Impacts de la migration des j eunes sur le développement du Bas-Saint-Laurent

Impacts de la migration des j eunes sur le développement du Bas-Saint-Laurent

De l’immigration à la migration (1840-1930)

Bien que la migration des populations ait pris différents visages depuis le XIXe siècle, il n’ en demeure pas moins qu’elle a toujours été une réalité très importante au Québec, particulièrement au Bas-Saint-Laurent. Il faut d’abord souligner que le Québec et l’ Amérique du Nord se sont peuplés d’un flot continu d’ immigrants européens qui sont venus s’ installer de manière permanente sur notre continent. Sur ce dernier, de nouvelles et de plus anciennes populations se sont déplacées vers l’Ouest américain et l’Ouest canadien, en quête de nouvelles terres (Perron, 1996) .. Au Québec, les migrations se font d’abord vers les espaces ruraux qui deviennent de véritables terres d’ accueil pour les migrants. En effet, on abandonne son village en famille vers des terres vierges pour assurer un certain avenir agricole. Ainsi, on observe des migrations de Baie-Saint-Paul à la Malbaie, de la Beauce aux Cantons-de-l’Est, alors que les Sud-Côtois et les Bas-Laurentiens défrichent le haut pays et que les Gaspésiens tendent à occuper l’ensemble de la péninsule. Ainsi, les départs pour la ville ou pour les États-Unis semblent assez exceptionnels jusqu’en 1850 (Perron, 1996).

Bien que les régions rurales semblent posséder un fort pouvoir d’attraction au XIXe siècle, il n’en demeure pas moins que plusieurs d’entre elles affichent des bilans migratoires négatifs depuis le milieu de ce siècle. C’est, entre autres, le cas du Saguenay- Lac-Saint-Jean, du Bas-Saint-Laurent, de la Côte-du-Sud, de Lanaudière, de la Mauricie, et de Lévis-Lotbinière. Dans des régions plus anciennes comme la Côte-du-Sud et Charlevoix, on quitte principalement en raison du manque de terres et d’emplois. Les régions de Québec et de Montréal accueillent beaucoup de ces migrants, ce qui montre un certain engouement pour la ville, parallèlement à celui pour la terre. La montée de l’ industrialisation, notamment dans le secteur textile dans les Cantons-de-l ‘ Est et en Mauricie, incitera bon nombre de migrants à choisir de nouvelles villes de taille réduite au début du XXe , siècle . D ‘ autres choisiront les nouveaux villages de compagnie monoindustriels de Oui at-Chouan (Val-Jalbert) ou de Rivière-Henri près de l’ actuel village de Joly où leur intégration se fera de manière encadrée par leur employeur (Perron, 1996) ..

Au début du XXe siècle, plusieurs migrants opteront pour les villes de la Nouvelle- Angleterre où le travail en usine est abondant. Ces villes auront, dès lors, une longueur d ‘ avance sur celles du Québec à cette époque de l’industrialisation. On estime entre 700 000 et 1 000 000 le nombre de Québécois qui quittent pour les filatures de laine et de coton de la Nouvelle-Angleterre entre 1840 et 1930. Cette migration extraterritoriale amènera les élites à s’ inquiéter pour la première fois des mouvements de la population québécoise. Les curés déplorent le départ vers les États-Unis de groupes ethniques, de familles entières, mais aussi de jeunes gens. Ainsi, entre 1870 et 1925, on estime à 8 000 familles et 18 000 célibataires, les migrants quittant Lévis-Lotbinière vers les filatures (Samson et al., 1996).

Les premières hypothèses semblaient faire un lien entre la famille et la migration, puisque l’accès à de nouvelles terres donnait naturellement l’occasion aux enfants d’éventuellement s’établir à proximité. Toutefois, les hypothèses tentant d’expliquer la migration vers la ville et les usines montrent une toute autre forme de migration. En effet, on parle désormais davantage d’ hommes quittant pour le travail en usine ou de femmes pour le travail de bureau ou de domestiques chez des bourgeois que de familles lorsque qu’on observe les migrations vers les centres métropolitains (Perron, 1996). Au début des années 1900, on remarque également une migration temporaire et saisonnière de plus en plus importante. En effet, des milliers d’ hommes quittent pour les chantiers de la Côte-Nord, du Saguenay-Lac-Saint-Jean et de l’Outaouais. D’autres quittent pour les moissons de l’ Ouest canadien, pour la construction de chemin de fer ou pour le travail dans des usines de sciage ou des mines. Les femmes célibataires quittent pour travailler comme domestiques dans des lieux de villégiature ou dans des établissements bourgeois (Perron, 1996). Cette division du travail conduit les hommes à se retrouver en plus grand nombre dans les milieux ruraux alors que les femmes s’installent souvent en milieu métropolitain où les emplois qui leur conviennent le mieux sont abondants. Cet exode des jeunes filles vers les villes est un autre élément qui inquiète beaucoup les élites cléricales du temps.

