Influence de la caféiculture sur l’environnement

Influence de la caféiculture sur l’environnement

De l’usage traditionnel à l’intensification de la production au XXe siècle

Avant que le café ne soit développé en tant que culture de rente, le café Robusta du Buganda avait une signification symbolique importante. Dans la cérémonie appelée « the traditional blood brotherhood ritual » (littéralement : « le rituel traditionnel de la fraternité »), les deux grains de café étaient sortis de la cerise, chacun des deux hommes se fendaient l’extrémité du doigt pour tremper de leur sang le grain de café. Ils s’échangeaient ensuite leur grain et chacun l’avalait. Cette cérémonie symbolisait les prémices d’une entente particulière, une confiance solide et le commencement d’échanges (mariages, commerce…) entre les deux familles représentées. (Musoli et al., 2001). Au début du XXe siècle, suite à l’établissement des autorités coloniales anglaises, le gouvernement colonial a commencé à cultiver et à produire du café Robusta en grande quantité afin d’approvisionner l’Angleterre et l’Europe en café. Le gouvernement colonial créa la première institution de régulation : le Coffee Industry Board (CIB) pour superviser l’achat, la transformation et l’exportation du café (Zwanenberg and King, 1975 in NUCAFE, 2008).

La production et la récolte du café étaient autoritairement surveillées par les chefs locaux et les réfractaires étaient souvent battus à coup de rotin (en Luganda « kiboko » qui signifie bâton), un terme qui fut associé à l’obtention d’un café de bonne qualité et qui aujourd’hui est utilisé pour désigner le café séché (ou café coque). (NUCAFE, 2008) L’industrie du café en Ouganda a commencé au début des années 20, lorsque le café de plantation a été adopté par les paysans ougandais. D’après Prunier et Calas, «vers 1930, la production de café des paysans était supérieure à celle des plantations. Dès le début des années 30, le café constituait la plus grande source de devises étrangères après le coton. Au milieu des années 50, il dépassa le coton (Prunier et Calas, 1994).» Dans les années 60, la production de café atteignait 120.000 tonnes de qualité exportable et 222.000 tonnes en 1972 (Musoli et al., 2001). Cependant, la production fut affectée par les guerres civiles, un système marketing fragile et des prix aux producteurs bas, suite au monopole qu’imposait le gouvernement par un modèle étatique fort et par les différentes institutions de contrôles qui se sont succédées. L’amélioration de l’industrie s’est déroulée de façon progressive grâce à son association aux programmes d’ajustement structurels du gouvernement.

1991, une libéralisation réussie pour l’Ouganda

En 1991, le secteur du café a été libéralisé (Daviron et Ponte, 2007). Les agriculteurs ougandais sont devenus dépendants des prix compétitifs du marché, ce qui a eu pour avantage de réserver une plus grande part du prix exporté au producteur mais pour inconvénient d’exposer la filière de production à une plus grande fluctuation de prix sur le court terme. Aujourd’hui, l’Ouganda est considéré comme le pays le plus avancé dans le processus de libéralisation qui a débuté au cours des années 90 en Afrique de l’est, même si la réglementation concernant la certification officielle des exportations est très contraignante. Après la libéralisation, l’Office de développement du café ougandais (Uganda Coffee Development Authority) a repris la régulation du secteur, son rôle étant de contrôler la qualité du café destiné à l’exportation (Daviron et Ponte, 2007). Son objectif est de promouvoir et de superviser l’industrie du café (recherche, qualité et développement) (Musoli et al., 2001). Dans une étude datant de 2005 et comparant le secteur caféicole kenyan à celui d’Ouganda, Damianopoulos montre les divergences qui se creusent entre ces deux pays, bien qu’ils soient voisins.

