Impact des perceptions culturelles sur les politiques nationales

La nature a de tous temps passionné, intrigué, frustré, aidé l’homme. Cette relation complexe, faite de détours, d’ambigüité et d’incompréhension est le fait de la diversité de la nature elle même mais aussi des perceptions qu’en ont les hommes. L’histoire de la nature et de l’homme, ou plutôt des natures et des hommes, est une relation passionnelle, une fresque historique faite d’évolutions, de revirements et dont un des dénouements possibles est la fin d’un des deux protagonistes. La connaissance de la possibilité de l’issue fatale n’est pas nouvelle, et pourtant l’homme ne réussit pas à modifier le cours de son action. Cet état de fait, de la part d’un être qui se veut rationnel et en mesure de faire intervenir un jugement fondé sur une analyse pour prendre la meilleure décision possible semble pour le moins incompréhensible. Il implique en tout état de cause de comprendre la nature des relations, des idées à l’œuvre, ainsi que les explications aux perceptions et actions. Seule une telle analyse peut être en mesure de fonder une explication compréhensive, laquelle peut servir de base à une modification d’action.

L’ambition de cette thèse est de proposer une méthode pour refonder l’action collective de l’homme vis-à-vis de la nature, qui s’appuie sur les solutions et enceintes existantes – il ne s’agit pas ici de faire table rase de l’existant, une telle proposition ne pouvant être concrètement mise en œuvre – mais en se fondant sur une analyse ayant un point de départ différent, celui d’explorer la fécondité de la diversité. Pour ce faire, la thèse s’appuie sur une variété de champs disciplinaires outre son domaine principal, la philosophie et l’histoire des idées – histoire, sociologie, psychologie, relations internationales. La diversité des domaines auxquels la thèse emprunte pour construire des modèles compréhensifs est tout à fait vitale car seule la complémentarité de ces expertises permet de réunir l’ensemble des prismes en mesure de fournir une compréhension fine des mécanismes à l’œuvre dans l’action humaine et donc de proposer des clés d’entrée pertinentes pour la modifier. La transversalité de la thèse reflète ici simplement la complexité du sujet à l’étude ainsi que la volonté d’être exhaustif dans le questionnement des causes, sans pour autant la spécialiser dans autre chose que l’exercice philosophique. Cette thèse part du constat de la complexité du monde, de l’homme et de la nature, dès lors un des écueils les plus importants à éviter est celui du réductionnisme, c’est pourquoi il est important d’en appeler à une diversité disciplinaire aussi large.

L’ensemble de ces apports disciplinaires permet de dessiner une explication compréhensive et holistique, pour formuler une refondation de l’action qui les prenne tous en compte. Le questionnement initial qui a animé cette réflexion portait sur la possibilité de mobiliser les perceptions culturelles pour modifier en profondeur l’action de l’homme envers la nature. A cela s’est ajouté, au fil de l’approfondissement, une question fondamentale : pourquoi et comment l’humanité dans son ensemble est incapable de modifier le cours de son action alors même que celle-ci démontre chaque jour plus encore qu’elle peut potentiellement remettre en cause les conditions de la vie humaine sur Terre. L’exploration de la relation homme nature et des conditions de celle-ci nous amène à remettre en cause une lecture linéaire et monolithique dans laquelle l’homme aurait augmenté son impact sur la nature au cours de l’histoire pour ses propres besoins de développement de plus en plus voraces et que, en dépit de la multiplication des signes de rétroaction, l’humanité continuerait à exploiter aveuglément la nature. Cette lecture comporte nécessairement une forme de vérité, sans quoi la situation aurait déjà changé, mais elle est indubitablement incomplète, ne serait-ce que parce qu’elle ne prend pas en compte la complexité des parties impliquées. Or une rapide analyse étymologique nous montre rapidement la fécondité et la complexité de la nature, mais aussi le cortège de questions tant liées au monde des hommes que métaphysiques qu’elle suscite.

Le mot « Nature » est issu du latin natura qui signifie « le fait de la naissance », le «tempérament », « le cours des choses ». Le latin natura est participe du verbe latin nascor issu de gnatus, forme archaïque de natus qui désigne celui qui est né, celui qui est par naissance, mais qui signifie aussi, employé au singulier, le fils.

