La famille des gènes des chaines α- globine
Cette famille est localisée sur la partie distale du bras court du chromosome 16 (16p13.3), elle s’étend sur 30 kb. Le gène ζ, le plus télomérique, est le premier exprimé durant l’embryogenèse. Le gène α-globine existe en deux exemplaires : α1 et α2 qui sont exprimés dès la vie fœtale et continueront à fonctionner durant la vie adulte. Les séquences exoniques des gènes α2 et α1 sont identiques, ainsi que celles de leur 1er intron (IVS-I : Intervening sequences). Une région cis-régulatrice a été identifiée à 40 kb en amont de ζ nommée HS40, elle contrôle l’expression des gènes ζ et α. Le phénomène de la commutation des gènes (le Switch), c’està-dire le passage de l’expression du gène ζ à celle des gènes α, au début de la vie fœtale, n’est pas encore clairement décrypté (8).
Fixation de l’oxygène par l’hémoglobine
L’Hb assure le transport de l’oxygène des poumons vers les tissus. Une molécule d’oxygène se fixe par atome de fer et 1 gramme d’hémoglobine peut transporter au maximum 1,34 millilitre (ml) d’oxygène lorsque la saturation est total, soit environ 20 ml d’oxygène pour 100 ml de sang. L’oxygénation tissulaire ne peut être assurée que si le transporteur peut se saturer en oxygène au niveau des poumons et le libérer efficacement dans le lit capillaire où sa pression partielle reste encore élevée. Ces exigences de la fonction oxyphorique ont pu être satisfaites par le fonctionnement allostérique de la molécule d’Hb et l’effet régulateur de facteur physicochimiques environnementaux (16)
Les différents génotypes
On parle de drépanocytose chez les sujets homozygotes HbS/HbS, suite au brassage important des populations, il existe des formes dîtes « hétérozygotes composites ». Les génotypes suivants sont considérés comme syndrome drépanocytaire majeur (SDM) et entrainent une symptomatologie importante :
L’HbS associée à un défaut bêta-thalassémique chez les patients présentant la mutation βS sur un allèle et une mutation bêtathalassémique sur l’allèle controlatéral, définissant une hétérozygotie composite βS/β0 ou βS/β+.
L’HbS associée à des variantes spécifiques de l’hémoglobine chez des patients qui présentent une hétérozygotie composite : βS/βC pour la plus fréquente, βS/βO-Arab, βS/βD-Punjad, et plus rarement ; βS/βEet βS/βLepore ou encore HbS/HbC Harlem, HbS/HbC Antilles (36). Quel que soit le type de SDM, le taux d’HbF peut-être augmenté (>1% chez l’enfant de plus de un an). Ce taux est soumis à différents facteurs modulateurs notamment des facteurs génétiques présents sur le cluster bêta définissant les haplotypes. Pour les plus connus, on sait que le taux d’HbF est de 5-7% pour l’haplotype Bantu, Benin et Cameroun, 7-10% pour l’haplotype Sénégal, 10- 25% pour l’haplotype Arabo-Indien (37).
Chromatographie liquide haute performance (CLHP)
La chromatographie liquide de haute performance a été développée pour permettre à la fois le dépistage et la confirmation des hémoglobinopathies chez les nouveau-nés avec une grande sensibilité et spécificité. En effet, sa bonne sensibilité vis-à-vis des variants majeurs impliqués en pathologie ainsi que sa rapidité de réalisation (environ 3 minutes par échantillon), permettant l’analyse d’un grand nombre d’échantillons, ont fait de la CLHP une méthode particulièrement adaptée au dépistage des anomalies de l’hémoglobine (49). Ce temps d’analyse rapide a été possible par la mise au point d’une technique de CLHP par échange de cations (Figure 15). Les différentes hémoglobines sont séparées par un gradient de tampons de force ionique et de pH croissants. Cette technique, automatisée et adaptée à de grandes séries, permet une quantification précise de l’Hb A2, Hb F, Hb A, Hb S et Hb C notamment. Cependant, puisque certains variants de l’hémoglobine peuvent co-éluer et certaines hémoglobines éluent avant la zone d’intégration des pics, cette technique ne peut être utilisée seule (49). Elle doit être couplée à une autre technique, par exemple électrophorétique, de manière à confronter les résultats obtenus par ces deux techniques différentes (50).
