Implantation d’une mutuelle d’épargne et de crédit

Historique de la création des institutions de micro finance à Madagascar

                   Dès la période coloniale, Madagascar a vu la création d’institutions financières. Cela a favorisé l’implantation d’institutions de micro finance. La Caisse Centrale de Crédit Agricole (CC CA) a été créée entre 1926-1955, c’était alors un système de crédit importé (transfert de modèle français, système auxiliaire de la colonisation) Entre 1955-1962, il y avait une tentative de regroupement au sein de la Société de Crédit Agricole Mutuel (SCAM) qui a été soutenue par la Caisse Centrale de la France (première expérience de mutuelle de crédit qui était encore un système français). Cette mutuelle de crédit se caractérisait par l’obligation des garanties réelles (terres, bâtiments ou cheptels…) et des garanties morales (solidarité des emprunteurs ou caution solidaire). A titre d’exemple, en 1963, le métropole a mis en place la SMIC (Société Malgache d’Investissement et de Crédit) qui accordait des prêts aux coopératives et sociétés de crédit mutuel, en vue de l’achat des semences, d’engrais, à la commercialisation, à l’industrie et l’artisanat. Malgré cela, il y a eu un échec des multiples formes de solidarité traditionnelle qui peuvent s’appliquer au crédit. Pour maîtriser la situation, une certaine réforme a été appliquée. De 1962-1975, l’État a procédé à la responsabilisation des collectivités comme garants de crédit. Cela a entraîné la création de la BNM (Banque Nationale Malgache). Cette institution financière offrait un crédit sur liste accordé sur demande collective de Fokontany. Pourtant, ce système a rencontré le problème de favoritisme. Durant la deuxième République, entre 1976-1986, à travers la Révolution Socialiste, l’État malgache a procédé à la nationalisation des banques. A cette époque, l’État a pris en main les principaux moyens de production, les ressources du sous-sol, les banques. La structure socialiste a encouragé le système du fokonolona, les coopératives. Cela a favorisé l’investissement à travers la maîtrise du crédit et de l’épargne. Tels sont les cas des premières banques malgaches : BTM (Bankin’ny Tantsaha Mpamokatra), BFV (Banky Fampandrosoana ny Varotra) et BNI (Banque Nationale de l’Industrie). A partir de 1986, la Grande Île a poursuivi la politique de libéralisation menée par les Bailleurs de fonds (FMI et Banque Mondiale) et impliquant la privatisation du secteur bancaire. Dans cette nouvelle organisation, l’administration n’est qu’un coordinateur et animateur. Par contre, cette structure tend vers la responsabilisation des opérateurs privés ou parapublics, y compris les paysans. Pour pallier la défaillance du secteur bancaire dans le monde rural, l’année 1990 constituait la phase d’émergence des institutions mutualistes. De ce fait, la promotion des institutions de micro finance (IMF) remonte dans les années 1990. Auparavant, la BTM, d’une part, a pour objectif de promouvoir le développement rural, de libérer les paysans, de les protéger contre l’exploitation par les usuriers et de favoriser la mobilisation de l’épargne nationale. Et la BFV, d’autre part, a pour fonction de financer les activités agricoles, telles que les plantations de coton, de sisal, mais aussi le grand commerce. Or, ces deux banques n’atteignaient qu’une frange limitée de la population. Nous signalons que la mise en place des institutions de micro finance fait partie du partenariat public privé (l’État, les bailleurs de fonds, et les organismes privés) La loi de régularisation du secteur de la micro finance a favorisé la création de nombreuses institutions de micro finance qui peuvent être catégorisées en 2 types :
– les Institutions Financières Mutualistes (IMF) telles que : l’OTIV, la CECAM,…
– les Institutions Financières Non Mutualistes (IFNM) telles que la CEM (Caisse d’Épargne de Madagascar).
Cette brève historique nous permet de connaître le processus d’implantation et l’amélioration du mode d’organisation et de fonctionnement des institutions de micro finance à Madagascar. Face au développement de ces institutions financières, nous focaliserons notre étude sur le réseau OTIV (Ombona Tahiry Ifampisamborana Vola) qui figure parmi les institutions de micro finances mutualiste.

