Importance du salariat agricole

La population agricole mondiale compte aujourd’hui 2,6 milliards de personnes soit près de 41% de la population de la planète (Ferraton, 2009). Elle comprend 1,3 milliard d’actifs ce qui fait de l’agriculture le premier secteur d’activité au monde, loin devant toutes les autres activités des secteurs de l’industrie et des services qui sont beaucoup plus segmentés et spécifiques (Losch et al., 2013). L’agriculture constitue donc un des moyens d’existence de la majeure partie de l’humanité. La grande masse des actifs agricoles mondiaux, est située à 93% en Asie et en Afrique et travaille dans de très petites exploitations (Lowder et al., 2014).

Madagascar fait partie de ces pays où la part de la population agricole dans la population totale reste très importante. Selon l’Enquête Périodique auprès des Ménages de 2010, (INSAT, 2011) « l’agriculture reste toujours archi-dominante dans la structure des emplois. Elle compte plus de huit actifs occupés sur dix ». Les exploitations agricoles sont presque exclusivement familiales avec de petites structures (Sourisseau et al, 2014). Il existe cependant une grande diversité entre les exploitations compte tenu de l’histoire agraire et des conditions pédoclimatiques et socioéconomiques du pays. La disparité entre exploitations agricoles existe aussi au sein des différentes régions de l’île, notamment en fonction des facteurs de production dont elles disposent. Dans un pays où l’agriculture est faiblement mécanisée, le travail agricole, familial ou salarié, occupe une place importante dans le fonctionnement des exploitations agricoles. Selon Minten et al (2003) l’importance du salariat agricole est fonction de la spécialisation régionale : il est développé dans les régions où sont pratiquées les cultures de la vanille, du coton, de la canne à sucre et du tabac ; et dans les greniers à riz de Madagascar, plus particulièrement à Marovoay et au Lac Alaotra.

Les exploitations agricoles

Les exploitations agricoles sont les unités de base de la production Agricole (cultures, élevage, pêche, cueillette,…). Selon la définition de la FAO : « une exploitation agricole est une unité économique de production agricole soumise à une direction unique et comprenant tous les animaux qui s’y trouvent et toute la terre utilisée entièrement ou en partie pour la production agricole, indépendamment du titre de possession, du mode juridique ou de la taille […]. Dans la majorité des pays, la production agricole relève essentiellement du secteur des ménages. Le concept d’ « exploitation agricole » est donc étroitement lié au concept de « ménage » (FAO, 2007) et dans ce cas on les qualifie d’exploitations agricoles familiales.

Dans le contexte agricole malgache, les exploitations agricoles sont le plus souvent familiales avec un recours massif au travail familial. Elles diversifient en général leurs activités aussi bien agricoles que non agricoles. Les actifs de la famille s’engagent dans des activités non agricoles pour diversifier les sources de revenus et ainsi réduire les risques agricoles. Cette stratégie de diversification des activités et ressources financières est, dans la majorité des cas, adoptée afin de faire face à la pauvreté, de trouver des revenus complémentaires pour subvenir aux besoins, de réduire l’exposition aux différents risques et chocs, et pour pallier à l’absence et/ou la défaillance des marchés des facteurs de production et du crédit (Losch, 2013).

Les exploitations sont faiblement mécanisées et l’essentiel des travaux agricoles est réalisé manuellement. Pour faire face aux besoins en travail, la main d’œuvre familiale est souvent insuffisante, notamment aux périodes de pointe comme par exemple pour la culture du riz : le repiquage, le désherbage manuel ou la récolte. Dans ce cas, les exploitations agricoles ont recours à de la main d’œuvre extérieure à l’unité de production. A Madagascar, il existe deux modes d’échange de travail : l’un est monétarisé c’est le travail salarié temporaire ou permanent avec un travailleur qui reçoit une rémunération en nature et/ou en espèce pour le travail effectué, l’autre est non monétarisé basé sur la réciprocité, le travail effectué est remboursé par l’exploitation qui l’a reçu à celle qui le lui a donné, c’est l’entraide.

