Principaux TMS à l’origine des diagnostics d’inaptitude
Il peut exister des variations en fonction des domaines d’activité ou bien de la région et des facteurs sociaux des salariés. Une étude menée à la Réunion [4] mettait en évidence que la première pathologie responsable d’inaptitudes concerne les TMS, avec 43% des cas. La deuxième est liée aux troubles de la santé mentale (TSM), représentant 26% des inaptitudes. Selon une étude de Dutheuil et al. [6] parmi 255 salariés déclarés inaptes au travail à la suite de TMS, 49% concernent les membres supérieurs, 39,2% la colonne vertébrale et 11,8% concernent la partie inférieure du corps. Une étude de Fouquet et al [22] met en évidence que les douleurs lombaires sont la principale cause de morbidité au travail. Environ 50% des travailleurs européens déclarent souffrir de douleurs lombaires (étude Eurofound 2012) et les douleurs lombaires font partie des six pathologies les plus importantes en termes de coûts pour la société [23] et fait partie des trois douleurs les plus handicapantes dans les pays développés [24] Selon Leclerc et al. [25]. Les TMS ayant un impact sur l’activité professionnelle des salariés sont fortement associés avec un niveau d’éducation bas sans distinction en fonction du sexe et des conditions de travail. ParotSchinkel et al. [26] met en évidence l’association de TMS dans des régions anatomiques multiples dans plus de deux tiers des cas avec comme régions les plus représentées, les membres supérieurs, la colonne vertébrale ainsi que les membres inférieurs. Petit et al. [27] mettaient en évidence que les douleurs lombaires sont le principal TMS à considérer dans le monde du travail en raison de sa forte prévalence ainsi que l’incapacité de travail pour les personnes atteintes en fonction de l’âge.
Définition de l’inaptitude dans son cadre juridique et retentissement économique
L’inaptitude médicale au travail peut être prononcée par le médecin du travail lorsque l’état de santé du salarié est devenu incompatible avec le poste qu’il occupe. Avant de prendre cette décision, le médecin du travail doit réaliser au moins un examen médical du salarié concerné et procéder à une étude de son poste de travail. C’est uniquement lorsqu’il constate qu’aucune mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n’est possible alors que l’état de santé du salarié justifie un changement de poste que le médecin du travail peut le déclarer inapte à son poste de travail. L’avis d’inaptitude oblige l’employeur à chercher un reclassement pour le salarié. Néanmoins, il peut procéder à son licenciement s’il est en mesure de justifier de son impossibilité à lui proposer un emploi compatible avec son état de santé, ou du refus par le salarié de l’emploi proposé. L’employeur peut également licencier le salarié si l’avis d’inaptitude mentionne expressément que tout maintien dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que son état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.
Analyse des données
Les multiples tables extraites de manière indépendante ont été transmises au promoteur de l’étude. Une harmonisation des codages des items qui différaient entre les SIST a été conduite. L’harmonisation des codages et la correspondance entre le code initial transmis par chaque SIST et le nouveau code ont, au préalable, été validées en comité de pilotage (COPIL). Dans un premier temps les facteurs de risque socioprofessionnels susceptibles d’être en lien avec la survenue des inaptitudes ont été étudiés. Pour ce faire, les variables socioprofessionnelles de l’échantillon des salariés inaptes ont été comparées avec celles de la population salariée « non inapte » suivie par les médecins volontaires. Ensuite les modalités d’entrée des salariés dans le processus d’inaptitude ont été étudiées. Aussi, les caractéristiques de la visite de pré-reprise et de la visite menant à l’inaptitude ont été décrites. Ces caractéristiques ont ensuite été déclinées en fonction des variables socioprofessionnelles des salariés inaptes. Les pathologies, maladies chroniques et handicaps motivant les avis d’inaptitudes ont été décrits. Les répartitions des principales catégories de pathologie ont été déclinées en fonction des variables socioprofessionnelles en vue d’identifier des profils de salariés davantage à risque de développer ces pathologies. Pour continuer, l’origine professionnelle ou non professionnelle de chaque catégorie de pathologie a été étudiée. Les analyses statistiques ont été réalisées avec le logiciel « Statistical Package for Social Sciences ». Les variables quantitatives ont été décrites par les effectifs et les pourcentages. Les variables qualitatives ont été comparées entre elles par le test exact de Fischer et les variables quantitatives et qualitatives par le test t ou le test F de Fisher-Snedecor. Des régressions logistiques multivariées ont ensuite été conduites afin de contrôler les facteurs de confusion. La qualité d’ajustement du modèle a été estimée par le test d’Hosmer-Lemeshow. Les Odds-Ratio (OR) et Intervalles de confiance (IC) à 95% ont été utilisés pour interpréter les résultats. Les valeurs de p<0,05 ont été considérées comme significatives.