Le réseau OTIV

                Régie par la loi 96-020 portant réglementation des institutions financières mutualistes, l’OTIV fait partie de ce genre d’institutions financières à caractère mutualiste. Et d’après l’enquête, le premier réseau OTIV a été créé en 1994 à Toamasina et au lac Alaotra. Grâce à l’organisation d’implantation, cinq réseaux OTIV sont actuellement présents dans tout Madagascar, à savoir, à TOAMASINA, ALAOTRA, ANTANANARIVO, SAVA, DIANA. Notons que vers l’année 2001, le réseau a commencé à s’étendre à Antananarivo.

Situation actuelle du monde rural

                En majorité, le monde rural est dominé par les activités de l’agriculture, de l’élevage, de la pêche et des mines. Mais la situation socioéconomique dans cette zone reste critique car le taux de pauvreté est très élevé. L’enquête menée par l’INSTAT (Institut National de la Statistique), intitulée EPM (Enquête Prioritaire auprès des Ménages), en 2005 a conclu que 66% de la population rurale consomment 2003 calories par jour, 67 % des enfants de moins de trois ans souffrent d’une mal nutrition chronique, et 47% des femmes enceintes et allaitantes sont mal nourries, avec un revenu journalier nettement inférieur à un dollar. Cette réalité démontre la présence de l’insécurité alimentaire. Par ailleurs, cette situation est amplifiée par l’insuffisance de bonne gouvernance, la corruption, l’insécurité (actes de banditisme.) De plus, il importe de signaler que l’économie rurale est fermée et faiblement intégrée dans l’économie mondiale. Les transformations industrielles sont à l’état embryonnaire. Ces activités sont toutes dominées par la bourgeoisie rurale. Cela prouve que les entrepreneurs, les industriels, voire les produits sont peu compétitifs. Notons que le système socioéconomique de la zone rurale est fragmenté et non organisé (EPM, 2005) car il n’y pas de liens étroits entre les activités de production, de transformation et de commercialisation. Ainsi, les agriculteurs et les associations paysannes ne sont pas à la hauteur du professionnalisme puisqu’ils n’ont pas la possibilité d’accéder aux informations techniques, commerciales et managériales. Sur ce point, l’EPM 2005 a affirmé que : « la logistique est faible en matières d’intrants, d’appui conseil et d’approvisionnement. En amont, d’une part, les points de vente des facteurs de production et l’accès au capital aussi bien financier que foncier font défaut13». En réalité, nous rappelons que les institutions de micro finance ne couvrent que 03 à 5% de la population totale. D’autre part, l’enquête a évalué aussi qu’ « en aval, les infrastructures de stockage, de conditionnement, de transformation, de marchés manquent. » Cela remet en cause le respect des normes des produits provenant de la campagne. Or, depuis l’année 2000, l’État malgache s’efforçait de mettre en place « la grande maison des paysans » ou « Tranoben’ny tantsaha ». C’est un lieu de rencontre entre les ruraux producteurs et les fournisseurs en matière de formation technique, de moyens de production, d’entreprenariat, de clientèles, de financement (bailleurs de fonds). Au niveau régional ou au sein du District, cette nouvelle structure paysanne s’efforce d’augmenter les avantages des ruraux : formation, information, vulgarisation technique, animation rurale, financement, infrastructures rurales, échange et commercialisation. D’ailleurs, le besoin des marchés locaux et étrangers est remarqué actuellement. Or, le poids de l’exportation est très significatif, depuis une décennie notamment celles des haricots vert, de la pomme de terre, du cornichon, des épices. Signalons aussi que la production de la culture d’exportation (vanille, litchi, café, girofle) est en baisse et en mauvaise qualité de nos jours (vieillissement et mauvais entretien, concurrence internationale, détérioration des termes de l’échange, effets de nationalisation). Par ailleurs, le changement climatique influence la zone rurale, à travers la dégradation de l’environnement. Les feux de brousse sont à l’origine de la baisse de la fertilité des sols, de la diminution du pâturage et de la détérioration des réseaux hydro- agricoles. Nous constatons aussi que les catastrophes et fléaux naturels attaquent le monde rural : cyclones, inondations, sécheresses, organismes nuisibles et maladies. Nous avons choisi, comme terrain d’enquête, la Commune rurale d’Ampitatafika montrant les caractéristiques de la zone périphérique à la fois rurale et urbaine. A partir de l’explication du secteur financier et l’historique des institutions de micro finance à Madagascar, nous arrivons à l’étude de l’organisation des caisses OTIV regroupant au sein d’un réseau OTIV Antananarivo, sur le plan régional. Nous apportons aussi une approche sociologique et sociohistorique du monde rural et de son développement, allant de l’époque royale jusqu’à nos jours. Après avoir étudié le contexte général du monde rural en relation avec la politique nationale du développement rural et la mise en place d’une institution financière, telle que l’OTIV, il s’agit maintenant pour cette deuxième partie de voir son mode d’organisation suivi des comportements de la population locale vis-à-vis de cette institution et aussi l’étude de l’impact de la mise en place de l’OTIV FANAVOTANA Ampitatafika.

