Incontinence urinaire après prostatectomie

La prostatectomie radicale est une chirurgie du cancer de la prostate qui consiste à l’ablation de la prostate et des vésicules séminales, d’où  l’appellation prostato-vésiculectomie. Elle est pratiquée depuis le début du XXe siècle et constitue le premier moyen thérapeutique curatif du cancer localisé de la prostate [24]. La première prostatectomie radicale a été réalisée en 1905 par Young qui avait utilisé un abord périnéal [37]. C’est en 1945 que Millin a décrit la voie d’abord rétro pubienne de la prostatectomie radicale [24]. Une meilleure compréhension de l’anatomie avec la possibilité de préservation des bandelettes vasculo-nerveuses a été développée par Walsh [35] au début des années 1980. Depuis ces progrès, le nombre de cas de prostatectomie radicale a augmenté de façon exponentielle et certaines équipes, comme celle de Penson et al. [26] ont publié plus de 1000 cas. L’utilisation de la voie laparoscopique (VL) depuis 1997 et plus récemment couplée au robot en 2000 est considérée par beaucoup d’urologues de manière empirique comme supérieure à la voie rétropubienne (VR) en raison d’une vision magnifiée de l’organe opéré [7, 13]. Il n’y a pas de différence significative sur les résultats carcinologiques et fonctionnels par rapport à la voie ouverte [7]. Au Sénégal, la première prostatectomie radicale a été réalisée en 2002 au Service d’Urologie-Andrologie de l’Hôpital Aristide Le Dantec. Depuis cette date, des progrès significatifs ont été observées dans la vulgarisation de la technique et dans sa maîtrise. Certains praticiens ont dépassé la cinquantaine de prostatectomies radicales effectuées.

Rappels Anatomiques 

La description de l’anatomie chirurgicale de la prostate a permis une amélioration du geste chirurgical. La connaissance de la vascularisation, de l’innervation prostatique, et la topographie des fascias endo-pelviens a contribué à une meilleure compréhension du déroulement de l’acte opératoire.

Anatomie descriptive

Situation
La prostate est une glande mâle qui entoure la partie initiale de l’urètre et qui reçoit les voies spermatiques constituées de chaque côté par le canal déférent et la vésicule séminale. Elle est située en dessous de la vessie, au-dessus du plancher pelvien, en arrière de la symphyse pubienne et en avant du rectum.

Configuration externe 

Morphologie
La prostate a la forme d’un cône un peu aplati d’avant en arrière avec une base située en dessous de la vessie et un sommet en bas et en avant représenté par l’apex prostatique. Elle mesure 25 à 30 mm de hauteur, 40 mm de diamètre transversal et 25 mm de diamètre antéropostérieur. Elle présente 4 faces : antérieur, postérieur et latérales, une base et un sommet ou apex. La prostate est entourée par une capsule qui constitue un rapport important pour la classification du cancer de la prostate mais aussi la prostatectomie radicale.

Anatomie zonale
Deux modèles anatomiques permettent une subdivision de la prostate donnant une approche physiopathologique. Le plus ancien est celui de Gil Vernet qui distingue une prostate crâniale dont les canaux excrétoires s’abouchent à la partie supérieure du Veru Montanum ; une prostate caudale dont les canaux s’abouchent à la partie inférieure du Veru Montanum et entre les deux zones, il existe une zone intermédiaire. Le second modèle proposé par Mc Neal (figure 2), distingue 5 zones au niveau de la prostate : une zone périphérique, une zone centrale, une zone transitionnelle, une zone fibromusculaire et une zone péri urétrale. C’est aux dépens de la zone périphérique que se développent 70% des cas de cancer de la prostate. Ensuite vient la zone de transition avec moins de 30% des cas souvent découvert de façon fortuite lors d’une résection de la prostate pour adénome bénin. Les cas de cancer de la prostate qui se développent au niveau de la zone centrale sont surtout le fait d’un envahissement secondaire.

