Inadéquation du système pénal international dans son organisation en Afrique

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Intervention des autorités politiques dans le processus pénal international

L’agitation observée chez les pouvoirs politiques africains et dans certains milieux proches des pouvoirs en place ne concordait pas avec la volonté affichée des organes des Nations-Unies d’éradiquer le processus politique fondé sur l’emploi de la force armée pour conquérir ou pour conserver le pouvoir politique en Afrique. Comme l’avait indiqué M. Benjamin FERENCZ, ancien Procureur au Tribunal de Nuremberg, « il ne peut y avoir de paix sans justice ni de justice sans loi, ni de loi digne de ce nom sans un tribunal chargé de décider ce qui est juste et légal dans des circonstances données »195.
Aujourd’hui, la communauté internationale est plus que jamais décidée à faire face énergiquement à toute action civile ou politique qui tendrait à nuire gravement à l’humanité, à un groupe déterminé ou à une catégorie de personne donnée, à tout acte qui dégraderait cruellement l’individu ou qui nuirait violemment aux libertés, à point d’en empêcher leur exercice196. Or, il se trouvait que, des crimes de guerre et des crimes de génocide avaient été commis en Afrique selon des Experts indépendants et les Rapporteurs spéciaux de la Commission internationale des droits de l’homme.
Il est important de signaler cependant que les droits de l’homme ne traitent pas de la conduite des hostilités. Le droit international humanitaire consacre en revanche des règles et des obligations qui s’imposent à toutes les parties à un conflit. Ces règles humanitaires visent bien protéger des personnes qui ne participent pas ou ne participent plus aux hostilités. Ni les droits de l’homme ni les règles de droit humanitaire n’avaient été respectés lors des guerres au Rwanda ni en Sierra-Léone.
Il est bien reconnu aux Etats, par des instruments juridiques internationaux des droits de l’homme, le droit pour eux lorsqu’ils sont « confrontés à un danger public grave de suspendre les droits qu’ils consacrent, à l’exception toutefois de certains droits fondamentaux, qui doivent être respectés en toutes circonstances. Ces droits sont indérogeables, quel que soit le traité. Ce sont en particulier, le droit à la vie, l’interdiction de la torture, des peines et des traitements inhumains, de l’esclavage et de la servitude, ainsi que le principe de légalité et de non-rétroactivité de la loi »197. Ces droits fondamentaux que les Etats sont tenus de respecter en toutes circonstances, même en cas de conflits ou de troubles, sont considérés et appelés le noyau dur des droits de l’homme.

Tentatives d’instrumentalisation de la justice pénale internationale par des autorités politiques dans le déroulement du processus pénal