Le comportement de la population d’Ampitatafika face à l’OTIV

                 A travers les questionnaires, les interviews et les observations, l’étude a permis de savoir que les habitants, après avoir été sensibilisés, éduqués, et informés, reconnaissent l’utilité de l’OTIV. « La gestion de l’épargne constitue un avantage de l’adhésion à l’OTIV 14», selon un père de famille. Pour les membres, épargner à l’OTIV FANAVOTANA Ampitatafika permet d’éviter des dépenses inutiles, de sécuriser l’argent et de préparer un projet d’avenir dans le long terme. Selon eux, la pratique de l’épargne signifie une prise en main de l’avenir en adoptant le proverbe : « mitsinjo ny vodiandro ho merika » (prévenir et préparer le mauvais temps). Cette idée d’épargne, selon les 52% des membres, constitue la base de l’économie individuelle, familiale et collective. Cela permet une extension des activités génératrices de revenu. Cette réalité démontre la motivation des membres face à la politique de l’OTIV. Une autre partie des membres témoigne de l’importance du crédit. Ils ont confiance envers cette institution financière. Les résultats de l’enquête nous permettent de déduire que, pour les membres, l’OTIV joue le rôle de bailleurs et d’investisseurs car ils ont la possibilité d’obtenir un crédit pour financer leurs activités et pour améliorer leurs conditions de vie dont le mode de remboursement est à leurs portées. Les 21% des adhérents témoignent du fait que le principe mutualiste est une source de persuasion. Ils se sentent être propriétaires d’actions (capitaux) à l’OTIV. Pour les 11% des membres enquêtés, la caisse de l’OTIV se situe auprès de leur lieu de résidence. Cette proximité géographique de la caisse OTIV facilite la relation et l’échange entre les membres et cette institution financière. Cela augmente la confiance à l’égard de l’OTIV parce que leur argent est en sécurité. Toujours d’après les résultats de l’enquête, « être membre de l’OTIV signifie être riche », grâce à l’épargne et la possibilité de disposer un crédit. D’après un enquêté, « on ne peut pas adhérer tant qu’on n’a pas d’argent15 ». Cela suppose qu’être membre à l’OTIV pourrait entraîner de l’exclusion sociale. Donc, certains membres n’aiment plus faire connaître leur adhésion à l’OTIV en respect à la solidarité sociale. Ce qui explique la discrétion, voire la dissimulation du statut de membre de l’OTIV auprès des proches et surtout de l’entourage. D’après une femme enquêtée : « on craint de montrer notre statut de membre car cela est perçu par les autres comme un geste ostentatoire16 ». Et de l’autre, selon un commerçant : « on cache notre statut d’être membre pour éviter de se faire emprunter de l’argent à un proche17». C’est à travers ces propos que nous distinguons une hiérarchie sociale de la population en rapport avec l’adhésion ou non à l’OTIV. Selon les enquêtés, être membre de l’OTIV signifie appartenir à une couche sociale bien déterminée. Cela véhicule les notions de « ngetroka », de « mpanefoefo », de « ngahindriana » ou bien des riches et des « fadiranovana » ou des pauvres. Malgré tout, les membres adhérent à l’OTIV dans le but de lutter contre la pauvreté, d’améliorer leurs conditions de vie. Cela exige des efforts, des stratégies, des projets, des actions et des capacités accompagnées du professionnalisme. Donc, pour eux, l’OTIV constitue une institution de renforcement de capacité et du professionnalisme de leurs clients. Il s’est avéré, d’après nos observations au cours de l’enquête que la notion de parenté entre en jeu dans ce phénomène. Quelques membres de la famille font de la publicité sur l’OTIV pour les sensibiliser sur l’avantage à être membre de cette institution. Cela peut entraîner la compétition ou la concurrence intrafamiliale et interfamiliale des membres. Pour les membres, l’OTIV devient un moteur de leur développement.