Rapports

La loge prostatique 

Elle est constituée par plusieurs feuillets provenant des différentes aponévroses de la région :
– en avant et latéralement : la lame pré-prostatique ou fascia pelvien latéral, elle est en continuité directe avec la capsule prostatique. Ce fascia sera incisé lors de la prostatectomie radicale par voie rétro pubienne pour atteindre la prostate par son versant endopelvien avec ligature de la veine dorsale et récliné latéralement dans la prostatectomie radicale par voie périnéale pour éviter de blesser la veine dorsale de la verge et le plexus de Santorini.
– en arrière : l’aponévrose prostato-péritonéale de Denonvillers constituée de deux feuillets antérieur et postérieur. Elle est située entre la paroi antérieure du rectum et la face postérieure de la prostate. Le plan de décollement lors de la prostatectomie radicale passe entre ces deux feuillets antérieur et postérieur. Le nonrespect de ce plan du décollement expose au risque de marge positive.
– en bas : l’aponévrose périnéale moyenne et l’entonnoir des muscles releveurs de l’anus.
– en haut : le mince feuillet inter vésico- prostatique sépare inconstamment la loge prostatique de la loge vésicale.

Rapports dans la loge prostatique

– L’urètre prostatique traverse de haut en bas la prostate, admet une portion qui inclut le sphincter lisse et qui sera emporté avec la pièce opératoire. Sa paroi postérieure est soulevée par le veru montanum et les canaux éjaculateurs qui s’abouchent au niveau du colliculis séminal.

L’exérèse en bloc de la prostate, des vésicules séminales et des canaux déférents explique l’absence d’éjaculation après prostatectomie.
– Le sphincter strié constitue un anneau complet au niveau de l’urètre membraneux et de l’apex prostatique, tandis que plus haut, il se prolonge par une mince lame musculaire pré-prostatique. Il participe à la continence c’est pourquoi la section de ses fibres lors de la prostatectomie radicale doit se faire au maximum à 3 mm de l’apex de la prostate afin d’éviter le risque d’incontinence urinaire post-opératoire d’une part et d’autre part des marges d’exérèses pathologiques.

Rapports par l’intermédiaire de la loge

– La face antérieure
Elle répond à l’espace pré-prostatique qui est limité :
En avant : le 1/3 inférieure de la symphyse pubienne
En arrière : la lame pré prostatique
En haut : le ligament pubo- prostatiques
Latéralement : l’aponévrose périnéale moyenne
L’espace pré-prostatique contient le plexus veineux de Santorini qui reçoit les veines dorsales du pénis, les veines de l’urètre postérieur et de la prostate. L’abord de l’apex prostatique commence par l’hémostase de ce plexus afin de maintenir le champ opératoire le plus exsangue possible.

– La face postérieure
Elle répond par l’intermédiaire de l’aponévrose prostato-périnéale de Dononvilliers à la face antérieure du rectum. Cette aponévrose est fixée au sommet de la prostate et au bord postérieur de l’aponévrose périnéale moyenne par le petit muscle recto-urétral de Roux. La dissection de la face postérieure de la prostate est facilitée par la présence de cette aponévrose de Denonvilliers qui délimite une zone avasculaire et constitue un plan de clivage entre le rectum et la prostate. Si une plaie du rectum se produit lors de la dissection, il faut la reconnaitre et la réparer.

– Les faces latérales
La prostate répond latéralement à l’espace pelvi- rectal limité en dehors par les muscles releveurs de l’anus. Cet espace contient les bandelettes vasculonerveuses nécessaires à l’érection. Ces bandelettes sont préservées en menant la dissection au ras de la capsule prostatique.

– La base
Elle est de forme quadrilatère et présente 3 segments :
● un segment antérieur urétral ;
● un segment moyen inter urétéral ;
● un segment postérieur vésico-déférentiel qui répond à l’aponévrose de Denonvilliers qui contient les vésicules séminales et les ampoules déférentiels. Ces éléments feront parties de la pièce opératoire.

– L’apex
Il est en contact avec le sphincter strié et répond au plan moyen du périnée par le biais de l’urètre membraneux. La section de l’urètre doit éviter de léser le sphincter strié afin de préserver la continence postopératoire.