L’entraide agricole

Dans la culture malgache, le « fihavanana » constitue la valeur fondatrice de la société. C’est un principe d’organisation sociale à l’origine des solidarités entre les individus ou des groupes d’individus. Préserver le « fihavanana » est essentiel pour les malgaches. Pour maintenir ou marquer ce lien, les individus s’associent à différentes formes de solidarité comme la participation aux événements heureux ou malheureux, aux différentes obligations sociales et économiques « adidy » (Andrianatoandro, 2013, p.288). « Le fihavanana à Madagascar est un système de règles, normes et coutumes qui régissent la dynamique de la société locale, édictent les comportements interpersonnels, les modes de sociabilité et les stratégies anti-risques » (Sandron, 2008, p.507) Basé sur ce lien de fihavanana, le mode de production agricole sur les Hautes-Terres malgaches repose traditionnellement sur une entraide villageoise : le « valintanana » ou « mains qui se répondent ». Ce système consiste à rendre « de manière absolument exacte en nombre égal de personnes et de journées de travail » (Condominas, 1961, p.151) les travaux effectués par les autres sur ses propres parcelles. L’entraide demeure donc une activité pour les exploitations qui ne peuvent pas se permettre d’engager de la main d’œuvre extérieure faute de moyens financiers.

Le salariat agricole

Le salariat agricole est ici un contrat, généralement verbal, selon lequel un propriétaire ou un exploitant rémunère un individu qui travaille ses terres (Andrianatoandro, 2013) ou qui réalise contre rémunération une autre activité agricole au sens large c’est-à-dire y compris élevage, pêche, aquaculture, etc. Dans nos travaux, nous avons distingué salariat agricole et prestation agricole. Un salarié agricole travaille manuellement ou avec les outils et équipements de celui qui l’emploie. Un prestataire agricole réalise un travail pour un tiers en ayant recours à son équipement : la prestation comprend donc du temps de travail plus un équipement que cela soit une paire de bœufs avec une charrue ou une herse ou un motoculteur avec une remorque ou une charrue, une batteuse mécanique. En général, les prestations sont réalisées par des membres d’une exploitation qui est équipée et la rémunération est nettement plus élevée par rapport à une simple journée de travail .

Dans le contexte malgache, rares sont les ménages exclusivement salariés agricoles. Ce sont le plus souvent des exploitations agricoles. Ainsi, dans une zone rurale comme le Lac Alaotra, il y a d’une part des ménages ruraux, qui sont aussi pour la plupart des exploitations agricoles, dont le revenu et la sécurité alimentaire dépendent du travail salarié auprès d’autres exploitations agricoles, et d’autre part des exploitations, à priori de taille plus importante, qui ont recours à de la main d’œuvre extérieure salariée pour mener à bien leurs activités productives (production végétale, mais aussi d’élevage, de transformation de produit, etc.).

Pour les zones à forte production agricole comme les greniers à riz de Madagascar, la demande en travail est très élevée pendant les périodes de pointe de repiquage du riz et de récolte (Randrianarison, 2003). Selon Andrianatoandro, (2013), le salariat agricole est plus facile d’accès, c’est un service de proximité, rémunéré tout de suite une fois le travail fini. Les emplois agricoles sont pour la plupart temporaires et, surtout, ils offrent des revenus très limités dans l’année, puisque très souvent ils sont saisonniers. Ils représentent un complément de revenu assez modeste pour de nombreux ménages ruraux, même s’ils s’avèrent indispensables pour les plus pauvres, qui souvent n’ont pas d’autre alternative (B. Losch et al. 2013).

Comme le mentionne Minten et al (2003) le fonctionnement du marché du travail agricole à Madagascar est mal connu. Or c’est une composante importante des économies rurales, notamment dans les zones de productions commerciales. La présente étude vise à contribuer à une meilleure connaissance du fonctionnement des ménages ruraux vis-à-vis du marché du travail et de l’entraide. Les actions de développement rural doivent prendre en compte ce marché du travail avec ses limites et contraintes dans son fonctionnement pour l’amélioration de la productivité agricole et pour la réduction de la pauvreté par la création d’emplois.

