute Autorité de Santé (HAS), 40 % des personnes souffrant de dépression ne recourent pas aux soins dans notre pays10. Or, la dépression a des de réels effets délétères. La principale cause de mortalité liée à une dépression est le suicide. Près de 70 % des personnes qui décèdent par suicide souffraient d’une dépression, le plus souvent non diagnostiquée ou non traitée11. Selon l’OMS, la France est l’un des pays le plus touché par le suicide dans le Monde. L’impact de cette pathologie est donc particulièrement néfaste en termes de pronostic fonctionnel et vital.
Ensuite, lorsque la dépression est bien diagnostiquée, on observe souvent une mauvaise utilisation des antidépresseurs. Ils sont en effet trop prescrits pour des dépressions légères et pas assez pour les dépressions sévères ou encore non associés à la psychothérapie ni à un suivi ultérieur10.
Le médecin généraliste est le premier professionnel consulté en cas de troubles dépressifs et ce loin devant les psychiatres ou encore les psychologues. Parfois c’est le seul recours, dans des territoires où les spécialistes sont rares. Ce professionnel de santé possède à sa disposition beaucoup de traitements efficaces. Malgré cela, moins d’une personne souffrant de dépression sur quatre ayant consulté est diagnostiquée et traitée de façon appropriée12.
La HAS, dans le cadre de son programme « Psychiatrie et santé mentale », publie en 2013 une recommandation à destination des médecins généralistes, pour améliorer le repérage et la prise en charge de la dépression, en collaboration avec les spécialistes pour les cas complexes. La dernière version fut mise à jour en octobre 202013.
Épidémiologie
Prévalence de la dépression dans le Monde
Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, 25 % de la population mondiale souffre de dépression ou d’anxiété chaque année14.
Une étude réalisée en 201815, incluant plus d’un million de personnes provenant de l’Asie, l’Afrique, l’Australie, l’Amérique du Nord et du Sud et d’Europe calcula la prévalence de la dépression entre 1994 et 2014. Cette dernière confirme les chiffres annoncés par l’OMS. Selon cette étude :
• Prévalence ponctuelle de la dépression : 12,9 %
• Prévalence sur un an : 7,2 %
• Prévalence sur la vie entière : 10,8 %
Les femmes seraient plus sujettes à la dépression (14,4%) ainsi que les populations vivant dans un pays dont l’indice de développement humain est moyen voire faible (29,2%). Enfin le risque de rechute est estimé à 80 % à 5 ans.
Toujours selon l’OMS, 50 % des congés de maladie de longue durée sont imputables à la dépression et à l’anxiété. De plus, environ 50 % des dépressions majeures ne seraient pas traitées14.
Prévalence de la dépression en France
Concernant les données de prévalence de la dépression en France, nous nous appuierons sur la revue systématique suivante : Prévalence de la dépression majeure en France en population générale et en population spécifique de 2000 à 201816. Cet ouvrage regroupe les recherches de 2000 à 2018. Pour pouvoir être inclus, les articles devaient concerner uniquement le diagnostic d’épisode dépressif majeur en dehors d’un trouble bipolaire de l’humeur, d’une schizophrénie ou tout autre trouble neuropsychiatrique à l’exception des comorbidités anxieuses. Ensuite, ces différents articles ont été classés entre « population générale » et « populations spécifiques » au sein desquelles les populations cliniques ont été isolées. Le suicide n’a pas été exploré car il est identifié dans le DSM-5 comme un trouble indépendant bien que ce dernier soit augmenté de façon significative dans les troubles dépressifs.
Dans le cadre de cette thèse, nous nous intéresserons uniquement à la prévalence de la dépression dans la population générale.
Résultats dans la population générale
Le CIDI-SF (Composite International Diagnostic Interview – Short Form) est un questionnaire utilisé pour le diagnostic des troubles dépressifs. Il s’appuie sur le DSM. Il existe un autre outil de diagnostic : le MINI (mini international neuropsychiatric interview). S’il comprend moins de symptômes que le MINI, le CIDI-SF, est en revanche plus détaillé, puisqu’il n’enregistre pas que des réponses binaires, et permet notamment de déterminer avec précision les critères de fréquence et de durée pour les deux symptômes principaux, l’humeur dépressive et la perte d’intérêt17.
D’après la revue systématique, les prévalences d’épisodes dépressifs majeurs EDM dans la population générale varient selon les enquêtes. Les enquêtes Anadep et celle ménée dans le Baromètre Santé utilisent toutes les deux le CIDI-SF comme outil et étudient les 15-75 ans comme populations. Elles se différencient par la taille de l’échantillon, plus important pour l’Anadep. Les prévalence étaient de 7,8% pour l’Anadep et de 5% pour le Baromètre Santé. Les autres enquêtes étudiées ici se basent sur la mise en route d’un traitement antidépresseur/hospitalisation et non sur le diagnostic. Ceci représente un biais important et explique la différence de prévalence mesurée.