Les plans de colonisation (1930-1940)

La CrIse économique des années 1930 conjuguée à la fermeture des frontières américaines ont passablement limité l’accès à la ville. Un bon nombre de Franco- Américains sont alors revenus à la terre. Parallèlement, les régions de colonisation sont devenues très prisées au Québec depuis l’influence du célèbre curé Antoine Labelle. Au même moment où les efforts de colonisation prennent place, le Québec met également des efforts à développer son caractère industriel qui accuse un retard sur ses voisins. Au Bas-Saint-Laurent, la Crise aura un effet inattendu sur le territoire des hautes terres. Le mouvement de colonisation qui a ralentit dans les années 1920, reprend vie. La crise des ressources forestières et des sols à bon potentiel agricole s’ estompe, et le haut pays redevient attrayant pour les populations rurales et urbaines régionales. Cette nouvelle étape de la colonisation agricole au Bas-Saint-Laurent se fera sous le signe de l’intervention étatique du fédéral et du provincial, en collaboration avec les sociétés de colonisation sous l’ égide du clergé diocésain (Fortin et al., 1993). L ‘ État québécois s’était mis à la tête du mouvement de colonisation en instaurant d’abord les primes de défrichement en 1923. Différents programmes visant l’ établissement rural de familles et de célibataires désireux de défricher une terre ou de reprendre une ferme à l’ abandon verront aussi le jour, portant le nom des ministres responsables concernés: les plans Vautrin, Roger-Auger et Gordon. Rapidement, des subventions s’ajouteront pour permettre la construction de maisons, de bâtiments de ferme, l’achat d’instruments aratoires ou de bétail et même des primes pour l’égouttement et l’épierrage des terres. De 1936 à 1939, on aura dépensé autant d’argent pour la colonisation que depuis 1867 (Fortin et al. , 1993). Bien qu’il soit difficile de quantifier les résultats de ces efforts au Bas-Saint-Laurent, certaines données peuvent témoigner d’ un succès certain.

Le recensement fédéral de 1941 permet de dresser un certain bilan de cette période depuis 1930. Alors qu’ au Québec la population agricole augmente de 95 000 personnes, on estime que la région appalachienne du Bas-Saint-Laurent serait responsable de 22 000 personnes dans cet accroissement. Ce nombre apparaît comme très élevé comparativement aux résultats des régions voisines: la Gaspésie avec 5 000 et la Côte-du-Sud avec 4300 âmes (Fortin et al. , 1993). Les effets positifs de cette course à la colonisation du haut pays demeurent encore aujourd ‘ hui fort discutables. En effet, certains centres de colonisation bénéficiaient d ‘ un faible potentiel agricole alors que le système de primes de l’ époque, poussant les colons toujours plus loin, a entraîné le délaissement de lots à demi défrichés au coeur de paroisses récemment ouvertes. Ce déboisement effréné a hypothéqué pour plusieurs décennies le potentiel forestier de la région, en plus de créer d’ inévitables conflits de cohabitation entre les concessionnaires forestiers et les colons-bûcherons.