Vascularisation

Vascularisation artérielle

La prostate est vascularisée par des branches viscérales de l’artère iliaque interne :
– Artères vésicales inférieures qui donnent des rameaux destinées à la base de la prostate ;
– Artère prostatique : née souvent d’une des branches viscérales de l’artère iliaque interne, en général de l’artère vésico-prostatique ;
– Quelques rameaux de l’artère rectale moyenne.

Drainage veineux
Les veines qui drainent la prostate se jettent dans le plexus de Santorini. Les veines efférentes de ce plexus forment les veines vésicales qui rejoignent la veine hypogastrique.

Drainage lymphatique
Il est assuré par trois voies lymphatiques : les nœuds iliaques, pré sacrés et pré sciatiques. Ainsi le curage ganglionnaire doit intéresser les ganglions ilio-obturateur lors du premier temps d’une prostatectomie radicale.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
1. Rappels Anatomiques
1.1. Anatomie descriptive
1.1.1. Situation
1.1.2. Configuration externe
1.1.2.1. Morphologie
1.1.2.2. Anatomie zonale
1.2. Rapports
1.2.1. La loge prostatique
1.2.2. Rapports dans la loge prostatique
1.2.3. Rapports par l’intermédiaire de la loge
1.3. Vascularisation
1.3.1. Vascularisation artérielle
1.3.2. Drainage veineux
1.3.3. Drainage lymphatique
1.4. Innervation
2. Rappel clinique : Diagnostic du cancer localisé de la prostate
2.1. Circonstances de découverte
2.1.1. Cancer révélé par des signes de prostatisme
2.1.2. Toucher rectal
2.1.2.1. Élévation du taux de PSA total
2.1.2.2. Examen clinique
2.1.2.3. Evaluation du terrain et de l’état général du patient
2.2. Examens paracliniques
2.2.1. Examen biologique
2.2.2. Échographie endorectale
2.2.3. Ponction biopsie et examen anatomo- pathologique
2.2.3.1. Ponction-biopsie prostatique
2.3. Bilan d’extension
2.3.1. Bilan de l’extension
2.3.1.1. IRM pelvienne
2.3.2. Recherche de métastases ganglionnaires
2.3.3. Recherche de métastase osseuse
2.3.3.1. Scintigraphie osseuse
2.3.3.2. IRM
2.3.3.3. Tomodensitométrie thoraco- abdomino-pelvienne
2.4. Classifications des cancers de la prostate
2.5. Classification de D’Amico
3.Rappels thérapeutiques : indications de la prostatectomie radicale
3.1. Buts
3.2. Les méthodes thérapeutiques
3.2.1. La prostatectomie radicale rétro-pubienne
3.2.1.1. Technique opératoire : prostatectomie radicale rétro pubienne
3.2.1.1.1. Préparation préopératoire du patient
3.2.1.1.2. Anesthésie
3.2.1.1.3. Position du patient
3.2.1.1.4. Abord
3.2.1.1.5. Curage ganglionnaire ilio- obturateur
3.2.1.2. Technique de prostatectomie radicale
3.2.1.3. Suites opératoires
DEUXIEME PARTIE
4. Cadre de l’étude
5. Patients et méthode
5.1. Patients
5.1.1. Population d’étude
5.1.2. Critères d’inclusion
5.1.3. Critères de non inclusion
5.2. Méthode
5.2.1. Type d’étude
5.2.2. Paramètres étudiés
5.2.3. Critères de jugement
5.2.4. Collecte et analyse des données
6. Résultats
6.1. Etat de la continence postopératoire
6.2. Continence postopératoire selon l’âge du patient
6.3. Continence et données préopératoires
6.3.1. Valeur du PSAT préopératoire
6.3.2. Score de Gleason
6.3.3. Stade clinique
6.4. Données opératoires
6.4.1. Technique d’anastomose vésico-urétrale
6.4.2. Durée d’intervention
6.4.3. Traitement de l’incontinence urinaire
7. Discussion
7.1. Sévérité de l’incontinence urinaire
7.2. L’âge des patients au moment de la prostatectomie
7.3. PSA total et stade clinique
7.4. Le score de Gleason
7.5. La technique de l’anastomose vésico-urétrale
7.6. Durée de l’intervention
7.7. Traitement
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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