Le consensus qui existe autour de la décision de poursuivre les auteurs des crimes de guerre et des crimes de génocide perpétrés en Afrique et dans le monde, ne permettait pas facilement l’exercice d’une influence fructueuse dans le déroulement du processus pénal mis en place. Des manœuvres politiques pouvaient par contre bien affecter l’adhésion massive des africains au système pénal international mais ne pouvaient toutefois pas arrêter sa mise en œuvre.
Il a été remarqué que « malgré les obstacles rencontrés dans leur fonctionnement (lenteur de procédure, encombrement du greffe, arrestation difficile des inculpés…) ils se sont imposés comme des organes juridictionnels vivants et opérationnels avec lesquels les Etats doivent désormais compter »216.
Les difficultés et les obstacles que les tribunaux pénaux internationaux avaient connus en Afrique étaient généralement liés au comportement des pouvoirs africains, notamment ceux qui sont visés par des poursuites pénales internationales.
Les crimes en cause avaient été commis dans la perspective de la conquête ou de la conservation du pouvoir étatique. Dans ce cadre, les populations font toujours l’objet d’instrumentalisation de la part des acteurs politiques et elles sont violemment retournées les unes contre les autres.
Le professeur Georges BURDEAU a souligné à ce sujet, que « la plus rapide observation de la vie politique, qu’elle porte sur le passé ou le présent, relève la prodigieuse variété des forces dont elle est le lieu de rencontre. Il n’est guère de passions humaines généreuses ou sordides qui, à un moment ou à un autre, ici ou là, n’aient provoqué une lutte pour le pouvoir ou pesé sur ses décisions, guère de besoins qui n’aient utilisé l’instrument politique pour obtenir satisfaction, guère de circonstances qui, si inédites soient-elles, n’aient suscité une force prête à les affronter par la révolte ou par la loi »217. Le pouvoir politique est toujours structuré, chaque secteur disposant d’une mission déterminée.
Les crimes de guerre et les crimes de génocide avaient été commis dans une telle atmosphère politique que, chaque camp tentait de dominer et de soumettre l’autre par la force armée. Dans la recherche des responsabilités des crimes perpétrés, on ne peut se limiter aux seuls auteurs directs des crimes commis218. La logique pénale s’emploierait à retracer tout le processus qui a conduit aux crimes. Dans ce cadre, seront pris en compte, l’initiation des plans et des politiques ainsi que les auteurs directs. Toutes les personnes se trouvant dans cette chaine doivent faire l’objet de poursuites pénales en tout cas aux termes du contenu du système pénal international.
Les dirigeants rwandais et sierra-léonais, à un moment donné, avaient fait croire à une réelle volonté de collaborer avec les tribunaux pénaux internationaux dans leurs pays respectifs219. Mais il ne s’agissait que d’une tactique qui avait pour but d’instrumentaliser ces derniers dans la poursuite de leur mission. La tactique consistait à signaler et au besoin à livrer les membres du camp adverse aux tribunaux pénaux internationaux220.
Au Rwanda, il avait été constaté en effet que, s’agissant des enquêtes pénales visant les personnes appartenant au camp adverse, c’est-à-dire les personnes appartenant à l’ancien pouvoir, le gouvernement en place mettait tout en œuvre pour que ces enquêtes pénales aboutissent dans les meilleures conditions notamment à l’arrestation de ces personnes.
Mais lorsqu’il s’agissait d’enquêtes visant le pouvoir en place ou les membres de celui-ci, des entraves étaient dès lors posées partout : soit la personne recherchée par les tribunaux pénaux internationaux n’était jamais trouvée soit la personne est rendue inaccessible à cause des pressions et des menaces proférées par les partisans du pouvoir contre les enquêteurs du tribunal pénal international.
C’est ainsi qu’il avait été rapporté que le tribunal pénal international pour le Rwanda « a jugé un nombre important de hauts responsables politiques impliqués dans le génocide, il n’a entrepris aucune action contre les crimes de guerre ou les crimes contre l’humanité imputés au Front Patriotique Rwandais (FPR) »221, puisque le FPR est la force qui demeure à ce jour aux commandes de l’Etat rwandais.

DIFFICULTES RENCONTREES PAR LA COUR PENALE INTERNATIONALE (CPI) DANS LA REPRESSION DES CRIMES DE GUERRE ET DES CRIMES DE GENOCIDE EN AFRIQUE

