L’optique intégrée : la technologie de demain ?
« Le concept d’optique intégrée existe depuis au moins 1969, date à laquelle le Bell Systems Technology Journal présenta les papiers de Marcatili et Goell (MAR69, GOE69). Ces papiers présentent une méthode complète d’analyse et de conception de guides d’onde, filtres et virages de guides. Ces travaux oubliés qui montraient la similarité avec les microondes prédisaient que l’ensemble des structures optiques pourrait être fabriqué avec des technologies planaires qui émergeaient alors pour la fabrication des circuits intégrés. L’optique intégrée, à l’époque, était considérée comme le candidat de choix pour remplacer les systèmes optiques discrets et potentiellement se combiner avec les systèmes électroniques. Trente ans plus tard, cette vision de l’optique intégrée n’a pas beaucoup évolué. L’optique intégrée reste encore la technologie de demain mais semble condamnée à le rester. »
Il y a dix ans, James Foresi (FOR97b) écrivait ces lignes en introduction de sa thèse. La situation semble avoir peu évolué depuis, bien que des premiers signes traduisent d’une attention grandissante des industriels pour la photonique. Ainsi, depuis le début des années 2000 des grands groupes comme Intel et IBM contribuent significativement aux recherches et aux développements des technologies photoniques (VLA04, MCN03). L’intérêt grandissant venant du constat que la microélectronique atteint aujourd’hui des limites : la loi de Moore qui stipule que tous les 18 mois la puissance des ordinateurs est doublée semble à l’horizon 2010-2020 buter contre des limites physiques. En effet, à mesure que la taille des transistors diminue et que leur vitesse de commutation augmente, plusieurs problèmes se posent : les courants de fuites, donc la consommation d’énergie augmentent avec la réduction des dimensions et l’augmentation des fréquences. De plus, lorsque la taille des composants diminue des effets quantiques apparaissent qui perturbent le fonctionnement normal des transistors. Enfin, les temps de propagation d’un bout à l’autre d’un microprocesseur deviennent du même ordre que la période d’horloge, inférieure à la nanoseconde.
L’ITRS (International Trend Roadmap in Semiconductors) qui définit les technologies à développer pour pouvoir suivre cette loi de Moore prévoit donc d’inclure des composants photoniques dans un avenir proche . L’idée à priori simple consiste à remplacer l’électricité, moyen de transport de l’information, par de la lumière. Les avantages aux premiers abords sont multiples : le temps de propagation se réduit, le multiplexage des données est rendu possible, la densité est fortement augmentée, le travail en connexion directe avec un réseau télécoms devient possible, etc. Cependant un certain nombre de difficultés apparaissent. Lorsque l’on raisonne sur l’ensemble de la chaîne de traitement de l’information, il y a quatre éléments clés : la modulation de lumière qui génère l’information, les fonctions optiques qui la traitent, les guides qui la transportent et la détection de celle-ci. L’ensemble de ces quatre points au final présente un bilan global de performances qui à l’heure actuelle ne suffit pas à justifier le remplacement des composants électroniques.
Du point de la physique la problématique commune de ces 4 fonctions réside dans l’interaction entre la lumière et la matière. Cette interaction permet de contrôler la lumière pour différentes fonctions (mémoire, buffer, transistor optique, etc.), d’augmenter les propriétés de l’émission (émission spontanée diminuée, émission Raman stimulée) et de détection. Pour augmenter cette interaction, il faut augmenter le confinement de la lumière et donc utiliser des structures résonnantes : les cavités optiques. Lorsque la lumière résonne dans un petit espace, l’interaction augmente avec le facteur de qualité de la structure. Nous nous sommes donc intéressés à la réalisation de cavités à grands facteurs de qualité avec le plus petit volume de confinement possible. Nous avons amélioré les facteurs de qualité de cavités Fabry Perot en manipulant les modes de Bloch de structures périodiques. En particulier une des deux ingénieries de modes développées dans cette thèse a consisté à diminuer les pertes et donc augmenter le facteur de qualité en adaptant de manière progressive les profils de modes dans la structure .
Structure périodique dans un guide ruban
En optique intégrée, des structures périodiques utilisées comme miroir ont déjà été réalisées sur des guides (WAN74, PEY02). Différents types de modulations d’indice ont pu être utilisés : motifs partiellement gravés, corrugations des flancs, gravure de tranchées ou de trous. Nous avons éliminé les deux premières possibilités, d’une part parce qu’il est difficile de contrôler une gravure partielle, et d’autre part ces deux modulations ne présentent pas un contraste d’indice effectif élevé puisqu’elles ne sont pas centrées sur le mode guidé. Notre choix s’est porté sur les trous plutôt que sur les tranchées, car à propriétés optiques équivalentes les tailles caractéristiques des réseaux de trous sont moins contraignantes que celles des tranchées.
