Impact des PAH sur le chauffage du gaz dans les régions de photodissociation

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Molécules interstellaires et circumstellaires

À ce jour, plus de 200 molécules ont été détectées dans la Galaxie, soit dans le mi-lieu interstellaire, soit dans les enveloppes d’étoiles évoluées. Les détections de nouvelles molécules sont concentrées dans quelques objets : les nuages moléculaires TMC-1 et Sgr B2 pour le milieu interstellaire et principalement dans l’enveloppe de l’étoile AGB carbonée la plus proche, IRC+10216, pour le milieu circumstellaire [McGuire, 2018]. Les premières espèces moléculaires à avoir été détectées sont CH, CN et CH+ (des ra-dicaux) [Douglas and Herzberg, 1941; McKellar, 1940; Swings and Rosenfeld, 1937]. La molécule de H2 n’a été détectée qu’en 1970 par Carruthers [1970], par ses transitions dans l’UV accessibles seulement depuis l’espace. La mesure de Carruthers [1970] a per-mis d’effectuer la première mesure de densité de colonne du H2, de NH2=1.3×1020 cm−2 en direction de l’étoile ξ Persei. Conformément aux prédictions de l’époque, la moitié de l’hydrogène sur cette ligne de visée est sous forme moléculaire. H2 est la molécule la plus abondante, suivie de CO puis H2O. La molécule de CO permet de tracer effica-cement les nuages moléculaires via l’observation de sa transition rotationnelle dans le domaine millimétrique, à 115 GHz (2.6 mm). Un des grands intérêts de cette molécule est que l’on peut, en faisant certaines hypothèses, relier son émission à la densité de colonne du H2 [Heyer and Dame, 2015]. De façon non exhaustive, son émission peut aussi servir à cartographier la Voie Lactée, à la mesure de la masse des nuages molé-culaires ou encore du taux de formation d’étoiles dans les galaxies [Heyer and Dame, 2015].
Par ailleurs, on compte plus de 70 molécules contenant 6 atomes ou plus, appelées molécules organiques complexes (MOC). Enfin, les hydrocarbures aromatiques polycy-cliques (Polycyclic Aromatic Hydrocarbons en anglais, PAH par la suite), sont également une composante moléculaire importante mais elles doivent être considérées comme une famille car aucune espèce individuelle n’a pu être identifiée à ce jour.
La formation moléculaire ne sera pas traitée dans ce manuscrit, mais on pourra consulter Tielens [2013] et Herbst and van Dishoeck [2009] pour plus d’informations à ce sujet. Globalement, la chimie en phase gazeuse n’est pas assez efficace pour expliquer à elle seule les densités de colonne des molécules observées. Les grains de poussière jouent un rôle crucial dans l’évolution de la complexité chimique du milieu interstellaire.

La poussière interstellaire

La mesure de l’abondance du C, Mg, O, Si et Fe dans le gaz interstellaire indique que ces atomes sont sous-abondants dans le milieu interstellaire, et participent à la formation de grains de poussière. Ces grains absorbent et diffusent le rayonnement provoquant l’extinction interstellaire, dépendante de la longueur d’onde (figure 1.4). Dans le cas le plus simple, la variation d’intensité due à l’extinction est donnée par : Iλ = Iλ0e−τλ , (1.3) où Iλ0 est le flux avant la traversée du milieu et Iλ est le flux observé, affecté par l’extinction. La profondeur optique τλ est définie comme : τ(λ) = σext(λ)NH , (1.4) avec σext(λ), la section efficace d’extinction par atome d’hydrogène (en cm2/H) en fonction de la longueur d’onde et N H la densité de colonne d’hydrogène, i.e. la quantité de H dans une colonne de 1 cm2 de surface à la base (en H/cm2). La figure 1.4 montre l’évolution de σext dans le cas du milieu diffus à haute latitude galactique (DHLG pour la suite). L’extinction à la longueur d’onde λ peut par ailleurs être définie en magnitude selon : Aλ = −2.5 log Iλ (1.5).
En injectant l’équation (1.3) dans 1.5, on obtient la relation : Aλ = 1.086 τλ. En gé-néral, l’extinction est mesurée dans la bande visible V par comparaison entre le spectre “éteint” d’une étoile et celui d’une autre étoile de même type dont le spectre n’est pas affecté par l’extinction. AV et NH sont reliés par AV /NH ∼ 2×1021 H cm−2 mag−1 (voir entre autres les études de Güver and Özel [2009] et Predehl and Schmitt [1995]).

