Le procédé de fabrication additive SLM est largement étudié ces dernières années pour identifier l’impact de la stratégie de fabrication et les paramètres du laser sur les propriétés microstructurales ou sur les propriétés de surface – par les aspects topologiques- des pièces massives obtenues par ce procédé. Ce procédé additif métallique s’applique à de nombreuses nuances de matériaux ou d’alliages dont les alliages de cobalt et plus spécialement les nuances CoCrMo sont assez abordées dans la littérature.
Procédés de fabrication additive
Généralités
La fabrication additive est une technique d’élaboration de structures par ajout de matière jusqu’à l’obtention de l’objet final en 3 dimensions faisant intervenir la conception assistée par ordinateur et la numérisation. On note la définition communément utilisée pour la fabrication additive qui est celle donnée par la norme AFNOR NF E 67-001 et qui est « l’ensemble des procédés permettant de fabriquer, couche par couche, par ajout de matière, un objet physique à partir d’un «objet numérique» [LAV16]. C’est une technique qui a commencé à se développer dans les années 1980 avec le brevet déposé par Jean Claude André et son équipe [LAV16]. En 1986, apparaît le premier fabriquant de machine de fabrication additive qui était 3D System [LAV16, HOR12]. Suivant la norme ASTM-I F2792 on attribue à la fabrication additive diverses dénominations, on citera : le procédé additif, la technique additive, la fabrication par couches additives et la fabrication libre [SLO14].
Elle s’applique sur plusieurs types de matériaux et vient concurrencer les méthodes d’élaboration conventionnelles dites traditionnelles telles que le forgeage, le moulage, la fonderie…etc. Elle peut aussi être perçue comme un atout pour ces procédés comme moyen de concevoir des moules, des noyaux et/ou des empreintes servant par la suite à fabriquer les pièces avec ces procédés classiques, on parle alors d’outillage rapide. Suivant la définition normative [BAU16], on construit l’objet couche par couche en faisant monter ou descendre le plateau de fabrication entre 2 couches successives. On parle donc de fabrication ascendante ou descendante respectivement. De par sa grande précision, la complexité des pièces conçues, son automatisation ainsi que l’étendue de ses champs d’application, la fabrication additive suscite l’intérêt de plusieurs secteurs tels que l’aéronautique, le militaire, le médical et même l’électronique et les biens de consommation.
La Fusion Laser Sélective sur lit de poudre métallique SLM
La technique de fusion laser sélective SLM (Selective Laser Melting) est une des méthodes de fabrication additive les plus courantes. Suivant la classification établie par la norme NF ISO 17296-2, elle fait partie de la famille de fusion sur lit de poudre [BAU16, OBA17]. Le procédé de fusion laser sélective, apparu vers la fin des années 1990, connait aujourd’hui un essor important. Il est utilisé dans le prototypage rapide mais aussi comme procédé de fabrication directe de pièces. Cette technique a été développée en premier par M. Fockele et D.Schwarze de F & S Stereolithographietechnik GmbH avec FER. Meiners, K. Wissenbach, et G. Andres de Fraunhofer ILT. Ce sont les premiers inventeurs avant que le brevet de cette technologie soit déposé pour la première fois en 1997 auprès de l’office allemand des brevets [YAP15]. Le procédé SLM s’adresse à un grand nombre de secteurs d’activités. On citera la plasturgie, le dentaire, le militaire, l’aéronautique, le spatial et l’armement. On compte six constructeurs de machine sur le marché qui sont : SLM Solution, EOS, 3DSystems, Concept Laser, Renishaw et Realizer [PIL16]. Ce procédé intéresse grandement la communauté scientifique notamment pour l’étude des différentes propriétés générées par le procédé sur les structures obtenues. Il est applicable sur une large gamme de matériaux qui font l’objet de nombreux articles scientifiques en particulier : les aciers, le titane et ses alliages, les alliages base nickel, en un second degré les alliages d’aluminium et les alliages base cobalt… [YAP15]. Une attention particulière est portée à cette technique qui représente exclusivement le mode de fabrication utilisé dans ce travail de thèse. Dans ce qui suit, une description plus détaillée de la méthode est développée pour mettre en évidence sa particularité.
