IMPACTS DES CHANGEMENTS CLIMATIQUES SUR LA BIODIVERSITÉ

Les changements climatiques et leurs impacts sur la biodiversité

   Le plus récent rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) indique que l’air à la surface de la planète a été plus chaud au cours de chacune des trois dernières décennies que durant l’ensemble des autres décennies depuis 1850. Les températures ont augmenté partout dans le monde et de façon plus marquée dans les hautes latitudes de l’hémisphère nord. À titre d’exemple, les années 1983 à 2012 furent vraisemblablement la période de 30 ans la plus chaude que l’hémisphère nord ait connu au cours des 1 400 dernières années (GIEC, 2013). Les changements climatiques se font également sentir sur la circulation atmosphérique, la variabilité climatique et les événements climatiques extrêmes, les cycles de précipitations, la cryosphère, la température et la chimie des océans ainsi que sur le niveau des mers (GIEC, 2013).De plus en plus d’études révèlent que, partout sur la planète, les effets des changements climatiques sont observables sur les espèces et les communautés biologiques tant au niveau morphologique, physiologique et phénologique que par des changements dans l’abondance et la répartition des espèces (GIEC, 2002; Hughes, 2000; Parmesan et Yohe, 2003; Root et al., 2003; Walther et al., 2002). Ainsi, les changements climatiques régionaux amènent les espèces à ajuster leur répartition spatiale en réponse au déplacement de leur niche climatique. En 2003, la synthèse de Parmesan et Yohe suggérait que, dans l’hémisphère nord, les aires de répartition de 99 espèces se déplaçaient progressivement vers le nord à une vitesse moyenne de 6,1 km/décennie et en altitude à une vitesse moyenne de 6,1 m/décennie. Plus récemment, Chen et al. (2011) analysaient les résultats de 24 études portant sur les changements de répartition d’espèces d’une grande variété de groupes taxonomiques végétaux et animaux en Europe, en Amérique du Nord, au Chili, en Malaisie et sur l’île Marion (Chen et al., 2011). Les résultats indiquent que les espèces s’éloignent progressivement de l’équateur à une vitesse moyenne de 16,9 km/décennie et que les espèces se déplacent en altitude à une vitesse moyenne de 11 ,0 rn/décennie.

Évaluer la vulnérabilité de la biodiversité

   Le GlEC définit la vulnérabilité aux changements climatiques comme suit : Degré de capacité d’un système de faire face ou non aux effets néfastes du changement climatique (y compris la variabilité climatique et les phénomènes extrêmes). La vulnérabilité dépend du caractère, de l’ampleur, et du rythme des changements climatiques auxquels un système est exposé, ainsi que de sa sensibilité et de sa capacité d’adaptation (GlEC, 2007, p. 28). Cette définition du concept de vulnérabilité comprend trois composantes sousjacentes, soit l’exposition aux changements climatiques, la sensibilité et la capacité d’adaptation des espèces ou des systèmes. Une multitude d’auteurs présentent des définitions et schémas conceptuels qui organisent et hiérarchisent ces composantes de façons plus ou moins comparables et auxquelles viennent parfois s’ajouter d’autres notions, notamment celle de la résilience (Metzger et al., 2005; Turner et al., 2003; Williams et al. , 2008). Dans la présente étude, la vulnérabilité sera définie comme le produit de l’ exposition et de la sensibilité, telle que décrite par Williams et al. (2008; Figure 1). L’exposition réfère à l’ intensité des changements climatiques auxquels est soumis une espèce ou un système, et donc à la pression que subira cette espèce ou ce système (Turner et al. , 2003). L’exposition dépend de l’intensité des changements climatiques à l’échelle régionale et du pouvoir tampon de micro-habitats à l’échelle locale (Williams et al., 2008). La sensibilité des espèces est définie par leurs traits intrinsèques qui détermineront leur capacité à survivre et à revenir à un état d’équilibre suite à une perturbation (la résilience) et leur capacité d’ adaptation (via une réponse phénotypique ou évolutive) face à des changements environnementaux. Ces traits propres aux espèces touchent l’écologie (comportement, interactions biotiques et abiotiques et utilisation de l’ habitat), la physiologie (prérequis métaboliques, préférences et tolérances climatiques) et la diversité génétique (Williams et al., 2008). Ultimement, les espèces survivront aux changements climatiques si la vitesse de ceux-ci permet le développement de réponses adaptatives ou si la connectivité du territoire permet la dispersion des organismes vers des habitats favorables (Williams et al., 2008).