Attribution des bandes aromatiques infrarouges aux PAH

Les observations spectroscopiques des régions de formation d’étoiles montrent la présence caractéristique de bandes spectrales intenses, appelées “bandes aromatiques infrarouges” (AIB en anglais), centrées pour les principales à 3.3, 6.2, 7.7, 8.6 et 11.2 µm (figure 1.6). Ces bandes ont été interprétées par Leger and Puget [1984] et Allamandola et collab. [1985] comme la signature spectrale du refroidissement radiatif de molécules polycycliques aromatiques hydrogénées (PAH) suite à l’absorption d’un photon UV, ce qui correspond au chauffage impulsionnel décrit ci-dessus. Dans l’article de Leger and Puget [1984] l’hypothèse PAH repose sur un bon accord entre le spectre IR du coronène (C24H12) modélisé à 600 K et les AIB ainsi que sur la nature réfractaire de ces molécules, leur permettant de résister à ces hautes températures. Toujours selon ces auteurs, les PAH interstellaires seraient composés d’un mélange de PAH différents comportant environ 50 atomes de carbone. Allamandola et collab. [1985] arrivent à la même conclusion en utilisant l’exemple du chrysène (C18H12) et la comparaison entre un spectre Raman de suie et un spectre de la Barre d’Orion obtenu avec le satellite IRAS (figure 1 de leur article). Ils signalent aussi que les PAH peuvent se trouver dans l’état ionisé dans les environnements très irradiés. Dans ces deux articles, l’idée défendue est que les bandes observées sont dues aux vibrations des liaisons C-C et C-H des PAH. Le tableau 1.3 donne l’attribution des principales AIB aux modes de vibration des PAH. La figure 1.7 représente les géométries d’un certain nombre d’espèces de cette famille de molécules.

Structure associée à une région de formation stellaire

La structure d’une PDR de région de formation stellaire est présentée en Figure 1.8. Le rayon de Strömgren définit le front d’ionisation où il y a équilibre entre ionisation et recombinaison de H. Au delà de cette limite le gaz est essentiellement neutre et marque le début de la PDR. Les photons EUV étant tous absorbés dans la région H ii, il ne reste que les photons FUV (hν < 13.6 eV ). Ces photons peuvent ioniser les atomes ayant un IP inférieur à celui de l’hydrogène (par exemple le carbone), et dissocier des molécules comme H2 et CO. Cette définition correspond par ailleurs à l’intégralité des phases CNM et WNM ainsi qu’à la surface des nuages moléculaires (section 1.2.1).
La poussière en présence participe à atténuer le champ de rayonnement dans la PDR (voir section 1.3.3). La limite où le taux de dissociation de H2 est égal au taux de formation définit le front de dissociation. Plus profondément dans la PDR, le carbone et l’oxygène atomique peuvent se combiner pour former du CO. Les observations montrent en effet une structure stratifiée des PDR, voir figure 1.9 pour le cas de la Barre d’Orion, dans laquelle H2 et CO sont présents successivement par rapport à la surface atomique de la PDR, révélée par l’émission à 3.3 µm attribuée aux PAH. La PDR s’arrête là où le champ UV est assez atténué pour ne plus réguler la chimie du milieu. Dans leur schéma classique, Hollenbach and Tielens [1999] la placent vers AV =10, où la molécule de O2 n’est plus significativement dissocié.