Depuis la seconde guerre mondiale, l’idée de créer une juridiction pénale internationale permanente avait existé. Sa réalisation a pu être effective seulement en Juillet 1998 suite à des négociations suivies et sérieuses entre les Etats, lesquelles avaient concrètement débuté en 1994.
La criminalité avait pris des proportions extrêmes dans le monde, en particulier sur le continent africain. Le monde venait également de connaître des bouleversements importants qui toutefois commandaient une prise en charge globale des questions relatives à la paix et à la sécurité dans le monde. L’URSS a été morcelée, donnant naissance à de nombreuses Républiques ; tandis que l’Afrique était en pleine mutation démocratique avec ses lots de conflits.
Le monde connait aussi des « défis qui en nombre menacent bien l’humanité et la paix »229. La criminalité transfrontalière se développe, les djihadistes se manifestent partout et se montrent aussi menaçants, notamment dans les Etats africains.
Toutes ces situations alambiquées dans le monde avaient vivement conforté la communauté internationale dans sa volonté de mettre sur pied un système pénal international comprenant une Cour pénale internationale ; celle-ci devant juger les auteurs des crimes dûment spécifiés, commis dans le monde. Elle intervient devant l’inaction des Etats à la commission des crimes graves, des violations importantes des droits de l’homme et des Conventions de droit international humanitaire. Dans son organisation au travers du Traité de Rome230, la CPI se compose de la Présidence, des Chambres, du Bureau du Procureur et du Greffe. Dix-huit juges avaient été élus au scrutin secret lors d’une réunion de l’Assemblée des Etats-parties, en février 2003, parmi deux listes : une liste regroupant les candidats ayant la qualité de pénaliste, et l’autre comprenant les juristes spécialistes en droit international. Ils sont cependant tous ressortissants des Etats-parties.
Après leur engagement solennel, les juges élisent entre eux le président et ils forment également les Chambres aussi rapidement que possible. La présidence de la Cour est constituée du président de la Cour, du premier et du second Vice-président. Mais rappelons qu’ils sont toutefois tous élus par leur pair à la majorité, pour un mandat de trois ans.
La fonction judiciaire de la CPI s’organise autour de trois Chambres : la Chambre préliminaire, la Chambre de première instance et la Chambre d’Appel. Chaque Affaire devant la Cour est d’abord soumise à la Chambre préliminaire qui décidera ensuite si le cas peut être présenté devant la Chambre de première instance. Cette dernière vérifiera aussi la recevabilité de la requête en cause. C’est un « jugement avant le jugement ».
La Chambre d’Appel est composée du Président de la Cour et de quatre autres juges : la Chambre de première instance et la Chambre préliminaire sont toutes deux formées chacune de six juges au moins. Le Bureau du Procureur est une institution particulière au sein de la Cour. Il agit indépendamment en tant qu’organe séparé de la Cour.
Il est dirigé par le Procureur qui, à son tour, est élu au scrutin secret et à la majorité absolue de l’Assemblée des Etats parties. C’est la gambienne Fatou Ben SOUDA qui avait été élue Procureur de la CPI231, le 12 décembre 2011. Elle avait ainsi remplacé en juin 2012, Luis Moréno OCAMPO dont elle était l’adjoint depuis 2004.