Les modèles de niche bioclimatique

   Les modèles de niche bioclimatique sont parmi les modèles prédictifs les plus couramment utilisés dans les analyses de vulnérabilité des espèces (Glick et al., 20 II). L’ensemble des prérequis bioclimatiques d’une espèce constitue sa niche bioclimatique. Les modèles de niche capturent la niche bioclimatique d’ une espèce en reliant les sites d’occurrence de cette espèce à des variables climatiques (température, précipitations, etc.) et environnementales (Guisan et Zimmermann, 2000). Par la suite, la substitution dans le modèle des données climatiques de la période de référence par des scénarios climatiques futurs permet de prédire la présence ou l’absence de l’espèce selon les conditions climatiques attendues dans chaque région de l’aire d’étude, et donc d’estimer l’aire de répartition future potentielle de l’ espèce (Figure 2).

Les aires protégées dans le contexte des changements climatiques

   Selon la Convention sur la diversité biologique, les aires protégées constituent la pierre angulaire de la conservation in situ de la biodiversité (Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique, 2004). Au Québec, le Ministère du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs (MDDEFP) est responsable de l’élaboration d’une stratégie ministérielle de conservation de la biodiversité dans le cadre de son Plan stratégique quinquennal 2009-2015. Or, la gestion des aires protégées est directement concernée par les enjeux écologiques découlant des changements climatiques (Dudley, 2010; Hannah et al., 2007; Peters, 1985; Scott et al., 2002). Le réseau d’aires protégées du Québec a été développé pour représenter chacun des types d’écosystèmes qui caractérisent le territoire québécois et, du même coup, une majeure partie de la biodiversité qui y est associée (MDDEP, 2009; Parcs Canada, 1997). La protection à long terme d’écosystèmes par le biais d’un réseau d’aires protégées spatialement fixe repose sur l’hypothèse d’une certaine stabilité climatique et biogéographique des milieux naturels à travers le temps. Cette prémisse n’est toutefois plus valide dans le contexte des changements climatiques. En effet, que ce soit par une altération des cycles de perturbations qui modifieraient la végétation existante ou par des changements dans la distribution des espèces, les milieux deviendront beaucoup plus dynamiques, perturbant ainsi le fonctionnement d’un réseau fixe qui tenterait de préserver des espèces en mouvement (Lemieux et Scott, 2005; Peters, 1985; Scott et al., 2002). Monzon et al. (2011) ont documenté plusieurs impacts de ces changements dans la dynamique des communautés sur la biodiversité des aires protégées, et relèvent entre autres la présence d’espèces se dispersant hors d’une aire protégée, la propagation de pathogènes, de même que les déclins de populations et les extinctions. Conséquemment, il apparaît d’autant plus complexe d’assurer la protection d’écosystèmes complets que la composition des communautés biologiques actuelles risque d’être considérablement modifiée (Hole et al., 2009; Thuiller et al., 2006). Dans l’immédiat, ces « nouvelles communautés» peuvent difficilement être intégrées aux plans de gestion et de conservation des aires protégées (Scott et Lemieux, 2005). Ajoutons finalement que bon nombre d’espèces ciblées comme étant valeurs de conservation prioritaires lors de l’établissement d’aires protégées pourraient quitter les limites de leurs aires de répartition actuelles.

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Table des matières

REMERCIEMENS
RÉSUMÉ
ABSTRACT
LISTE DES FIGURES
INTRODUCTION GÉNÉRALE
CHAPITRE 1 IMPACTS DES CHANGEMENTS CLIMATIQUES SUR LA BIODIVERSITÉ : DÉFIS ET OCCASIONS POUR UN RÉSEAU NORDIQUE D’AIRES PROTÉGÉES
1.1 RÉSUMÉ EN FRANÇAIS DU PREMIER ARTICLE
1.2 CUMATE CHANGE IMPACTS ON BIODIVERSITY: CHALLENGES AND OPPORTUNITIES FOR A NORTHERN PROTECTED AREA NETWORK 
CHAPITRE 2 CONCLUSION
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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