Limitations dues à l’atmosphère terrestre et aux effets thermiques

La contrainte principale dans l’observation infrarouge est l’absorption du rayonne-ment par l’atmosphère terrestre, induite notamment par H2O, O3, CH4 et CO2. La figure 2.1 montre l’évolution de l’absorption atmosphérique dans l’infrarouge moyen au niveau de l’observatoire Gemini, au sommet du Mauna Kea 1 (Hawaï). Quelques bandes spectrales pour lesquelles l’atmosphère terrestre est transparente existent cependant, notamment à ∼3 et ∼10 µm (exploitées au sol par exemple par le Very Large Telescope de l’ESO, dans le désert de l’Atacama au Chili), mais il n’est pas possible de faire l’acquisition d’un spectre infrarouge d’un objet interstellaire sur un grand intervalle de longueurs d’onde sans être affecté par cette absorption atmosphérique. C’est pour cette raison que l’on cherche à installer les observatoires infrarouges à haute altitude. Cela inclut les sommets de montagnes en zone aride mais aussi dans les airs via l’aviation (cas de SOFIA) ou des missions en ballons stratosphériques (PILOT par exemple). Un observatoire stratosphérique tel que SOFIA (à ∼ 11 − 13 km d’altitude) aura déjà une majeure partie de l’atmosphère hors de la ligne de visée, cependant les observations seront toujours affectées par le reste de l’atmosphère terrestre. Le cas idéal est la mise en place d’observatoires spatiaux, dont ceux décrits en section 2.1.4, impliquant par ailleurs une limite de taille et masse des télescopes imposée par les capacités des lan-ceurs utilisés.
Les longueurs d’onde du domaine infrarouge correspondent au rayonnement ther-mique de corps à une température de l’ordre de 50 à 1000 K. L’observatoire spatial peut atteindre ces températures et émettre lui même un rayonnement thermique parasite provenant à la fois du télescope et des instruments. Cette émission est généralement plus importante que le rayonnement observé des objets astrophysiques. Il est donc né-cessaire d’une part de se protéger directement du rayonnement solaire via des boucliers et d’autre part, de refroidir activement les instruments via un système cryogénique. Ceci se fait généralement à l’hélium, permettant d’atteindre de très basses températures (quelques Kelvin). Cependant, la perte progressive d’hélium restreint la durée de vie de l’observatoire à quelques années contre près de 30 ans pour le télescope spatial Hubble. Il est aussi nécessaire d’éviter le rayonnement de la Lune et la Terre, ce qui contraint les zones d’observations et les orbites du satellite. Enfin, les poussières présentes dans le plan de l’écliptique diffusent le rayonnement solaire et émettent leur propre rayonne-ment infrarouge (lumière zodiacale). Elles ajoutent une contrainte supplémentaire en perturbant les observations pour des objets proches du plan de l’écliptique (i.e. proches des constellations du zodiaque).