Conclusions
Cette revue systématique permet de souligner que la prévalence de la dépression était estimée, dans la population générale, à 8% dans les années 2000. Dans les années 2010, cette estimation atteint les 10%. Attention, n’oublions pas qu’il existe des variations selon les critères et les outils retenus pour cette étude. Dans tous les cas, on peut remarquer que la prévalence estimée pendant les années 2000 était proche de la prévalence mondiale de la dépression : 8%. Ainsi, cela suggérait que la France se situait dans la moyenne mondiale en terme de prévalence de la dépression à cet instant. Or, elle pourrait aujourd’hui dépasser cette moyenne (10% vs 7,8%) alors qu’elle compte parmi les pays les plus riches et les plus développés du globe.
Attention, les données extraites des bases nationales retrouvent des prévalences inférieures (< 2%) du fait de leurs critères plus restrictifs comme vu au dessus (hospitalisations, traitements médicamenteux…).
En somme, les données concernant le trouble dépressif majeur en France restent insuffisantes aujourd’hui. Or, toutes ces données sont nécessaires à la mise en place d’une politique de santé efficace.
Etiopathogénie
À ce jour, nous ne connaissons pas avec exactitude l’étiologie de la dépression. Cependant, il existe différentes hypothèses qui ne permettent pas d’expliquer à elles seules l’ensemble des phénomènes de la dépression : c’est une maladie multifactorielle dans laquelle se mélangent des éléments biologiques, psychologiques et environnementaux. Un bref résumé de certaines de ces hypothèses est présenté ci-dessous.
Le modèle psychoanalytique
Cette théorie s’articule autour de la notion de perte/traumatismes/frustrations qui rendent le sujet vulnérable à une possible rupture dépressive. Il est vrai que la dépression se produit souvent suite à un événement difficile, mais elle est le résultat d’une lente accumulation non perceptible. Une fois apparente, un travail psychothérapeutique permet de mettre le doigt sur un vécu complexe rempli de déceptions, désirs ensevelis et inaccessibles à la conscience.
Dans son ouvrage Deuil et mélancolie (1915), Freud oppose ces deux notions, le deuil et la mélancolie. En effet, il décrit le deuil comme la réaction face à la perte d’un « objet » reconnu par l’individu alors que dans le cas de la mélancolie « l’objet » perdu n’est pas consciemment identifié. De cette manière, dans le cas de la mélancolie, le sujet sera incapable de réinvestir son énergie affective dans un nouvel « objet ». Plus tard, le célèbre fondateur de la psychanalyse proposa un spectre des troubles dépressifs allant du deuil à la mélancolie18 :
a) Deuil = état dépressif normal consécutif à la perte d’une personne. C’est un état réversible plus ou moins long selon l’individu lui-même. L’énergie qui se libère au renoncement progressif des liens avec l’être perdu peut être réinvestie dans de nouveaux projets19.
b) Dépression névrotique = des mécanismes de défense accompagnent les symptômes habituels et classiques. Ce sont des mécanismes phobico-anxieux ou encore obsessionnels.
c) Dépression caractérisée = elle s’accompagne souvent d’idées suicidaires ou d’autres méthodes de défense qui diffèrent des névrotiques. De fait, il aura tendance à se faire du mal, physiquement ou psychologiquement.
d) Mélancolie = alternance d’épisodes mélancoliques et maniaques. Le sujet sera incapable d’accepter la perte et niera la réalité. Il pourra alors choisir de suivre dans la mort ce dont il ne peut se séparer. C’est un état très destructeur.
Le modèle comportemental
Cette hypothèse repose sur l’importance des facteurs comportementaux et environnementaux sur la survenue d’une dépression. Elle distingue :
– Les événements traumatiques anciens (enfance/adolescence)
– les événements traumatiques récents (précède de le début de l’épisode dépressif). Ce modèle comportemental mène à la mise en évidence de facteurs psychosociaux favorisant l’apparition d’une possible dépression comme la pauvreté, le support social (l’absence de relation)18…
La notion importante de la théorie comportementale est celle du « renforcement »20. Dans les années 50, Skinner, psychologue américain, développe la théorie du renforcement : une personne sera plus susceptible de répéter un comportement qui fut renforcé de manière positive et/ou associé à des renforcements négatifs.
– Renforcement positif = conséquences considérées comme positives par le sujet (récompenses ou gratifications). Par exemple, donner un bonbon à un enfant qui a fait ses devoirs.
