Impact d’un entrainement syntaxique sur la théorie de l’esprit

La théorie de l’Esprit (TdE) est « la capacité à attribuer des états mentaux à autrui et ainsi à prédire ou expliquer son comportement » (Premack et Woodruff, 1978 cités par Durrleman et al., 2016) [4]. Elle joue un rôle fondamental dans les habiletés sociales, et est généralement acquise vers 4-5 ans par les enfants présentant un développement typique (DT) (Astington et Edward, 2010) [1]. En revanche, les enfants avec un trouble du spectre autistique (TSA) et les enfants avec un trouble développemental du langage (TDL) (selon la terminologie de Bishop et al., 2017) [3] présentent des difficultés à comprendre les états mentaux d’autrui (TSA : Baron Cohen, Leslie et Frith, 1985 [2] ; TDL : Nilsson et Jensen de López, 2016 [16]).  Pourtant, certains enfants parviennent tout de même à réussir les tâches de fausse croyance (Naito et Nagayama, 2004) [15]. Ces enfants posséderaient un meilleur niveau de langage et s’en serviraient explicitement afin de résoudre les tâches de TdE (Durrleman et Franck, 2015 [9] ; Tager-Flusberg et Joseph, 2005 [20]). En effet, il existerait un lien entre les phrases enchâssées (ou complétives) et la compréhension de fausses croyances (Durrleman et al., 2016) [8]. Cette construction syntaxique a l’avantage que le contenu de la phrase enchâssée reste vrai indépendamment de la réalité et de l’état mental subjectif (de Villiers et de Villiers, 2000) [5] et permet donc aux enfants de mettre en place une stratégie verbale afin de résoudre la tâche de TdE (Durrleman et al., 2016) [8]. Cette résolution serait plus aisée lorsque l’enchâssement est introduit par un verbe de communication, car ce dernier est plus concret qu’un verbe d’état mental (TSA : TagerFlusberg et Joseph, 2005 [20] ; TSL : Durrleman, Burnel, et Reboul, 2017 [7]). La maîtrise des complétives s’est avérée être prédictive de la réussite des tâches de TdE, y compris non verbales, pour les TSA, TDL et DT (Durrleman, Burnel, et Reboul, 2017) [7]. De plus, des entraînements portant sur les complétives auprès d’enfants DT d’âge préscolaire n’ayant pas encore acquis la TdE ont montré une amélioration des performances pour les complétives et pour les tâches en TdE (Hale et Tager Flusberg, 2003 [11] ; Lohmann et Tomasello, 2003 [14] ; Shuliang et al., 2014 [18]). L’objectif de cette étude est de s’interroger sur les enjeux liés à un entraînement portant sur les complétives, plus particulièrement auprès de patients TSA et TDL. Ainsi, nous formulons trois hypothèses : (1) Un entraînement syntaxique basé sur la compréhension et l’acquisition des complétives pourrait améliorer les compétences en TdE des enfants TSA et TDL comparativement à une population contrôle (DT) et à un entraînement contrôle lexical ; (2) Il existerait des différences intergroupes dans l’amélioration des performances en TdE ; (3) Les enfants ayant progressé en TdE maintiendraient leurs gains après l’arrêt de l’entraînement.

Méthodes

Participants
Cette étude porte sur 29 enfants répartis en trois types de population. Nous avons inclus dans notre population : 10 enfants avec un développement typique (DT) âgés de 4 ans 3 mois à 5 ans 2 mois dont six ont reçu l’entraînement cible et quatre l’entraînement contrôle, 10 enfants avec un trouble développemental du langage (TDL) âgés de 6 ans 4 mois à 9 ans 5 mois dont six ont reçu l’entraînement cible et quatre l’entraînement contrôle ; et 9 enfants avec un trouble du spectre autistique (TSA) âgés de 6 ans 1 mois à 13 ans 3 mois dont six ont reçu l’entraînement cible et trois ont reçu l’entraînement contrôle. Les participants de cette étude ont été principalement recrutés à Paris mais aussi à Genève. Un consentement de participation à l’étude a été rempli et signé par les parents de chacun des enfants.

Critères d’inclusion
Pour être inclus les enfants devaient respecter plusieurs critères. Chacun d’eux devaient appartenir à la fourchette d’âge préalablement définie, c’est-à-dire de 3 à 6 ans pour les DT, de 6 à 10 ans pour les TDL et de 6 à 13 ans et demi pour les TSA. Concernant les enfants avec un développement typique, ceux-ci ne devaient pas avoir de trouble du langage. Pour les deux populations cliniques (TSA et TDL), le diagnostic devait être posé. Le principal critère d’inclusion concerne les performances des enfants en théorie de l’Esprit (TdE) et en complétive au pré-test. En effet, pour être inclus l’enfant doit avoir un score inférieur à 80% aux tâches de TdE, c’est-à-dire qu’il doit échouer à au moins 4 items sur 24. Il doit également obtenir un score inférieur à 80% aux tâches portant sur les complétives, c’est-à-dire qu’il doit échouer à minimum 2 items sur 12. Ces échecs doivent être retrouvés dans les deux cas pour les items portant sur les fausses croyances. Les items de vraies croyances servent d’indice sur les capacités de maintien attentionnel de l’enfant. De plus, le niveau de langage doit être suffisant et l’enfant doit comprendre des phrases simples de type sujet-verbe-objet. Enfin, l’enfant doit manifester suffisamment d’attention pour pouvoir profiter de l’entraînement.