Résolutions spatiale et spectrale

La précision spatiale d’une observation est limitée par la diffraction de la lumière passant par la pupille du système optique. Elle est décrite par le critère de Rayleigh défini par : θ = 1.22 λ , (2.1) où θ est l’angle de séparation minimal entre deux objets pour les distinguer (en radians), D est le diamètre de l’instrument (en mètres) et λ la longueur d’onde d’ob-servation (en mètres). Cette grandeur définit la largeur de la fonction d’étalement du point de l’instrument. Une observation à λ = 0.5 µm (domaine visible) réalisée avec un télescope de 1 m de diamètre permet d’atteindre des échelles spatiales 10 fois plus faibles qu’une observation à λ = 5 µm sur la même scène avec le même télescope. Pour obtenir un même niveau de résolution spatiale que le domaine visible, les infrastruc-tures infrarouges doivent être considérablement plus importantes. Optimiser la taille d’un télescope spatial infrarouge en considérant les limites imposées par les lanceurs est donc primordial pour obtenir le maximum d’informations spatiales possible.
Lorsque l’observation consiste en l’acquisition d’un spectre, i.e. la dispersion en longueurs d’onde du rayonnement provenant d’un élément de résolution (voir sec-tion 2.1.3), c’est la résolution spectrale qui intervient. Un spectre présentera d’autant plus de détails spectraux que la résolvance, notée R de l’instrument est élevée. Cette dernière est définie comme : R = λ , (2.2) où λ est la longueur d’onde et Δλ est l’intervalle de longueur d’onde minimal per-mettant de séparer deux raies. Cette dernière est définie par le système dispersif utilisé. Un spectrographe au pouvoir de résolution de R ∼10-100 est dit “basse” résolution, résolution “moyenne” pour R ∼500-5000, et haute résolution pour R > 104. Certains instruments peuvent aller jusqu’à R ∼105−6 et 107 pour les observations radios hétéro-dynes.

