Analyse de données
Les données de base nous ont permis de décrire notre échantillon en ce qui concerne les données anthropométriques, la blessure médullaire, les activités usuelles, l’historique de chute, le relever du sol, l’auto-évaluation de l’équilibre en position assise ainsi que l’évaluation de la crainte de chuter par la question « En général, avez-vous peur de tomber de votre ou avec votre fauteuil roulant ? », les réponses possibles étant « pas du tout », « un peu », « moyennement » ou «beaucoup ». Les participants ont également évalué leur peur de chuter sur l’échelle visuelle analogique de 10 cm (0 : «aucune crainte » ; 10 : « crainte maximale ») et ils ont répondus aux questionnaires SCI-FCS, FSS, HADS-A, HADS-D et SEWMS. Nous avons calculé les moyennes et l’écart-type pour l’âge, le poids, la taille et les scores des questionnaires. Pour l’échelle visuelle analogique et le nombre de chutes antérieures, nous avons calculé la médiane et l’écart-type. Pour évaluer la validité de construit, nous avons mesuré les corrélations entre le questionnaire SCI-FCS et les scores de l’évaluation de la peur de chuter (EVA) et des questionnaires FSS, HADS et SEWMS.
Nous avons fait de même avec la question sur la peur de chuter. Du fait que ce type de corrélation peut se réaliser avec les corrélations de Pearson, de Kendall et de Spearman, en fonction de la normalité de la distribution des données, nous choisirons le test adéquat. En effet, le coefficient de Pearson identifie et teste la force d’un lien entre deux ensembles de données avec une distribution normale tandis que le coefficient de corrélation de Spearman et le coefficient de Kendall sont utilisés pour deux ensembles de données qui ne suivent pas une loi normale. Leurs résultats varient entre -1 et 1. Plus ils se rapprochent de ces valeurs limites, plus il existe une forte relation (Clerici, 2006). Afin d’évaluer la normalité de la distribution des données nous avons effectué le test de Shapiro-Wilk. Il est le test de normalité le plus fiable. La normalité est vérifiée quand la valeur est élevée (« Tests de normalité (Shapiro-Wilk…) », 2015).
Afin de comparer les scores des différents questionnaires que nous avons soumis aux participants, nous avons dû les ajuster. En effet, les questionnaires n’ayant pas tous les mêmes échelles, nous avons dû les transformer pour obtenir une relation linéaire. Nous avons tout d’abord mis tous les questionnaires sur un score minimal de zéro, en respectant l’écart entre les résultats maximaux et minimaux. Ensuite, nous avons divisé l’écart du score SCI-FCS de 48 par les écarts des autres questionnaires. Finalement, nous avons multiplié ce quotient avec tous les scores des questionnaires FSS, HADS-A, HADS-B et le SEWMS. Pour mesurer la consistance interne, nous avons utilisé le coefficient alpha de Cronbach. Une haute valeur de ce coefficient indique une forte corrélation entre les items de l’échelle. Une valeur entre 0.70 et 0.90 est recommandée pour avoir une bonne fiabilité interne (Terwee et al., 2007). Le coefficient de corrélation intra-class (ICC2,1) a été utilisé pour évaluer la fiabilité test-retest. Un ICC <0.40 démontre une faible fiabilité, de 0.41 à 0.59 une fiabilité modérée, de 0.60 à 0.74 une bonne fiabilité et >0.75 une excellente fiabilité (McDowell, 2006). Le coefficient Kappa de Cohen complète l’ICC. Il mesure l’accord entre deux variables qualitatives ayant les mêmes modalités, dans notre cas pour le test-retest (Santos, 2015). Cohen est compris entre -1 et 1. Un résultat négatif correspond à un grand désaccord, un résultat compris entre 0.41 et 0.60 exprime un accord moyen et un résultat entre 0.81 et 1 signifie un accord excellent (Santos, 2015).
