INEGALITES DE SANTE

La santรฉ

ย  ย Lโ€™expression santรฉ peut prรฉsenter une certaine ambiguรฏtรฉ dans son explication. Cependant, quelle que soit la dรฉfinition quโ€™on lui donne, une chose reste constante et revient dans presque toutes : sa nature. La santรฉ nโ€™est pas une idรฉologie et encore moins une chose matรฉrielle car elle nโ€™est pas palpable. La santรฉ est un รฉtat cโ€™est-ร -dire une maniรจre dโ€™รชtre physique ou morale. Elle est souvent dรฉfinie comme ยจabsence de pathologiesยจ, autrement dit, รฉtat de quelquโ€™un qui nโ€™est pas malade. Mais cette dรฉfinition semble peu satisfaisante surtout dans le cas des maladies hรฉrรฉditaires car on peut รชtre ยจporteur sainยจ malgrรฉ le fait que la maladie soit en nous. Par ailleurs, la santรฉ est aussi dรฉfinie comme un รฉtat physiologique. Par consรฉquent, il peut รชtre bon ou mauvais. Cette caractรฉrisation parait plus acceptable que la premiรจre mais reste incomplรจte car ne prenant pas en compte lโ€™รฉtat psychique et encore moins social de lโ€™individu. Or ces deux aspects (psychique et social) sont importants voire mรชme indispensables pour une santรฉ complรจte de lโ€™individu. Si on se limite ร  cette dรฉfinition, alors comment spรฉcifier une personne qui physiquement se porte bien mais qui prรฉsente des troubles mentaux ? Peut-on dire quโ€™elle est en bonne santรฉ ? Certes non. La santรฉ physique et la santรฉ mentale vont de pair. En outre, le social ne peut รชtre laissรฉ en rade dans la dรฉfinition de la santรฉ dโ€™une personne. Cโ€™est pourquoi la dรฉfinition de lโ€™OMS semble sans nul doute la plus complรจte de toutes. Selon lโ€™OMS (1946), la santรฉ est un ยซ รฉtat de complet bien-รชtre physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou dโ€™infirmitรฉ ยป (Sy I. 2015)17. Cette dรฉfinition est dโ€™autant plus complรจte quโ€™elle dรฉpeint les diffรฉrents รฉlรฉments dโ€™un รฉtat de santรฉ et requiert la satisfaction de tous les besoins essentiels de lโ€™individu (alimentaires, sociaux, รฉducatifs, โ€ฆ) et ce ร  toutes les รฉtapes de sa vie. Cette dรฉfinition a cependant รฉtรฉ critiquรฉe, conduisant ร  sa mise ร  jour par lโ€™OMS en 1986. Ainsi, dรฉfinie-t-elle la santรฉ comme ยซ lโ€™aptitude dโ€™identifier et de rรฉaliser ses aspirations, satisfaire ร  ses besoins et modifier ou faire face ร  son environnement. La santรฉ est donc une ressource de la vie quotidienne et non pas un objectif de vie. La santรฉ est un concept positif mettant lโ€™accent sur les ressources sociales et personnelles ainsi que sur les capacitรฉs physiques ยป (Fournier P. 2003)18 . Cette idรฉe est rejointe par Terris pour qui la santรฉ est : et ยซ un รฉtat de bien-รชtre physique, mental et social ยป, et ยซ la capacitรฉ de se rรฉaliser et non simplement lโ€™absence dโ€™inconfort ou dโ€™infirmitรฉ ยป (Fournier P. 2003). Ces deux conditions se prรฉsentent comme le recto et le verso dโ€™une feuille et sont dรจs lors indissociables. Lโ€™รฉtat de santรฉ dโ€™un individu est fonction de son adaptation ร  son milieu, autrement dit, son adaptation ร  son environnement. Ce dernier exerce une forte influence sur la santรฉ et cette constatation ne date pas de nos jours. Dรฉjร  au Vรจme siรจcle avant Jรฉsus Christ, Hippocrate, le plus grand mรฉdecin de lโ€™Antiquitรฉ รฉcrivait que ยซ Pour approfondir la mรฉdecine, il faut considรฉrer dโ€™abord les saisons, connaitre la qualitรฉ des eaux, des vents, รฉtudier les divers รฉtats du sol et le genre de vie des habitants ยป (Etchelecou A.)20. Ceci nous amรจne ร  affirmer que lโ€™apprรฉhension de lโ€™environnement est inรฉvitable dans lโ€™รฉtude de la santรฉ, ou en ce qui nous concerne, lโ€™รฉtude des inรฉgalitรฉs de santรฉ.