Facteurs de risque de présenter une inaptitude au motif d’un TMS
Les salariés inaptes de plus de 54 ans sont plus à risque de présenter des TMS que les autres tranches d’âges, respectivement pour les dorsopathies l’OR ajusté est de 4,16 IC95% [2,50-6,94], des affections des tissus mous 12,9 IC95% [4,59-36,5] ou des arthropathies 17,2 IC95% [4,05-72,9], autres TMS 4,22 IC95% [1,89-9,41]. Les femmes inaptes sont significativement plus représentées dans les sous-catégories des affections des tissus mous (ORaj.=2,26 IC95% [1,55-3,29]) et des arthropathies (ORaj.=1,69 IC95% [1,06-2,70]) que dans celles des dorsopathies (ORaj.=1,20 IC95% [0,94-1,54]) et des « autres pathologies musculosquelettiques » (ORaj.=1,20 IC95% [0,80-1,80]). Parmi les inaptes, les femmes et les hommes présentent autant de risque de présenter une dorsopathie (IC95%, OR inclus 1). Le risque de présenter une dorsopathie augmente graduellement avec l’âge des « inaptes ». Les salariés inaptes de 25-34 ans ont 1,81 IC95% [1,09-2,98] fois plus de risque que les salariés plus jeunes d’en présenter une. Les salariés de plus de 54 ans ont 4,16 IC95% [2,50-6,94] fois plus de risque d’être atteint. Le risque de présenter une affection des tissus mous augmente également avec l’âge des « inaptes ». Aussi, l’augmentation de ce risque atteint jusqu’à 12,9 IC95% [4,59- 36,5] fois plus de risque de présenter une telle affection parmi les salariés inaptes de plus de 54 ans. Concernant les arthropathies, seuls les salariés inaptes de plus de 44 ans présentent un risque accru de présenter cette sous-catégorie de pathologies, jusqu’à 17,2 IC95% [4,05-72,9] après 55 ans. Les employés et les ouvriers inaptes ont plus de risque de présenter des dorsopathies par rapport aux professions intermédiaires, respectivement 2,84 IC95% [1,96-4,10] et 2,80 IC95% [1,88-4,17]. Les employés et les ouvriers inaptes ont respectivement 4,55 IC95% [2,36-8,76] et 5,79 IC95% [2,91-11,5] fois plus de risque de présenter des affections des tissus mous. Seuls les ouvriers inaptes présentent un risque accru de présenter des arthropathies 2,69 IC95% [1,39-5,21]. Les salariés inaptes de la section de la construction ont 2,66 IC95% [1,49-4,73] fois plus de risque de présenter une dorsopathie et 4,26 IC95% [1,42-12,8] fois plus de risque de présenter une arthropathie. Les salariés de l’administration publique, enseignement, santé et action sociale ont 1,85 IC95% [1,15-3,00] fois plus de risque de présenter une dorsopathie. Les salariés des activités spécialisées, administration et soutien aux entreprises ont, eux, 2,27 fois moins de risque de présenter une affection des tissus mous 0,44 IC95% [0,22-0,87]. Ces résultats mettent en évidence le besoin d’investiguer d’autres variables susceptibles de mieux expliquer la variabilité dans la survenue de ces pathologies.
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Table des matières
Inaptitudes au travail et troubles musculosquelettiques
Chapitre I. Introduction
I-1 Justification de l’étude
I-1-a. Etat des lieux
I-2 TMS Etat des connaissances
I-2-a Principaux TMS à l’origine des diagnostics d’inaptitude
I-3. Objectif de l’étude
I-3-a. Objectif primaire
Chapitre II. Matériel et méthodes
II-1. Type d’étude
II-2. Population cible et échantillon
II-3-a. Critères d’inclusion
II-3-b. Critères d’exclusion
II-3. Définition de l’inaptitude dans son cadre juridique et retentissement économique
II-4. Recueil des données
II-5. Analyse des données
Chapitre III. Résultats
III-1. Description de la population
III-2. Pathologies, maladies chroniques et handicaps motivants les avis d’inaptitude médicale au poste de travail dans le cadre des troubles musculosquelettiques
III-3. Facteurs de risque de présenter une inaptitude au motif d’un TMS
III-4. Origine professionnelle ou non professionnelle des pathologies motivant les avis d’inaptitude médicale dans le cadre des TMS
Chapitre IV. Discussion
IV-1. Confrontation des résultats avec les données de la science et de la littérature
IV-1-a. Incidence et causes médicales de l’inaptitude au travail pour TMS
IV-1-b. Facteurs de risque de l’inaptitude au motif d’un TMS
IV-2. Prévention de la désinsertion professionnelle
IV-3. Limites et forces de l’étude
Chapitre V. Conclusion
Références bibliographiques
Annexes
Liste des abréviations
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