Description de l’échantillon
Sur un total de 19 participants, nous avons dû exclure une personne, car elle n’utilisait pas son fauteuil roulant pour plus de 75% de ses activités quotidiennes. Notre échantillon se compose donc de 18 sujets. Trois personnes n’ont pas répondu une deuxième fois au questionnaire ; les données concernant la fiabilité ont donc été réalisées avec 15 participants. La description de notre échantillon est présentée dans le tableau 2 (Tableau 2 : tableau démographique). Le panel des participants se compose d’un ratio homme/femme de 13/5 avec une moyenne d’âge de 49 ans. Dix-sept lésions médullaires sont de type traumatique et une est due à la maladie. Les niveaux de lésion se situent entre C7 et L1 et la moyenne du temps écoulé depuis leur lésion est de 21 ans. Nous avons calculé une médiane de 2 pour le nombre de chute durant les douze derniers mois. À la question « En règle générale avez-vous peur de tomber de votre ou avec votre fauteuil roulant?», six personnes ont répondu « pas du tout », dix « un peu », une « moyennement» et une « beaucoup ». Sur l’échelle visuelle analogique (EVA), la médiane des résultats est de « 2 » et l’écart type de 2.272. La moyenne du score total de l’échelle de sévérité de fatigue est de 31.444 avec un écart type de 11.226 et celle de l’échelle de l’estime de soi sur la mobilité en fauteuil roulant est de 33.444 et l’écart-type de 6.06. L’échelle de mesure des troubles anxieux et dépressifs présente des moyennes de 6.888 et de 3.333 et des écarts-type de 3.358 et de 3.804 pour respectivement sa partie anxiété et sa partie dépression. Nous n’avons pas pris en compte la question sur la classification ASIA et sur le nombre de chute depuis la lésion car trop de gens n’y ont pas répondu.
Description de l’échantillon
L’âge moyen de nos participants s’élève à 49.8 ans. Cela se révèle plus haut que les sujets de l’étude de Boswell-Ruys (2010), mais partage ce nombre avec les deux études qui ont évalué la validité et la fiabilité de ce questionnaire en suédois (Butler Forslund et al., 2016) et en norvégien (Roaldsen et al., 2015). Notre échantillon comprend 72% d’homme, ce qui est représentatif de la population des médullo-lésés. La moyenne de la durée écoulée depuis la lésion se situe à 21 ans ; cette durée est bien plus élevée que celle des études de Boswell-Ruys (2010), de Butler Forslund (2016) et de Roaldsen (2015). Ce score peut être expliqué par le faible échantillon. Les niveaux de lésion sont bien répartis entre C7 et L1, ce qui nous donne un panel bien équilibré. A la question « En général, avez-vous peur de chuter de votre ou avec votre fauteuil roulant ? », 66% a répondu avoir peur, mais seulement 6% a répondu par « beaucoup ». Cette proportion se corrèle bien avec le score moyen de l’échelle visuelle analogique qui se chiffre à 2/10, avec un seul participant qui a misé haut (9/10). Le score moyen du questionnaire SCI-FCS se situe à 20/64. Il se rapproche des études ayant évalué la validité et la fiabilité du SCI-FSC (Boswell-Ruys et al., 2010; Butler Forslund et al., 2016; Roaldsen et al., 2015). Par contre, le score maximal atteint se situe à 39 alors qu’il se situe à 59 dans l’étude de Boswell-Ruys (2010), de 64 dans l’étude de Butler Forslund (2016) et de 46 dans l’étude de Roaldsen (2015). Ce score de 20/64 se retrouve dans la question sur la peur de chuter et l’échelle visuelle analogique. La moyenne peu élevée du score SCI-FCS peut également se corréler avec la médiane du nombre de chutes durant les douze derniers mois qui est de 2. Selon Boswell-Ruys et al. (2010), un nombre de chutes supérieur ou égal à un se révèlerait significatif à une peur de chuter plus basse.