Lโ€™environnement

ย  ย Lโ€™environnement, ร  lโ€™instar de la santรฉ, est un concept polysรฉmique. Il est apparu plus tard dans le jargon scientifique contrairement ร  celui des architectes, des peintres et des sculpteurs (Becker C.)21. Il est considรฉrรฉ par certains comme un terme ordinaire qui dรฉsigne ce qui environne, entoure. Dans ce cas, on peut lui trouver des synonymes comme ambiance, dรฉcor, environs, entourage, atmosphรจre, climat, etc. Il est aussi perรงu comme ce qui est dehors, cโ€™estร -dire ร  la marge de quelque chose ou quelquโ€™un. Ces deux dรฉfinitions semblent ร  notre avis mรฉdiocres โ€“ par rapport ร  notre sujet – car elles ne laissent pas envisager de relations possibles entre lโ€™environnement et lโ€™homme. Or, sโ€™il nโ€™y a aucun lien entre lโ€™homme et son environnement, comment sa santรฉ pourrait-elle en dรฉpendre ? Cette relation nโ€™est plus ร  dรฉmontrer surtout par les spรฉcialistes de lโ€™environnement comme les spรฉcialistes des sciences de la nature et les gรฉographes par exemple. La gรฉographie de la santรฉ qui est une branche de la gรฉographie humaine nโ€™enfreint pas cette rรจgle. Lโ€™รฉtude de lโ€™environnement concerne surtout les causes anthropiques de sa dรฉgradation ainsi que des mesures ร  apporter pour y remรฉdier (Georges P, Verger F. 1970). Lโ€™environnement nโ€™est pas figรฉ, il se mรฉtamorphose parce quโ€™aux facteurs naturels sโ€™ajoutent les facteurs รฉconomiques, sociaux et culturels. Pour lโ€™OMS, lโ€™environnement est ยซ lโ€™ensemble des รฉlรฉments naturels et artificiels au sein duquel se dรฉroule la vie humaine ยป (Etchelecou A.)23. Cette dรฉfinition de lโ€™environnement par lโ€™OMS nous montre clairement sa relation avec lโ€™homme car il nโ€™est pas seulement le milieu (naturel) que lโ€™homme trouve ร  sa venue au monde et qui nโ€™est pas son ล“uvre, mais aussi celui (artificiel) faรงonnรฉ par ses mains, selon son dessein. Dโ€™ailleurs, le code de lโ€™environnement du Sรฉnรฉgal apporte plus de clarifications. Selon lui, lโ€™environnement est ยซ lโ€™ensemble des รฉlรฉments naturels et artificiels ainsi que des facteurs รฉconomiques, sociaux et culturels qui favorisent lโ€™existence, la transformation et le dรฉveloppement du milieu, des organismes vivants et des activitรฉs humaines ยป (Rรฉpublique du Sรฉnรฉgal 2001). Cette perception de lโ€™environnement montre quโ€™il est le socle de la vie sans lequel lโ€™existence de lโ€™homme serait difficile voire impossible. Lโ€™environnement, comme soulignรฉ dans lโ€™introduction, nโ€™est pas uniforme. Dโ€™ailleurs, comment pourrait-on le lui reprocher car la Terre elle-mรชme ne lโ€™est pas ? Elle est composรฉe de zones polaire, tempรฉrรฉe et tropicale, de reliefs de montagnes, de plaines, de plateaux et de collines ainsi que beaucoup dโ€™autres caractรฉristiques, sans compter les pratiques de lโ€™espace propres ร  chaque communautรฉ humaine qui particularisent chaque rรฉgion. Ces diffรฉrences se traduisent par des inรฉgalitรฉs dโ€™environnement qui vont ร  leur tour conduire ร  des inรฉgalitรฉs de santรฉ.