– Renforcement négatif = élimination des conséquences que le sujet considère comme négatives. Par exemple, lever la punition d’un enfant qui a eu une bonne note.
Ainsi d’après la théorie comportementale, une diminution (qualitative ou quantitative) des renforcements sociaux serait à l’origine de la dépression.
Le modèle cognitif
Le modèle cognitif le plus connu reste celui du psychiatre américain Aaron Beck qui explique que la dépression prend forme à causes de différents schémas et processus cognitifs qui entraînent des distorsions de la réalité. Les schémas cognitifs représentent l’ensemble des croyances et des convictions intimes qu’un sujet entretient sur lui-même et sur le monde.18 En 1979, il affirme que l’on retrouve chez les personnes souffrant de dépression une « triade cognitive »21. Cette dernière se caractérise par une vision négative de :
– soi-même : dévalorisation et manque de valeurs personnelles.
– milieu : interprétation toujours négative de tous types d’événements.
– avenir : aucune issue favorable possible.
Cette triade cognitive prend son origine dans des expériences passées négatives, qui restent latentes jusqu’à leur réactivation par un évènement similaire.
Le modèle biologique
Certaines dépressions apparaissent sans facteur psychique déclenchant.
Plusieurs pistes biologiques ont été suivies. Parmi celles-ci :
Dépression et rythme circadien
Le sujet souffrant de dépression verra sa symptomatologie plus marquée le matin et sera plus sensible à la lumière22. Ces deux constats sont le résultats d’une étude effectuée sur l’influence du rythme circadien sur la dépression. Le dépressif souffre alors d’une anomalie du rythme veille/sommeil, d’une diminution de l’apparition du sommeil paradoxal ainsi que du temps total de sommeil. Sa température nocturne est aussi augmentée.
Les rythmes circadiens les plus étudiés chez le sujet dépressifs sont les rythmes neuro-hormonaux. Ce qui ressort le plus est une hypercortisolémie et une modification du rythme circadien de la mélatonine. De fait, l’hormone responsable de l’endormissement voit sa sécrétion nocturne diminuée chez le patient dépressif.
Plusieurs hypothèses physiopathologiques sont étudiées afin de comprendre l’origine de ces différences entre le sujet euthymique et le dépressif. Premièrement, la dépression fut comparée à un isolement temporel dans lequel on observe cette même désynchronisation de rythmes biologiques. Néanmoins, certains déprimés voient leur humeur s’améliorer en isolement temporel. Deuxièmement, on dénote une anomalie de position de phase : les anomalies de rythmes biologiques et les modifications de l’architecture du sommeil témoigneraient d’une avance de phase (le sujet se couche très tôt et se lève très tôt). D’ailleurs, il semblerait que certaines dépressions soient améliorées par la modification des horaires de sommeil.
Cependant, cette avance de phase ne semble pas s’appliquer à tous les rythmes étudiés ou encore toutes les formes de dépression. Enfin, la perturbation de l’horloge interne pourrait être une explication partielle. Cette dernière est régie par la lumière au niveau du noyau suprachiasmatique. Ainsi, la lumière donne l’impulsion nécessaire à la production de mélatonine par la glande pinéale. Il existe plusieurs gènes au niveau de ce noyau, parmi eux, le gène Clock. Celui-ci pourrait avoir un rôle dans la préférence circadienne, les troubles du sommeil du sujet dépressif, l’âge du début des troubles ainsi que leur récurrence, la réponse à la privation de sommeil22…
Neurotransmetteurs, hormones et cytokines
Il est aujourd’hui, et depuis des années, avéré que la sérotonine, la noradrénaline ainsi que la dopamine sont des neurotransmetteurs impliqués dans la dépression. De ce fait, c’est sur ces monoamines que certains des antidépresseurs médicamenteux agissent23.
Ce défaut de neurotransmission médié par la sérotonine, la noradrénaline et la dopamine a longtemps été considéré comme le constituant majeur de l’apparition de la maladie dépressive. De fait, en 1965, différents effets indésirables observés chez certains médicaments ont permis d’arriver à ces conclusions. Par exemple, l’effet euphorisant de l’iproniazide (antituberculeux), inhibiteur de la monoamine oxydase, elle-même responsable de la dégradation de la sérotonine et de la noradrénaline entre autres. Ou encore l’apparition d’un syndrome dépressif chez les patients traités par la réserpine. Cet antidépresseur inhibe le transporteur des monoamines VMAT (Vesicular Monoamine Transporter).
Ainsi, le mécanisme des principaux antidépresseurs fut centré sur cette neurotransmission, par réduction de la recapture neuronale présynaptique de ces médiateurs ou par diminution de leur dégradation24.