Cela peut être aussi dû au nombre d’années vécues depuis la lésion élevé. Les participants auraient acquis les habiletés que demande le déplacement en fauteuil roulant comme le montre la valeur élevée du score moyen du questionnaire SEWMS (33/40) qui évalue la confiance dans les habiletés en fauteuil roulant. La principale limite que nous avons rencontrée est la difficulté de recruter assez de participants, malgré une bonne collaboration avec la Clinique Romande de Réadaptation SUVA et un contact avec des associations romandes. Avec 18 participants, notre échantillon est de faible taille, par rapport aux recommandations de Terwee (2007) qui suggère au moins 50 personnes pour obtenir des résultats significatifs. De plus, il se trouve que la région dans laquelle l’étude s’est déroulée (Suisse romande) est une région à faible densité d’habitants et que les blessés médullaires de cette région sont fortement sollicités à participer à des études. La phase de recrutement aurait dû durer plus longtemps et nous aurions pu élargir nos recherches au travers des frontières (France, Québec). Toutefois, nous sommes satisfaites du pourcentage de réponses élevé au retest (15/18). Les recueils de données ont été auto-administrés par les participants eux-mêmes, ce qui peut biaiser certaines données comme par exemple le nombre de chutes. Pour cette raison, nous avons dû abandonner certaines questions auxquelles beaucoup de personnes n’ont pas pu répondre, tel que le score ASIA (ABCD/sensitif/moteur). Par contre, les questionnaires FSS, SEWMS, HADS et SCI-FCS ne présentent pas de données manquantes. La variation démographique ainsi que la variation des réponses montrent cependant un échantillon adéquat pour évaluer les propriétés psychométriques de la version francophone du questionnaire SCI-FCS.
Consistance interne du questionnaire
La consistance interne pour le questionnaire « test » (0.893) se révèle légèrement en-dessous de celle du questionnaire original en anglais (0.92) (Boswell-Ruys et al., 2010) et de la traduction suédoise (0.95) (Butler Forslund et al., 2016), mais juste au-dessus de la traduction norvégienne (0.88) (Roaldsen et al., 2015). Par contre la consistance du questionnaire « retest » (0.968) est supérieure à toutes les valeurs obtenues. Ceci démontre une excellente consistance interne de la version francophone du questionnaire SCI-FCS. La question 10 « cuisiner ou préparer un repas (par ex. faire un sandwich, utiliser la cuisinière) », se corrèle le moins bien avec les autres items du questionnaire. Nous supposons que cette faible corrélation est due à l’activité elle-même. Elle ne demande pas autant d’habiletés avec le fauteuil roulant et n’exige pas un aussi grand déplacement du centre de gravité que les autres activités du questionnaire, au vu du fait que la plupart des cuisines sont actuellement agencées de manière fonctionnelle pour les personnes en fauteuil roulant. Nous notons que la question 10 est liée à la question 15 (« faire ses courses ») et partagent leurs basses corrélations avec les items Q1, Q2, Q6 et Q9. Les questions visées font référence pour trois d’entre elles à des activités dans le lit et non dans le fauteuil roulant. Les difficultés rencontrées dans ces situations sont donc différentes.
Les activités des questions 1, 2 et 6 impliquent un changement de position dans le lit ou un transfert tandis que les activités des questions 10 et 15 demandent plutôt une bonne organisation, des stratégies et un bon équilibre assis dans la chaise roulante. La mauvaise corrélation entre les items Q10, Q15 et Q9 « ramasser des objets par terre » n’est pas si évidente. En effet, la question 9 est l’inverse de la question 8 « atteindre des objets haut placés » et pourtant la Q8 présente une meilleure corrélation avec la Q10 et la Q15. Les gestes au-dessus de la tête se retrouvent certes plus que les gestes vers le sol lors de la préparation d’un plat ; l’explication peut être identique pour l’activité de faire ses courses.
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Table des matières
1. Introduction
1.1 Contexte physiothérapeutique
1.2 Concepts théoriques
1.2.1 Lésions médullaires
1.2.2 La peur de chuter
1.2.3 Échelles de mesure
1.2.4 Validité
1.2.5 Fiabilité
1.3 Question de recherche et hypothèse
1.4 Objectifs de l’étude
2. Méthode
2.1 Traduction et adaptation transculturelle
2.2 Validation de construit et fiabilité
2.2.1 Population
2.2.2 Recrutement
2.2.3 Mesures
2.2.4 Gestion des données
2.3 Commission d’éthique
2.4 Analyse de données
3. Résultats
3.1 Description de l’échantillon
3.2 Consistance interne du questionnaire
3.3 Validité de construit
3.4 Fiabilité (Test-retest)
4. Discussion
4.1 Implications pour la pratique de physiothérapeutes
4.2 Pistes de recherches futures
4.3 Apports personnels
5. Conclusion
6. Références
7. Liste des illustrations
8. Liste des tableaux
9. Annexes
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