La migration en chiffres Au cours des années 1970 et 1980, le monde rural bas-laurentien verra son hémorragie démographique se poursuivre. Au chapitre de la population totale, les villes de Rimouski et de Rivière-du-Loup se font visiblement terres d’accueil des ruraux. Forte de l’ attrait de ces villes, la population bas-Iaurentienne passe tout de même de 211 670 habitants en 1981 à 205 094 âmes dix ans plus tard (Fortin et al. , 1993). Au-delà de ces mouvements de population qui se font persistants, c’ est l’ exode des jeunes de 15 à 35 ans qui marque davantage le contexte contemporain des mouvements de population au Bas-Saint-Laurent. Le comportement migratoire des jeunes inquiète d’ autant plus que la région fait face à un important vieillissement de sa population. De 1996 à 200 1, la région aurait perdu près de 17,5 % de ses jeunes âgés de 20 à 24 ans alors que 16,7 % des 25-29 ans auraient également quitté la région. Mentionnons que pour la même période, le Bas-Saint-Laurent enregistre une perte de 5 % de ses 30-34 ans. Les pertes s’ observent toutefois de façon inégale sur le territoire comme en fait foi le tableau 1. Au-delà de ces différents pourcentages chez les MRC, il importe de mentionner une certaine disparité entre les milieux urbains et ruraux, particulièrement dans les MRC de la Matapédia, de la Mitis, de Matane et du Kamouraska. En effet, à l’ image des mouvements de population du milieu du siècle dernier, les pôles urbains de chacune des MRC s’ en tirent mieux que chacune des municipalités rurales de son territoire en ce qui a trait à la migration de ses 15-25 ans comme le démontre la figure 4.