Les observatoires infrarouges

Infrared Space Observatory – ISO:
Le satellite ISO est le premier observatoire spatial de l’infrarouge moyen pour lequel la communauté astrophysique mondiale pouvait proposer des observations spécifiques. Mis en service fin 1995, il succède à IRAS (1983-1984) qui a essentiellement effectué un relevé complet du ciel dans quatre bandes spectrales. Jusqu’en 1998, ISO effectue plus de 30 000 observations grâce à son télescope de 60 cm de diamètre et ses quatre instruments refroidis à ∼2 K :
— Short Wavelength Spectrometer (SWS) [de Graauw et collab., 1996] : spectro-mètre sur la bande 2.4-45 µm de résolution spectrale moyenne R ∼260-2000. Il était possible d’effectuer des observations selon plusieurs modes, rendant pos-sible l’obtention de spectres à différentes résolutions et sur différentes bandes spectrales. Le mode SWS01 rassemble 1248 spectres sur tout le domaine acces-sible [Sloan et collab., 2003]. Cependant les scans pouvaient se faire à des vitesses différentes (notées de 1 à 4) ce qui impactait la résolution spectrale, d’où l’écart de résolution cité précédemment. De plus, le spectromètre est composé de 12 segments différents sur toute la région spectrale ayant des résolvances différentes. SWS ne permettait pas d’obtenir d’informations spatiales sur les objets obser-vés, il présentait un champ (beam) d’une taille entre 14″×20″ à 20″×33″ selon les bandes spectrales et la vitesse de scan. Tout ceci est détaillé dans le manuel de l’instrument [Leech et collab., 2003].
L’observatoire ISO comprenait aussi les instruments (i) ISOCAM [Cesarsky et col-lab., 1996], (ii) Long Wavelength Spectrometer (LWS,Clegg et collab. [1996]) et (iii) ISOPHOT [Lemke et collab., 1996]. (i) ISOCAM est caméra qui permettait d’obtenir des cubes hyperspectraux de 2.5 à 17 µm à basse résolution spectrale (R ∼40) et à une résolution spatiale de 1.5 à 12″ par pixel. (ii) LWS est l’instrument complémentaire de SWS à plus grandes longueurs d’onde (43 à 196 µm) avec une résolution spectrale de R ∼200 et spatiale de 1.65’. (iii) ISOPHOT permettait de réaliser des relevés photopo-larimétriques (photométrie et mesure de la polarisation du rayonnement) dans plusieurs filtres entre 2.5 et 240 µm.
Spitzer Space Telescope
Le télescope spatial Spitzer [Werner et collab., 2004], de 85 cm de diamètre, a été lancé en 2003 pour une période au départ de deux ans et demi étendue de 3 ans en phase “froide” (refroidie à l’hélium) jusqu’en 2009 puis a entamé sa phase “chaude” jusqu’au début 2020. Il avait à son bord trois instruments dont :
— l’InfraRed Spectrometer (IRS, Houck et collab. [2004]) : celui-ci pouvait produire des cubes hyperspectraux échantillonnés avec une fente (méthode IFU). Il était composé de deux fois deux modules. Short-Low et Long-Low (SL et LL) respec-tivement de 5.2 à 14.5 µm et 14 à 38 µm avec une basse résolution spectrale (dite Low) de R = 60 − 120 et une résolution spatiale de respectivement ∼3.6″ et ∼10.5″. Les spectres de chaque module comportaient comme ISO-SWS plusieurs segments mesurant des portions réduites des spectres qu’il fallait combiner. SL et Observatory ; b : Spitzer ; c : Herschel ; d : le James Webb Space Telescope en phase de test de déploiement des boucliers solaires en octobre 2019. Crédits : NASA/ESA/JPL-Caltech.
LL ont un intervalle de longueurs d’onde en commun de sorte à obtenir un spectre complet de 5.2 à 38 µm Les deux autres modules, Short-High (SH) et Long-High (LH) permettaient d’obtenir des cubes à plus grande résolution spectrale R ∼600 de 9.9 à 19.6 µm et 18.7 à 37.2 µm respectivement pour SH et LH.
Les deux autres instruments de Spitzer, IRAC [Fazio et collab., 2004] et MIPS [Rieke et collab., 2004] permettaient de réaliser des relevés photométriques dont les filtres étaient centrés à 3.6, 4.5, 6 et 8 µm pour IRAC et 24, 70 et 160 µm pour MIPS. L’utilisation de ces filtres permettait d’obtenir des SED dans la partie « basses » lon-gueurs d’onde, sondant l’émission des plus petits grains de poussière. La phase froide permettait à ses instruments d’avoir une température plus basse que les objets qu’il observait et de ne pas perturber ses propres observations. Pour cela, ils devaient être refroidis à moins de 5 K. Au bout de 5 ans, l’hélium liquide servant à refroidir les ins-truments est arrivé à épuisement ce qui a fortement limité les observations sauf pour les bandes à 3.6 et 4.5 µm de l’instrument IRAC qui restaient utilisables.
Herschel Space Observatory:
Herschel [Pilbratt et collab., 2010] est un observatoire spatial optimisé pour l’obser-vation de l’infrarouge lointain et du sub-millimétrique. Avec son miroir de 3.5 mètres de diamètre, il est jusqu’à présent le télescope spatial le plus gros. Il emportait trois instruments dont :
— PACS [Poglitsch et collab., 2010] qui permettait d’effectuer à la fois des relevés photométriques et spectrométriques. La partie photométrie se composait de trois filtres centrés à 70, 100 et 160 µm sur des champ de vues de 3.5’×1.75’ avec des pixels d’une taille de 3.2″×3.2″ pour les deux premiers filtres et 6.4″×6.4″ pour le troisième.