Plus récemment, il a été démontré que d’autres neurotransmetteurs jouaient eux aussi un rôle dans la dépression. Effectivement, la balance GABA/glutamate est primordiale car elle influe sur la sécrétion du BDNF (Brain-Derived Neurotrophic Factor), un facteur essentiel à la prolifération, la différenciation et la survie des neurones. De ce fait, le déséquilibre de cette balance serait à l’origine d’une altération de la neuroplasticité chez le patient déprimé. Ce dernier serait donc en incapacité de reformer de nouveaux neurones25.
|
Table des matières
I. Introduction
Partie I : La dépression
II. La dépression dans l’Histoire
1. Antiquité : -3000 à 476
2. Moyen-Âge : 476 à 1492
3. Temps moderne : 1492 – 1789
4. Temps contemporains : 1789 – 1957
5. Arrivée des médicaments antidépresseurs : 1957 – aujourd’hui
III. Définition
1. Classification
2. L’épisode dépressif caractérisé
A. Description
B. Diagnostic
a DSM-5
b CIM-10
IV. Dépistage en France
V. Épidémiologie
1. Prévalence de la dépression dans le Monde
2. Prévalence de la dépression en France
A. Résultats dans la population générale
B. Conclusions
VI. Etiopathogénie
1. Le modèle psychoanalytique
2. Le modèle comportemental
3. Le modèle cognitif
4. Le modèle biologique
A. Dépression et rythme circadien
B. Neurotransmetteurs, hormones et cytokines
5. Modèle génétique
VII. Prise en charge et traitements
1. Schéma de prise en charge
2. Hygiène de vie
3. Psychothérapie
A. Naissance de la psychanalyse (Freud)
B. Thérapie cognitivo-comportementale – TCC :
C. Thérapies interpersonnelles – TIP :
4. Médicaments
5. Traitements physiques non médicamenteux
A. L’activité physique adaptée APA
B. Stimulation magnétique transcrânienne répétée – rTMS
C. Luminothérapie
D. Electroconvulsivothérapie
VIII. Modes évolutifs
1. Rémission et guérison
2. Récidive
3. Dépression résistante aux médicaments
A. Définition
B. Traitements
Partie II : Les antidépresseurs
I. Historique
II. Evolution de la consommation en France
III. Les différentes classes d’antidépresseurs
1. Inhibiteurs de la monoamine oxydase (IMAO)
2. Les imipraminiques ou tricycliques
3. Les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine
4. Inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline
5. Antidépresseur noradrénergique et sérotoninergique sélectif
6. Vortioxétine – Antidépresseur de type I(S)RS
7. Antidépresseur de type mélatoninergique
IV. Choix de l’antidépresseur
V. Évaluation de l’efficacité
VI. Tolérance
1. Effets indésirables spécifiques à la classe thérapeutique
A. IMAO
C. ISRS et ISRN
2. Les effets secondaires des antidépresseurs
A. Les effets secondaires les plus souvent rencontrés
a Nausées et vomissements
b Variation pondérale
c Troubles du sommeil et fatigue
d Dysfonctions sexuelles
B. Autres effets indésirables
C. Risques suspectés majeurs
a Risque de mortalité
b Risque suicidaire
c Risque du virage maniaque
D. Effets indésirables sur le long-terme
3. Syndrome d’arrêt des antidépresseurs
A. Définition
B. Manifestations cliniques
C. Différences entre les antidépresseurs
D. Traitement et prévention
Partie III : L’électroconvulsivothérapie
I. Historique
II. Représentation dans la culture cinématographique
III. Indications
1. Indications classiques
A. Dépression
B. Catatonie
2. Autres indications
A. Accès maniaques
B. Schizophrénies
C. Maladie de Parkinson
3. Mode opératoire
A. Consentement et information
B. Consultation d’anesthésie
C. Équipement anesthésique du site de réalisation de l’ECT
D. Préparation à l’ECT
a Anesthésie
b Curarisation
c Anticholinergique
E. Mise en place des électrodes
F. Dosage du stimulus
G. Contrôle de la crise comitiale
a Absence de crise
b Crise avortée
c Crise prolongée
H. Rythme d’administration
I. Traitement d’entretien
a ECT d’entretien
b Relai par traitements médicamenteux
4. Mécanismes d’action
A. La théorie anticonvulsivante
B. Action sur les neurotransmetteurs
C. Théorie neurotrophique
5. Contre-indications
A. Contre-indication absolue
B. Contre-indications relatives
6. Risques liés à l’anesthésie
7. Effets indésirables
A. Effets indésirables immédiats
B. Effets indésirables tardifs
a Troubles cognitifs
b Vécu subjectif du patient
Conclusion
Télécharger le rapport complet