Les prestations agricoles

Une prestation agricole est réalisée par une exploitation qui vend à une autre, un service réalisé avec du matériel ou un équipement agricole. Le cas le plus fréquent est la vente d’une prestation de travail du sol (labour ou/et hersage) réalisée avec un attelage en traction animale ou avec un motoculteur. Les motoculteurs, connus communément sous le terme de « kubota », sont très répandus dans la zone. En raison des vols fréquents de bœufs ainsi que de la réduction des aires de pâturages, les agriculteurs ont cherché une alternative à la traction animale. Aidés par la détaxation accordée par le gouvernement sur les importations de matériels agricoles en 2002, ils ont investi dans l’acquisition de motoculteurs souvent d’origine chinoise. Ainsi depuis 2002, sur les 919 exploitations suivies par le projet BVLac, 71 disposaient d’un ou plusieurs motoculteurs (soit 8% des exploitations) avec un maximum de 5 machines pour une seule exploitation (Rakotoarimanana et al., 2009). Par ailleurs, les propriétaires de ces matériels motorisés complètent souvent leurs revenus et facilitent la rentabilisation des équipements en effectuant des prestations de préparation du sol, mais aussi de transport ou de battage. Ainsi, les exploitations qui sont peu ou pas équipées, ou insuffisamment équipées, peuvent acheter des prestations avec des motoculteurs ou des matériels à traction animale pour les travaux de labour, de hersage, de transport de la récolte et parfois de battage.

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Table des matières

INTRODUCTION
1 CONTEXTE DE L’ETUDE
1.1 Les exploitations agricoles
1.2 L’entraide agricole
1.3 Le salariat agricole
1.4 Les prestations agricoles
2 MATERIELS ET METHODES
2.1 Le lac Alaotra
2.1.1 Localisation de la zone d’étude
2.1.2 Typologie des exploitations
2.2 Utilisation des données du ROR
2.3 Enquêtes complémentaires auprès des exploitations agricoles et des ménages
2.3.1 Choix des zones
2.3.2 Elaboration du questionnaire et définition de quelques termes utilisés
2.3.3 Constitution de l’échantillon et réalisation de l’enquête
2.3.4 Saisie et traitement des données
2.4 Limites et contraintes de la méthodologie
3 RESULTATS
3.1 Types de main d’œuvre et importance dans les zones d’études
3.1.1 Les différents types de recours au marché du travail
3.1.2 L’entraide agricole, une activité de plus en plus rare
3.1.3 Le recours à la main d’œuvre salariée : une pratique très répandue parmi les EA de la zone
3.1.4 La vente de main d’œuvre
3.2 Caractéristique des EA et typologie structurelle
3.2.1 Capital humain
3.2.2 Capital naturel
3.2.3 Capital social
3.2.4 Capital physique
3.2.5 Capital financier
3.2.6 Typologie des EA
3.3 Mise en relation entre les caractéristiques structurelles des EA et le recours au marché du travail
3.3.1 Le recours à de la main d’œuvre extérieure est lié à la superficie exploitée
3.3.2 Le salariat agricole : une option pour les moins dotés en moyen de production
3.4 La performance économique des EA et la sécurité alimentaire
3.4.1 La structuration des revenus et performances économiques
3.4.2 La place du revenu issu du salariat agricole dans le revenu total des EA
3.4.3 Le pouvoir d’achat du salaire agricole
4 DISCUSSIONS
4.1 Une caractéristique des EA proches du ROR
4.2 L’entraide agricole supplantée par le salariat agricole
4.2.1 Situation similaire au niveau national
4.2.2 L’entraide, plus une relation d’échange que de réciprocité
4.3 Le recours au salariat agricole dépend de la surface cultivée par les EA
4.4 Le recours à la main d’œuvre extérieure à l’exploitation, une option indispensable pour les EA
4.5 Le salariat agricole, première source de revenu pour les pauvres
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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