Impacts des travaux de l’A89 sur les populations piscicoles et astacicoles

Impacts potentiels des travaux sur le Gand 

    Divers facteurs relatifs aux travaux, mais également à l’exploitation future de l’axe autoroutier, peuvent impacter le milieu. Les risques sont notamment liés aux lessivages des fines ou encore de matières polluantes dans le cours d’eau. En effet, les talus mis en place présentent de fortes pentes et se retrouvent à nus, ce qui peut occasionner l’entrainement massif de particules fines vers le cours d’eau lors d’épisodes pluvieux. Il en résulte un risque de colmatage des habitats par les sables et limons provenant des matériaux terreux utilisés. En plus de ce risque de colmatage, subsiste également un danger de pollution du Gand par les composantes ou engins nécessaires à la mise en œuvre de l’ouvrage. De plus, le remblai d’importantes zones humides situées en fond de vallée peut engendrer des perturbations du milieu. En effet, ces zones contribuent significativement au bon fonctionnement des milieux aquatiques. Ce sont des zones tampons permettant en plus de la rétention des matières polluantes, l’épuration de certaines d’entre elles. Elles jouent de surcroît un rôle de soutien d’étiage, rôle primordial pour des petits milieux comme le Gand durant la période estivale. La réduction significative de la surface de ces zones présente un risque de dysfonctionnement écologique pour le cours d’eau en  question. A terme, il est prévu de mettre en place une nouvelle zone humide afin de palier aux impacts négatifs engendrés par leur destruction. Cela dit, ces zones ne pourront être efficaces dès leur mise en place et ne sont actuellement pas reconstituée (voir annexe 2 : vue d’ensemble de l’état actuel des travaux). Les travaux de construction de l’A89 apparaissent alors comme un danger éventuel pour les populations piscicoles et astacicoles du Gand. A. pallipes est d’autant plus menacée que ses exigences écologiques sont étroites.

Biologie 

 Reproduction : Ces écrevisses sont des espèces sténothermes d’eau froide se reproduisant pendant la période automnale lorsque la température ambiante est inférieure à 10°C. Durant l’accouplement, le mâle dépose les spermatophores près des orifices externes des oviductes de la femelle. Entre 4 et 6 semaines plus tard, les œufs sont pondus. La femelle porte entre 80 et 100 œufs sur une durée comprise entre 6 et 9 mois. A l’issue de l’incubation, seule une trentaine d’œufs éclosent. Suite à l’éclosion, qui a lieu au printemps, les juvéniles (10 à 12 mm) restent accrochés aux pléopodes de la femelle jusqu’à leur seconde mue (soit entre 10 et 15 jours). Durant leur première année de vie, les juvéniles muent jusqu’à 8 fois, ce qui diminue largement avec l’âge. En effet un adulte ne mue qu’une à deux fois par an. La maturité sexuelle est atteinte au bout de 3 à 4 années de vie.
 Nutrition : Les écrevisses à pieds blancs appartiennent aux espèces omnivores et tendent à être opportunistes. Elles pratiquent occasionnellement le cannibalisme (envers les individus les plus fragiles). Elles s’alimentent aussi bien de végétaux, tels que les hydrophytes ou encore les hélophytes, que d’animaux (larves d’insectes, alevins…). Globalement, les plus jeunes se nourrissent davantage d’animaux que les adultes. Cette espèce consomme aussi leur exuvie lorsqu’elles muent. Les habitats de type litière sont notamment une source alimentaire appréciée de A. pallipes puisqu’ils abritent bactéries et détritivores.

Thermie

  Le suivi thermique du cours d’eau est essentiel dans le sens où la température est paramètre physique conditionnant pour beaucoup la présence des espèces (Verneaux, 1973). Ainsi, elle peut expliquer la répartition des espèces. Les trois stations repérées dans le cadre de ce suivi sont équipées de thermographes enregistreurs en continu. Ces sondes, de modèles ProSensor, HOBOU22 Pro V2 correspondent aux recommandations de l’ONEMA dans le cadre du protocole de suivi national des cours d’eau. Ces thermographes ont été mis en place en juillet 2010 et relevés successivement en janvier et juin 2011. Ils ont été installés de manière à ne pas être exondés ni exposés au rayonnement solaire, à savoir dans des faciès de type mouille et sous couvert boisé. Chaque sonde est programmée pour enregistrer une valeur de température toutes les heures. Ce suivi thermique permettra de connaitre les valeurs moyennes et extrêmes des températures du Gand. Via l’analyse de ces dernières, il est possible de déterminer le niveau typologique théorique du cours d’eau (Verneaux, 1973). Calculer ce type théorique d’un cours d’eau permet de connaître la présence et l’abondance théorique des espèces au sein d’un milieu écologique donné. Le calcul du type théorique (NTT) se réfère à trois composantes :
– une thermique (T1), relative à la moyenne des températures maximales des trente jours consécutifs les plus chauds (ϴ en °C) ;
– une trophique (T2), prenant en compte la distance à la source d0 (en km) ainsi que la dureté D (en mg/L) ;;
– une morphodynamique (T3), avec la section mouillée à l’étiage Sm (en m²), la pente du lit p (en%0) et la largeur du lit mineur L (en m) ;