La partie spectrométrie permettait l’obtention de données hyperspectrales dont chaque champ de vue de 47″×47″ était échantillonné par 5×5 pixels spatiaux. Les modes d’observations de cet instrument permettaient de retirer l’émission d’arrière plan des observations si l’objet d’étude n’était pas trop étendu (en des-sous de 6’). Il pouvait acquérir un spectre sur toute la région de 55 à 210 µm à moyenne résolution R = 1 − 4 × 103 ou en se focalisant sur certaines transitions précises comme celles de l’oxygène neutre à 63 et 145 µm ou du carbone ionisé à 158 µm. Les résolutions spatiales à ses longueurs d’onde étaient respectivement de 4.5″, 8.8″ et 11″ [Bernard-Salas et collab., 2015].
Herschel comportait deux autres instruments (i) HIFI [de Graauw et collab., 2010] et (ii) SPIRE [Griffin et collab., 2010]. (i) HIFI était un spectromètre hétérodyne permettant d’obtenir des résolutions spectrales très hautes R ∼106 et résoudre le profil des raies permettant d’étudier la dynamique du gaz. Il opérait entre 156 et 210 µm et 240 et 624 µm. (ii) SPIRE permettait de compléter la photométrie de PACS à plus grandes longueurs d’onde, i.e. 250, 350 et 500 µm.
Le futur (proche) : James Webb Space Telescope:
Le James Webb Space Telescope [Gardner et collab., 2006] est le prochain observa-toire dans l’infrarouge moyen pour lequel la communauté astronomique pourra proposer des observations. Il embarquera quatre instruments qui permettront d’effectuer des ob-servations très variées entre 0.6 et 28 µm. Son miroir de 6.5 m permettra d’obtenir une résolution spatiale de 0.125″ à 3.3 µm et 0.29″ à 7.7 µm, jamais atteinte pour un ob-servatoire spatial infrarouge sur le même intervalle spectral. Deux instruments seront particulièrement intéressants pour le type d’étude présentée dans le chapitre 3 de ce manuscrit :
— Mid-InfraRed Instrument (MIRI) [Rieke et collab., 2015] : il permettra d’effec-tuer des mesures en coronographie, des relevés photométriques ainsi que de la spectroscopie avec ou sans fente à basse résolution et de la spectro-imagerie à moyenne résolution. C’est ce dernier mode qui nous intéresse, le mode MRS. Il permet d’obtenir des cubes de données de 4.9 à 28.8 µm à moyenne résolution spectrale de R = 1550 − 3250 et avec une résolution spatiale entre 0.17 et 1.2″. Un spectre complet est segmenté en plusieurs morceaux. MIRI-MRS dispose de 4 chaînes, elles mêmes composées de 3 segments (courtes, moyennes et grandes longueurs d’onde). Chaque chaîne a un champ de vue légèrement différent, la première étant la plus petite de 3.2″×3.7″, la dernière étant la plus grande de 6.9″×7.9″. Chaque image spectrale est échantillonnée par des pixels de 0.196 à 0.273″.
— NearInfraRed Spectrograph (NIRSpec) [Dorner, B. et collab., 2016] : cet instru-ment présente plusieurs modes d’observations comme de la spectroscopie multi-objets, spectroscopie à haut contraste à fente fixe, spectroscopie d’objets lumi-neux en série temporelle et de la spectro-imagerie (mode IFU). Ce dernier mode permet d’obtenir des cubes hyperspectraux sur le domaine 0.6 à 5.3 µm. Chaque champ de vue de 3″×3″ est échantillonné par des pixels de 0.1″ avec une résolution spectrale moyenne de R = 1000 à 2700 avec un mode basse résolution à R = 100.
La mise en commun des données NIRSpec et MIRI produira des cubes de données à haute résolution spatiale sur tout le domaine spectral accessible avec JWST. Les deux autres instruments sont (i) NIRCAM et (ii) NIRISS, observant tous les deux de 0.6 à 5 µm. (i) NIRCAM permettra d’effectuer de la photométrie dans 29 filtres de fonction de transmission plus ou moins étendue de R ∼ 1 à R ∼ 100, ainsi que de la coro-nographie, de la spectroscopie grand champ sans fente ainsi que des mesures en série temporelle (imagerie et spectroscopie). (ii) NIRISS permettra d’effectuer de la spectro-scopie sans fente aussi bien sur un seul objet que sur un même champ de vue de 133″ de cotés. Il présente un mode de masque interférométrique permettant une meilleure séparation de deux sources très proches l’une de l’autre et ayant un fort contraste en luminosité. Le site internet https://jwst-docs.stsci.edu/ regroupe toutes les infor-mations techniques concernant les instruments. La mise en service de cet observatoire spatial suscite beaucoup d’attente dans toute la communauté astronomique depuis des années. En particulier, son pointage vers des PDR permettra d’observer l’évolution de la matière carbonée irradiée en fonction de l’intensité du champ de rayonnement UV avec une finesse inégalée. En particulier, la haute résolution spatiale permettra d’at-teindre des échelles très fines et d’étudier les transitions autour des fronts d’ionisation et de dissociation, limitées autrefois à des échelles de plusieurs secondes d’arc (comme avec Spitzer).