Principe
Dans la technique de fusion laser sélective, le matériau de base utilisé est sous forme de poudre qui est versée et dispersée par un racleur venant étaler les particules de poudres. Le principe de la technique consiste à fondre de la poudre sélectivement en balayant un faisceau laser sur des sections spécifiques d’un lit de poudre qui ont été préalablement déterminées et établies à partir des fichiers CAO et STL (fichiers de maillage). Une fois la première couche lasée, le plateau de fabrication est abaissé d’une épaisseur égale à l’épaisseur de couche et le racleur vient étendre une nouvelle couche de poudre sur la précédente qui est quant à elle déjà solidifiée sur des sections spécifiques. Le plateau de fabrication est préchauffé pour limiter le refroidissement rapide des couches. Toute l’opération est réalisée sous atmosphère contrôlée en présence de gaz neutre qui est généralement de l’argon ou de l’azote. Ainsi la fabrication se poursuit couche par couche jusqu’à l’obtention du massif en 3D avec la géométrie et les dimensions précédemment définies dans le fichier CAO [PIL16].
On note que pour certaines pièces massives, il sera nécessaire de laser des supports d’édification en même temps que la pièce, qui seront positionnés entre cette dernière et la plateforme de fabrication. Les supports et la pièce se trouvent donc immergés dans de la poudre non fusionnée en fin de fabrication. La pièce est par la suite séparée des supports par usinage manuel ou usinage par décharge électrique et envoyée aux opérations de post-traitements tels que les traitements thermiques et les traitements de surface afin de pallier les problèmes de contraintes résiduelles dus au refroidissement rapide et à l’aspect de surface (rugosité élevée). Comme pour toutes les techniques de fabrication additive, la dernière étape, appelée étape de contrôle, consiste à évaluer les différentes propriétés de la pièce.
Paramètres du procédé
On compte plusieurs paramètres liés au procédé de fusion laser sélective pouvant impacter la qualité et les propriétés de la pièce finale [PIL16], on citera :
o La poudre :
Les particules de poudre sont en général élaborées par procédé d’atomisation au gaz. La forme et la taille des particules obtenues sont d’une grande importance et ont une influence sur le degré de fusion de la couche lors du procédé de fabrication SLM. Des particules fines facilitent la mise en couche et favorisent l’obtention d’une couche dense, la distribution de la taille des particules doit avoir une allure gaussienne. Pour le cas idéal, la forme des particules doit se rapprocher le plus possible de la forme sphérique.
L’absorbance de la poudre joue également un rôle important dans l’énergie apportée dans le procédé. Elle reflète théoriquement le rapport du flux d’énergie absorbée par rapport au flux d’énergie émis par le laser. Pour un même matériau, l’absorbance d’une poudre est généralement plus importante que celle d’un massif. On cite que l’absorbance d’une poudre de Titane est de 70% alors qu’elle n’est que de 30% pour le matériau à l’état massif [YAP15]. Les conditions de stockage influent également sur la qualité de la poudre. Le taux d’humidité et d’oxygène doivent être minimisés et c’est pour cette raison qu’il est recommandé de procéder à un étuvage de la poudre avant chaque fabrication.
o Les paramètres liés au laser :
Contrairement au procédé SLS qui utilise un laser ??2 avec une longueur d’onde de λ=10.6 µm, le laser utilisé pour le procédé SLM est de type Nd :YAG avec une longueur d’onde de λ=1064 nm. En diminuant la longueur d’onde d’un facteur 10, l’énergie apportée par le laser Nd :YAG est donc significativement augmentée, ce qui augmente l’énergie absorbée par la poudre. Ce laser fonctionne en mode continu. Les paramètres du laser établis dans le fichier STL sont la puissance, la vitesse et l’espacement entre deux passes laser successives.