Le Greffe est dirigé par un Greffier qui est également élu à la majorité absolue des juges de la Cour. C’est l’italienne Silvana ARBIA qui occupe cette fonction. Dans son fonctionnement, retenons que ce sont les Etats-parties ou le Conseil de sécurité qui saisissent le Procureur des situations concernant des crimes relevant de la compétence de la CPI. Le Procureur examine ensuite les renseignements disponibles et, à moins de conclure qu’il n’y a pas lieu de poursuivre, il ouvre aussitôt une enquête.

Les obstacles devant l’intervention de la CPI en Afrique

La CPI est entrée en mouvement d’abord parce que son statut avait été adopté notamment en 2002. Sa mise en action était ensuite motivée par l’avalanche et l’ampleur des crimes interdits commis dans le monde et particulièrement en Afrique. Aux dires du professeur Jean Marc SOREL, « saisie pour la première fois début 2004 par l’Ouganda et par la République Démocratique du Congo, la CPI semblait être immédiatement crédible »247.
Toutefois « quatre ans plus tard, la machine paraît s’être quelque peu grippée, et la faute n’en revient pas seulement aux éléments extérieurs »248. Autrement dit, la CPI avait bien attiré la confiance des Etats et c’est ce qui expliquait sa saisine courante par des Etats. Mais d’un coup, elle avait été lâchée par ceux-là mêmes qui lui avaient fait confiance.
Ces revirements d’opinions avaient bien des explications. Des causes matérielles indépendantes de la CPI et des raisons liées singulièrement à la CPI elle-même sont bien au fondement de cette réévaluation de la CPI en Afrique.
On peut constater que la nature de la CPI est en soi compliquée. Elle est avant tout une juridiction. A ce titre ses compétences sont alors définies dans son statut. A la lecture de celles-ci, il ressort que la CPI est chargée de poursuivre les auteurs des crimes dits internationaux dans le monde249. Les présumés accusés étant des pouvoirs étatiques et des chefs de guerre250, dès lors la CPI ne pouvait réellement pas bénéficier de l’estime ni des Etats où sont poursuivis des pouvoirs ni des groupes rebelles dont certains membres sont recherchés ou inculpés par elle.
Il n’est pas indiqué qu’en la saisissant, elle se rangerait du côté du plaignant. Des autorités politiques des Etats africains qui l’avaient saisi n’avaient pas été certainement épargnées par elle dans l’exécution de ses missions pénales. Après s’être montrés coopératifs, ces pouvoirs s’attendaient peut-être à la clémence de la CPI et pensaient qu’ils allaient ainsi échapper aux poursuites pénales internationales. L’ignorance de cette bonne foi de la Cour a peut-être frustré les pouvoirs étatiques africains et provoquer alors leur colère contre cette juridiction.
Du fait également de la pertinence des enquêtes pénales de la CPI, celle-ci avait dès lors montré son vrai visage qui dévoilait clairement l’absence de souplesse dans ses méthodes de travail. La découverte de la rigidité de la CPI l’avait alors conduit au cœur des critiques et des contestations en Afrique251.
Les pouvoirs politiques africains avaient dès lors réalisé qu’ils étaient bien des cibles potentielles et finir par comprendre ainsi la méfiance de certains Etats à l’égard de la CPI comme les Etats-Unis, l’Inde ou encore la Russie et tant d’autres qui, en raison des capacités juridiques de celle-ci en matière de répression des crimes de guerre et des crimes de génocide, notamment au plan international, n’avaient pas accepté de ratifier le traité qui l’avait instituée, contrairement aux Etats africains qui en nombre ont ratifié ce traité, même si parfois il était avéré que des ratifications du Traité sur la CPI avaient été obtenues à partir d’importantes pressions notamment françaises et européennes.