Les inรฉgalitรฉs de santรฉ

ย  ย Les inรฉgalitรฉs de santรฉ sont les divers รฉtats de santรฉ notรฉs entre les groupes dโ€™individus mais aussi entre les individus dโ€™un mรชme groupe. On parle dโ€™inรฉgalitรฉs sociales de santรฉ lorsque des diffรฉrences au niveau sanitaire sont perรงues entre des groupes sociaux en fonction de faits sociaux (INPES)26. Deux types de dรฉterminants agissent sur les inรฉgalitรฉs sociales de santรฉ :
๏‚ท Les dรฉterminants structurels cโ€™est-ร -dire ceux liรฉs aux conditions รฉconomiques, culturelles et environnementales. En effet, la pauvretรฉ et la mauvaise santรฉ sont liรฉes. Les personnes qui vivent dans des conditions prรฉcaires sont plus exposรฉes aux maladies parce quโ€™elles vivent dans des endroits insalubres et lorsquโ€™elles sont malades, elles nโ€™ont pas les moyens de se soigner ;
๏‚ท Les dรฉterminants intermรฉdiaires ร  savoir lโ€™offre et lโ€™accรจs aux soins (toutes les localitรฉs ne sont pas dotรฉes dโ€™infrastructures sanitaires), les conditions de vie et de travail (les bureaucrates et les ouvriers nโ€™ont pas le mรชme รฉtat de santรฉ), les facteurs individuels (les รฉlรฉments gรฉnรฉtiques et biologiques, les comportements et les modes de vie, lโ€™รขge, le sexe) (Sรฉlig E. 2014). Lโ€™OMS considรจre les inรฉgalitรฉs sociales de santรฉ comme des ยจiniquitรฉsยจ de santรฉ (INPES). Elles doivent รชtre รฉradiquรฉes en donnant ร  tous les individus des chances รฉgales. Les inรฉgalitรฉs de santรฉ ont augmentรฉ considรฉrablement ces derniรจres dรฉcennies bien que des efforts aient รฉtรฉ consentis par les Etats en matiรจre de santรฉ publique.

La santรฉ publique

ย  ย La santรฉ publique serait apparue vers le XVIIIรจme siรจcle. Elle est de nos jours une discipline ร  part entiรจre. Elle souvent expliquรฉe comme lโ€™รฉtude des dรฉterminants de la santรฉ ainsi que des opรฉrations ร  mener pour lโ€™amรฉlioration de la santรฉ de la population. En 1952, lโ€™OMS la dรฉfinissait comme ยซ la science et lโ€™art de prรฉvenir les maladies, de prolonger la vie et dโ€™amรฉliorer la santรฉ et la vitalitรฉ mentale et physique des individus, par le moyen dโ€™une action collective concertรฉe (โ€ฆ) ยป (Fournier P. 2003)29. Dans ce sens, on peut dire en quelque sorte que la santรฉ publique se diffรฉrencie de la mรฉdecine parce quโ€™elle ne sโ€™intรฉresse pas juste ร  un individu ou ร  une portion de la population mais ร  celle-ci tout entiรจre, ni seulement aux malades mais aussi aux biens portants. Une autre diffรฉrence entre la mรฉdecine et la santรฉ publique est que cette derniรจre sโ€™accentue plus sur la prรฉvention que sur la cure. Dโ€™ailleurs Charles-Edward Winslow, lโ€™un des prรฉcurseurs de la santรฉ publique aux Etats Unis la dรฉfinie comme : ยซ la science et lโ€™art de prรฉvenir les maladies, de prolonger la vie et de promouvoir la santรฉ et lโ€™efficacitรฉ physiques ร  travers les efforts coordonnรฉs de la communautรฉ pour lโ€™assainissement de lโ€™environnement, le contrรดle des infections dans la population, lโ€™รฉducation de lโ€™individu aux principes de lโ€™hygiรจne personnelle, lโ€™organisation des services mรฉdicaux et infirmiers pour le diagnostic prรฉcoce et le traitement prรฉventif des pathologies, le dรฉveloppement des dispositifs sociaux qui assureront ร  chacun un niveau de vie adรฉquat pour le maintien de la santรฉ, lโ€™objet final รฉtant de permettre ร  chaque individu de jouir de son droit innรฉ ร  la santรฉ et ร  la longรฉvitรฉ ยป (Fournier P. 2003). Cette dรฉfinition prรฉcise et complรจte de la santรฉ publique nous montre quโ€™elle sโ€™intรฉresse ร  la santรฉ ร  tous les niveaux et que son but est le bien-รชtre total de la population qui inclue sa participation. Cโ€™est pourquoi en 1952, lโ€™OMS a insistรฉ sur la nรฉcessitรฉ dโ€™une รฉducation sanitaire personnelle et communautaire (INPES).