Critères d’exclusion
Les critères d’exclusion comprennent un score supérieur à 67 % pour les tâches de TdE en fausse croyance (8 items réussis sur 12) ainsi que pour les tâches portant sur les complétives en fausse croyance (4 items réussis sur 6), des scores exclusivement déficitaires en TdE ou exclusivement déficitaires en complétive, un niveau langagier insuffisant et un trouble attentionnel trop important.

Matériel et procédure 

Matériel d’évaluation
Tous les participants ont été évalués lors des pré-tests sur un ordinateur portable. Les prétests spécialement conçus pour l’étude comportent plusieurs types d’épreuves. Tout d’abord, nous faisons passer à l’enfant un test portant à la fois sur la TdE et sur la compréhension des phrases enchâssées (ou complétives).

Théorie de l’esprit
La TdE est évaluée sur un total de 24 items. Sur ces 24 items, 12 concernent des tâches de TdE verbale (6 sont des vraies croyances et 6 autres sont des fausses croyances) et 12 autres concernent des tâches de TdE non verbale (6 sont des vraies croyances et 6 autres sont des fausses croyances). Il existe deux versions du test évaluant la TdE, il s’agit des mêmes items présentés dans un ordre différent. Ceci a pour but de vérifier qu’il n’y a pas d’effet de l’ordre de présentation des items. Pour chaque tâche présentée ci-dessous, l’enfant doit choisir entre trois propositions. Deux sont impliquées dans le scénario présenté et reflètent le conflit cognitif dans lequel se trouve l’enfant. Le troisième choix est toujours sans rapport avec l’histoire et a pour rôle de contrôler que l’enfant ne répond pas « au hasard ».

L’épreuve de TdE verbale est directement inspirée de l’épreuve du Sally-Ann (BaronCohen, Leslie et Frith, 1985) [2]. Pour cette tâche, l’enfant est confronté à un déplacement inattendu d’un objet à l’insu d’un des personnages. Chaque scène est présentée de façon animée, et les protagonistes sont des personnes ou des animaux. Par exemple, une des scènes proposées est : « Voici Anne. Voici Thomas. Anne a un panier. Thomas a une boîte. Anne a un ballon. Elle met le ballon dans son panier. Anne sort se promener (le personnage quitte l’écran). Thomas sort le ballon du panier et le met dans la boîte. Maintenant Anne revient, elle veut jouer avec le ballon. Où Anne va chercher son ballon ? ». L’enfant doit ensuite choisir parmi trois réponses : la position initiale (ici le panier), l’endroit où l’objet se trouve réellement (ici la boîte) et la position du milieu représentant un objet non impliqué dans l’histoire (ici un sac). Pour réussir la tâche, l’enfant doit prédire où Anne ira chercher le ballon à son retour en tenant compte de la représentation erronée d’Anne et en mettant de côté sa propre connaissance de la réalité. Pour cet exemple, la bonne réponse est de choisir le panier puisqu’Anne n’a pas vu le déplacement opéré par Thomas.

L’épreuve de TdE non verbale est inspirée des travaux de Woolfe, Want et Siegal, (2002) [22]. Pour cette tâche, le personnage de la scène est accompagné d’une bulle de pensée et cherche à obtenir un objet qu’il ne voit pas. Par exemple, une des scènes proposées est : « La maman a soif, elle veut prendre quelque chose à boire. Regarde, on cache les yeux de la maman. Elle ne voit pas ce qu’elle prend dans le placard. Clique pour voir ». En même temps que l’on indique à l’enfant que le personnage ne voit pas ce qu’il fait, un bandeau apparaît pour cacher les yeux du personnage. L’enfant clique ensuite pour voir ce qui est caché (ici derrière la porte du placard) et découvre que le personnage ne prend pas en réalité ce qu’il croit prendre (ici la maman prend un bocal à bonbons). On demande ensuite à l’enfant : « La maman pense prendre quoi dans le placard ? ». L’enfant doit alors choisir entre ce que pense prendre le personnage (ici la bouteille d’eau), ce qu’il prend réellement (ici le bocal à bonbons) et un objet n’ayant rien à voir avec l’histoire (ici un cartable). Cette tâche est dite non verbale car elle est plus imagée et donc implique moins de composantes verbales que la tâche de TdE verbale précédemment décrite.

Complétive
La tâche évaluant la compréhension des complétives comporte 12 items (divisés en 6 vraies complétives et 6 fausses complétives). Cette tâche est inspirée de « la tâche élaborée » conçue par de Villiers et Pyers, (2002) [6]. L’enfant est confronté à une courte histoire impliquant une phrase enchâssée introduite par le verbe de communication « dire ». Par exemple, une des scènes proposées est : « Le papa demande à la maîtresse ce que Jean est en train de faire, et la maîtresse répond que Jean est en train d’écrire quelque chose ». Ensuite, la scène se déplace pour que l’enfant découvre ce que le personnage est réellement en train de faire. Par exemple, « Mais regarde au lieu de ça Jean est en train de jouer à des jeux de construction ». On demande ensuite à l’enfant de choisir ce que le personnage a dit : « La maîtresse dit que Jean fait quoi ? ». L’enfant doit alors choisir parmi trois images : ce que le personnage à qui la question est posée dit (ici « Jean est en train d’écrire »), ce que le personnage dont on parle fait réellement (ici Jean joue à des jeux de construction) et une image n’ayant aucun lien avec l’histoire (ici Jean fait des pliages avec des feuilles de papier).

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Table des matières

I)INTRODUCTION
II) GENERALITES
III) METHODOLOGIE
IV) RESULTATS
V) COMMENTAIRES ET DISCUSSION
VI) CONCLUSION  
VII) REFERENCES
ANNEXES
RESUME

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