La puissance « P » peut varier de 50 à 1000 W selon les machines et on peut avoir jusqu’à quatre sources laser qui travaillent simultanément. Plus la puissance du laser est grande plus la densité d’énergie apportée dans la poudre est importante.
La vitesse de balayage « V mm/s» du laser correspond à la vitesse de déplacement du spot sur le lit de poudre. Plus cette vitesse est lente, plus le temps d’interaction faisceau laser/matière est important et par conséquent on apporte plus d’énergie. On précise que la taille du spot est considérée constante quand le laser se déplace le long du lit de poudre grâce à une lentille à champ plat qui focalise le faisceau.
o La stratégie de fabrication et l’épaisseur de couche :
Actuellement il y a deux stratégies largement utilisées pour éviter des distorsions importantes des massifs élaborés :
♦ La stratégie croisée pour laquelle on change de direction de laser en passant d’une couche à une autre avec des passes qui restent parallèles dans la même couche.
♦ La stratégie en damier pour laquelle on change de direction des passes laser sur la même couche suivant des zones sélectives dans des carrés.
o Les contours, l’enveloppe et le cœur :
En général une pièce en 3D n’est pas construite suivant la même paramétrie dans tout son volume. Les paramètres de fabrication préconisés par le constructeur diffèrent entre le cœur de la pièce et les contours extérieurs. Il y a aussi ce qu’on appelle l’enveloppe comportant la peau supérieure et la peau inférieure correspondant aux zones en contact avec la poudre non fondue en fin de fabrication. En fixant des paramètres adéquats du laser, il faut utiliser une énergie moindre pour la peau inférieure comparativement au cœur et une énergie plus importante pour la peau supérieure afin de favoriser de bonnes propriétés de la surface de la pièce.
o Les post traitements :
On a déjà cité que l’un des avantages majeurs des techniques de fabrication additive est la fabrication en une seule étape sans avoir recours aux opérations de post-fabrication telles que le soudage, l’usinage et le perçage. Néanmoins, il est inévitable, pour le procédé SLM en particulier, de procéder aux opérations de post-traitement pour remédier aux problèmes de contraintes résiduelles dues au refroidissement rapide. Les traitements les plus récurrents sont le traitement thermique de revenu de détensionnement, la compression isostatique à chaud comme solution aux problèmes de porosité et les traitements de surface pour le problème de rugosité.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE 1 : ETAT DE L’ART
1. Introduction
2. Procédés de fabrication additive
2.1. Généralités
2.2. Classification des procédés de fabrication additive
2.3. La Fusion Laser Sélective sur lit de poudre métallique SLM
2.3.1. Principe
2.3.2. Paramètres du procédé
2.3.3. Paramètres du procédé SLM dans le cas de poudres en alliages base cobalt
2.3.4. Flux thermique dans le procédé SLM
2.4. Difficultés et limites de la fabrication additive
2.5. Construction Laser Additive Directe CLAD (en anglais Direct Laser Deposition DLD)
2.5.1. Principe
2.5.2. Paramétrage du procédé dans le cas des alliages base cobalt
3. Le cobalt et ses alliages
3.1. Les alliages base cobalt
3.1.1. Structures cristallographiques
3.1.2. Matrice
3.1.3. Précipités
3.2. Formes allotropiques et transformation de phase
3.3. Énergie de fautes d’empilement et rôle des éléments d’addition dans la matrice cobalt