Traitement
Traitements symptomatiques des CVO à base d’antalgiques, par paliers (paracétamol, AINS, dérivés morphiniques) et traitement précoce des infections (57). Mise en place d’un programme transfusionnel (transfusions, échanges transfusionnels) qui permet de traiter les symptômes de la maladie, mais aussi de prévenir des complications (58). Hydroxyurée (HU) : Cette option thérapeutique représente le traitement de choix en première intention, pour les enfants et les patients homozygotes, la tolérance à long terme reste à assurer. Son mécanisme passe par l’induction de la synthèse d’HbF, la réduction de l’adhésion excessive des érythrocytes à l’endothélium, et la diminution des polynucléaires activés (59). Allogreffe de moelle osseuse ; seul traitement curatif (réservée à la drépanocytose sévères, STA ou CVO sous Hydroxyurée …) (60). Emergence de nouveaux traitements : thérapie ciblée : crizanlizumab (Anticorps humanisé anti-P selectin), inhibiteur d’AKT (61).
Conclusion
La drépanocytose homozygote a longtemps été considérée comme une maladie particulièrement invalidante, au pronostic vital réservé à court et moyen terme. Ce tableau sombre s’est heureusement éclairci ces dernières années. Cependant un certain nombre de constatations cliniques montre que la situation n’est pas aussi homogène et que dans certaines situations, la maladie est mieux supportée voire pauci-symptomatique. Ainsi, à partir de dossiers de patients drépanocytaires homozygotes répertoriés au Centre National de Transfusion Sanguine (CNTS) de Dakar, Sénégal, nous avons cherché à savoir si le taux d’hémoglobine F avait une influence dans la survenue des complications cliniques et biologiques. L’exploitation de nos données nous ont permis de retrouver un âge moyen de 27,79 ans et un sex ratio de 0,75. Le taux de l’Hb F était en moyenne de 9,5% et sa persistance au-delà 10% était observée chez 38% de nos sujets. De plus, nous avons retrouvé que chez ces derniers les complications cliniques (pneumonie, lithiase biliaire, ulcère de la jambe, STA, septicémie) et biologiques (syndrome anémique, protéinurie, inflammation, dyslipidémies) étaient beaucoup moins fréquentes que chez les sujets drépanocytaires avec un taux d’Hb F < 10%. De ce fait, cette persistance des taux de l’Hb F semble jouer un rôle important de protection chez ces patients. Ces résultats ouvrent la porte à de nombreuses questions et par conséquent à autant de voies de recherche :
– Quantification de l’hémoglobine F par des techniques plus sensibles et la répartition de celle-ci au niveau cellulaire.
– La persistance de l’hémoglobine F est-elle déterminée génétiquement (héréditaire) ou est-elle acquise.
– Rechercher une empreinte métabolique chez les sujets présentant une persistance de l’Hb F.
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Table des matières
Introduction
Première partie : Synthèse bibliographique
I. Les hémoglobines
1. Structure de l’hémoglobine
2. Structure et localisation des gènes de l’hémoglobine
2.1. La famille des gènes des chaines α-globine
2.2. La famille des gènes des chaines β-globine
3. L’évolution ontogénique des hémoglobines humaines
4. Fonctions de la molécule d’hémoglobine
4.1. Fixation de l’oxygène par l’hémoglobine
4.2. Transport du CO₂ dans le sang
II. La drépanocytose
1. Définition
2. Historique
3. Epidémiologie
4. Les différents génotypes
5. Rôle de l’hémoglobine fœtale
6. Physiopathologie de la drépanocytose
7. Diagnostic biologique
7.1 Données anamnestiques
7.2. Prélèvement
7.3. Techniques de dépistage
7.4. Techniques phénotypiques
7.5. Interprétations des résultats
8. Symptomatologie et complications
8.1. Patients hétérozygotes
8.2. Patients homozygotes
9. Prise en charge de la drépanocytose
9.1. Prévention
9.2. Traitement
2ème Partie : Matériels et méthodes
I. Méthodologie
1) Cadre et type d’étude
2) Population d’étude
3) Paramètres étudiés
4) Echantillonnage
5) Méthodes de dosage
1. Bilan lipidique
2. Dosage de la CRP
3. Dosage des protéines urinaires
4. Electrophorèse de l’hémoglobine
5. Numération sanguine
6) Exploitations statistiques
II. Résultats
1. Caractéristiques générales de la population
2. Répartition selon le sexe
3. Fréquence des complications clinico-biologiques
4. Evaluation de la persistance de l’HbF
5. Evaluation de la persistance de l’Hb F et les complications clinicobiologiques
5.1. Persistance de l’HbF et les complications cliniques
5.2. Persistance de l’HbF et les complications biologiques
5.3 Corrélation entre la persistance de l’HbF et les complications clinico-biologique
III. Discussion
Conclusion
Résumé
Références bibliographiques
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