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Table des matiรจres

INTRODUCTION
I : PROBLEMATIQUE
I.1 : CONTEXTE ET JUSTIFICATION
I.2 : OBJECTIFS DE RECHERCHE
I.3 : HYPOTHESES DE RECHERCHE
I.4 : DISCUSSION DES CONCEPTS
II : METHODOLOGIE
II.1 : LA REVUE DOCUMENTAIRE
II.2 : LE TRAVAIL DE TERRAIN
II.2.1 : LES ENTRETIENS
Les structures sanitaires
La mairie
II.2.2 : LES ENQUETES AUPRES DES MENAGES
Le dรฉroulement des enquรชtes mรฉnages
II.2.3 : LE TRAITEMENT DES DONNEES
II.2.4 : LES OBSTACLES RENCONTRES
PREMIERE PARTIE : LA GEOGRAPHIE DE LA COMMUNE DE GRAND-YOFFย 
CHAPITRE I : LA COMMUNE DE GRAND-YOFF UN ESPACE EN CONSTANTE MUTATION
I.1 : PROCESSUS Dโ€™OCCUPATION DE LA COMMUNE DE GRAND-YOFF
I.2 : DYNAMIQUES DEMOGRAPHIQUES DE LA COMMUNE DE GRAND-YOFF
I.2.1 : EVOLUTION DE LA POPULATION DE LA COMMUNE DE GRAND-YOFF
I.2.2 : STRUCTURE DE LA POPULATION DE LA COMMUNE DE GRAND-YOFF
CHAPITRE II : LES SERVICES SOCIAUX DE BASE DE LA COMMUNE DE GRANDYOFF
II.1 : Lโ€™ACCES A Lโ€™EAU ET A Lโ€™ASSAINISSEMENT DANS LA COMMUNE DE GRAND-YOFF
II.1.1 : LE MODE Dโ€™APPROVISIONNEMENT EN EAU POTABLE DANS LA COMMUNE DE GRAND-YOFF
II.1.2 : Lโ€™ASSAINISEMENT A GRAND-YOFF, UNE SOURCE Dโ€™INEGALITES DE SANTE
II.2 : Lโ€™OFFRE DE SOINS DANS LA COMMUNE DE GRAND YOFF
II.1.1 : Lโ€™OFFRE DE SOINS DE SANTE PRIMAIRES (SSP) DANS LA COMMUNE DE GRAND-YOFF
II.1.2 : Lโ€™OFFRE DE SOINS SECONDAIRES ET TERTIAIRES A GRAND-YOFF
II.2.3 : Lโ€™OFFRE DE SOINS PUBLIQUE DE LA COMMUNE DE GRAND-YOFF
II.3 : LES EQUIPEMENTS SOCIOEDUCATIFS DE LA COMMUNE DE GRAND-YOFF
DEUXIEME PARTIE : LES INEGALITES SOCIALES DE SANTE DANS LA COMMUNE DE GRAND-YOFF
CHAPITRE I : LES INEGALITES DANS LE RECOURS AUX SOINS ET LA MORBIDITE DECLAREE DANS LA COMMUNE DE GRAND-YOFF
I.1 : LE RECOURS AUX SOINS DANS LA COMMUNE DE GRAND-YOFF
I.1.1 : LE TEMPS MIS ET LE MOYEN DE TRANSPORT POUR ACCEDER A UNE STRUCTURE DE SOINS
I.1.2 : LES CHOIX THERAPEUTIQUES
I.1.3 : LES AIRES DE RECRUTEMENT DES STRUCTURES DE SOINS DE GRANDYOFF
I.1.4 : LE RECOURS AUX SOINS POUR LES CPN ET LE DEPISTAGE DU VIH-SIDA POUR LES FEMMES ENCEINTES
Les inรฉgalitรฉs de recours dans le nombre de CPN effectuรฉ au cours de la grossesse
Le dรฉpistage du VIH-SIDA pendant la grossesse, source dโ€™inรฉgalitรฉs de sante
I.2 : LA MORBIDITE DANS LA COMMUNE DE GRAND-YOFF
I.2.1 : LA MORBIDITE DECLAREE
I.2.2 : LA REPARTITION SPATIALE DE LA MORBIDITE DECLAREE
CHAPITRE II : LES FACTEURS DES INEGALITES DE SANTE DANS LA COMMUNE DE GRAND-YOF
II.1 : LE PROFIL DES ENQUETES
II.1.1 : LA SITUATION SOCIOPROFESSIONNELLE DES ENQUETES
II.1.2 : LA NATURE DES LOGEMENTS DES MENAGES
II.2 : LA SITUATION SOCIOECONOMIQUE, FACTEURS Dโ€™INEGALITES DE SANTE A GRAND-YOFF
II.2.1 : LES INEGALITES DE SANTE LIEES AU REVENU (ACTIVITE SOCIOPROFESSIONNELLE)
II.2.2 : LES INEGALITES DE SANTE LIEES AU NIVEAU Dโ€™INSTRUCTION
II.2.3 : LES INEGALITES DE SANTE LIEES A Lโ€™AGE ET AU SEXE
II.3 : LES INEGALITES DE SANTE LIEES AUX MODES DE VIE ET COMPORTEMENTS
CONCLUSION

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