Implication dans le rechauffement climatique
Le pergelisol
Le pergélisol est defini comme etant le sol gele pendant une periode d’au moins deux annees consecutives (Margesin, 2009). Celui-ci est compose generalement de roches, de sediments, de matieres organiques ou d’autres materiaux terrestres. Il existe un gradient de pergelisol en fonction de la latitude (Figure 1.1). En effet, plus on se rapproche du pole nord (90°N), plus la concentration du sol en pergelisol est elevee. Cette logique est egalement applicable en fonction de l’altitude. On retrouve du pergelisol de type alpin a des latitudes plus basses en region montagneuse telles que dans les hauts plateaux des Alpes et du Tibet (Boeckli et al., 2012; Wu et al., 2010). Differents termes sont utilises pour qualifier le pergelisol en fonction de sa concentration dans le sol : continu (90-100% du territoire), discontinu (50-90% du territoire), sporadique (10-50% du territoire) et isole (2-10% du territoire) (Brown et al., 1998). Il est estime que le pergelisol recouvre pres du quart des terres emergees dans l’hémisphère nord, soit environ 26 millions de km2 (Zhang et al., 2000). On constate rapidement que le pergelisol est reparti majoritairement entre la Russie et le Canada. L’Alaska, le Groenland et la Scandinavie en sont egalement pourvu mais avec une etendue moindre (Margesin, 2009). Un sol pergelisole comprend deux couches distinctes. Il y a d’abord a la surface, sous le couvert vegetal, la couche active. Son epaisseur est dependante de la capacite du sol, de la vegetation et/ou de la neige a transferer la chaleur (ACIA, 2005). En effet, il s’agit de la couche du sol qui subit les variations saisonnieres de temperature et qui va degeler annuellement a chaque periode estivale (Margesin, 2009). Sous la couche active, on retrouve le pergelisol, le sol qui demeure gele en permanence et qui ne subit que tres peu de variations de temperature au cours de l’annee.
Les lacs de fonte de pergelisol Les lacs de fonte de pergélisol, egalement appeles lacs (ou mares) de thermokarst, sont des ecosystemes d’eau douce formes suite a la fonte du pergelisol. Avec le rechauffement climatique, les regions polaires subissent une hausse des temperatures plus elevees que partout ailleurs sur la planete. On estime que les regions arctiques ont subi un rechauffement de 2,1°C depuis 1990, tandis que le reste du monde s’est rechauffe en moyenne de 0,4°C, soit cinq fois plus lentement que l’Arctique pour la meme periode (ACIA, 2005). Ainsi, le pergelisol fond de maniere acceleree favorisant l’erosion du sol et la formation de depressions ou l’eau de fonte vient s’accumuler, ce qui cree un lac de fonte (Margesin, 2009). De ce fait, les lacs de thermokarst sont dorenavant parmi les ecosystemes aquatiques les plus repandus dans les regions arctiques et subarctiques canadiennes (Pienitz et al., 2008).
En zone de pergelisol sporadique a discontinu, la formation d’un lac de fonte peut se diviser en quatre etapes (Figure 1.2) (Bouchard et al., 2016). Tout d’abord, on retrouve dans le paysage une butte composee de pergelisol riche en glace. Puis, avec la hausse des temperatures, le pergelisol fond graduellement, ce qui favorise l’erosion et l’effondrement du sol a une extremite de la butte. L’eau commence alors a s’accumuler dans cette petite depression, creant petit a petit un etang en forme de croissant de lune. Par la suite, la fonte du pergelisol se poursuit entrainant l’elargissement et l’evolution de l’etang en petit lac. Enfin, la butte de pergelisol fond completement et laisse place a un lac mature lorsque sa profondeur maximale est atteinte. Il est egalement important de remarquer une densification de la vegetation autour de la butte tout au long du developpement du lac (Bouchard et al., 2014; Lloyd et al., 2003). Avec l’evolution du lac de thermokarst, la vegetation composee initialement de petits arbustes, de lichens et de mousses passe progressivement a une vegetation arbustive. En zone de pergelisol continu, ou l’on retrouve une grande quantite de coins de glace (≪ice wedges≫), les lacs de fonte prennent plutot une forme polygonale (Fortier and Allard, 2004).
Caractéristiques limnologiques
Durant l’ete, les lacs de thermokarst sont generalement caracterises par une forte stratification verticale causee par des densites et des temperatures distinctes a la surface et au fond du lac. La grande quantite de matiere en suspension a tendance a absorber les rayonnements solaires, ce qui a pour effet de rechauffer davantage la couche de surface et d’entrainer une stratification thermique de la colonne d’eau; l’eau de fond demeurant plus froide. L’eau froide etant plus dense, celle-ci ne se melange pas avec l’eau de surface moins dense, accentuant ainsi la stratification verticale. Par ailleurs, durant l’hiver, la colonne d’eau ne gele pas completement, ce qui concentre du meme coup tous les ions au fond du lac augmentant la densite de la couche de fond (Deshpande et al., 2015). De plus, en raison de la respiration bacterienne et de l’absence de brassage, la couche de fond devient eventuellement hypoxique ou totalement anoxique ce qui cree des conditions diametralement opposes au fond et a la surface (oxique) du lac (Deshpande et al., 2015). En consequence, ces conditions distinctes seront propices pour le developpement de differentes populations microbiennes tout au long de la colonne d’eau (Rossi et al., 2013). Ainsi, tous ces parametres favorisent la creation d’un gradient physico-chimique vertical malgre que les lacs de thermokarst soient tres peu profonds (1-4 m) (Breton et al., 2009) (Figure 1.3).