Constat de coopération limitée des Etats africains avec la CPI dans la répression des crimes de guerre et des crimes de génocide en Afrique

Les pouvoirs politiques se sont montrés plus hostiles à la CPI que les populations africaines. Cette hostilité des pouvoirs politiques africains à son égard s’explique par le fait que les poursuites de la CPI en Afrique ont visé principalement les pouvoirs en place263, les gradés de l’Armée et les chefs de guerre264. En effet, il s’agit des principaux acteurs qui se révèlent au cœur des conflits armés et des crimes. Les populations civiles ayant été les principales victimes des exactions commises, elles ne pouvaient pas alors avoir le même jugement que ces derniers au sujet de la politique pénale internationale en question.
Les crimes graves sont commis lors des crises politiques graves et des conflits armés découlant de la mauvaise gouvernance des Etats africains. Dans un tel contexte, les pouvoirs politiques échapperaient difficilement aux critiques, aux accusations voire aux poursuites pénales.
L’entourage immédiat des pouvoirs politiques africains et les pouvoirs eux-mêmes sont les premiers qui supporteraient bien la responsabilité directe des crimes commis et passibles devant la CPI. Au regard des compétences et des pouvoirs qui sont reconnus constitutionnellement aux pouvoirs africains, une grande part de logique existe dans un tel raisonnement de la CPI. Les chefs d’Etat africains concentrent en effet tous les pouvoirs étatiques entre leurs mains. Ils auraient pu dès lors, au moyen de ces pouvoirs constitutionnels, éviter à leur pays la perpétration des crimes interdits.
La responsabilité de protéger incombant à la communauté internationale, celle-ci ne pouvait aucunement rester indifférente à ces exactions criminelles graves contre les populations civiles, abandonnées de surcroît par les gouvernants. La mission de la CPI s’inscrit dans cet engagement international. Elle s’est dès lors attelée à sa mission partout dans le monde.
Devant cette offensive pénale internationale, le journaliste sénégalais Cheikh Yérim SECK s’était interrogé, s’il fallait véritablement croire à la fin de l’impunité dans le monde265 et particulièrement en Afrique. Il s’est demandé également, si « l’ère de l’impunité des dirigeants africains était révolue ? Victimes d’exactions, prisonniers d’opinion, exilés politiques et militants des droits de l’homme se prennent à rêver, depuis le 4 Juin, premier jour du procès de l’ex-chef de guerre et président libérien, Charles TAYLOR »266. Ce procès marquait bien la première fois qu’un ancien Président africain se retrouve dans l’obligation de répondre de ses crimes et actes graves devant un Tribunal et de surcroît hors d’Afrique.
Les chefs d’Etats africains n’avaient jamais pensé à la possibilité un tel procès. Ils venaient de s’en rendre compte. Des chefs d’Etats africains étaient conscients que devant la colère du peuple, la poursuite pénale du Chef de l’Etat pour haute trahison pourrait bien être sollicitée à l’intérieur du pays, notamment par l’opposition politique au parlement. Il avait été ainsi en Ethiopie du cas de l’ancien Président Mengistu Hailé MARIAM.
En effet, le 11 Janvier 2007 à Addis-Abeba tombait le verdict d’un procès-fleuve qui avait duré douze ans, avait passé au crible 211 chefs d’accusation (torture, assassinat de l’empereur Hailé SELASSIE, séquestration, spoliation, arrestations arbitraires, exécutions sommaires, etc.) et avait nécessité l’audition de 730 personnes ainsi que l’exploitation de 3000 documents. L’ancien Président Mengistu, qui « ensanglanta et affama l’Ethiopie de 1974 à 1991 »267, avait ainsi été reconnu coupable de génocide par la Haute Cour Fédérale de son pays et condamné en conséquence par contumace à la réclusion criminelle à perpétuité, peine que le Parquet avait d’ailleurs estimé insuffisante et avait interjeté appel de la décision, requérant l’application de la peine capitale.
Récemment, le Parlement de Madagascar, sous la pression de l’opposition parlementaire, avait voté aussi la destitution du Président de la République au motif que celui-ci avait à plusieurs fois violé la Constitution du pays. La Haute Cour Constitutionnelle avait cependant rejeté le recours des parlementaires au motif que les allégations du Parlement étaient infondées. Le Président Moussa TRAORE du Mali avait été aussi traduit en justice, mais plutôt devant la Cour d’Assises pour des crimes de sang. Il avait été condamné à la peine capitale à l’issue du procès ; la peine a été commuée en la condamnation à perpétuité. Le Président Alpha Oumar KONARE l’avait ensuite gracié. On pouvait légitimement se convaincre de l’évolution de la justice à l’intérieur des Etats africains. Mais dire qu’une Cour pénale internationale pourrait bien lancer un mandat d’Arrêt contre un Chef d’Etat, de surcroît en exercice, l’arrêter et le juger hors de son pays, cela paraissait incroyable pour les pouvoirs politiques africains et inacceptable. Le cas du Président TAYLOR et récemment celui du Président Laurent GBAGBO, le cas du Président Uhuru KENYATTA du Kenya et de son Vice-président et le mandat contre le Président Omar El BECHIR268 du Soudan avaient totalement convaincu la classe politique africaine de cette possibilité et de cette capacité offerte à la Cour Pénale Internationale de par son Statut.
D’ailleurs, lorsque le Président Omar El BECHIR s’était rendu le 14 Juin 2015 en Afrique du Sud pour la XXVe session de l’Union Africaine, un juge sud-africain avait été saisi d’une requête par une Organisation non gouvernementale, en vue de l’exécution des mandats d’Arrêt délivrés contre lui par la CPI en 2009, donc de l’arrêter et de le transférer à la Haye devant cette Cour. Le juge saisi avait pris à cet effet une ordonnance qui interdisait le Président Omar El BECHIR de quitter le territoire sud-africain avant que la justice ne statue sur la demande dont elle avait été saisie.