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Table des matières

INTRODUCTION
1-Généralités
2- Objet de l’étude
3- Choix du sujet
4- Choix du terrain
5- Objectifs de l’étude
6- Problématique
7- Hypothèse
8- Technique de recueil des données sur terrain
a- La technique documentaire
b- Les techniques vivantes
9- L’échantillonnage
10- Déroulement de la recherche
11- Méthode
12-Etape terminale de la recherche
a- Analyse des données
b- Intérêts du sujet
c- Limite de la recherche
PREMIÈRE PARTIE : PRÉSENTATION GÉNÉRALE
CHAPITRE I : LA COMMUNE RURALE D’AMPITATAFIKA
A- HISTORIQUE, LOCALISATION GÉOGRAPHIQUE ET ADMINISTRATIVE
1- Situation géographique
2- Historique de la Commune
B- ÉTAT DES LIEUX
1- La population
2- Activités économiques
a- Agriculture
b- L’élevage
c- L’artisanat
3- Les ressources socioculturelles
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a- L’éducation
b- La santé
CHAPITRE II : LE RÉSEAU O.T.I.V
1- Historique de la création des institutions de micro finance à Madagascar
2- Le réseau OTIV
3- L’organisation des OTIV
CHAPITRE III : LE DÉVELOPPEMENT RURAL
1- Approche socio historique du développement rural à Madagascar
a- A l’époque royale
b- Durant la colonisation
c- Durant la Première République
d – Durant la Deuxième République
e- Durant la troisième République
2- Situation actuelle du monde rural
DEUXIEME PARTIE : MODE D’ORGANISATION ET ETUDE D’IMPACTS DE L’IMPLANTATION DE L’OTIV 
CHAPITRE I : ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DE L’OTIV FANAVOTANA AMPITATAFIKA
A- MODE D’ORGANISATION
B- L’OTIV ET SES SERVICES
1- La collecte d’épargne
a- Définition de l’épargne
b- Les types d’épargne
2- L’octroi de crédit
a- Définition du crédit
b- Les types de crédit
c- Les conditions d’octroi de crédit
CHAPITRE II : LA POPULATION D’AMPITATAFIKA ET L’OTIV
1- Le comportement de la population d’Ampitatafika face à l’OTIV
2- Les facteurs d’adhésion
3- Les facteurs de blocage
4- Catégorisation des membres et services de l’OTIV
CHAPITRE III : ÉTUDE D’IMPACT DE L’IMPLANTATION DE LA CAISSE OTIV
A- IMPACTS DIRECTS
1- Les apports de l’OTIV
2- Création des activités génératrices de revenu
3- Amélioration du mode de production
4- Impacts de l’adhésion à l’OTIV
B- LES IMPACTS INDIRECTS
1- Esprit de compétitivité et culture d’entreprise
2- Micro finance et exclusion socioéconomique
TROISIEME PARTIE : ANALYSE, PERSPECTIVE ET SUGGESTION
CHAPITRE I : L’OTIV ET LE DEVELOPPEMENT RURAL
1- La sociologie du monde rural
2- Le secteur financier malgache
3- Analyse de la motivation de la population à l’égard de l’OTIV
4- La participation et le changement social
CHAPITRE II : PERSPECTIVES ET SUGGESTIONS
1- Encourager la création des associations paysannes
2- Adopter une approche participative
3- Les projets communautaires devraient s’accorder aux besoins réels et aux attentes de la population locale
4- La promotion des réseaux socioéconomiques
5- Animation, sensibilisation et mobilisation communautaire
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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