La séparation aveugle de sources en astrophy-sique

Généralités

L’approche de séparation aveugle de sources (SAS) part de l’hypothèse qu’un signal, ici un spectre infrarouge, est le mélange de plusieurs signaux sources. L’hypothèse supplémentaire généralement faite est que ce mélange est linéaire et instantané. Un mélange est dit instantané quand chaque élément d’indice i des spectres observés ne dépend que des valeurs au même indice des spectres sources. Il est linéaire lorsque chaque spectre observé peut être modélisé par la combinaison linéaire d’un nombre r de spectres sources, tels que : X =A×S, (2.3) avec X la matrice de données de dimensions n × m (n spectres de m points spec-traux), A la matrice n × r des poids, S la matrice source de dimensions r × m.
Le but des méthodes de SAS est d’obtenir une estimation des matrices A et S, notées Aˆ et Sˆ et de même dimensions que A et S. Il existe cinq approches principales pour calculer ˆ et ˆ. Une courte revue de ces dernières est présentée ci-dessous.
-(i)- L’analyse en composantes indépendantes (ICA) se base sur l’indépendance statistique des sources, en utilisant par exemple la non-gaussianité des sources (voir le cas de la méthode FastICA [Hyvarinen, 1999]). Ce type de méthode a été utilisé pour des données hyperspectrales en astronomie IR, par Berné et collab. [2007].
-(ii)- L’analyse en composantes parcimonieuses (voir la revue par Jolliffe and Ca-dima [2016]) s’applique sur des problèmes pour lesquels les matrices A ou S sont parcimonieuses. Une matrice est parcimonieuse quand elle contient un grand nombre de valeurs nulles ou proches de zéro. Par exemple, la méthode SpaceCORR développée par Meganem et collab. [2010] se base sur la parcimonie spatiale des cubes hyperspec-traux et peut être appliqué à des cas de données infrarouges en astronomie (voir section 3.2 du manuscrit de thèse de Boulais [2017]).
-(iii)- Les approches bayésiennes en SAS ajoutent des a priori sur les sources, coeffi-cients de mélange ou le bruit des données, permettant de contraindre le modèle linéaire et de réduire le nombre de solutions possibles.
-(iv)- Les approches dites géométriques, se basent sur l’exploitation de la représenta-tion géométrique des données. Elle sont particulièrement utilisées dans la communauté de l’observation de la Terre. Une méthode de SAS géométrique nommée MASS, a cependant été développée par A. Boulais, durant sa thèse à l’IRAP, et concerne spéci-fiquement une application aux données de spectroscopie infrarouge en astrophysique. Cette méthode sera illustrée en détails en section 2.2.6.
-(v)- La factorisation par matrices non-négatives (NMF en anglais) utilise la non-négativité des sources et des coefficients de mélanges. Pour que cette méthode soit applicable, il faut que la matrice de données contienne uniquement des éléments non-négatifs. Les observations (des spectres dans notre cas), sont, en résumé, un nombre de photons en fonction de la longueur d’onde. Chaque élément d’un spectre est supérieur ou égal à zéro 2, la matrice de données peut donc être modélisée par un produit de matrices non-négatives. La première résolution du problème de la NMF a été propo-sée par Paatero and Tapper [1994] et Paatero [1997] et se nommait Positive matrix factorisation (PMF). Ce sont Lee and Seung [1999] et Lee and Seung [2001] qui ont permis son essor avec un algorithme très simple à implémenter. Berné et collab. [2007] et Rosenberg et collab. [2011] ont utilisé ce type de méthode pour l’analyse de données hyperspectrales IR. La suite de cette section décrit en détails la méthode NMF.