Implication dans le rechauffement climatique
Une etude publiee dans le prestigieux journal Science a demontre que les lacs de thermokarst ont joue un role majeur lors de la derniere deglaciation, il y a environ 9 000 a 14 000 ans (Walter et al., 2007). En effet, selon des estimations basees sur des observations actuelles et des analyses paleogeographiques, les lacs de fonte de pergelisol auraient emis par ebullition de 13 a 26 Tg de CH4 par annee, favorisant de maniere importante le rechauffement du climat. Leurs donnees suggerent que la formation de ce type de lac en Siberie, au Canada et en Alaska coincide avec une augmentation substantielle des concentrations de CH4 atmospherique, ce qui avait egalement ete suggeree par une precedente etude (Chappellaz et al., 1997). Ainsi, l’apport en GES par les lacs de thermokarst ne date pas d’hier… De nos jours, le meme phenomene semble se reproduire peu a peu. On estime que d’ici 60 ans, les lacs de fonte pourrait emettre soit par ebullition ou par diffusion jusqu’a 5.3 } 2.8 Tg de CH4 par annee (Wik et al., 2016). Deja, plusieurs etudes ont mesure de hautes emissions en CH4 de la part de ces lacs partout dans l’Arctique (Matheus Carnevali et al., 2015; Matveev et al., 2016). De plus, ces lacs sont la plupart du temps hyper satures en CO2 et en CH4, demontrant a quel point ils constituent des sources potentielles de GES a considerer dans les prochains modeles climatiques (Breton et al., 2009).
|
Table des matières
Resume
Abstract
Table des matieres
Liste des tableaux
Liste des figures
Liste des abreviations
Remerciements
Avant-propos
Chapitre 1 : Introduction generale
1.1 Le pergelisol
1.1.1 Les lacs de fonte de pergelisol
1.1.2 Caracteristiques limnologiques
1.1.3 Implication dans le rechauffement climatique
1.1.4 Ecologie des lacs de thermokarst
1.2 Les virus
1.2.1 Roles ecologiques
1.2.1.1 Court-circuit viral
1.2.1.3 ≪Reine Rouge≫ (Red Queen)
1.2.1.4 ≪Chat du Cheshire≫ (Cheshire Cat)
1.2.1.5 Transfert horizontal de genes
1.2.1.6 Genes auxiliaires metaboliques
1.2.1.7 Controle des populations microbiennes
1.2.2 Les virus infectant le phytoplancton
1.2.2.1 Les Phycodnaviridae – Chlorovirus
1.2.2.2 Les cyanophages
1.2.3 Ecologie virale dans les ecosystemes d’eau douce polaires
1.2.4 Approches utilisees pour etudier les virus
1.3 Problematique
1.4 Objectifs specifiques
1.5 Sites d’echantillonnage
1.5.1 Regions des villages de Whapmagoostui-Kuujjuarapik et Umiujaq
1.5.2 Lacs a l’etude
Chapitre 2 : Controle des communautes virales dans les mares de fonte de pergelisol par le type de mare
2.1 Resume
Chapter 2 : Landscape control of viral communities in permafrost thaw ponds
2.2 Abstract
2.3 Introduction
2.4 Materials and Methods
2.4.1 Study site and sampling
2.4.2 Sample processing and molecular analysis
2.4.3 Bioinformatics and statistical analyses
2.5 Results
2.5.1 Limnological conditions
2.5.2 Cellular communities
2.5.2.1 Community composition
2.5.2.2 Community comparisons
2.5.3 Viral communities
2.5.3.1 Community composition
2.5.3.2 Community comparisons
2.6 Discussion
2.7 Acknowledgments information
Chapitre 3 : Isolement et sequencage de deux nouveaux cyanophages d’origine subarctique
3.1 Mise en contexte
3.1.2 Les cyanophages
3.2 Materiel et Methodes
3.2.1 Amplification des cyanophages
3.2.1.1 Cultures de cyanobacteries
3.2.1.2 Inoculation avec les virus
3.2.1.3 Rondes d’amplification
3.2.2 Microscopie electronique
3.2.3 Isolement
3.2.4 Extraction d’ADN et sequencage
3.2.5 Analyses genomiques
3.2.6 Analyses phylogenetiques
3.3 Resultats
3.3.1 Lyse des cultures de cyanobacteries
3.3.2 Caracteristiques genomiques
3.3.3 Morphologie des particules virales
Chapitre 4 : Discussion générale et conclusion
4.1 Discussion
4.1.1 Objectif de recherche 1
4.1.2 Objectif de recherche 2
4.2 Conclusion
4.2.1 Perspectives
Bibliographie
Annexe
Télécharger le rapport complet