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Table des matières

REMERCIEMENTS
RÉSUMÉ
TABLE DES MATIÈRES
LISTE DES T ABLEAUX
LISTE DES FIGURES
LISTE DES SIGLES
INTRODUCTION
CHAPITRE PREMIER LA PROBLÉMATIQUE
1.1 L ‘ÉTUDE DE LA MIGRATION DES JEUNES
1.2 Au Québec
1.1.1 Dans [‘Est du Québec
1.1.2 Au Canada
1 .3 ÉTAT DE SITUATION AU QUÉBEC ET AU BAS-SAINT-L AURENT
1. 2. J La migration au Québec et au Bas-Saint-Laurent d ‘hier à 1970
1.2. 1.1 De l’ immi gration à la mi gration ( 1840- 1930)
1.2. 1.2 Les pl ans de coloni sation ( 1930- 1940)
1.2.1 .3 Les années d’après-guerre ( 1945- 1960)
1.2. 1.4 Un vé ritabl e exode bas-Iaurenti en (Les années 1960)
1.2. 1.5 Les aménageurs au Bas-Saint-Laurent, des mi grati ons fo rcées ( 1965-1 970)
1. 2.2 Le contexte contemporain de la migration et l ‘état de situation (/970 à aujourd’hui)
1.2.2. 1 La mi gration en chiffres
1.2.2.2 Où vont les jeunes?
1.2.2.3 Reviennent-il s?
1. 2.3 Impacts de la migration des j eunes sur le développement du Bas-Saint-Laurent
1.2.3.1 Impacts démographiques
1.2.3.2 Impacts sociaux
1.2.3.3 Impacts économiques
1.3 OBJET DE LA RECHERCHE
1.3.2 Intention et visée
1.3.3 Question de recherche
1.3.3 Cadre de d ‘analyse
1.3.4 Pertinence de la recherche pour la science
.3.5 Pertinence de la recherche pour la pratique
1.3.6 Pertinence en lien avec le développement régional
1.3.7 L ‘opérationnalisation
1.3.7. 1 L’ hypothèse
1.3.7.2 L’analyse conceptuelle
A. Les jeunes
B. Les intervenants
C. Représentati on des actions et des moyens
D. La migration
CHAPITRE 2 LES RÉGIONS FACE À LA MIGRATION: DES A VIS ET DES INITIATIVES
2.1 LES AViS
2.1.1 L ‘avis du Conseil permanent de la Jeunesse «Y’a pus d ‘avenir ici»(J99 7)
2. 1.2 L ‘avis du Conseil permanent de la Jeunesse (2004)
2. / .3 L ‘avis du Regroupement des jeunes gens d ‘affaires du Québec (2001)
2. 1.4 L ‘enquête du Partenariat rural canadien
2.2. L ES INITIATIVES
2.2. / Place aux jeunes (PAJ)
2.2.2 Stratégie Migraction au Saguenay-Lac-Saint-Jean
2.2. 3 Portail jeunesse Gaspésie-Les Îles
2.2.4 La Fondation communautaire Gaspésie – Les Îles et sa «Terre d ‘accueil des j eunes diplômés»
2.2.5 JeunEssor Portneuf
2.2.6 Des Romains chez les Gaulois
2.2.7 Dazibao : la conspiration d ‘A bitibi-Ouest
2.2.8 Opération survie à Saint-Magloire-de-Bellechasse
2.2.9 La Boîte à Bleuets dans Lac-Saint-Jean-Est
2.2. /0. Politiques gouvernementales
CHAPITRE 3 TERRITOIRE À L’ÉTUDE: LE BAS-SAINT-LAURENT
3.1 PORTRAIT SOCIAL ET ÉCONOMIQUE DU BAS-SAINT -LAURENT
3. 1. / Territoire
3. 1.2 Population
3.1.3 Activité économique et emploi
3.1.4 Éducation
3.1. 5 Recherche et technologie
3. 1.6 Tourisme
3.2 PORTRA IT DE LA MIGRATION DES JEUNES AU BSL
3.2. 1 Les j eunes bas-laurentiens quittent
3.2.2 La représentation que se font les j eunes de la région
3.2.3 L ‘intérêt des jeunes face à la région
3.3 LES INITI ATIV ES BAS- LAU RENTIENNES EN REG AR D DE LA MIGRATION
3.3. / Pour le développement d’un sentiment d ‘appartenance et d’une vision plus positive de la région
A. PAl -Ados
B. Programme portrait de village de la Coaliti on Urgence Rurale
C. Concours photo Zoom sur ma région
D. La place des j e unes dans les médi as locaux
3. 3.2 Pour maintenir le contact
A. Réseautage étudi a nts/entre pri ses de la CS DT -PME
B. La Vitrine du Bas-Saint-Laurent sur Inte rnet
3.3.3 Pour favoriser le choix du Bas-Saint-Laurent comme lieu d’établissement
A. Séjours ex ploratoires PAl
B. Ré pe rtoi re des dîpl omés au Témi scouata
C. Brochure Le Bas-Saint-Laurent un c hoix judicieux
D. Des j e unes Ré uni onnais au Bas-Saint-Lauren!
3. 3.4 Pour favoriser l ‘intégration et l’enracinement
A. 5 à 7 Synerjik
B. Accueil et intégrati on B.S.
C. Fonds du Bas-Saint-Laure nt pour les a rts et les lettres
D. Galas reconnaissance je unesse
E. Rassembl eme nt jeun esse du Bas-Saint-Laure nt
CHAPITRE 4 MÉTHODOLOGIE
4.1 ApPROCHE MËTHODOLOGIQU
4.2 INSTRUMENTATION
4.3 POPULATIONS À L’ËTUDE
4.3. 1 Échantillonnage « intervenants »
4.3.2 Échantillonnage «jeunes »
A. Consul tations sur la phase 1 – Avant que les jeunes ne quittent la région
B. Consultations sur la phase 2 – Pendant la mi gration
C. Consul tations sur la phase 3 – Au moment du choix d ‘établissement
D. Consul tations sur la phase 4 – Après 1’ établi ssement
CHAPITRE 5 LE BAS-SAINT-LAURENT EN MODE SOLUTION: DEUX POINTS DE VUE
5.1 PREMI ER TEMPS – AVANT QUE LES JEUNES NE QUITTENT LA RËG ION
5.1.1 L ‘engagement social des jeunes
5.1.2 Connaissance du marché de l ’emploi régional
5. 1.3 Loisir et culture
5.1.4 Connaissance de la région
Les jeunes
5. 1.5 Analyse des résultats
A. Engagement social des jeunes: deux ordres de priorités el deux visions
B. Le loisir : quelle importance?
C. Quand jeunes et intervenants s’entendenl
5.2 DEUXIÈME TEMPS – PENDANT LA MIGRATION
5.2.1 L ‘échange d ‘information
5.2.2 Premier réseau de contacts professionnels
5.2.3 Analyse des résultats
A. Important. le réseau de contacts?
B. L’ échange d ‘ information avec nos mi grants: deux visions
5.3 TROISIÈME TEMPS – A u MOMENT DU CHOIX D’ËTABLISSEMENT
5.3.1 incitatifs à l ‘établissement
5.3.2 Promotion des atouts de la région
5.3.3 Entrepreneuriat
5.3.4 L ‘accès à un premier emploi
5.3.5 Analyse des résultats
A. L’entrepreneuriat ou l’empl oi?
B. Les incitatifs fiscaux
C. Promotion de la vie au Bas-Saint-Laurent
5.4 A. QUATRIÈME TEMPS – APRÈS L’ÉTABLISSEMENT
5.4. / B. Occasions d ‘intégration
5.4.2 Connaissance de la région
5.4.3 Participation citoyenne
5.4.4 Analyse des résultats
CONCLUSION
RÉFÉRENCES
ANNEXE 1
ANNEXE 2
ANNEXE 3

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