Si notre vocabulaire a hérité de l’étymologie romaine, l’acception grecque du terme de « nature », « phusis », est aussi intéressante pour comprendre aussi l’évolution conceptuelle dont la nature a fait l’objet. Au fait initial de la naissance, l’acception grecque phusis ajoute la notion d’accomplissement et de croissance, provenant du verbe phuein signifie à la fois « être engendré » mais aussi « croître ». A la croisée de l’en-puissance et de l’en-acte d’Aristote, la nature est à la fois par son processus créateur une puissance en devenir, en éclosion, mais aussi une force actuelle qui contrôle l’existence humaine. Elle inspire à la fois respect et peur au monde des hommes et ce mode à la fois de l’être puissant et du devenir a engendré à des interrogations ontologiques sur l’être de la nature : la nature relève-t-elle du monde suprasensible, contient-elle en elle-même l’idée et la puissance de son éclosion, ou est-elle l’émanation d’un créateur, le résultat d’une poïésis ? La conjonction de la dunamis et de l’energeia dans la nature a probablement amené ces interrogations sur le processus naturel de la nature. La natura est un fait initial et la phusis un processus en changement permanent, un souffle. Si la nature est entendue comme processus de création permanent, y a-t-il un ordre à cette création ? Est-elle régie par des lois, par un nomos ? L’étymologie nous montre aussi déjà bien la tension entre l’étant et le devenant, mais aussi entre la nature comme origine de son propre mouvement ou comme créée par une puissance extérieure. Elle porte ainsi déjà en tension des représentations très différentes de la nature.

La nature au défi de la compréhension humaine
« Par Nature, on entend l’ensemble de tout ce qui existe, le monde, l’univers, mais également ce qui singularise un existant, son principe ou son essence. Le radical latin comme son équivalent grec renvoient à ce qui naît (nasci) et se développe (phuomai / φυοµαι, se mettre à pousser, croître). La nature est alors du côté du vivant, de ce qui est susceptible de génération et de corruption : le changeant. En même temps, la nature est de ce qui se maintient, le permanent, le stable, du côté de l’être ou de l’ordre. Cette polysémie se renforce lorsque l’on passe du descriptif au normatif, du registre de la vérité à celui du bien et du beau. » .

Comme le pointe bien Catherine Larrère, la polysémie du mot de « nature » nous renvoie au défi de l’appréhension par l’homme. La nature représente ainsi trois réalités : 1. l’ensemble du naturel (monde naturel), 2. l’ensemble de l’univers dans une appréhension plus ominsciente et 3. l’essence fondamentale de quelque chose, qui le définit de manière intrinsèque. La nature, qu’elle soit initialement créée ou qu’elle s’auto-crée, est du côté de la création, mais elle se meut selon des principes ou des lois qui dépassent les hommes. L’éventail des réalités et des représentations de la nature est donc en quelque sorte comme de l’infiniment petit à l’infiniment grand, tout est nature de l’atome aux lois de l’univers. La nature est un défi posé à l’entendement humain, peut-être le plus absolu car il requiert de porter un regard extérieur sur un ensemble dont l’homme fait partie.

La nature serait donc un objet permutant, en constante évolution et mouvement, posant un défi inhérent à la compréhension humaine. Outre la polysémie, c’est la multiplicité des réalités que la nature recouvre, parfois chose sur laquelle l’homme exerce son pouvoir, mais aussi tout étant omnipotent face auquel l’homme est totalement démuni, qui laisse l’esprit humain désarmé. La nature est tout à la fois nourricière, pacha mama, elle nourrit l’homme de ses généreux fruits, mais elle peut être aussi furieuse et destructrice, tout comme elle est l’oïkos, habitat mais aussi maison dans son caractère familier. Cette multiplicité de réalités engendre aussi une multiplicité de perceptions par l’homme.