3.4. Diagramme d’équilibre fer cobalt
4. Microstructure et comportement tribologique des alliages base cobalt
4.1. Alliages base cobalt obtenus comme massifs par SLM
4.1.1. Microstructure des massifs
4.1.2. Dureté
4.1.3. Comportement tribologique
4.2. Alliages base cobalt obtenus comme revêtements par procédés classiques
4.2.1. Microstructure des revêtements
4.2.2. Dilution du fer
4.2.3. Dureté des revêtements
4.2.4. Comportement tribologique
5. Microstructure et comportement en fatigue des alliages base cobalt
5.1. Alliages base cobalt obtenus comme massifs par SLM
5.2. Alliages base cobalt obtenus comme revêtements par procédés classiques
5.2.1. Durée de vie en fatigue
5.2.2. Mécanismes d’endommagement
6. Conclusions
CHAPITRE 2 : PROCEDE, MATERIAUX, MOYENS DE CARACTERISATIONS EXPERIMENTALES & ESSAIS MECANIQUES
1. Introduction
2. Machine de fabrication additive SLM 125 HL
2.1. Préparation de la chambre de travail
2.1.1. Système laser
2.1.2. Système de mise sous argon
2.1.3. Préparation des fichiers numériques
3. Matériaux étudiés et géométries des éprouvettes
3.1. Poudre CoCrMo
3.1.1. Composition chimique et cristallographie
3.1.2. Granulométrie des poudres
3.1.3. Recyclage de la poudre
3.2. Substrats base fer
3.2.1. Acier C35
3.2.2. Acier C45
4. Méthodes d’analyses et de caractérisation
4.1. Diffraction des rayons X – DRX
4.1.1. Épaisseur affectée par les rayons X
4.1.2. Méthode de dosage des phases
4.1.3. Méthodologie pour identification des teneurs massiques en fer et des phases cristallines dans le revêtement
a. Sur les disques de tribologie
b. Sur les éprouvettes de fatigue
4.2. Techniques d’observation des microstructures et d’analyses de la composition chimique
4.2.1. Préparation des échantillons
4.2.2. Microscopes optiques
4.2.3. Microscopes électroniques à balayage
a. Paramétrage des analyses EDS
b. Profondeur analysée par EDS (interaction des électrons)
4.3. Diffraction des électrons rétrodiffusés – EBSD
4.4. Microscope Confocal à champ étendu
4.5. Caractérisation mécanique par microdureté
5. Les moyens d’essais pour les sollicitations surfaciques et volumiques
5.1. Sollicitations surfaciques
5.1.1. Le Tribomètre pion sur disque
5.1.2. Fabrication des revêtements sur les disques de tribologie
5.2. Sollicitations volumiques
5.2.1. La machine de fatigue
5.2.2. Fabrication des revêtements sur les éprouvettes de fatigue
5.2.3. Conditions d’essais en fatigue
6. Conclusions
CHAPITRE 3 : ÉTUDE DE L’ETAT MICROSTRUCTURAL DU REVETEMENT OBTENU PAR SLM A PARTIR D’UNE POUDRE BASE COBALT
1. Introduction
2. Lien entre paramètres du procédé SLM et microstructure
2.1. Campagne de fabrication avec variation de la densité d’énergie volumique
2.2. Évolution de la teneur massique de fer en surface des revêtements
2.3. Évolution des phases cristallines
2.4. Nature de la microstructure
2.5. Conclusion partielle
3. Revêtements à différents nombres de couches
3.1. Évolution de la teneur en fer en fonction du nombre de couches
3.2. Mise en évidence de l’influence de l’intervalle de temps entre couches
3.3. Phases cristallines et microstructures
3.3.1. Phases cristallines
3.3.2. Microstructure
3.3.3. Évolution des teneurs en éléments dans l’épaisseur du revêtement
3.3.4. Épaisseur des revêtements
3.4. Dureté des revêtements
4. Conclusions
CHAPITRE 4 : RESULTATS DES ESSAIS TRIBOLOGIQUES, DES ESSAIS DE FATIGUE & ANALYSES MICROSTRUCTURALES
CONCLUSION GENERALE