Les obstacles juridiques devant l’intervention de la CPI en Afrique

L’intervention de la CPI en Afrique est entravée aussi par des contrariétés entre les règles de procédure et de règlement des preuves devant la CPI et les législations nationales en Afrique. Les lois pénales en Afrique ne prennent pas suffisamment en compte la gravité et l’ampleur des crimes horribles commis lors des conflits armés. La logique internationale dans la répression des crimes de guerre et des crimes de génocide dans le monde est contestée par les pouvoirs africains.
Pour la communauté internationale, la poursuite pénale des auteurs des crimes les plus horribles par une juridiction internationale indépendante constitue la solution idoine aux conflits armés292, notamment en Afrique. Toutefois « la traduction des auteurs des crimes devant la juridiction pénale internationale ne sied pas aux procédures de règlement politique et pacifique des conflits »293. Pour la communauté internationale, l’intervention de la CPI viendrait bien appuyer les efforts déployés par la diplomatie dans le règlement des conflits armés. Mais pour de nombreux pouvoirs africains, en vue de donner plus de chance à la paix et à la stabilité politique en Afrique, il faudrait plutôt s’appuyer davantage sur les canaux diplomatiques pour mettre fin aux crises politiques qui dégénèrent ensuite en conflits armés.
La fin des conflits armés sonnera en fin de compte la fin des crimes. Des actions publiques viendraient ensuite compléter les démarches diplomatiques dans le cadre de la cessation des conflits armés. Ces actions publiques comportent l’indemnisation des victimes294 et la présentation de pardon aux victimes295. Mais pour la plupart des pouvoirs africains, la justice pénale coûte que coûte, dans le but de retrouver la paix, est inefficiente et improductive.
Du moment où ces recommandations africaines ne concordent pas avec la logique pénale des Organes des Nations-Unies, les pouvoirs politiques africains entreprennent dès lors peu de réformes législatives en vue d’adapter les législations pénales africaines à la dynamique pénale internationale de la répression des crimes de guerre et des crimes de génocide dans le monde. Cette nécessaire adaptation des lois pénales nationales est couramment rappelée aux pouvoirs africains.
Le Colloque qui a réuni à Dakar en octobre 2001, l’Organisation nationale des droits de l’homme, l’Agence intergouvernementale de la Francophonie et les membres de Lawyers committee for human Rights, avait souligné que « la mise en place d’une Cour Pénale Internationale juste et efficace requiert des Etats parties qu’ils procèdent à une adaptation de leur droit interne. Cette adaptation comporte deux volets essentiels qui consiste, d’une part, à assurer leur coopération avec la Cour et, d’autre part, à délimiter la compétence respective de la Cour et des juridictions nationales compte tenu du principe de complémentarité de la Cour »296.
Sans cette harmonisation des règles pénales dans les Etats africains et celles régissant la procédure et le règlement des preuves devant la CPI, cette dernière atteindrait difficilement ses buts recherchés : la répression des crimes de guerre et des crimes de génocide en Afrique restera dès lors toujours problématique. La correction des contrariétés entre les normes internationales et le droit interne est donc indispensable (Paragraphe 1). La poursuite efficace des auteurs des crimes internationaux exige également la levée de certaines difficultés juridiques (Paragraphe 2).

Difficultés dans la poursuite des auteurs des crimes internationaux en Afrique par la CPI