Les hommes et les natures
A la complexité de la nature répond tout naturellement celle de sa perception par l’homme, ou plus exactement pour comprendre la complexité de l’objet d’étude de la nature, il faut comprendre la complexité du percevant, l’homme. Car ce qu’il projette sur la nature, selon qu’il la perçoit comme un objet inerte ou un étant global, évoluant sous sa propre impulsion ou créé par une puissance supérieure, porte naturellement des implications profondes quant à son comportement envers elle. Si la nature est régie par un nomos, impliquant un dessein préétabli, cela ne présuppose-t-il pas une morale à laquelle l’homme doit aussi se plier ? Mais l’homme ne projette-t-il pas des conventions et des lois qui appartiennent au domaine des hommes ? La dichotomie nature / loi peut être transcendée par la notion de telos qu’apportent ultérieurement Platon et Aristote. La téléologie n’a pourtant pas la même charge pour tous, biologique pour Aristote et démiurgique chez Platon, elle n’appelle donc pas aux mêmes conclusions éthiques. La réponse apportée par l’homme au cours de son existence et au fur et à mesure de sa construction en tant que société au fait de savoir s’il y a ou un nomos ou un telos dans la nature influe considérablement sur l’ethos humain. Ces questions de nomos et de telos sont, elles, inextricablement liées à la construction des sociétés, elles ont à voir autant avec les constructions spirituelles que les progrès de la science, mais aussi que l’éthique à proprement parler en tant que société. Si l’action de l’homme envers la nature semble assez similaire dans le temps long, les perceptions ont donc nécessairement évolué avec les sociétés des hommes, parallèlement à elles. Cette rapide présentation de la complexité des parties et des forces à l’œuvre montre aussi la nécessité d’en appeler à des domaines d’expertise différents, afin d’avoir une vision la plus fine des représentations de la nature.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE L’HOMME ET LA NATURE
Chapitre I. Une histoire commune ?
1. Les récits fondateurs
1.1. Les cosmogonies
1.2. Les eschatologies
2. Une trajectoire globale
2.1. Action de l’homme sur la nature
2.2. Action de la nature sur l’homme
3. Modifier la trajectoire de l’action humaine
3.1. Comprendre les motifs
3.2. L’aporie homme nature
Chapitre II. Des relations plurielles
1. La nature, objet échevelé
2. Des récits des hommes et des dieux
2.1. Comprendre le système monde
2.2. Laisser le monde faire système
3. Des facteurs de perceptions différentes
3.1. Le territoire
3.2. La religion
3.3. A l’intersection entre nature et culture : le paysage
DEUXIÈME PARTIE UNE NATURE, DES PERCEPTIONS
Chapitre III. La France : la victoire de la science
1. De la nature merveilleuse à la nature dévoilée
2. La nature horloge, arracher la nature au Créateur
3. De l’esthétique à la gestion de la nature
Chapitre IV. Le Japon : l’harmonie avec une nature
1. La nature sacrée
2. La création d’une « nature secondaire » idéalisée
3. La nature idéalisée au prix de la nature réelle
4. Le changement : volonté réelle ou vœu pieux ?
Chapitre V. Les États-Unis : l’homme libre
1. Les puritains, ou la peur de la wilderness
2. L’esprit de la frontière, l’optimisme renouvelé
3. Le dilemme américain face à la nature : la nature et l’homme libre
TROISIÈME PARTIE REFONDER L’ACTION COLLECTIVE
Chapitre VI. Appréhender la diversité
1. Pourquoi reconnaître la diversité ?
1.a. Impact des perceptions culturelles sur les politiques nationales
1.b. Inopérabilité du concept de développement durable
1.c. Technicité et primauté économique du système existant
2. Comment – Théoriser et conceptualiser
2.a. Trouver des ponts
2.b. Modéliser
2.c. Un rapport concentrique entre homme et nature
Chapitre VII. Refonder l’action collective
1. Les concepts et solutions existantes
1.a. Pour une gnoséologie de la science
1.b. L’éthique comme sacré immanent
2. Mieux prendre en compte la diversité dans les enceintes internationales
2.a. L’enceinte internationale pertinente pour la diversité culturelle
2.b. Implémenter la diversité culturelle
CONCLUSION

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