Pêche électrique 

   Le Gand étant un petit cours d’eau dont la largeur n’excède pas les 3 mètres et la profondeur d’eau moyenne les 30 centimètres, un appareil de pêche électrique portable de type « martin-pêcheur » est utilisé. Ainsi et comme le montre la figure 6, une seule anode et deux opérateurs munis d’une épuisette suffisent. Le Martin-pêcheur fonctionne sur batterie et délivre un signal électrique par impulsion. Le générateur de courant est relié par sa phase négative à une cathode qui doit restée immergée. La phase positive est quant à elle reliée à une anode mobile maintenue par le pêcheur. Les anodes utilisées sont de forme ronde et de 35 cm de diamètre environ. Le manche de l’anode mesure 1,5 m de longueur. La cathode est constituée d’une armature métallique portant plusieurs tresses souples en cuivre et de longueur variable. Une fois dans l’eau, l’anode produit un champ électrique rayonnant autour de la perche. Les poissons à proximité sont alors attirés au niveau de l’anode, phénomène appelé la « nage forcée ». Deux autres pêcheurs peuvent alors recueillir les espèces pour les stocker en vue d’effectuer la biométrie postérieurement. Sur les trois stations du Gand, les pêches réalisées sont des inventaires complets. De ce fait, les opérateurs prospectent tous les faciès et tous les habitats présents sur l’ensemble de la station. En fonction des stations prospectées, l’effort de pêche peut varier de 1 à 3 passages si nécessaires. A l’issue de la pêche, chaque espèce est mesurée, pesée puis remise à l’eau. Ce type d’inventaire permet notamment de suivre l’évolution et la dynamique des populations d’un milieu. L’abondance ainsi que la biomasse des espèces seront étudiées. De plus, la comparaison entre le niveau typologique observé et théorique (précédemment expliqué), complètera l’analyse en permettant d’évaluer le milieu.

Conclusion

   Le suivi biologique du Gand atteste des impacts des travaux d’ASF sur les populations piscicoles et astacicoles. Initialement, le Gand amont accueillait des populations d’écrevisses à pieds blancs sur tout son linéaire. Ces populations ont par la suite été victimes de sècheresses mais ont pu survivre pour ensuite recoloniser une grande partie de ce linéaire entre 2007 et 2008. Depuis les travaux de l’A89, le linéaire de cours d’eau situé en aval de l’ouvrage a été considérablement perturbé, tant d’un point de vue morphologique que chimique. Les zones d’artificialisation du lit mineur sont à l’origine de différentes perturbations puisqu’elles ne permettent pas au Gand de s’écouler en surface. En plus de faire obstruction à la migration des espèces, ceci engendre des dérèglements du régime thermique du cours d’eau. L’effet le plus destructeur vis-à-vis des être vivants du Gand est attribué à l’augmentation importante du pH due à la mise en eau de l’ouvrage voûté en 2009. En effet, une destruction massive des populations piscicoles et astacicoles a été constatée. Lors du suivi de ces populations en 2010, aucun individu n’a été contacté sur la station située en aval de l’ouvrage. En 2011, la truite fario semble entrer en phase de recolonisation du milieu. En revanche, les populations d’écrevisses à pieds blancs, bien que toujours densément présentes à l’amont, ont complètement disparu au niveau du tracé en aval de l’ouvrage. Malgré tout, le Gand conserve ces capacités d’accueil pour l’écrevisse à pieds blanc : thermie et physico chimie restent en accord avec leurs exigences écologiques. En ce sens et à terme, il est envisageable que les écrevisses puissent un jour de nouveau coloniser la partie en aval de l’ouvrage. A l’heure d’aujourd’hui, le tracé du Gand n’est que provisoire. En effet, la reconstitution de son lit mineur au sein de la future zone humide en amont de l’ouvrage est prévue. De ce fait, les impacts globaux à l’issue des travaux restent actuellement inconnus. Il apparaît donc comme essentiel de poursuivre le suivi biologique du Gand dans les années à venir afin de mesurer l’impact de la construction de cet axe autoroutier sur le vallon du Gand.

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Table des matières

Résumé
Abstract
Introduction
I. Présentation de l’étude
1. Contexte et localisation 
2. Travaux réalisés sur Le Gand
1. Présentation de l’ouvrage réalisé
2. Déviation et reconstitution du lit mineur
3. Impacts potentiels des travaux sur le Gand
4. Les écrevisses à pieds blancs (Austropotamobius pallipes)
1. Statut juridique
2. Morphologie
3. Biologie
4. Exigences mésologiques
II. Matériels et méthodes
1. Présentation des stations
1. Localisation et description des stations
2. Données disponibles et utilisées
3. Programme année 2011
2. Thermie
3. Pêche électrique
4. Suivi des populations astacicoles 
1. Suivi de l’aire de répartition
2. Capture-marquage-recapture (CMR)
5. Physico-chimie
III. Résultats et discussion
1. Thermie 
2. Physico chimie
3. Pêche électrique
1. Station 1 : Chez Chabout
2. Station 2 : Bois Corcy
3. Station 3 : Le Rey
4. Suivi de l’aire de répartition des populations astacicoles
5. CMR (Capture-Marquage-Recapture)
1. Données 2007
2. Station 1, CMR 2010 et 2011
3. Station 2, CMR 2010
Conclusion
Bibliographie
Liste des figures
Liste des tableaux

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