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Table des matières

1 Contexte astrophysique 
1.1 Introduction générale
1.2 Le milieu interstellaire
1.2.1 Les phases du milieu interstellaire
1.2.2 Le cycle de la matière
1.3 Composition du milieu interstellaire
1.3.1 Les éléments chimiques
1.3.2 Molécules interstellaires et circumstellaires
1.3.3 La poussière interstellaire
1.4 Attribution des bandes aromatiques infrarouges aux PAH
1.5 Les régions de photodissociation
1.5.1 Champ de rayonnement UV
1.5.2 Structure associée à une région de formation stellaire
1.5.3 Bilan thermique du gaz dans une PDR
1.6 Objectifs de cette thèse
2 Méthodes et outils 
2.1 L’astronomie infrarouge
2.1.1 Limitations dues à l’atmosphère terrestre et aux effets thermiques
2.1.2 Résolutions spatiale et spectrale
2.1.3 Les types d’observations
2.1.4 Les observatoires infrarouges
2.2 La séparation aveugle de sources en astrophysique
2.2.1 Généralités
2.2.2 La méthode NMF
2.2.3 Identification du nombre de composantes
2.2.4 Unicité et variabilité des solutions de la NMF
2.2.5 NMF couplée à une approche Monte-Carlo
2.2.6 Initialisation de la NMF par MASS : méthode MASS-NMF
2.3 Photophysique générale des PAH
2.3.1 Relaxation de l’énergie interne
2.3.2 Ionisation
2.3.3 Photodissociation
3 Analyse des bandes aromatiques infrarouges par séparation aveugle de sources dans le contexte de la mission JWST 
3.1 Observations et interprétations des bandes aromatiques infrarouges
3.1.1 Observations des bandes aromatiques infrarouges
3.1.2 Approches d’analyse des AIB
3.1.3 Étude des spectres de populations physico-chimiques de PAH par SAS
3.2 Adaptation de MASS-NMF à des observations de grande dimension dans le contexte du JWST
3.2.1 Challenges de l’application de la SAS sur des données JWST
3.2.2 Étape de pré-traitement
3.2.3 Étape MASS-NMF
3.3 Application sur données réelles
3.3.1 Données ISO-SWS
3.3.2 Pré-traitement des données ISO-SWS
3.3.3 Application de MASS-NMF à XAIB construit avec les données ISO-SWS
3.4 Performances de l’application de MASS-NMF sur l’échantillon ISO-SWS
3.4.1 Reconstruction des données
3.4.2 Rôle du spectre du Rectangle Rouge dans le calcul des spectres élémentaires
3.4.3 Temps de calcul dans le contexte des données JWST
3.5 Interprétation physique et chimique des résultats
3.5.1 Identification des spectres représentatifs
3.5.2 Diversité chimique / comparaison inter-spectres
4 Impact des PAH sur le chauffage du gaz dans les régions de photodissociation
4.1 État des connaissances du lien entre évolution des PAH et chauffage du gaz
4.1.1 Études observationnelles antérieures
4.1.2 Quantification de la contribution des PAH au chauffage du gaz
4.1.3 La région de photodissociation NGC 7023 NW
4.2 Mesure observationnelle de r dans NGC 7023
4.2.1 Données infrarouges
4.2.2 Extraction des cartes
4.3 Chauffage du gaz par effet photoélectrique sur les PAH : approche moléculaire
4.3.1 Absorption d’un photon UV : propriétés moléculaires
4.3.2 Calcul de l’efficacité du chauffage par les PAH
4.4 Application du modèle et comparaison avec les observations
4.4.1 Conditions physiques de NGC 7023
4.4.2 Comparaison observations – modèle
Conclusion et perspectives 
Bibliographie

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