Nous avons choisi un miroir constitué de trous de diamètre 180 nm et de période 370 nm. Cette période permet de situer le centre de la BIP à 1,5 µm. D’autre part l’ensemble de ces deux paramètres permet d’obtenir un contraste d’indice élevé et donc une bande interdite assez large (plus de 300 nm) tout en restant facilement réalisable. Afin de valider ce choix, nous avons calculé le diagramme de dispersion d’un guide ruban (340 nm de hauteur par 500 nm de largeur) percé de ce miroir formé d’un nombre infini de trous (Figure 12). Ce diagramme de dispersion est la superposition du diagramme de bande du miroir et du cône de lumière du guide. Il présente une bande interdite large et des bandes de valence et de conduction similaires à celles du miroir de Bragg Figure 6. Il sera souvent fait allusion par la suite à cette analogie entre cristal photonique 2D et miroir de Bragg. La différence fondamentale entre les deux objets vient du fait que l’objet réel est borné dans l’espace. Le diagramme de bande est délimité par le cône de lumière (en grisée Figure 12) : les ondes ayant un vecteur d’onde et une fréquence dans cette zone se couplent avec le continuum radiatif, couplage qui est une source de pertes dans le système. Ces pertes constituent un paramètre fondamental de la structure. Comme nous le verrons par la suite, contrairement au miroir de Bragg « parfait », lorsque le nombre de périodes augmente, la réflexion et donc le facteur de qualité et la transmission à la résonance sont limités par les pertes.
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Table des matières
Introduction générale
1 L’optique intégrée : la technologie de demain ?
2 Contenu de cette thèse
Introduction
1 Description du modèle Fabry-Perot
1.1 L’interféromètre Fabry-Perot
1.2 Miroir de Bragg
1.3 Propriétés de la Bande Interdite Photonique
1.4 La cavité Fabry-Perot à miroir de Bragg fini
1.5 Expression du facteur de qualité
1.6 Longueur de pénétration
2 La micro-cavité sur un guide d’onde SOI
2.1 Guide d’onde planaire
2.2 Guide ruban utilisé
2.3 Structure périodique dans un guide ruban
3 Etat de l’art des micro-cavités
4 Optimisation des micro-cavités
4.1 La méthode de modélisation utilisée pour l’optimisation
4.2 Les deux stratégies possibles
Procédés de fabrication des micro-cavités
1 Procédé de fabrication utilisé
1.1 Lithographie
1.2 Gravure
2 Validation du procédé par l’étude optique des guides d’onde SOI
2.1 Absorption du matériau
2.2 Mesure des Pertes avec plusieurs guides
2.3 Mesure des pertes avec un seul guide
2.4 Etat de l’art international des pertes en ligne des guides d’onde SOI
2.5 Validation par une mesure AFM
2.6 Conclusion
Micro-cavités linéiques à grands facteurs de qualité
1 Spectroscopie en mode guidé en lumière blanche
2 Transmission des miroirs périodiques
2.1 Transmission des cavités à miroirs périodiques
2.2 Limitation du facteur de qualité par les pertes
3 Les micro-cavités à adaptation modale
3.1 Conception de la zone d’adaptation
3.2 Mesure large bande de la transmission en lumière blanche
3.3 Mesure avec un laser accordable
3.4 Discussion sur les résultats expérimentaux
3.5 Conclusion sur les cavités à adaptation modale
4 Les micro-cavités à recyclage de pertes optiques
4.1 Optimisation du recyclage
4.2 Résultats expérimentaux
4.3 Conclusion sur les cavités à recyclage
Conclusion sur les stratégies d’amélioration des cavités
Etude en champ proche des micro-cavités
1 Introduction
2 Le champ proche par l’expérience
2.1 Principe du champ proche optique
2.2 Instrumentation
2.3 Résultats expérimentaux
2.4 Modèle Fabry-Perot des interactions pointe-cavité
2.5 Comparaison modèle expérience
2.6 Conclusions
les guides à mode lent
1 Introduction
2 Group-velocity impedance mismatch problem (problème de la désadaptation
d’impédance en fonction de la vitesse de groupe)
2.1 Injection efficiency (éfficacité d’injection)
2.2 Approximate closed-form expression for the injection efficiency (expression approchée pour
l’efficacité d’injection)
3 Slow-mode injectors (injecteur dans des modes lents)
3.1 Perfect injection in 1D thin-film stacks (injection parfaite dans un cas 1D d’un empilement de
couches minces)
3.2 Broadband injection in 2D periodic waveguides ( injexction large bande dans un guide planaire 2D)
4 Conclusion
Conclusion générale
Conférences et publications
Bibliographie
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