Les difficultés en Afrique dans la poursuite des criminels de guerre et de génocide avaient été observées avec l’inculpation massive d’africains devant la CPI. La qualité de certains accusés dont des Chefs d’Etat et d’anciens Chefs d’Etat était véritablement à l’origine de toutes les entraves intentées contre les actions de la CPI321 en Afrique. L’inculpation des dirigeants politiques africains avait suscité d’importantes contestations en Afrique à propos de la sincérité d’une telle démarche. Le Président de la République d’un Etat est bien le choix national. Il apparait comme le « plus illustre des citoyens ». La majorité des citoyens s’identifie en lui. L’inculpation de celui-ci traduit dès lors la contestation de ce choix national, notamment de la qualité du choix du peuple.
Des citoyens se sentent concernés dans cette optique. Ils restent partagés sur la réponse qui doit être réservée à une telle grave accusation. Si certains estiment la nécessité de poursuivre les procédures pour connaitre la véracité de l’accusation, d’autres pensent qu’une telle poursuite pénale est une atteinte à la souveraineté d’un Etat.
Mais au fond, la CPI ne se mêle pas du choix du Président d’un pays. Elle a été chargée de rechercher les auteurs des crimes graves, des violations graves des droits de l’homme et des quatre Conventions de Genève. Ces compétences lui avaient été reconnues dans son statut qui a fait l’objet de consensus entre les Etats et adopté par un certain nombre d’Etats dont des Etats africains. C’est la communauté internationale qui avait décidé l’interdiction totale de certains crimes et cela quelques soient les circonstances.
La CPI veille au respect de cette exigence internationale322. Si des Chefs d’Etats africains ont été visés par des poursuites pénales dans ce cadre, la procédure d’enquêtes et les procès qui s’en suivent sont ceux qui devraient en décider définitivement. Il faut surtout opposer la gravité et l’ampleur des crimes commis à la qualité des accusés pour comprendre la justesse de la justice pénale internationale323.
Au lieu d’œuvrer dans les règles juridiques pour être disculpées, les plus hautes autorités africaines, poursuivies dans le cadre de la répression des crimes internationaux, résistent en politisant la démarche de la CPI. Cette diversion des pouvoirs politiques africains est au fondement des difficultés que rencontre la CPI dans son travail en Afrique.
Celles-ci sont observées d’abord au niveau des enquêtes pénales, puis au stade de l’arrestation des présumés coupables et en ce qui concerne la situation des victimes et des témoins. Les enquêteurs de la CPI « rencontrent d’énormes difficultés pour réunir les éléments de preuve dans les Etats africains »324. C’est dans les Etats où les crimes graves en cause ont été perpétrés que les preuves peuvent être réunies. Etant donné que la CPI n’est pas au-dessus des Etats, elle ne passera que par les structures étatiques pour mener les enquêtes sur lesquelles elle assoie ensuite ses accusations.
Mais on a constaté que, couramment les manœuvres politiciennes commencent à ce niveau des enquêtes pénales par les pouvoirs politiques africains pour faire échouer la procédure pénale déclenchée contre eux devant la CPI. Les enquêtes pénales qui avaient visé par exemple l’inculpation d’Uhuru KENYATTA et son Vice-président au Kenya avaient connu d’importantes entraves à tel point qu’il avait été reproché au président Uhuru KENYATTA, à la CPI, d’avoir tenté à plusieurs reprises d’influencer et parfois de dissuader des témoins.
La CPI, avant de demander à un Etat de procéder à l’arrestation d’une personne soupçonnée d’avoir commis un crime grave, mène au préalable des enquêtes soit sur les informations qu’elle avait reçues des Experts internationaux ou des Organisations internationales de défense des droits de l’homme, soit sur des informations provenant de l’Etat concerné par le conflit en règlement.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : INEFFICACITE DU SYSTEME PENAL INTERNATIONAL MIS EN PLACE DANS LE CADRE DE LA REPRESSION DES CRIMES DE GENOCIDE ET DES CRIMES DE GUERRE EN AFRIQUE
TITRE I : DYSFONCTIONNEMENT DANS LA MISE EN ŒUVRE DU SYSTEME PENAL INTERNATIONAL MIS EN ŒUVRE CONTRE LES CRIMES DE GUERRE ET DE GENOCIDE
Chapitre I : Inadéquation du système pénal international dans son organisation en Afrique
Chapitre II : Fonctionnement catastrophique des tribunaux pénaux internationaux dans le cadre de la répression des crimes de guerre et des crimes de génocide en Afrique
TITRE II : DIFFICULTES RENCONTREES PAR LA COUR PENALE INTERNATIONALE (CPI) DANS LA REPRESSION DES CRIMES DE GUERRE ET DES CRIMES DE GENOCIDE EN AFRIQUE
Chapitre I : Les obstacles devant l’intervention de la CPI en Afrique
Chapitre II : Les poursuites pénales engagées en Afrique par la CPI dans le cadre de la répression des crimes de guerre et des crimes de génocides
DEUXIEME PARTIE : DE LA NECESSAIRE AFRICANISATION DU SYSTEME PENAL DE REPRESSION DES CRIMES DE GUERRE ET DE GENOCIDE
TITRE I : LES EXPERIENCES AFRICAINES DES TRIBUNAUX PENAUX INTERNATIONAUX DANS LE CADRE DE LA REPRESSION DES CRIMES DE GUERRE ET DES CRIMES DE GENOCIDE COMME PREMICES
Chapitre I : Le tribunal pénal international pour le Rwanda
Chapitre II : Cas du Tribunal Spécial pour la Sierra-Léone : (TSSL)
TITRE II : DE LA CREATION DE JURIDICTIONS PENALES AFRICAINES
Chapitre I : La Cour africaine de justice, des droits de l’homme et des peuples
Chapitre II : Chambres Africaines Extraordinaires
CONCLUSION GENERALE

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