Tandis que l’Ouganda est considéré comme complètement libéralisé car il n’y a pas (ou peu) d’implication du gouvernement dans le marketing et la vente du café, au Kenya en revanche, ces deux activités sont totalement contrôlées par le gouvernement. Dans ces deux cas, les surfaces de caféiculture ont augmenté de 1980 à 2004, pour l’Ouganda dans la même période, les rendements et la production de café vert se sont accrus (17 et 38% respectivement), au Kenya ils diminuent (57 et 30%). L’industrie du café ougandais a enregistré une forte évolution de la production dans les années 90 ce qui coïncide avec la libéralisation tandis que le secteur du café affiche un constant déclin au Kenya durant la même période (Damianopoulos, 2005).

La libéralisation a marqué la fin des coopératives en Ouganda. En 1995, l’Ouganda se dote d’une agence de régulation qui pilote le marché: l’association ougandaise des caféiculteurs (Uganda Coffee Farmers Association). En 2003, l’UCFA devient “the National Union of Coffee Agribusinesses and Farm enterprises” (NUCAFE) (Cf figure 5). NUCAFE s’associe aux planteurs pour les aider à se regrouper en associations qui sont actuellement au nombre de 102 réparties sur les 5 grandes régions caféicoles de l’Ouganda. La principale activité de l’union est la formation des planteurs, il y a peu d’activité de coopérative telle que l’aide à l’obtention d’intrants ou de micro-financement. NUCAFE aide les planteurs pour l’amélioration de la qualité du café et les aide à négocier le prix de vente avec les acheteurs. Par exemple lorsque les ventes sont réalisées en groupe avec l’aide de NUCAFE, le différentiel de prix peut être de 200 shillings/kg de café coque (filière robusta), soit 8 centimes d’euro.

Projet Cafnet et objectifs du mémoire

Dans ce contexte, le projet Cafnet (Connecting, enhancing and sustaining environmental services and market values of coffee agro-forestry in Central America, East Africa and India) a pour objectif de combiner la gestion durable des ressources environnementales et celle des systèmes agroforestiers, avec une rémunération appropriée des producteurs. Ceci permettrait dans un deuxième temps d’améliorer les conditions de vie des communautés de caféiculteurs tout en préservant le milieu naturel. Ce projet est implanté dans trois régions du globe : Amérique Centrale (CATIE1), Inde (Université de Bangalore) et Afrique de l’Est (ICRAF) dont l’Ouganda où la présente étude a été réalisée. L’ensemble du projet est sous la coordination du Cirad. L’étude sur le terrain a consisté en une enquête réalisée à l’échelle de l’exploitation agricole, ainsi nous avons utilisé comme unité, le couple « famille-exploitation ». Nous nous intéresserons aux dimensions économique, sociale, démographique, agronomique et environnementale à l’échelle de l’exploitation agricole, nous nous attacherons en particulier au système de production. Les frontières entre les échelles n’étant pas absolues, l’étude pourra s’étendre, lorsqu’il sera nécessaire, aux échelles de la région et de la parcelle.

Ces changements d’échelles se feront, lors de l’analyse des résultats, selon une approche systémique (système agraire, système de production et système de culture et d’élevage). Ce mémoire utilisera alors les résultats de l’enquête en deuxième partie pour prolonger la réflexion dans la troisième partie et s’intéresser à l’échelle nationale qui comprend d’autres acteurs clés du secteur du café et notamment la recherche locale et le gouvernement ougandais. Tandis que l’étude, en deuxième partie, se focalisera sur les producteurs, la dernière partie de ce mémoire étendra le débat aux enjeux des acteurs nationaux. L’objectif de ce mémoire est en effet de se fonder sur les données et l’analyse des résultats de l’enquête menée auprès des caféiculteurs de la zone d’étude pour réévaluer la place du café dans leur production et dégager leurs stratégies d’adaptation suite au CWD. Il s’agira ensuite de discuter la pertinence des résultats de l’étude et de prendre du recul sur la méthodologie employée, pour en faire émerger les points forts et les points à améliorer. Dans un troisième temps, la discussion cherchera davantage à reconsidérer les solutions proposées par la recherche, et l’aide apportée par le gouvernement pour répondre aux besoins des agriculteurs. Nous chercherons à comprendre si les intérêts des 3 parties (gouvernement, recherche et paysans) s’opposent ou se complètent, la crise du CWD nous servant ainsi de prétexte pour évaluer la position de chacun, comprendre les interactions entre les différents acteurs et soulever quelques problèmes de communication.

