Qui dit développement inclue d’une manière irréversible l’environnement. Il n’est guère nécessaire d’insister aujourd’hui sur l’importance d’un thème tel que l’environnement dont on se gardera, momentanément de donner une définition précise. La protection ou la restauration de l’environnement sont en effet considérées comme l’un des défis majeurs de notre temps : il en va, dit-on, de la qualité de la vie, voire de la vie même des générations futures. Cette conception est particulièrement répandue dans les sociétés industrialisées qui ont, sans doute plus que les autres, malmené leur milieu naturel et subit en retour les effets les plus spectaculaires, de leur incurie. Cependant, la situation n’en est pas moins grave dans les pays en voie de développement comme Madagascar, où le cas extrême de la famine et notamment dans le sud, liée à la dégradation écologique et à la déforestation, amène à s’interroger sur la manière objective de trouver une solution qui réduirait ou éradiquerait la pauvreté et qui serait en même temps écologique. Et comme la révolution agricole serait la clé de voûte du développement dans ce type de pays, il s’agirait plutôt de savoir comment orienter la révolution agricole vers le développement toujours et encore, d’une manière écologique. Dans ce sens, viser une production agricole plus importante suppose d’agir sur les techniques de production et sur les structures sociales de l’agriculture ainsi que les modes de culture.
Importance de l’activité agricole dans le développement
Il serait juste d’affirmer que la révolution agricole est une condition nécessaire mais non suffisante pour le développement, les théories et l’histoire peuvent le justifier. Toutefois, il faudrait tenir compte du fait que la mise en œuvre d’une politique agricole s’avère être le plus souvent très difficile et requiert un certain temps.
Les théories
• L’école physiocrate :
« La physiocratie est un courant économique qui ne durera que quelques années en France au XXVIIIe siècle et qui ne regroupera que peu de personnes : François Quesnay (1694-1774), son chef de fil et médecin de la marquise de Pompadour et de Louis XV, entouré de quelques nobles et de quelques ecclésiastiques. La doctrine physiocratique eut d’illustres sympathisants : le ministre français Turgot, Catherine II la Grande, en Russie, ou le roi Stanislas II, en Pologne. Pour les physiocrates, libéraux hostiles aux interventions de l’Etat, le véritable enrichissement n’est pas monétaire mais agricole. Ils préconisent une vie naturelle aux champs et considèrent qu’il faut augmenter la production de richesses agricoles.
Pour cette école, seule l’agriculture est en mesure de produire un surplus aux delà des matériaux utilisés, c’est-à-dire un produit net. » Il est tout de même nécessaire d’affirmer que l’erreur des physiocrates est évidemment de limiter la définition de la richesse uniquement au produit agricole et de considérer que seule l’activité agricole est productive.
Les faits historiques
La révolution agricole :
La révolution agricole est surement la clef de voute du développement. En effet, il est facile de comprendre que l’intégration de l’industrie dans l’économie nationale n’est possible, dans un pays qui commence son processus de développement, que si les progrès de l’agriculture le permettent. Pour l’illustrer, il suffit de rappeler premièrement que les économies traditionnelles sont constituées en majeure partie de paysans et deuxièmement, que, même dans les économies les plus modernes, les hommes se nourrissent toujours de produits agricoles. Bien qu’il soit habituel de parler des innovations technologiques qui ont accompagné les transformations essentielles dans l’industrie métallurgique et textile de la Grande-Bretagne au XVIIIe siècle, il est encore plus important de rappeler que ces inventions n’ont porté leurs fruits économiques que parce que les progrès de la productivité agricole l’ont permis. En effet, dans l’industrie métallurgique, l’accroissement de la productivité agricole a été un élément décisif de la mise en œuvre de procédés nouveaux. La demande de produits métallurgiques était encore essentiellement d’origine agricole : roues, outils aratoires, fers de chevaux…C’est donc à partir d’une augmentation significative de la demande effective, c’està-dire de la demande issue du pouvoir d’achat des agriculteurs, qu’une production de masse a pu être économiquement entreprise. L’utilisation du charbon pour produire du fer aurait été, à cette époque, sans intérêt si les paysans n’avaient pas eu les moyens d’augmenter sensiblement leur demande de produits ferreux : créant ainsi, un processus cumulatif qui allait, à son tour, augmenter la productivité agricole grâce à l’amélioration des techniques disponibles.
Ainsi fût-il aussi du progrès de l’industrie textile, bien que cela soit moins directement perceptible. Car les surplus disponibles de l’agriculture ont, non seulement, créé un débouché massif pour les produits des nouvelles manufactures textiles, mais curieusement aussi, par un processus de « feed-back », ils ont, à la fois, permis la rationalisation de ces procédés defabrication et augmenté la production agricole. L’apparition des textiles créés selon des procédés techniques mécaniques a entrainé une baisse de prix qui a concurrencé victorieusement les artisans villageois qui ont été alors, obligés :
– ou bien d’abandonner leur artisanat et sont venus grossir le prolétariat urbain nécessaire aux manufactures ;
– ou bien de cultiver plus intensément les terres qu’ils pouvaient avoir à leur disposition, ce qui augmentait la production agricole disponible.
Modalités de réussite
Parler de réussite dans le domaine de l’agriculture sous entend une production agricole élevée due à une productivité accrue et un rendement croissant. Il s’agirait donc dans cette section de distinguer les différentes contraintes qui conditionnent la productivité agricole. Elles peuvent être d’ordre environnemental, d’ordre technologique ou budgétaire, mais aussi relatives à la volonté humaine ; sans oublier les apports d’énergie tels que le travail, les animaux et les outils.