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Table des matières

Introduction
Partie 1: La filière café ougandaise ébranlée par une maladie
1.Le café ougandais, un enjeu de développement à de multiples échelles
1.1. Le secteur primaire constitue la base de l’économie
1.2. Le café contribue à la croissance du pays et au développement des petits producteurs
1.3. Les principales zones de caféicultures
2.Evolution de la gouvernance et des politiques caféicoles
2.1. De l’usage traditionnel à l’intensification de la production au XXe siècle
2.2. Années 30 à 90 : succession d’institutions pour installer le pouvoir de l’Etat sur la filière
2.3. 1991, une libéralisation réussie pour l’Ouganda
2.4. 1995 à nos jours, la fin des coopératives et de nouveaux modes de régulation
3.De la production à la commercialisation du café
3.1. Un intermédiaire pour chaque maillon de la production
3.2. Contrecarrer les effets du CWD, un défi majeur pour le café ougandais
3.3. Les axes de l’étude
3.3.1. Usages et contribution des systèmes agroforestiers
3.3.2. Stratégies paysannes à étudier
4.Projet Cafnet et objectifs du mémoire
Partie 2: Les stratégies des producteurs
1.Méthodologie de l’étude sur le terrain
1.1. Méthodologie mise en place pour répondre à la problématique de l’étude
1.1.1. Délimiter le champ de l’étude: Questions, Hypothèses et Variables
1.1.2. L’enquête ménage a été choisie pour effectuer cette étude.
1.1.3. Elaboration des guides d’entretien
1.2. Choix méthodologiques
1.1.4. Choix des lieux de l’enquête
2.Résultats et Analyse
2.1. Réévaluation de la place du café au sein des exploitations agricoles
2.1.1. Le foncier, un facteur limitant pour la production de café
2.1.2. Quelles sont les activités des fermiers?
2.1.3. Quelle est la place du café ?
2.2. CWD, ennemi numéro un des caféiers : étude des stratégies paysannes
2.2.1. Le CWD est le principal problème des caféiculteurs
2.2.2. Comment les paysans font-ils pour maintenir leurs revenus ?
2.2.3. Quelle typologie permet de mieux caractériser les exploitations?
2.2.4. L’analyse des données vient en appui aux conclusions précédentes
2.3. Le café, une culture de rente indispensable pour les fermiers de la province de Mukono aujourd’hui.
Partie 3 : Interaction des acteurs impliqués dans le secteur caféicole.
1.Biais et limites de l’étude
1.1. L’utilisation du langage comme principal outils de compréhension
1.2. Des cadres de référence différents entre l’enquêteur et l’enquêté
1.3. En phase exploratoire de projet, la perception des fermiers est privilégiée
2.Discussion des points principaux de l’étude
2.1. Lien entre les arbres et la caféiculture
2.1.1. Effet des pratiques agro-forestières sur la culture du café
2.1.2. Influence de la caféiculture sur l’environnement
2.1.3. Résilience apportée par les arbres en période de crise pour le café
2.2. Détermination des fermiers à planter toujours plus de café
2.3. CWD et modes de gestion ailleurs
2.3.1. Sur les traces du CWD
2.3.2. Quelles ont été les solutions lors de différentes épidémies agricoles?
3.Le CWD, un prétexte pour étudier les interactions entre les acteurs
3.1. Les répercutions de la libéralisation à l’échelle des fermiers
3.1.1. Démantèlement du système traditionnel et crise de confiance
3.1.2. La place du café diminue dans les préoccupations de l’Etat
3.1.3. Rôle de NUCAFE retour au système de board ?
3.2. Le programme de replantation de l’Etat et les répercutions sur la recherche et les fermiers
3.3. Recherche et CWD : Etat de la recherche et perspectives pour la distribution de variétés résistantes
Conclusion générale
Bibliographie
Table des annexes

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