Contraintes environnementales
Les physiocrates sont sans aucun doute fondés à réclamer une politique agraire comme précondition du développement. Pour ce faire, il s’agirait d’utiliser la terre comme ressource principale de richesse. Par le support qu’elle fournit aux plantes et par les éléments nutritifs qu’elle leur apporte, la terre joue un rôle déterminant en agriculture. Les premiers agriculteurs, ne disposant que de moyens manuels pour l’ameublir et la préparer à recevoir les graines de la future récolte, sans beaucoup de moyens pour compenser l’exportation de matière nutritive que constituait cette dernière, commencèrent par travailler les régions les plus fertiles. Mais cette ressource n’est pas inépuisable, ne serait-ce que de par sa fertilité.
Cette rareté peut s’expliquer par les rendements décroissants de Ricardo d’une part et d’autre part par la dégradation de la terre.
Ricardo et les rendements décroissants
« David Ricardo (1772-1823) est un économiste classique britannique. Son ouvrage « Principes de l’économie politique et de l’impôt », paru en 1817, se compose de deux parties : la première est pessimiste car il y explique que l’économie tend vers un état stationnaire ; la deuxième partie est beaucoup plus optimiste puisqu’il y détaille les moyens pour reculer l’échéance de cet état stationnaire. » Ricardo a souligné dans son ouvrage que le rendement de la terre est décroissant : il affirme qu’en raison de l’augmentation de la population, il est nécessaire de mettre en culture de nouvelles terres. Mais comme les parcelles les plus fertiles ont été cultivées les premières, chaque nouvelle terre a des rendements plus faibles que la terre précédente.
La dégradation de la terre
La dégradation des terres concerne les modifications que subit le sol en place. Elles sont de nature physique, chimique ou biologique .
Dégradation chimique et biologique
Elle est due à l’influence de trois phénomènes naturels, aggravés par des pratiques agricoles inappropriées et un quatrième dû exclusivement à des activités humaines : la pollution d’origine industrielle.
• Pertes d’éléments nutritifs et d’humus
Elle se produit dans toutes les terres mais elle est plus grave dans celles qui naturellement ont une fertilité faible à moyenne. Le processus est le suivant : les récoltes sont prélevées mais les éléments nutritifs du sol utilisés par les plantes pour leur croissance ne sont pas remplacés par des engrais minéraux ou des amendements organiques. Peu à peu la terre est épuisée et le rendement des récoltes diminue. Ce type de dégradation reste d’un niveau faible tant que l’agriculteur pratique la jachère naturelle. La terre est cultivée durant 3 à 4 ans puis laissée en jachère 10 à 15 ans ; cela suffit pour restaurer la fertilité. Actuellement la pression démographique fait que le temps de jachère est raccourci ou même supprimé. L’utilisation continue de la terre sans apport d’éléments nutritifs entraine une chute inexorable de la production. La perte d’humus qui suit nécessairement le défrichement de la végétation naturelle aboutit au même résultat.
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Table des matières
INTRODUCTION
Première partie L’AGRICULTURE BIOLOGIQUE ET L’ETUDE DES CRITERES DE PAUVRETE
Chapitre RELATIONS ENTRE ENVIRONNEMENT, AGRICULTURE ET PAUVRETE
1.1. Importance de l’activité agricole dans le développement
1.1.1. Les théories
1.1.2. Les faits historiques
1.2. Modalités de réussite
1.2.1. Contraintes environnementales
1.2.2. Les contraintes technologiques et budgétaires
1.2.3. La volonté humaine
1.2.4. Les apports d’énergie : travail, animaux, outils
1.2.5. Evolutions récentes
1.3. Environnement, Agriculture et pauvreté : Cas de la Région de Vakinankaratra
1.3.1. Evolution des indicateurs environnementaux
1.3.2. Raisons du déclin de la fertilité du sol
1.3.3. Origines de l’érosion
1.3.4. Implications relatives aux constats
Chapitre 2 L’AGRICULTURE BIOLOGIQUE
2.1. Les principes du système agroécologique : le semis direct
2.2. Objectif du semis direct
2.3. Avantages du semis direct
Chapitre 3 LES CRITERES DE PAUVRETE : la pauvreté chronique du monde rural à Madagascar
3.1. La pauvreté à Madagascar
3.1.1. Evolution de la pauvreté à Madagascar
3.1.2. Interprétations
3.1.3. Les défis à soulever
3.2. La pauvreté chronique du monde rural
3.2.1. La production agricole
3.2.2. Le revenu des ruraux
3.2.3. La nutrition à Madagascar
3.2.4. Les services sociaux
Deuxième partie L’AGRICULTURE BIOLOGIQUE POUR LA REDUCTION DE LA PAUVRETE
Chapitre 1 LE SYSTEME AGROECOLOGIQUE : Cas de la Région d’Antsirabe
1.1. Etude comparative sur les temps de travaux
1.2. Etude comparative sur les niveaux de fumures
1.3. Etude comparative sur l’évolution des rendements annuels
Chapitre 2 LES ENJEUX DANS LE SYSTEME AGROECOLOGIQUE
2.1. Impacts socioéconomiques du Semis direct sur Couverture Végétale
2.2. Changement de productivité associé à l’adoption du Semis direct sur Couverture Végétale
2.3. Les contraintes et les perspectives d’avenir liées à l’application du Semis direct sur Couverture Végétale
2.3.1. Les contraintes liées à l’application du Semis direct sur Couverture Végétale
2.3.2. Les perspectives d’avenir liées à l’application du Semis direct sur Couverture Végétale
CONCLUSION
Bibliographie
Annexe 1
Annexe 2
Annexe 3